Intervention de Alain Zabulon

Réunion du 1er juillet 2014 à 17h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Alain Zabulon :

C'est vrai, mais nous connaissons tous les contraintes financières de l'État. En dépit de cela, le périmètre du renseignement a fait l'objet d'un arbitrage important dans la loi de programmation militaire, avec des moyens prévus en augmentation, notamment pour la DGSI et la DGSE.

La prison est effectivement un lieu privilégié de bascule des individus vers la radicalisation. Cela se fait au contact d'individus eux-mêmes radicalisés, de prédicateurs ou d'imams auto-proclamés qui véhiculent des discours de propagande djihadiste. Nous n'avons pas prévu de dispositions législatives particulières à ce sujet car cela ne relève pas de la loi mais de l'action de l'administration pénitentiaire qui est parfaitement consciente du problème. Le conseil de défense d'avril dernier a défini un train de 23 mesures, dont un volet relatif à la prévention de la radicalisation en prison. Ces mesures sont en cours d'élaboration.

Le projet de loi vise aussi, je vous l'ai dit, à nous permettre d'agir sur les sites Internet qui véhiculent des discours intolérables. C'est pourquoi nous souhaitons modifier la loi pour la confiance dans l'économie numérique de 2004 afin d'y introduire des mesures permettant de bloquer les sites provoquant aux actes de terrorisme et en faisant l'apologie. Ces dispositions vaudront aussi pour les comptes Facebook.

Les organismes accordant des prêts à la consommation n'ont aucun moyen de savoir à quoi serviront les fonds. Or, comme je l'ai dit, quelques milliers d'euros suffisent à financer le voyage et le séjour en Syrie.

Les individus repérés comme étant allés combattre en Syrie sont par ailleurs signalés aux organismes qui versent les prestations sociales.

La réforme de 2010 a mis fin au système d'autorisation de sortie du territoire pour les mineurs. À l'époque, nous n'étions pas confrontés au phénomène actuel et il était apparu que le dispositif, outre qu'il était mal appliqué, était parfois utilisé à mauvais escient par des parents en conflit. Nous sommes conscients du problème, et un système d'interdiction individuelle de sortie du territoire d'un mineur a été rétabli : les parents peuvent demander à l'autorité administrative compétente de prendre une interdiction de sortie du territoire s'ils font valoir des arguments établissant que leur enfant est en danger. Évidemment, cette parade ne vaut que si les parents ont détecté ce danger ; or on connaît des cas de mineurs prétendument partis le matin au collège ou au lycée et qui étaient en Syrie le soir. Mais cette question renvoie à la responsabilité individuelle des parents : jusqu'où l'État doit-il se substituer à l'autorité parentale ? Quoi qu'il en soit, nous avons rétabli le dispositif pour les parents légitimement inquiets d'empêcher la sortie du territoire de leurs enfants.

J'appelle cependant l'attention sur la limite naturelle de tous ces dispositifs dans l'espace Schengen, où les contrôles sont aléatoires. Nous devons être conscients que nous habitons un pays dans lequel le droit d'aller et venir constitue une liberté fondamentale. Autant dire que toutes les mesures que nous prenons auront une efficacité certaine mais aussi des limites évidentes.

Il est vrai, Monsieur le député, que l'attitude des familles varie. Ce qui prévaut est un désarroi réel et une demande d'assistance, mais il peut aussi y avoir complicité quand les familles sont elles-mêmes radicalisées ; à ce sujet, je ne trahirai aucun secret en disant que la soeur de Mohamed Merah a approuvé sans réserve les agissements de son frère. Mais dans leur grande majorité, les parents sont plutôt inquiets, et ils ont des raisons de l'être. Qui est recruté dans une katibate n'en sort pas aussi facilement qu'il le souhaiterait. Des jeunes gens revenus en France nous ont indiqué avoir été menacés d'exécution lorsqu'ils ont dit vouloir quitter la Syrie, et certains ont été victimes de maltraitances et de châtiments corporels pour avoir refusé de procéder à un égorgement ou de participer aux combats. Tout cela, nous le disons aux familles, qui doivent savoir à quoi s'exposent leurs proches : le djihad est tout sauf une promenade de santé.

Les individus ramenés du Mali auxquels vous avez fait allusion ont fait l'objet d'une procédure judiciaire. Enfin, l'association d'aide aux prisonniers que vous avez mentionnée retient l'attention des autorités compétentes.

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