Intervention de Marisol Touraine

Réunion du 18 juin 2014 à 16h00
Commission des affaires sociales

Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé :

L'exercice qui nous réunit aujourd'hui est exceptionnel. Depuis que les projets de loi de financement de la sécurité sociale existent, c'est la deuxième fois qu'un PLFRSS vous est proposé. De plus, le texte constitue une des premières mises en oeuvre du pacte de responsabilité et de solidarité, effort d'économies sans précédent en faveur de l'emploi. Il doit être analysé à la lumière du projet de loi de finances rectificative (PLFR) qui vous a été présenté la semaine dernière par M. Sapin et M. Eckert. Pour des raisons juridiques, nous avons décliné dans deux textes une politique qui constitue un tout.

Le PLFRSS est relativement court. Seize articles déclinent les engagements pris par le Gouvernement dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité. Le 14 janvier, le Président de la République a fixé un cap très clair : donner la priorité à l'emploi, afin de relancer la croissance. C'est ce à quoi tendent les allégements de cotisations sociales pour les employeurs, les salariés et les travailleurs indépendants, et de contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S).

Ne sont présentés dans le texte que les allégements en faveur des entreprises prévus pour 2015. Le Gouvernement, qui a adopté un dispositif visible par tous les acteurs sociaux pendant les trois prochaines années, procédera par paliers. Nous ferons le point l'an prochain sur les premiers résultats, avant de franchir une nouvelle étape visant à renforcer la compétitivité des entreprises.

Les pertes de recettes pour la sécurité sociale qui découlent de ces mesures seront intégralement compensées. Les lois de finances pour 2015 définiront les vecteurs qui garantiront cet équilibre, ce qui n'a pu être fait dans le cadre des lois rectificatives, la loi organique relative aux lois de finances ne permettant pas d'y inscrire des dispositions qui n'auront d'effet qu'en 2015.

Dès janvier 2015, les employeurs n'auront plus à acquitter de charges de sécurité sociale pour les salariés qui perçoivent le SMIC. Par ailleurs, les branches maladie et vieillesse de base du régime social des indépendants (RSI), lesquelles reçoivent aujourd'hui la C3S, seront adossées financièrement aux branches maladie et vieillesse du régime général, qui en assureront l'équilibre. Cette forme de solidarité financière prévaut depuis cinquante ans pour le régime des salariés agricoles et, depuis 2009, pour le régime maladie des exploitants agricoles. Ces précédents nous garantissent que le financement du régime sera assuré de manière pérenne et que ni l'autonomie de sa gestion ni le niveau des cotisations et des prestations ne seront remis en cause. Le dispositif sera neutre pour le régime général, grâce à la compensation mise en oeuvre dans le cadre des lois de finances.

Le PLFRSS accélère nos efforts d'économies. Il tire les conséquences de la sous-exécution de l'ONDAM 2013 en revoyant le niveau de l'ONDAM 2014, mesure qui ne remet pas en cause le taux de progression de 2,4 % voté dans la loi de financement initiale de la sécurité sociale pour 2014. Par ailleurs, il propose de ne pas revaloriser pendant un an les retraites et l'allocation de logement familiale (ALF).

Nous avons choisi de préserver les revenus les plus modestes, particulièrement ceux des personnes en situation de pauvreté ou de précarité, puisque le texte ne concerne ni le revenu de solidarité active (RSA) ni le plan de lutte contre la pauvreté. Conformément aux engagements du Premier ministre, l'absence de revalorisation ne concerne pas les petites retraites. Celles dont le montant mensuel ne dépasse pas 1 200 euros seront réévaluées.

Bien que beaucoup de retraités perçoivent, pour une part variable, des retraites complémentaires, la revalorisation ne porte que sur la retraite de base : il n'a jamais été question d'agir directement ou indirectement sur la part complémentaire en surrevalorisant la retraite de base. La non-revalorisation des retraites complémentaires AGIRC-ARRCO a été décidée par les partenaires sociaux il y a plus d'un an. Chercher à la compenser constituerait une ingérence inédite dans la gestion paritaire de ces retraites par les partenaires sociaux.

Je ne sous-estime pas l'effort que représente cette mesure, même dans un contexte de très faible inflation, mais nous avons soutenu par ailleurs le pouvoir d'achat des retraités, grâce à la double revalorisation du minimum vieillesse, à la revalorisation de cinquante euros, soit 10 %, de l'aide à la complémentaire santé pour les plus de soixante ans dont le revenu est inférieur à 987 euros, et au plan de revalorisation des petites retraites agricoles résultant de la réforme des retraites.

L'absence de revalorisation de l'ALF suscite des doutes chez certains d'entre vous. Le dialogue entre le Gouvernement et le Parlement va se poursuivre. Je souhaite que nous trouvions un point d'équilibre sur le sujet, mais je rappelle que nous avons, d'ores et déjà, pris des mesures fortes en faveur du pouvoir d'achat. Ainsi, nous avons revalorisé de 25 % l'allocation de rentrée scolaire, relevé le plafond de ressources de la couverture maladie universelle (CMU) complémentaire et de l'aide à la complémentaire santé (ACS), et augmenté le complément familial pour les familles modestes. Nous avons aussi revalorisé l'allocation de soutien familial et, pour le RSA, garanti, en plus de la revalorisation annuelle, une revalorisation exceptionnelle de 2 % par an pendant cinq ans. En outre, le PLFRSS et le PLFR contiennent deux mesures fortes en faveur du pouvoir d'achat : l'exonération de cotisations salariales pour les salaires inférieurs à 1,3 SMIC et une réduction d'impôt qui favorisera de nombreux ménages. Enfin, le gain induit par la baisse des cotisations salariales représentera 500 euros par salarié et par an.

Les efforts que demande le PLFRSS sont au service d'un objectif qui nous rassemble tous : la pérennité de notre modèle social. Ce texte participe globalement à la politique que nous avons engagée depuis deux ans et qui vise à rétablir l'équilibre de la sécurité sociale sans remettre en cause les droits ni la couverture des personnes.

Quand nous sommes arrivés aux responsabilités, le déficit du régime général et du fonds de solidarité vieillesse (FSV) atteignait près de 21 milliards d'euros. En 2013, nous l'avons réduit à 15,4 milliards. Avant la fin de l'année, il devrait atteindre 13,3 milliards. Ce résultat est le fruit d'une volonté politique. En 2010, alors que la croissance atteignait 1,6 %, le déficit de la sécurité sociale avait progressé de 4,5 milliards d'euros pour atteindre 28 milliards. En 2013, avec une croissance de 0,1 %, nous l'avons réduit de plus de 2 milliards. Ce résultat est le fruit de nos réformes structurelles, qui garantissent à tous la protection sociale, gage de cohésion nationale et promesse de nouveaux droits.

Tout au long de la discussion, le Gouvernement sera attentif à vos amendements, mais le cadre dans lequel s'inscrit le texte – le pacte de responsabilité et de solidarité – ne pourra pas être remis en cause, puisqu'il vise à mobiliser les énergies pour la croissance, l'emploi et l'assainissement de nos comptes.

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