La question de la taille optimale des régions reste théorique, et le redécoupage régional ne s'imposait pas.
Tout redécoupage produit des insatisfactions et tel devait déjà être le cas lors de la réalisation du tracé des régions en 1972. En 1960, le Gouvernement avait souhaité fusionner la Bourgogne et la Franche-Comté, mais Michel Debré, alors Premier ministre, avait accédé à la demande de Edgar Faure de laisser ces deux entités séparées. Le redécoupage oblige à se pencher sur les pôles d'attraction principaux ; le Gouvernement a décidé d'agir par bloc – comme aurait pu le dire Georges Clemenceau dans d'autres circonstances –, c'est-à-dire que l'on procède à des fusions de régions déjà existantes. Or la cartographie proposée ne tient pas compte des flux économiques et de la vie des populations. Monsieur le rapporteur, prenez en compte les demandes des populations – celles-ci en formulent en effet, les élus n'étant pas les seuls dans ce cas contrairement au portrait trop répandu de défenseurs de leurs propres intérêts que l'on fait d'eux –, car les forces économiques, sociales et syndicales s'expriment et rejettent le redécoupage proposé.
Comme la Normandie, la Savoie a exercé une souveraineté sur la Sicile, cher Alain Tourret, et elle est la dernière province à avoir volontairement rejoint la France, en 1860. Deux conseils généraux ont incarné cette petite patrie, et cette réforme qui vise à supprimer les départements et à dessiner de grandes régions – comme l'ensemble composé de Rhône-Alpes et de l'Auvergne dont je ne perçois pas bien la cohérence – entraînera la disparition de tout centre de décision dans les pays de Savoie. Si l'on regarde les cinquante ou soixante dernières années, des initiatives conduites par des conseillers généraux ou des maires n'auraient pas été prises depuis Lyon ou Paris. Agrandir la région et éliminer les départements revêt un paradoxe, même si la reconfiguration du périmètre des départements et de la répartition des compétences entre ceux-ci, les régions et l'État s'avère nécessaire – à ce titre, je soutiens plusieurs éléments contenus dans le projet de loi sur les compétences. Les élus des deux départements savoyards se battront pour que la réforme prenne en compte la gouvernance de certains territoires spécifiques.