Se rendre en Ukraine pour initier des échanges avec toutes les parties concernées est en effet une excellente initiative. Lors de notre mission, nous avons pu constater combien la situation restait délicate. Le moment est crucial. Les élections présidentielles du 25 mai sont derrière nous, leur résultat est incontestable et n'a pas d'ailleurs été contesté par les candidats perdants ; une certaine stabilisation prévaut donc aujourd'hui à Kiev, même si la situation est proche de la guerre dans certaines régions orientales de l'Ukraine.
Je tiens néanmoins à nuancer cette dernière remarque car il ne s'agit pas d'une guerre civile mais d'une situation entretenue par le contexte international, autrement dit l'incursion de troupes et d'armes depuis l'autre côté de la frontière. Cela a amené M. Porochenko à annoncer que les frontières devraient être mises sous contrôle ces jours-ci afin d'interrompre les livraisons d'armes ; j'espère que cela pourra fonctionner, en dépit de la pression soutenue imprimée sur Kiev.
La semaine dernière, un attentat a provoqué vingt-neuf morts. Des missiles sol-air Man Portable Air-Defense System (MANPADS) ont été introduits dans le pays. Toutes les parties engagées dans ce conflit témoignent aussi du transfert de troupes depuis le Caucase russe. Il nous a également été confirmé que des colonnes de poids lourds ou de blindés arrivaient de Russie. Je suppose que l'objectif de ces manoeuvres est de nuire à la crédibilité du nouveau Président en aggravant la situation à Donetsk. Cette escalade des armements a aussi pour but de pousser les autorités à réagir et risque d'aggraver la violence, avec notamment les combats de rue.
Dans ce contexte, nous devons mener trois actions. Tout d'abord, il convient d'exercer une influence plus importante sur la Russie en renforçant les menaces de sanctions. La Russie a déjà reconnu l'élection de M. Porochenko, l'entretien téléphonique qu'il a eu avec M. Poutine l'illustre ; sous la menace de sanctions vis-à-vis de la Russie, nous pourrions influer encore sur la position de ce dernier vis-à-vis de Kiev. Ensuite, il faut renforcer la légitimité des autorités de Kiev, par exemple en y organisant des missions. Enfin, il faut les encourager à entreprendre une politique de décentralisation et organiser de nouvelles élections.
Il est crucial que l'Union européenne reste unie. Si M. Poutine arrivait à diviser les vingt-huit États membres, les conséquences seraient désastreuses.