Intervention de Julien Aubert

Séance en hémicycle du 9 juillet 2014 à 21h45
Agriculture alimentation et forêt — Article 18

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJulien Aubert :

Le loup est une problématique extrêmement sensible. Certes, nous ne sommes pas tous concernés, mais, dans ma circonscription rurale, le loup pose un vrai problème. La caractéristique de l’élevage sur le plateau d’Albion, dont j’ai le privilège d’être le représentant, est qu’il n’y a pas de transhumance. Ce sont de petits troupeaux d’une centaine de têtes, et c’est une économie très fragile.

Dans un tel contexte, dans l’éventualité d’une attaque de loup, il faut protéger le troupeau toute l’année. En outre – certains de mes collègues doivent avoir le même type de problème dans les Alpes –, une seule attaque suffit à anéantir une exploitation. J’ai constaté un tel cas dans un village de ma circonscription où deux éleveurs, préférant se reconvertir, ont mis la clé sous la porte.

Il y a, dans le dispositif actuel, toute une série de déficiences. D’abord, une attaque de loup, c’est parfois quelques bêtes tuées, mais aussi, souvent, un traumatisme qui condamne l’éleveur à tuer le reste du troupeau. C’est en tout cas, pour l’éleveur, un choc psychologique extrêmement fort. La situation est d’autant plus épuisante qu’ils n’ont pas forcément les moyens de grillager pour protéger leur troupeau. N’y parvenant pas, ils finissent par baisser les bras.

Ensuite, le système de rétorsion mis en place avec les lieutenants de louveterie est lourd. C’est comme si, dans notre société, quinze jours après un crime non résolu, on choisissait un passant au hasard dans la rue pour l’exécuter, pensant ainsi avoir réglé le problème. Lorsqu’il y a une attaque de loup, le temps que le lieutenant de louveterie se mette en place et que l’État prenne conscience de la situation, on va effectivement tuer un loup, mais pas forcément celui qui est à l’origine de l’attaque initiale.

Un autre problème se pose : il y a des loups plus ou moins craintifs, et certains n’hésitent pas à aller à proximité des lieux d’habitation.

J’en viens au problème de la prise de conscience dans un pays de plus en plus urbain. Le loup, qui était en voie de disparition, est devenu une espèce protégée. Avec l’explosion du nombre de loups, ce n’est plus le cas : sa disparition n’est plus d’actualité.

Il y a eu de la part du Gouvernement une prise de conscience assez rapide, depuis deux ans, avec une vraie volonté d’avancer, que je tiens à saluer. Mais dans le plan Loup, il est indiqué que l’objectif est une progression du nombre de loups, non une stabilisation. Cela me pose problème, car on me dirait qu’il faut faire des prélèvements pour essayer de stabiliser la proportion de loups, je pourrais le comprendre et l’expliquer à mes éleveurs. En revanche, dire que le nombre de loups doit continuer à croître, alors qu’ils représentent une menace mortelle pour certaines exploitations agricoles, je ne peux pas endosser cette responsabilité.

Voilà pourquoi je tiens à défendre les amendements qui vont suivre. C’est un vrai problème qui, aujourd’hui, est localisé, mais qui préfigure un problème plus général, à savoir la prolifération de la faune sauvage dans des endroits où l’agriculture est en déclin. Cela va poser de plus en plus de problèmes de coexistence entre les ruraux et cette faune sauvage.

J’espère, chers collègues, que vous porterez un regard très attentif sur ces sujets qui sont, chez nous, une question de vie ou de mort pour l’élevage, à l’horizon des quinze ou vingt prochaines années. Je parle, bien sûr, des régions que je connais. Chaque contrée voit midi à sa porte…

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