Intervention de Marc Dolez

Séance en hémicycle du 16 juillet 2014 à 21h30
Délimitation des régions et modification du calendrier électoral — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarc Dolez :

…après son rétablissement l’an dernier dans le cadre de la loi de modernisation de l’action publique et d’affirmation des métropoles, suppression de la clause de compétence générale qui remet en cause le grand principe de la libre administration des collectivités territoriales.

Briser la compétence générale, c’est vraiment décréter la mise sous tutelle de certaines collectivités par d’autres et réduire les financements croisés, alors que les conseils généraux et les conseils régionaux jouent actuellement un rôle essentiel dans le financement des communes, en particulier des plus petites.

Le regroupement des régions, sur lequel les projecteurs sont aujourd’hui habilement braqués, c’est en quelque sorte l’arbre qui cache la forêt.

Pour notre part, nous refusons de laisser le débat s’enliser dans la question des périmètres régionaux, car les véritables enjeux sont ailleurs.

C’est pour cette raison de fond, vous l’aurez remarqué, que notre groupe ne participe pas au grand Monopoly actuellement en cours et qui réserve chaque jour de nouvelles combinaisons. Nous en sommes déjà à la troisième carte, et ce n’est probablement pas fini.

Dans ce débat, un principe démocratique avec lequel on ne devrait pas transiger devrait être au moins respecté : pas de regroupements, pas de fusions sans débat public, pas de regroupements, pas de fusions sans consultation des habitants concernés.

Les considérations politiques, pour ne pas dire politiciennes, ressortent d’ailleurs clairement de ces différents projets de découpage élaborés à la va-vite et sans prendre le temps du dialogue avec les collectivités territoriales pour cerner les enjeux de chaque territoire.

Lors de la table ronde organisée par la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de notre assemblée, Mme Béatrice Giblin, professeure à l’Institut de géopolitique de l’université de Paris-VIII, a ainsi montré que la réforme territoriale est étroitement liée au contexte politique, pointant « les rivalités de pouvoir qui s’exercent pour le contrôle des territoires. »

De son côté, le géographe Gérard-François Dumont a souligné, d’une part, qu’aucun pays démocratique n’envisage de réduire d’un tiers le nombre de ses régions et, d’autre part, que la taille moyenne des régions françaises est supérieure à celle des Länder. Dans les pays alentours, de nombreuses régions sont plus petites que la plus petite des régions françaises, à savoir l’Alsace.

La réforme prévoit pourtant d’agrandir encore les deux régions les plus importantes, Rhône-Alpes et Midi-Pyrénées, comme si la grande taille procurait automatiquement des avantages.

M. Dumont souligne également que nombre de régions européennes sont moins peuplées que le Limousin, région française la moins peuplée, et rappelle enfin que les régions actuelles ont une identité – elles ne sont pas nées sous X – et que notre découpage régional est l’héritage d’une longue histoire, dont témoigne la dénomination des régions.

Pour le Gouvernement, la diminution du nombre de régions serait donc un facteur d’efficacité. Qu’il nous soit permis d’en douter sérieusement. En quoi de grandes régions seraient-elles nécessairement plus fortes ou plus justes ? En quoi le transfert de la gestion des routes ou des collèges aux régions les rendra-t-il plus performantes ? Le risque est grand, au contraire, de les transformer en monstres démocratiques plus éloignés des citoyens, moins efficaces et, en tout cas, moins réactifs que les départements.

En parfaite cohérence avec les positions qu’ils ont toujours défendues, les députés du Front de gauche combattent aujourd’hui une réforme territoriale qui, il faut bien le dire, va au-delà de la réforme de 2010, sous le précédent quinquennat, et à laquelle, si je me souviens bien, l’ensemble de la gauche s’était opposé.

Sous couvert de clarification, de simplification et d’économies à réaliser, le Gouvernement nous propose aujourd’hui de bouleverser l’organisation républicaine du pays. Derrière l’effacement de fait des communes, échelon de base de la démocratie locale, et la disparition programmée des départements au profit d’intercommunalités d’au moins 20 000 habitants, de métropoles et de treize ou quatorze grandes régions, se profile la privatisation rampante des services publics de proximité.

En outre, la réduction du nombre d’élus régionaux et locaux alors que les territoires seront plus grands ne peut qu’entraîner inéluctablement un éloignement des citoyens, un éloignement des préoccupations et des projets décidés démocratiquement,…

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion