Je me félicite de l'ambition forte de ce projet de loi, dont le titre est éloquent. Il promeut un changement de regard, car s'adapter au vieillissement, c'est tirer pleinement parti de la longévité en prévenant la perte d'autonomie et en améliorant globalement notre cadre de vie.
Ce projet de loi, fruit d'une longue concertation avec tous les acteurs menée avec énergie par notre collègue Michèle Delaunay, était très attendu. Aussi pouvez-vous nous préciser à grands traits, madame la secrétaire d'État, le calendrier envisagé qui nous conduira à la promulgation de la loi et à sa mise en application ?
On sait que le produit de la CASA va financer de manière pérenne les mesures du projet de loi en matière d'APA à domicile, d'accès aux aides techniques, et de développement des résidences autonomie. Mais compte tenu des différents paliers d'entrée en vigueur, quelle sera l'utilisation du solde pendant la phase intermédiaire ?
Le projet de loi affirme, pour la première fois, le droit de toute personne âgée qui bénéficie d'une aide publique au respect de son projet de vie : le libre choix entre domicile et établissement est donc consacré. Il se fonde sur une évaluation multidimensionnelle de la situation et des besoins, dans le cadre de l'APA, pour mieux prendre en compte l'environnement de vie et la contribution des proches aidants, également reconnus pour la première fois.
De même, le projet de loi consacre la liberté d'aller et venir en établissement et encadre strictement les restrictions qui y sont apportées pour les personnes les plus fragiles. Dans ce domaine, à la frontière du droit de la protection des majeurs, il sera sans doute nécessaire d'apporter des précisions. Pouvez-vous nous indiquer vos intentions à cet égard ?
Concernant l'APA, je me félicite que soient écartées les approches restrictives consistant, par exemple, à réserver l'allocation aux plus fortes pertes d'autonomie, les GIR 1 à 3. Une telle mesure était préconisée dans le cadre de travaux précédents, mais elle allait à l'encontre de l'objectif de prévention. Apporter les aides de manière précoce, c'est en effet prévenir le mauvais vieillissement. À rebours de ces approches, vous nous présentez donc une amélioration de l'APA particulièrement significative dans le contexte budgétaire.
Pouvez-vous préciser les modifications apportées aux plans d'aide de l'APA, en particulier pour les personnes dont les revenus sont les plus modestes et les plans d'aide les plus lourds ? Comment envisagez-vous de réduire la disparité des pratiques de définition des plans ou d'évaluation de la perte d'autonomie selon les départements ?
Le projet de loi d'orientation se fixe comme objectif de permettre à la personne de résider le plus longtemps possible dans un domicile adapté. Aussi convient-il d'améliorer la cohérence entre les services d'aide et d'accompagnement à domicile et les établissements.
La réduction des inégalités d'accès aux aides humaines peut être un des grands marqueurs de cette réforme. Le projet de loi définit de nouveaux contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens pour les services d'aide et d'accompagnement à domicile. Pouvez-vous en préciser les effets attendus ?
De nombreuses interrogations persistent concernant les services à domicile qui font l'objet d'un simple agrément qualité par l'État : ils ont parfois contribué à faire baisser la tarification appliquée par les conseils généraux aux services autorisés, souvent bien en dessous des coûts occasionnés par l'intervention de personnels convenablement formés et expérimentés.
Si l'apparition de nouveaux intervenants privés répond aux principes de la liberté d'entreprise, une meilleure régulation est manifestement nécessaire. Pouvez-vous préciser les effets attendus du projet de loi pour pérenniser l'action du monde associatif et permettre à tous les services d'aide et d'accompagnement à domicile de répondre à une demande qui va croître dans les années à venir ?
Des expérimentations sont prévues, mais quelle sera l'étape suivante ? Faut-il d'ores et déjà définir un nouveau modèle d'ensemble ?
La question de la gouvernance me paraît donc cruciale. Il faut développer des politiques d'ensemble de la vieillesse comme il existe des politiques d'ensemble de la jeunesse. En matière de jeunesse, on mobilise différents acteurs pour accompagner et faciliter l'acquisition de l'autonomie ; en matière de vieillesse, il faut parvenir à faire de même pour préserver le capital d'autonomie, en prévenir puis en compenser la perte.
En ce qui concerne la gouvernance nationale des politiques de l'autonomie, je me félicite de la création du Haut Conseil de l'âge. Cette instance n'a-t-elle pas vocation à être rapprochée d'autres instances placées auprès du Premier ministre dans tous les domaines qui touchent la famille ?
Je me félicite également de la volonté du Gouvernement de développer les fonctions de coordination et d'animation de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie. La CNSA est devenue en quelques années une instance reconnue et crédible : lui confier de nouvelles compétences en termes de prévention, d'appui méthodologique ou encore d'information du public, va asseoir sa légitimité. Cela améliorera la coordination et le pilotage des politiques de l'autonomie au niveau national.
Cette remarque me conduit néanmoins à vous faire part de mes interrogations relatives à la gouvernance locale des politiques de l'autonomie.
L'avant-projet de loi examiné par le Conseil économique, social et environnemental consacrait de nouvelles instances de gouvernance au niveau local. Or elles ne figurent plus dans le projet de loi.
La conférence des financeurs dans le domaine de la prévention de la perte d'autonomie constitue une avancée majeure pour coordonner les financeurs locaux, l'Agence nationale d'amélioration de l'habitat, l'action sociale des caisses de retraite et des complémentaires. Pour autant, nous sommes nombreux à considérer que les outils de gouvernance locale pourraient être refondus au niveau du département. Quelles sont vos intentions au regard du projet de loi de réforme territoriale ? Peut-on généraliser les maisons départementales de l'autonomie (MDA), qui existent déjà dans certains départements ?
Comment réunir dans une même enceinte l'ensemble des acteurs concernés par la perte d'autonomie sur un territoire – financeurs, associations de personnes âgées, familles, professionnels ?
Enfin, ce projet de loi d'orientation fait de l'adaptation de la société au vieillissement une priorité de l'ensemble des politiques publiques. Cet objectif, nous ne le perdrons pas de vue lors de l'examen des textes à venir. Pouvez-vous préciser l'articulation avec le projet de loi de santé publique ? Allez-vous contribuer à enrichir l'avant-projet de loi de santé parallèlement à l'examen du projet de loi d'adaptation de la société au vieillissement ?
Je finirai par une dernière interrogation plus technique. L'article 55 du projet de loi prévoit d'habiliter le Gouvernement à réformer par ordonnances l'organisation du contentieux de l'aide sociale. Compte tenu de la complexité du sujet, nous comprenons cette demande, mais il me semblerait utile que vous nous précisiez les intentions du Gouvernement.