Intervention de André Schneider

Séance en hémicycle du 12 novembre 2012 à 16h00
Projet de loi de finances pour 2013 — Mission aide publique au développement

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Schneider :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, certains pourraient penser qu'il faut réduire les crédits de la mission « Aide publique au développement » au bénéfice d'autres secteurs. Mais il est indispensable que nous ayons une vision à moyen terme, voire à long terme. La situation instable des pays du Maghreb à la sortie du « printemps arabe », par exemple, ou encore celle, délicate, du Sahel, et plus particulièrement du Mali, pour ne citer que ces zones géographiques, nécessitent de notre part une très grande attention et une grande vigilance.

L'expression de notre solidarité est non seulement un instrument d'influence mais également une contribution au maintien d'un environnement plus sûr pour la France. Nous devons aussi avoir une vision planétaire, aujourd'hui, dans le cadre de la mondialisation, donc être prêts, c'est-à-dire avoir des moyens suffisants pour intervenir dans tous les secteurs menacés dans le monde.

Monsieur le ministre, vous affichez d'excellentes intentions. Vous venez de le rappeler, vous avez lancé, le 5 novembre dernier, les assises du développement et de la solidarité internationale, auxquelles j'aurai d'ailleurs l'honneur de participer. Monsieur le ministre, c'est une excellente initiative.

Malheureusement, votre projet de budget manque un peu de lisibilité. Il ne nous apporte pas une vue d'ensemble de l'aide publique française au développement. En clair, nous examinons cet après-midi un budget d'un peu moins de 3,15 milliards d'euros sur une aide totale de plus de 9 milliards d'euros, parce que pas moins de huit ministères y concourent – vous l'avez dit vous-même.

Monsieur le ministre, il est important pour nous d'avoir une vision d'ensemble de cette politique publique. Il est cependant peu probable que la France réalise en 2015 l'objectif de consacrer 0,7 % de son revenu national brut à l'aide publique au développement. Un rapport de la Cour des comptes précise d'ailleurs que pour atteindre cet objectif, il serait nécessaire d'augmenter le montant de l'aide de près de 9 milliards d'euros, soit une progression annuelle de 20 % pendant quatre ans. Cela ne paraît pas réalisable dans le contexte de crise économique que nous connaissons. Dans ces conditions, il nous est difficile de remplir notre rôle de contrôle de cette politique.

Je dirai quelques mots de la taxe française sur les transactions financières, que vous avez également évoquée. En septembre, à New York, le Président de la République a précisé que « la France a pris l'engagement de reverser une partie des produits de cette taxe, au moins 10 %, pour le développement et pour la lutte contre les fléaux sanitaires et les pandémies ». Le 29 octobre dernier, à l'OCDE, il a promis aux chefs des organisations économiques internationales un effort considérable dans ce domaine.

Quelle est la réalité aujourd'hui ? Un « effort considérable », pour le Président de la République, c'est 3,75 % des revenus de cette taxe pour l'année en cours ! Cela représente 60 millions d'euros, alors que le budget de la mission « Aide publique au développement » baisse de plus de 197 millions d'euros. Je reviendrai sur ce point, car vous venez de l'évoquer. Tel qu'il est présenté, le dispositif prévoit une affectation progressive du produit de la taxe, dont la part consacrée à l'aide au développement n'atteindra 10 % qu'à échéance de trois ans.

Revenons aux crédits alloués à cette mission : 1,16 milliard d'euros en crédits de paiements est affecté au programme 110, ce qui équivaut à une baisse de 2,5 %. Quant au programme 209, c'est 1,96 milliard d'euros qui lui est attribué, ce qui représente une baisse de 7,8 %. On observe ainsi que le projet de budget pour 2013 prévoit bien une diminution des crédits de 197 millions d'euros. Vous avez dit que cette baisse sera par ailleurs compensée par l'affectation d'une partie du produit de la taxe sur les transactions financières ; pour l'instant, on est très loin du compte ! De plus, selon les prévisions du budget triennal 2013-2015, les crédits devraient encore diminuer au cours des deux prochaines années. On observe, par exemple, que les subventions bilatérales prévues pour les dix-sept pays prioritaires sont en baisse de 3,5 %. Quasiment toutes les actions de cette mission voient leurs crédits diminués, sauf l'action 2 du programme 110.

Monsieur le ministre, la France est au quatrième rang des donateurs de l'OCDE. Elle doit y rester ! Je suis conscient que de nombreux défis nous attendent. Nous devons réduire les frais administratifs, simplifier l'organisation du réseau français d'aide et revoir le système d'évaluation de l'aide.

Toujours selon la Cour des comptes, la France, comme d'autres grands donateurs, pourrait privilégier l'aide multilatérale en s'impliquant plus activement dans les organisations concernées, en créant un jeu de réseau et en réservant ses financements bilatéraux à des projets liés à des objectifs nationaux.

Monsieur le ministre, je tiens à rappeler que malgré un contexte budgétaire contraint, le gouvernement de François Fillon avait réussi à maintenir, voire à augmenter les crédits de cette mission. De 2001 à 2011, nous sommes passés de 0,31 % à 0,46 % du RNB. Cela représente tout de même plus de 50 % d'augmentation ! Telle n'est pas l'ambition qui se dégage de votre projet de budget.

Le budget que vous proposez pour la mission « Aide publique au développement » comporte ainsi beaucoup de bonnes intentions, mais qui ne sont malheureusement pas traduites en chiffres – pour l'instant seulement, j'espère. Aussi, dans ces conditions, monsieur le ministre, vous comprendrez bien que le groupe UMP votera contre.

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