Intervention de Erwann Binet

Séance en hémicycle du 27 juin 2014 à 15h00
Autorité parentale et intérêt de l'enfant — Article 19

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaErwann Binet :

Vous avez raison d’une certaine façon, monsieur Dhuicq : les enfants ne doivent pas être partie au conflit de leurs parents. Durant nos auditions, je pense notamment à celles que Marie-Anne Chapdelaine a menées dans le cadre d’un groupe de travail qu’elle a animé pendant plusieurs mois, nous avons entendu plusieurs propositions en faveur du droit des enfants de seize ans révolus de saisir directement le juge aux affaires familiales sur les décisions les concernant. Nous les avons refusées parce que nous considérons que le mineur, quel que soit son âge, n’est pas partie au conflit de ses parents.

En revanche, il est souvent l’objet du conflit, et l’objet des décisions du juge aux affaires familiales, et il est de ce fait parfois nécessaire que le magistrat puisse l’entendre, quel que soit son âge. Ce dernier point est la nouveauté de l’article 19. Aujourd’hui, l’article 388-1 du code civil, qui prescrit les conditions du recueil de la parole de l’enfant dans des procédures le concernant, prévoit que celui peut être entendu par le juge lorsqu’il est « capable de discernement ». Qu’est-ce que la capacité de discernement ? À cette question, les juges répondent différemment ; y compris au sein du même tribunal de grande d’instance, les réponses varient : certains fixent comme critère l’entrée au collège, d’autres l’âge de treize ans – critère prévu d’ailleurs dans le code civil pour d’autres situations, par exemple pour le consentement à l’adoption. Il faut harmoniser tout cela.

La défenseure des enfants a proposé à de multiples reprises, et nous l’a réitéré en audition, la présomption de discernement dès lors que l’enfant demande à être entendu. Nous n’avons pas fait ce choix, mais nous partageons complètement cette opinion sur le fond, qui a été relayée par nombre des personnes auditionnées, y compris par beaucoup de professionnels du droit. C’est pourquoi notre commission propose à cet article la suppression du critère de capacité de discernement. C’est une disposition extrêmement importante car le juge pourra ainsi entendre directement l’enfant, ou le faire entendre s’il est trop jeune ou s’il l’estime nécessaire pour une autre raison. Il recueillera sa parole selon son degré de maturité et pourra refuser d’entendre l’enfant si tel n’est pas son intérêt – par exemple, si celui-ci veut être entendu sur un conflit qui ne concerne que ses parents.

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