Intervention de Christophe Cavard

Séance en hémicycle du 3 juillet 2014 à 9h30
Économie sociale et solidaire — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Cavard :

Aujourd’hui se termine dans notre assemblée l’examen d’un projet de loi qui tient à coeur aux écologistes. Il nous tient à coeur car, à l’heure où nos concitoyens sont dans le doute, il crée un vrai cadre législatif visant à favoriser le développement d’un pan de l’économie vecteur de solidarité et de bonnes pratiques. Une gouvernance collective et participative, une gestion démocratique mettant l’humain au centre du projet, une grille de salaires resserrée, une lucrativité nulle ou limitée : telles sont ces bonnes pratiques.

Malgré des chiffres éloquents, qui vont croissant – un emploi sur cinq, ou encore 10 % de la valeur nationale créée chaque année – l’économie sociale et solidaire reste pour l’instant une niche, un secteur marginalisé. Ce projet de loi est donc un tournant pour ses acteurs, mais aussi pour ses filières, qui doivent être valorisées et se multiplier.

Aujourd’hui, l’économie sociale et solidaire est très présente dans certains secteurs bien connus, comme l’action sociale, la finance et l’assurance, la santé ou encore l’éducation. Elle doit cependant prendre de l’ampleur et investir maintenant d’autres domaines, tels que l’agriculture, les transports, l’industrie ou le bâtiment, qui sont des secteurs clefs pour réussir la transition écologique de notre économie. Ainsi, ses pratiques en matière de gouvernance, de parité, de salaire doivent petit à petit s’étendre, avec pour objectif de long terme de devenir la règle et non plus l’exception.

Vous l’avez compris, les écologistes placent de vrais espoirs dans ce projet de loi, qu’ils veulent voir fermement soutenu politiquement, afin de donner une chance à l’économie et à l’emploi de se rénover.

Ces pratiques tendant à une meilleure prise en compte de chacun dans l’entreprise vont dans ce que nous estimons être le sens de l’Histoire. Le 24 juin dernier, le Gouvernement lançait l’initiative « La France s’engage » pour encourager les projets innovants de l’économie sociale et solidaire. À cette occasion, le chef de l’État a déclaré : « ce que nous voulons faire, c’est fédérer, mobiliser, démontrer la vitalité d’un pays comme le nôtre ». C’est une déclaration à laquelle je souscris pleinement, tant elle me semble correspondre à ce que porte l’économie sociale et solidaire : une vision dynamique, utile et innovante de l’économie. Cette initiative donne un signal positif alors que ce projet de loi est examiné par notre assemblée.

Autre signal très positif que je souhaite saluer : mardi 24 juin, François Rebsamen, ministre du travail, de l’emploi et du dialogue social, indiquait à l’Union des employeurs de l’économie sociale et solidaire, principale organisation patronale de l’économie sociale et solidaire, qu’elle intégrera prochainement la Commission nationale de la négociation collective. En outre, pour la première fois, l’UDES sera conviée à participer à quatre des sept tables rondes organisées durant la conférence sociale, les 7 et 8 juillet prochains.

Depuis la première lecture, j’ai défendu au nom du groupe écologiste une meilleure représentation des acteurs de l’économie sociale et solidaire dans les conférences sociales et économiques. Cette annonce du ministre du travail va donc dans le bon sens, et c’est un geste particulièrement important dans un contexte de tensions sociales réelles. Nous l’avons vu ces derniers mois, notamment au travers de mobilisations très importantes comme celle des intermittents du spectacle, le dialogue social ne parvient pas encore à faire naître un consensus parmi les protagonistes. C’est pourtant un vrai instrument démocratique, qui a prouvé son efficacité dans d’autres pays où il existe une véritable culture du dialogue social. La France doit suivre cet exemple, mais, pour cela, nous devons adapter notre démocratie sociale aux réalités du monde du travail.

Tout comme l’UDES, qui était demandeuse de ces décisions, je me réjouis, alors qu’une loi cadre est votée par notre assemblée, que les employeurs de l’économie sociale et solidaire soient ainsi associés à une nouvelle instance de concertation nationale. C’est un premier pas vers une nouvelle reconnaissance de la part des pouvoirs publics de leur place parmi les partenaires sociaux.

Je terminerai avec un autre grand défi à relever, outre la gouvernance rénovée de notre dialogue social et de notre économie : celui la lutte contre le chômage, qui peut bénéficier de l’économie sociale et solidaire. En effet, cette dernière se caractérise par une bonne résistance dans la crise, mais également par des effectifs vieillissants : 29 % des effectifs globaux et 38 % des chefs d’entreprise et des cadres de l’ESS ont plus de 50 ans. Cela se traduira par le départ à la retraite d’un quart des effectifs de l’économie sociale et solidaire dans les prochaines années, et donc par un renouvellement important. On le voit, il y a là des enjeux énormes en termes de formation professionnelle et c’est pourquoi, madame la ministre, nous demandons depuis le début de l’examen de ce texte que l’on adapte le compte personnel de formation à ces réalités.

La conclusion paraît ainsi claire, mes chers collègues : il faut investir dans ce potentiel afin d’améliorer la qualité de vie au travail et lutter contre la souffrance au travail, tout en créant des emplois non délocalisables et pourvoyeurs de sens pour la société et nos concitoyens. À quoi sert, en effet, une économie qui ne prend pas en compte le développement des personnes ? Oui, nos concitoyens ont besoin de sens et de réalisation de soi, alors permettons à ce secteur qui en est porteur de se développer.

Nous voterons bien sûr avec plaisir ce projet de loi.

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