On a à juste titre pointé l’effet d’aubaine que constitue le CICE pour des secteurs comme la grande distribution ou les professions réglementées, qui ne sont pas davantage exposées à la concurrence interne qu’à la concurrence internationale. Les entreprises de la grande distribution, parce qu’elles ont une autorisation d’exploitation au sein d’une zone de chalandise, bénéficient d’un monopole de fait. Instituée pour limiter la concurrence que font les grandes enseignes au commerce de détail, cette autorisation les protège contre les concurrents de taille comparable à la leur. Quant aux professions réglementées, leur statut spécifique leur confère un monopole de droit résultant d’un numerus clausus. Il est inutile de préciser à nouveau ces éléments bien connus.
Dans ces conditions, il serait conforme aux objectifs poursuivis par le CICE de ne pas inclure ces professions et exploitants. On m’a objecté l’an dernier qu’une telle proposition soulevait une difficulté vis-à-vis du droit européen. Qu’en est-il vraiment ?
Ainsi que le prévoyait la loi, le Gouvernement a interrogé la Commission sur l’inclusion de la partie non lucrative des sociétés coopératives dans le CICE et a obtenu une réponse. Il n’a cependant jamais interrogé officiellement la Commission sur le périmètre qu’il retient pour le dispositif principal du CICE, alors qu’il aurait dû le faire.
Je rappelle que le premier paragraphe de l’article 107 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne prohibe les aides publiques de nature à fausser la concurrence « en favorisant certaines entreprises ou certaines productions ». Or la notion d’entreprise ou production, qui n’a fait l’objet à ce jour d’aucune jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, est très sujette à interprétation. Dans ces conditions, il serait utile que le Gouvernement acceptât de saisir officiellement la Commission pour lui demander s’il serait possible de limiter le champ des bénéficiaires du CICE de manière utile, conformément aux objectifs que nous poursuivons.
J’aimerais ajouter un élément tout à fait récent. Dans les documents qui seront soumis au Conseil européen des 26 et 27 juin prochain au titre du semestre européen, figurent les recommandations que la Commission propose aux États d’adopter. Dans le document qui porte sur la France, il est reproché à notre pays de n’avoir pas limité le CICE au périmètre des entreprises soumises à la concurrence à l’exportation. Tout ceci montre bien qu’il y a un flou dans le droit européen. J’aimerais que le ministre m’indique s’il accepterait enfin de saisir la Commission européenne.