Intervention de Sylvain Berrios

Séance en hémicycle du 17 juin 2014 à 21h30
Réforme ferroviaire - nomination des dirigeants de la sncf — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSylvain Berrios :

D’abord, je vous prie d’excuser Yves Albarello, député de Seine-et-Marne, qui souhaitait prendre la parole ce soir, mais qui a été rappelé en circonscription.

L’examen du présent projet de loi est un rendez-vous important pour l’avenir du rail en France, mais également en Europe. Les précédentes allocutions ont bien montré que ce sont les enjeux européens qui, en définitive, sont au coeur du texte.

Le système ferroviaire français actuel accumule les dettes financières et perd des clients au profit de la route.

La réforme devrait avoir deux objectifs : premièrement, la performance opérationnelle au service de l’intérêt général, avec la maîtrise des coûts et la sécurité des réseaux ; deuxièmement, la qualité et la diversité des services ferroviaires qui sont proposés aux voyageurs ; troisièmement, l’adaptation aux futurs défis du rail français – l’Europe et la mise en concurrence.

C’est à ces trois conditions que notre système ferroviaire redeviendrait attractif et participerait activement au report modal. Malheureusement, ce n’est pas avec le projet de loi que nous propose le Gouvernement que nous atteindrons ces objectifs.

Bien sûr, ce projet de loi comporte bien quelques points forts : l’engagement de l’État dans la gouvernance du système ferroviaire ; la création du gestionnaire d’infrastructure unifié qui regroupera RFF, SNCF Infra et la direction des circulations ferroviaires pour devenir SNCF Réseau ; les économies et l’effet d’entraînement pour moderniser un système en crise financière.

Rappelons qu’avec la dette de RFF et celle de la SNCF, nous atteignons la somme colossale de 41 milliards d’euros fin 2013. Et, si rien n’est fait, elle s’élèvera à 80 milliards d’euros en 2025.

Le groupe UMP a d’ailleurs déposé un amendement pour que le Gouvernement remette un rapport au Parlement afin de l’informer des économies réalisées grâce à cette réforme. Votre projet de loi comporte aussi quelques faiblesses. Je citerai, notamment, la création de ce fameux EPIC de tête susceptible de rassembler les trois autres EPIC.

On peut se demander, et d’autres l’ont fait à cette tribune, ce qu’il restera du rôle de stratège de l’État, quelle forme prendra cette organisation et surtout comment ces multiples EPIC au sein de l’EPIC de tête pourront être compétitifs face aux concurrents européens alors que l’Europe met fin à ce genre d’EPIC et s’oriente vers des sociétés anonymes au sein desquelles l’État pourrait d’ailleurs jouer un rôle déterminant comme c’est le cas dans d’autres structures.

L’Autorité de régulation des activités ferroviaires doit être renforcée. La gestion des gares de voyageurs doit être indépendante de SNCF Mobilités et transférée au gestionnaire d’infrastructure unifié pour garantir un accès non discriminatoire aux autres opérateurs. C’est également un élément très important d’ouverture à la concurrence et de préparation de l’avenir. Il y a aussi de grandes absences. En effet, il n’est pas prévu de renforcer le rôle des régions en tant qu’autorités organisatrices de transport s’agissant des réseaux express régionaux.

La loi devrait leur conférer tous les pouvoirs d’une autorité organisatrice de transport : propriété du matériel et des centres de maintenance, liberté tarifaire et libre choix de l’opérateur. La mise en conformité de la loi d’orientation sur les transports intérieurs de décembre 1982 avec le règlement européen relatif aux services publics est également un manque criant. Ce règlement aurait dû encadrer l’ouverture progressive à la concurrence d’ici à 2020 et donner aux autorités organisatrices de transport la liberté de choisir entre attribution directe à un opérateur interne ou attribution compétitive à un opérateur externe.

Une réforme bien menée aurait pu avoir des conséquences positives. Regardons ce qui s’est passé en Allemagne qui s’est engagée dès 1994 dans une réforme ferroviaire. Nous ne sommes pas dans ce cas. C’est ce qui est le plus frappant dans votre projet de loi. Les propos de l’orateur précédent m’ont beaucoup étonné. En effet, ce texte ne garantit pas l’avenir, car il vise à reconduire l’existant en essayant de verrouiller un système français dont on constate les limites au quotidien.

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