Monsieur le président, madame la garde des sceaux, monsieur le rapporteur de la commission des lois, que je veux de nouveau remercier et féliciter pour la qualité de son travail, mes chers collègues, notre groupe soutient pleinement les objectifs de cette réforme pénale, qui vise à repenser le droit de la peine et de son exécution autour de la question centrale de la prévention de la récidive.
La définition du sens de la peine, qui constitue désormais le préambule des dispositions relatives aux peines, consacre la nécessité de protéger la société, de prévenir la récidive, mais aussi d’assurer la réinsertion et l’équilibre social, dans le respect des droits reconnus à la victime.
Au-delà du rappel de ces fondamentaux, plusieurs avancées méritent d’être soulignées. D’abord, l’abrogation pure et simple des dispositions relatives aux peines plancher, qui limitent le pouvoir d’appréciation des juges sans avoir d’impact sur la prévention de la récidive. Ensuite, la suppression des révocations automatiques des sursis et la césure du procès pénal, qui permettent de renforcer la personnalisation de la peine.
Nous approuvons également la création d’une nouvelle peine de milieu ouvert, la contrainte pénale, qui se caractérise par un suivi renforcé et régulier du condamné et par l’absence de lien direct avec l’emprisonnement.
C’est une réelle avancée, même si le recours à une phase transitoire au cours de laquelle le champ d’application sera réduit ne nous semble pas convaincant.
Pour des raisons tenant à la cohérence de l’échelle des peines et à l’efficacité de la réponse pénale, nous restons favorables à l’extension sans attendre de la contrainte pénale à tous les délits, comme l’avait judicieusement proposé la commission des lois.
Le dispositif pour lutter contre les sorties sèches constitue aussi un progrès significatif. La libération sous contrainte garantira effectivement un retour progressif à la liberté et offrira, à cette fin, un suivi renforcé à l’issue de la détention, même si cela suppose bien sûr que les services d’insertion et de probation disposent de moyens suffisants.
L’efficacité concrète de toutes ces avancées pose à l’évidence la question cruciale des moyens, sur laquelle tous les professionnels de la justice ne cessent d’alerter. Services et juridictions sont surchargés. Chacun en conviendra, la lutte contre la récidive ne sera véritablement efficace que si les moyens nécessaires sont enfin engagés.
Par ailleurs, le projet de loi reste silencieux – et nous le regrettons – sur des points importants. Il ne prévoit aucune disposition visant à réformer le système pénitentiaire, alors que le jury de la conférence de consensus avait fait de la réforme des conditions d’exécution de la peine privative de liberté une « condition sine qua non de la prévention de la récidive ».
Le texte ne dit rien non plus sur la révision des incriminations ou la justice des mineurs. Sur ce dernier point, nos débats ont cependant montré qu’il existait une large majorité rassemblant toute la gauche pour supprimer dès maintenant ces juridictions d’exception que constituent les tribunaux correctionnels pour mineurs.
Nos débats ont également montré que la même majorité existait aussi pour abroger la rétention et la surveillance de sûreté. Si le Gouvernement a confirmé son accord, sur le fond, avec ces deux engagements du Président de la République, il nous a malgré tout opposé que le projet de loi, compte tenu de son périmètre, ne constituait pas le bon véhicule. Dont acte. Nous attendons maintenant du Gouvernement qu’il prenne les dispositions nécessaires pour inscrire le plus rapidement possible ces deux questions à l’ordre du jour de notre assemblée. Je pense en particulier à la proposition de loi tendant à supprimer le tribunal correctionnel pour mineurs, que notre groupe a déposée dès le début de la législature.
Pour conclure, malgré les insuffisances qui ont été soulignées, les députés du Front de gauche voteront avec conviction une réforme dont ils partagent la philosophie et qui constitue un progrès incontestable.