Le Gouvernement prétend concentrer son effort sur la baisse du coût du travail. Enfin, il semble reconnaître les erreurs qu'il a commises depuis le début de quinquennat et que le groupe UMP n'a cessé de dénoncer : matraquage fiscal des entreprises et des ménages, détricotage de toutes les mesures prises par ses prédécesseurs, qui soutenaient pourtant la compétitivité des entreprises. Il ne suffit pas de brandir pendant des mois le concept de pacte de responsabilité pour en faire une réalité palpable.
Le PLFRSS paraît opérer un virage à 180 degrés. Sur le papier, il prévoit une baisse du coût du travail de 6,5 milliards d'euros dès 2015, annonce pour 2016 un milliard d'allégement supplémentaire de la C3S avant sa disparition en 2017, et 4,5 milliards de baisse des cotisations familiales pour les salaires inférieurs à 3,5 SMIC. Nous devrions nous réjouir qu'avec un peu de retard, la majorité prenne conscience de ses erreurs. Hélas, certains députés n'ont pas encore compris que la lutte contre le chômage imposait de réduire la dépense publique et de baisser de manière significative le coût du travail.
C'est pourquoi nous craignons que ce projet de loi ne soit un énième texte d'affichage, qui leurrerait les entreprises et les ménages, dont le moral est au plus bas. Certaines mesures restent floues ; d'autres sont reportées. La compensation de la baisse des cotisations patronales et salariales et de l'allégement de la C3S est renvoyée au PLFSS pour 2015. Le Gouvernement ne renonce pas à la méthode qu'il avait utilisée pour le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), dont les deux tiers ne sont pas financés, un an et demi après sa mise en place.
Il n'est ni honnête ni responsable d'annoncer une baisse de cotisation et de contribution sans prévoir de compensation ni de mesure d'accompagnement certaines. Le Gouvernement veut baisser les cotisations familiales des indépendants, mesure que nous approuvons, mais comment comblera-t-il le manque à gagner pour le RSI, que la C3S finance à hauteur de 20 % ? La ministre assure qu'elle n'augmentera pas les cotisations et qu'une compensation interviendra dans la loi de finances pour 2015 : au vu des remarques formulées par la Cour des comptes sur le PLFR, il est permis d'en douter.
Le texte montre une nouvelle fois à quel point le Gouvernement a du mal à tenir ses engagements en matière de maîtrise des dépenses. Le solde des branches de la sécurité sociale est dégradé par rapport aux objectifs du PLFSS pour 2014, malgré une sous-exécution de l'ONDAM, qui ne manque pas de faire réagir les professionnels de santé. Chacun connaît la situation financière alarmante des hôpitaux, ainsi que les efforts qui leur sont demandés. Alors que le Gouvernement annonce 21 milliards d'économies sur le budget de la sécurité sociale, dont 10 milliards pour l'assurance maladie, l'inquiétude grandit au sein des hôpitaux de proximité. Les relations entre agences régionales de santé (ARS), directeurs d'hôpitaux et professions médicales se tendent.
Ce PLFRSS offrait au Gouvernement l'occasion de prouver qu'il voulait faire mieux avec moins, tout en maintenant la qualité du service aux patients. Il ne l'a pas saisie. Pire, il entend généraliser le tiers payant, alors que notre pays souffre d'une déresponsabilisation, qui nourrit la surconsommation médicale. Il gèle les prestations au lieu d'engager des réformes structurelles. L'exemple le plus flagrant est le report de six, puis de dix-huit mois, de la revalorisation des pensions de retraites. Les intéressés apprécieront. Initialement, le Gouvernement avait prévu de ne pas revaloriser les allocations de logement familiales et d'invalidité. Il n'y renonce que pour des raisons juridiques, parce que le Conseil d'État lui dicte de ne pas le faire.
Regrettant que les mesures annoncées ne soient financées que virtuellement et que d'autres pèsent sur le pouvoir d'achat des classes moyennes, le groupe UMP déposera des amendements sur le texte. Il entend défendre un modèle social efficace et juste, qui, sans croissance ni réforme courageuse de notre système de protection sociale, n'est manifestement pas sur les rails.