Intervention de Thierry Braillard

Séance en hémicycle du 12 novembre 2012 à 16h00
Projet de loi de finances pour 2013 — Immigration asile et intégration

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaThierry Braillard :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, examiner l'un des budgets régaliens de la République nécessite de l'humilité et de l'exigence. Le ministre de l'intérieur, qui a en charge la très grande partie de la gestion de cette mission, affiche des objectifs ambitieux, compréhensibles et bienvenus.

Ambitieux en matière d'asile, avec la volonté de réduire les délais d'instruction des dossiers des demandeurs, conformément aux objectifs définis par le Président de la République. Compréhensibles, avec la refondation de l'accès à la nationalité française, fondé désormais sur des critères clairs, faisant l'objet d'une publicité adéquate pour rompre avec le fait du prince. Bienvenus, avec l'abandon de la politique du chiffre en matière d'immigration et l'amélioration des conditions d'accueil des étrangers en préfecture.

Cela ne vous étonnera pas, les députés du groupe RRDP partagent les voeux du ministre de l'intérieur et ont les mêmes scrupules que lui. Il s'agit de permettre de couvrir la politique souveraine de la France, conformément à ses engagements internationaux et européens ainsi qu'à sa tradition historique de générosité à l'endroit des demandeurs d'asile, tradition mise à mal ces dernières années.

Le vote du budget, particulièrement en ce qui concerne un budget comme celui-ci, est toujours un instant de vérité. En effet, puisqu'en matière d'immigration en particulier, d'accueil des étrangers d'une manière générale, souvent l'on fait le contraire de ce que l'on dit et l'on dit le contraire de ce que l'on fait – nécessité fait loi –, ce budget, monsieur le ministre, a au moins le mérite de traduire financièrement la stratégie claire du Gouvernement autours des trois grands axes que sont l'intégration, la gestion maîtrisée de l'immigration et la garantie de l'exercice du droit d'asile pour les personnes sollicitant la protection de notre pays.

À cet égard, votre budget tient compte de la réalité des dépenses liées à la garantie de l'exercice du droit d'asile, dépenses qui, comme l'a souligné notre collègue Laurent Grandguillaume, qui reprend dans son rapport les préventions de la commission des finances et de la Cour des comptes, ont été structurellement sous-évaluées pendant trop longtemps. Nous nous félicitons du recrutement de dix agents supplémentaires à l'OFPRA. Certes, notre collègue Éric Ciotti peut toujours considérer, calculatrice en main, que ce n'est pas dix mais trente agents qu'il aurait fallu recruter si l'on voulait se donner pleinement les moyens de sa politique. Que ne l'a-t-il proposé à votre prédécesseur, monsieur le ministre ?

Au-delà de la réduction des délais d'instruction des demandes par l'OFPRA et la CNDA, il faut dire quelques mots sur l'accueil et l'hébergement des demandeurs d'asile, car cela aura une incidence directe sur la situation de ceux-ci. L'indicateur 1.2 de l'objectif n° l du programme 303 ne dit pas autre chose : le pourcentage des places de CADA occupées au 31 décembre est revu à la baisse car le ministère prévoit un plus grand nombre de déboutés. Il faut veiller à ne pas laisser ces populations dans le dénuement et à pouvoir les accompagner. Si l'effort porte sur la lutte contre les filières d'immigration irrégulière, nous devons savoir gérer les situations individuelles, comme nous le rappelle, même si elle n'est pas totalement imputable à la France, la situation dramatique de Sangatte.

Heureusement, les crédits pour l'hébergement d'urgence et l'accueil des demandeurs d'asile sont en forte hausse, avec en particulier 1 000 places supplémentaires au sein des CADA et une augmentation des dotations pour le DNA de près de 5 millions d'euros par rapport aux crédits votés pour 2012. Je citerai à nouveau le rapport de notre collègue Grandguillaume, s'agissant du programme 303 qui représente les neuf-dixièmes des moyens de la mission budgétaire : « un niveau de réalisme encore jamais atteint par les prévisions budgétaires sur cette mission ».

En ce qui concerne l'accès à la nationalité française, je voudrais, à l'instar de mon collègue et ami Patrick Mennucci, rappeler notre attachement à la règle selon laquelle toute instruction ministérielle ayant pour effet de modifier substantiellement l'appréciation par l'administration des critères de naturalisation est désormais opérée par la voie d'une circulaire, évidemment publiée. Nous nous réjouissons que le ministre de l'intérieur ait constamment manifesté son adhésion à cette démarche et qu'il l'ait même concrétisée récemment. Néanmoins, nous ne pouvons que regretter que les crédits relatifs au programme 104 poursuivent leur régression.

Nous sommes également favorables à une ouverture des conditions d'acquisition de la nationalité française, par voie de filiation et de naturalisation. Les naturalisations ont chuté de plus de 45 % entre 2010 et 2012, conséquemment à une forte hausse du taux de décisions défavorables : Patrick Mennucci a rappelé le chiffre de 53 % en 2011, j'y ajoute celui de 55 % au premier trimestre 2012. C'est insupportable. Cette politique du chiffre était celle de l'UMP, ce n'est pas la politique du nouveau gouvernement, et le groupe RRDP s'en félicite.

Nous veillerons à ce que l'ensemble des axes stratégiques de la politique d'immigration et d'intégration perdure afin de la rendre toujours plus efficace et surtout toujours plus juste. Les députés du groupe RRDP voteront les crédits de la mission budgétaire qui nous est soumise. (Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP, SRC, écologiste et GDR.)

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