J’avais dit que je ne le citerai pas !
…il a le mérite de ne pas reculer et de ne pas refuser une réalité qui s’impose.
Pour autant, la démarche du Gouvernement n’est pas celle que suggérait ce rapport du Conseil économique et social, parce que nous avons eu le précédent de l’ouverture à la concurrence du fret. Dès que j’ai pris mes fonctions, je me suis refusé à suivre ces recommandations d’une ouverture même anticipée, même expérimentale à la concurrence, considérant que le secteur public n’y était pas préparé.
Le Gouvernement a tenu le même discours durant ces dix-huit mois de travaux préparatoires, le même devant la Commission européenne, considérant que le maintien du service public était un préalable et que, derrière cette notion de service public, il y avait nécessairement des obligations. Je l’ai indiqué à mon homologue italien, M. Lupi, qui présidera le Conseil des ministres européens et qui s’engageait à procéder à l’ouverture à la concurrence du système ferroviaire.
La France est forte de son secteur public, de son service public qui font partie de notre patrimoine national. Il faut leur donner force et robustesse pour qu’ils puissent ensuite se trouver à armes égales avec d’éventuels autres opérateurs.
C’est pour nous un préalable indispensable alors que d’autres, en d’autres temps, ont préféré ouvrir prématurément, expérimenter, anticiper. Je me souviens de certains propos qui m’étaient tenus lorsque nous parlions des prémices de cette réforme ferroviaire, de propos qui sont encore tenus et dont je vais démontrer le manque de pertinence. Cette réforme ne serait pas eurocompatible, faute de se plier au dogme du libéralisme et d’une ouverture à tous crins à une concurrence qui n’aurait pas comme rempart la réalité du service public.
Je l’ai indiqué au commissaire Siim Kallas et à mes homologues européens, l’organisation même du secteur ferroviaire ne doit pas se fonder sur un modèle unique, une organisation éclatée, séparatiste comme dogme absolu, une vision unique au niveau européen d’un mode d’organisation.
Notre secteur ferroviaire a son histoire, ses racines comme bon nombre d’entre vous l’avez rappelé. Il nous faut lui apporter les garanties nécessaires sur le fait que le périmètre même, l’organisation et les obligations de service public n’entraînent pas une privatisation des bénéfices et une nationalisation des déficits.
Il faut, au-delà, construire un cadre social commun et, en maintenant le statut des cheminots, unifier la famille cheminote. L’opérateur public historique ne doit pas avoir affaire à d’autres qui ne seraient pas soumis aux mêmes règles ni aux mêmes obligations que lui. Des règles disparates seraient en effet synonyme de concurrence déloyale.
Je remercie encore l’ensemble des orateurs pour la qualité de leurs interventions. Tous ont exprimé la responsabilité, à laquelle nous appelons tous. Il s’agit de porter un message d’avenir et, au terme de ce débat parlementaire, d’avoir construit un secteur ferroviaire public solide. Nous allons avec fierté ouvrir un débat riche et passionnant, qui se doit aussi d’être un message de confiance adressé aux Français et aux usagers. Ils en ont besoin. Comment aujourd’hui ne pas écouter les préoccupations des quatre millions de voyageurs, qu’évoquait Rémi Pauvros ? Et celles des deux cent mille cheminots, aujourd’hui soucieux, mais fiers aussi, André Chassaigne l’a dit, de cette tradition cheminote, de ces métiers qui ont tant apporté à la France, il nous faut également y répondre avec clarté.
Permettez-moi tout d’abord de revenir sur l’eurocompatibilité de la réforme, de façon que cette ombre, régulièrement agitée autour de ce texte, ne vienne pas polluer les débats des prochains jours. Bertrand Pancher et Dominique Bussereau, et d’autres encore, ont fait part de leur crainte sincère que la réforme que nous souhaitons ne soit de ce fait remise en cause demain. Cette sincérité nous engage, et je les en remercie, car cela guidera certainement les travaux du Parlement. Cette réforme en effet ne doit pas pouvoir être, au gré des alternances, remise en cause.