Intervention de Corinne Erhel

Réunion du 17 juin 2014 à 14h00
Délégation de l'assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCorinne Erhel :

Deux domaines sont actuellement en pleine mutation : la santé et l'éducation. Parmi les enjeux de la Silver Economy, il y a le maintien à domicile et la possibilité de suivre les patients à distance. Le développement de la « e-santé » permettra un suivi en temps réel, ce qui est appréciable quand les patients n'ont pas, en raison de leur localisation, d'accès direct à un médecin. Mais cela ne veut évidemment pas dire que la e-santé palliera les inconvénients des déserts médicaux. Tout est question d'équilibre. Le contact avec le personnel médical restera important.

Sur le plan technologique, les expériences se multiplient – bracelets connectés, suivi de telle ou telle pathologie, Big data. Là encore, il faudra trouver un équilibre entre la protection des données personnelles qui est très importante, notamment en Europe et en France, et le développement de l'innovation. Le traitement des données médicales ne peut se faire que de manière brute et anonymisée. Mais l'exploitation du Big data – la production de données de masse – en matière de santé, peut s'avérer très bénéfique, notamment dans le domaine de la prévention.

Il faut bien voir que dans le numérique entendu au sens large, l'innovation est très importante. La bataille mondiale se joue sur les conditions d'accueil et de développement des start ups, etc., et sur le potentiel d'innovation. Si l'Europe ratait les marches du développement de l'innovation, elle risquerait de prendre du retard. Ce serait d'autant plus regrettable que la France a probablement les ingénieurs les meilleurs et les plus créatifs. Mais j'en reviens à la Silver Economy : c'est effectivement un chantier très important, qui permettra aux personnes de rester chez elles.

Un autre domaine est en pleine mutation : celui de l'éducation. Pour que l'on puisse se mouvoir dans le monde et le comprendre, pour ne pas être un simple consommateur du numérique et savoir sur quels points il faut être vigilant, nous préconisons l'apprentissage du codage dès le plus jeune âge. Beaucoup de pays le font : en Asie, la Corée du Sud ; en Europe, l'Estonie, et l'Angleterre va commencer à le faire ; aux États-Unis, où le président Obama veut faire de la programmation informatique une priorité pour les jeunes générations.

L'école est un lieu absolument central pour l'utilisation des technologies. Elle permettra d'atténuer les différences entre les enfants dont les parents utilisent déjà certaines technologies, et les autres. Mais en même temps, sous l'influence du numérique, elle sera amenée à modifier sa façon d'enseigner. La France conserve un enseignement vertical, où l'enseignant dispose du savoir et où les élèves écoutent. Le numérique incitera les élèves à questionner davantage l'enseignant.

Je passe sur le collège et le lycée, pour en venir aux MOOC (massive open online course), c'est-à-dire l'enseignement universitaire en ligne, qui permet un accès universel à certaines questions et formations. La France développe plusieurs enseignements de ce type.

Il ne faut pas oublier non plus que le numérique est en grande partie fondé sur l'économie de la donnée. La valeur se situe dans la donnée que produit telle ou telle organisation ou telle ou telle entreprise. Nous-mêmes nous produisons des données qui ont une valeur. Il faut donc apprendre à la fois à protéger ses propres données – nous avons des expertises européennes à faire valoir – tout en s'inscrivant dans une dynamique mondiale.

Selon moi, le numérique est un fait inéluctable, qui transforme la société. Nous devons nous y adapter et anticiper son développement. Tout comme la formation initiale, la formation professionnelle va devenir cruciale, dans la mesure où elle permet l'adaptation des compétences. Je pense tout particulièrement aux femmes, qui sont nombreuses à occuper des fonctions d'intermédiation. Il faut réfléchir dès maintenant à l'évolution de ces fonctions, au type de métiers vers lequel on orientera les intéressés et à la façon dont on les formera, pour ne pas laisser en difficulté tout un pan de notre société.

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