Intervention de Marc Le Fur

Séance en hémicycle du 17 juillet 2014 à 15h00
Délimitation des régions et modification du calendrier électoral — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarc Le Fur :

C’est une critique classique ; nous l’avons rencontrée lors des débats sur les langues régionales. Je suis très à l’aise pour répondre à ces critiques, car la Bretagne n’a rien à prouver : 250 000 Bretons se sont sacrifiés – ou plutôt ont été sacrifiés – durant la guerre de 14-18 ! Certains pseudo-historiens révisionnistes contestent ce chiffre, comme pour nier la participation de notre région à l’effort national. En 1940, autour du général de Gaulle, les Bretons étaient d’autant plus remarqués qu’il n’y avait pas grand monde avec lui.

Le Général de Gaulle n’a-t-il pas dit, le 2 février 1969, à Quimper : « Nulle part, on ne fut, plus qu’ici, fidèle à la patrie […] quand, au cours de la Grande guerre, la Bretagne sacrifiait, par rapport à sa population, un pourcentage de soldats très supérieur à la terrible moyenne française ; ou quand, pendant la Résistance, elle menait plus vaillamment que partout ailleurs le combat contre l’occupant » ?

Nous sommes Bretons, Français, Européens, sans que chacune de ces appartenances soit en contradiction avec les autres. Il n’y a que les jacobins pour trouver des contradictions là où il n’y a que des enrichissements.

L’identité régionale ne constitue une menace que lorsqu’elle est niée, méprisée, amputée ou salie. À cet égard, des projets comme le vôtre, niant des évidences comme l’appartenance de Nantes à la Bretagne, présente le risque de justifier bien des dérives !

Quarante-cinq ans après le discours du général de Gaulle, saisissons la chance qui nous est offerte de laisser vivre les vraies régions françaises, celles qui suscitent l’adhésion de nos concitoyens, celles pour lesquelles ils sont prêts à donner le meilleur d’eux-mêmes, qu’ils soient originaires de ces régions ou qu’ils les aient choisies.

À l’égard des régions, le Gouvernement cédera-t-il à la méfiance et à la suspicion qui caractérisent le jacobinisme ou, au contraire, notre assemblée fera-t-elle confiance aux régions pour mieux rajeunir et réformer le pays ?

Le débat que nous menons n’est pas un débat technique. Il ne s’agit pas d’optimiser le fonctionnement d’une entreprise. Le débat que nous menons touche à l’essentiel, à la démocratie, à l’identité et à l’enracinement.

Permettez-moi d’évoquer Simone Weil, la grande Simone Weil qui, à Londres, en 1943, quelques mois avant le terme de son existence, a rédigé L’Enracinement, qui est son testament à la fois personnel et politique. Elle écrit ceci : « L’enracinement est peut-être le besoin le plus important et le plus méconnu de l’âme humaine. C’est l’un des plus difficiles à définir. Un être humain a une racine par sa participation réelle, active et naturelle à l’existence d’une collectivité qui conserve vivants certains trésors du passé et certains pressentiments d’avenir. »

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