Je pense que la fin de ce texte, encore une fois, marque une dérive. Certes, nous avons quitté une période où l’enfant était considéré comme une pâte molle. L’ère victorienne avait porté cette conception à son paroxysme, avec ces bonnes familles qui, délibérément, faisaient élever leurs enfants par des gouvernantes pour qu’ils ne soient pas pollués par les liens affectifs qui auraient pu se nouer avec leurs parents. Certes, nous travaillons aujourd’hui de plus en plus sur les interactions précoces. Certes, nous cherchons à donner à l’enfant sa place, sa parole, et la possibilité de s’exprimer, mais je trouve, encore une fois, que l’ensemble des derniers articles, à force de vouloir bien faire, va, au contraire, complexifier les choses.
Un système qui permet à un professionnel, en son âme et conscience et en fonction de ses connaissances, de s’adapter à la situation et de prendre les décisions qui lui semblent justes, en acceptant que l’erreur est humaine, est infiniment préférable. On le voit bien avec l’ensemble des amendements que nous venons de discuter : inéluctablement, la question de la norme se pose, en l’occurrence la norme en âge, et avec cette question celle de la standardisation des décisions des tribunaux.
C’est d’ailleurs assez paradoxal. Nous avons soulevé face à Mme la garde des sceaux l’objection de l’inégalité de traitement de justiciables, en ce qui concerne les taux de condamnation et le quantum des peines, qui varient selon qu’ils comparaissent devant un tribunal ou devant un autre. En l’occurrence, c’est encore l’inverse. D’un côté, un discours, une idéologie dominante visent à affirmer la toute-puissance de la nature et à nier la dimension culturelle. De l’autre, quand il s’agit d’intervenir sur l’humain, vous tenez le raisonnement totalement inverse.
J’appelle modestement l’attention sur le fait qu’il est déraisonnable d’aller trop loin pour faire bien et de donner la parole à tout va à l’enfant.