Intervention de Germinal Peiro

Séance en hémicycle du 7 juillet 2014 à 16h00
Agriculture alimentation et forêt — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGerminal Peiro, rapporteur de la commission des affaires économiques :

Il faut rappeler dans quel contexte se situe ce projet de loi. Vous le savez, notre pays traverse une crise économique et sociale extrêmement grave. Ce projet s’inscrit dans la politique gouvernementale, qui est celle du redressement productif. Entre 2002 et 2012, notre pays a perdu 750 000 emplois industriels et le nombre de chômeurs a augmenté d’un million. La dette, entre 2007 et 2012, est passée de 1 200 milliards à 1 800 milliards. Dans ce tableau, assez noir, le monde agricole n’a pas été épargné puisque la France a perdu le premier rang qu’elle occupait en Europe en matière de production agricole et agroalimentaire et qu’elle est passée du premier au troisième rang, derrière l’Allemagne et les Pays-Bas.

Au cours des dix dernières années, ce sont 26 % des exploitations agricoles de notre pays qui ont disparu. Le projet de loi s’inscrit dans le droit fil de la politique du Gouvernement visant à assurer le redressement productif de notre pays, qui est absolument indispensable au maintien du haut niveau de protection sociale dont nous jouissons en France. Le secteur agricole bénéficiera des mesures générales de soutien à la compétitivité telles que le crédit d’impôt compétitivité emploi et le pacte de responsabilité. En vérité, le coût du travail sera allégé de plus d’1 million d’euros, ce qui mettra les entreprises agricoles et agroalimentaires à même de mieux affronter nos concurrents directs. Nous savons à quel point le coût du travail pèse sur certaines productions, en particulier celles de fruits et légumes.

Le projet de loi a un objectif parfaitement clair : la France doit produire plus et elle doit produire mieux. Elle doit produire plus pour reprendre son rang parmi les grands pays producteurs agricoles et elle doit aussi produire mieux, pour améliorer la compétitivité des exploitations agricoles, ce qui suppose un important travail interne afin d’en améliorer l’autonomie. Les premières marges de compétitivité peuvent être réalisées sur les achats d’intrants tels que les aliments d’élevage et d’engrais. Mais la France doit aussi produire mieux afin de protéger la santé publique et l’environnement. Le projet de loi prévoit donc des mesures visant à réduire et mieux contrôler l’utilisation des engrais azotés et d’autres visant à réduire l’usage des pesticides, sur lesquels je m’arrêterai un instant.

Le texte comporte une orientation très claire, l’agroécologie, mais la question de la réduction des pesticides est essentielle aujourd’hui et le sera peut-être encore plus demain. Après un rapport du Sénat et un autre de l’INSERM, après l’appel de 1 200 médecins suscité par les problèmes du traitement de la pomme en Limousin, il ne se passe pas un mois sans qu’une étude ne démontre le lien entre l’usage des pesticides et la santé humaine. Il s’agit donc d’un sujet majeur. L’objectif de l’agroécologie placé au coeur du texte de loi, unissant performance économique d’une part et environnementale et sanitaire d’autre part, prend ici tout son sens.

Le maintien sur le territoire national du plus grand nombre possible d’exploitants agricoles se situe également au coeur du projet de loi. Vous avez plusieurs fois appelé de vos voeux, monsieur le ministre, une agriculture faite avec des exploitants agricoles, c’est-à-dire des hommes et des femmes vivant à titre principal, et convenablement, de leur métier d’agriculteurs, dans des exploitations à taille humaine, privilégiant des productions à forte valeur ajoutée ancrées localement et répondant à la demande des consommateurs, qui sont de plus en plus des consommateurs citoyens. Le projet de loi donne de nouveaux outils aux professionnels de l’agriculture, au premier rang desquels les groupements d’intérêt économique et environnemental dont le travail en commun améliorera l’efficacité des exploitations et rompra l’isolement dont souffrent beaucoup d’exploitants agricoles. Les premiers résultats sont encourageants. En effet, l’appel à projets lancé l’été dernier a suscité un nombre important de candidatures, qui sont autant d’initiatives démontrant l’intérêt que suscite l’agroécologie dans tout le territoire.

Le texte vise aussi à assurer le renouvellement des générations et la pérennité de l’activité agricole au moyen du contrat d’installation progressive destiné aux jeunes agriculteurs et de toutes les mesures de protection des terres agricoles, dont nous débattrons à l’occasion de la deuxième lecture. Citons également le renforcement du contrôle des structures et du rôle des SAFER, dont la mission d’aide à l’installation devient une priorité. Comme nous le savons tous, la moitié des agriculteurs de France ont plus de cinquante ans. La première des priorités, si nous voulons produire plus et maintenir les agriculteurs dans l’ensemble du territoire national, est véritablement de faciliter l’installation.

Le texte de loi comporte des moyens pour mieux protéger la santé publique et l’environnement, comme la réduction de l’usage des antibiotiques. Nous savons tous que l’antibiorésistance progresse dans ce pays et qu’il faut lutter contre. Nous avons donc pris des mesures visant à mieux contrôler l’usage des antibiotiques, en particulier dans les élevages industriels qui en sont gros consommateurs, et à réduire l’usage des produits phytosanitaires comme le rappel de la nécessité du conseil et l’interdiction de la publicité. Nous encourageons également l’action des organismes de biocontrôle. Je me réjouis que nous ayons trouvé une solution juridique pour sécuriser l’utilisation des préparations naturelles peu préoccupantes, ou PNPP. Le texte de loi donne aussi les moyens nécessaires à la conciliation des usages, je pense en particulier au nécessaire équilibre entre les activités des forestiers et celles des fédérations de chasse qui, au-delà du loisir, assurent une mission de surveillance et de régulation de la faune sauvage.

Le texte ajoute à la compensation environnementale une nécessaire compensation agricole en cas de perte de terrain agricole, notamment dans le cas de la réalisation de grands projets publics.

Enfin, le texte prévoit de soutenir les zones en difficulté, en particulier les zones de montagne pour lesquelles toutes les dispositions législatives dont nous avons discuté ont été adaptées. Je ne doute pas que le texte sera encore enrichi, car 1 300 amendements ont été déposés pour la deuxième lecture à l’Assemblée, et que nous progresserons encore dans la voie de l’intérêt général.

Je ne puis terminer sans remercier les membres de votre cabinet, monsieur le ministre, et les administrateurs de l’Assemblée, qui nous sont d’un précieux secours et font preuve à la fois de compétence et de sérieux tout au long de la préparation de nos textes.

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