Intervention de Jean Pisani-Ferry

Réunion du 12 juin 2014 à 11h00
Mission d'information sur le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi

Jean Pisani-Ferry, commissaire général à la stratégie et à la prospective, CGSP :

Il n'est jamais facile, d'isoler les effets d'une mesure dans le comportement des entreprises ; c'est néanmoins ce à quoi nous nous appliquons. La difficulté est accrue par l'universalité de la mesure, qui interdit le ciblage d'une population d'entreprises. L'effet de seuil que représente la limite de 2,5 SMIC peut toutefois constituer un critère ; aussi les chercheurs s'efforceront-ils de distinguer, sur son fondement, des entreprises qui, par ailleurs, présentent des caractéristiques similaires.

Aux questions soulevées par ses membres, notamment les partenaires sociaux, le comité de suivi s'efforce d'apporter les réponses les plus objectives ; chacun accepte cette règle du jeu, même si la tentation est grande, parfois, d'aller plus vite vers la conclusion, car le dispositif mobilise d'importantes ressources publiques, dans le contexte que vous avez rappelé ; c'est la raison pour laquelle, d'ailleurs, le législateur a eu soin d'inscrire l'évaluation dans la loi ; et si nous nous astreignons à la plus grande rigueur pour la mener à bien, c'est précisément pour apporter notre contribution au bon emploi des fonds publics.

Je partage votre perplexité, monsieur Giraud, sur les comités de suivi régionaux, que nous n'avons cependant aucune capacité à mobiliser. Nous sommes tout à fait disposés, néanmoins, à travailler en coordination avec eux ; cela serait effectivement très utile pour apprécier les déclinaisons territoriales de la mesure.

En 2013, la BPI s'est engagée à hauteur de 1,5 milliard d'euros dans le préfinancement, le coût total du CICE s'établissant à 13 milliards. Le préfinancement a très majoritairement concerné les petites entreprises, mais il ne faut pas forcément y voir l'indice d'un dysfonctionnement. Il a fallu un certain temps avant que les entreprises prennent connaissance du système de prêt de la BPI, auquel elles sont de plus en plus nombreuses à recourir. Reste que certaines entreprises préféreront toujours obtenir ces financements auprès de leur banque, si elles bénéficient de conditions favorables pour le faire. L'entreprise peut aussi considérer que le fait de solliciter un préfinancement auprès d'une banque, qui plus est pour un montant très faible, est un signal négatif qu'elle lui envoie quant à sa trésorerie disponible.

Je ne sais si le CICE a permis d'attirer des investisseurs étrangers. La question posée est aussi celle de la prise en compte du CICE dans une firme multinationale et, plus généralement, dans une entreprise qui, fiscalement intégrée, possède des unités distinctes. Un allégement de cotisations sociales est directement intégré dans l'évaluation d'un projet d'investissement, contrairement au CICE, dont le bénéfice n'apparaît qu'au terme d'un calcul global, si bien que les entreprises ne le regardent comme un paramètre supplémentaire qu'au moment de prendre la décision. Un dispositif pérenne, observe-t-on, finit toujours par être intégré dans les calculs comptables ; c'est vrai, mais seulement au bout d'un certain temps.

Sur le plan macroéconomique, cependant, l'INSEE a intégré l'effet du CICE dans l'indice du coût du travail au 1er janvier 2013 ; de sorte qu'il a un impact sur les comparaisons internationales.

Sur la superposition des dispositifs, le bon sens vous donne raison : la complexité est toujours fâcheuse. On peut bien entendu s'interroger – même si, en le faisant, je serais à la limite de mon rôle, sur les bénéfices d'une simplification. Quoi qu'il en soit, nous ne disposons pas d'éléments directs sur les effets de cette complexité, non plus, d'ailleurs, que sur le rôle des chambres de commerce et d'industrie.

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