Séance en hémicycle du 17 juillet 2014 à 15h00

Résumé de la séance

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La séance

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La séance est ouverte à quinze heures.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral (nos 2100, 2120, 2106).

Ce matin, l’Assemblée a continué d’entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale. Le temps de parole restant pour la discussion de ce texte est de sept heures et cinquante minutes pour le groupe SRC, onze heures pour le groupe UMP, deux heures et cinquante-six minutes pour le groupe UDI, une heure et trente-six minutes pour le groupe écologiste, une heure et seize minutes pour le groupe RRDP, une heure et vingt minutes pour le groupe GDR et trente et une minutes pour les députés non inscrits.

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Madame la présidente, monsieur le ministre de l’intérieur, monsieur le président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, monsieur le rapporteur, chers collègues, nous avons de la chance de participer à ce débat extrêmement intéressant, important et structurant, puisqu’il est question de préfigurer ce que pourrait être notre modèle d’organisation, notre carte territoriale, et probablement aussi, comme certains l’ont dit, l’organisation de notre État pour les années à venir. En ce début de nouveau siècle, marqué par la mondialisation et par les mutations de notre environnement, de nos comportements et de nos technologies, une réorganisation s’impose en effet.

La question qui transcende ce débat est celle de savoir quel modèle d’organisation nous voulons. Si le sujet est important, la question, elle, est mal posée, car on a l’impression, en lisant le projet de loi, que c’est la carte qui va faire le territoire, alors que – nous sommes plusieurs à le croire – c’est plutôt le territoire qui fait la carte. Vous attendez tout d’une nouvelle carte, alors qu’il faudrait commencer par regarder comment les gens vivent et aspirent à vivre, et comment nos territoires s’articulent avec un monde qui change. Plutôt que de construire une carte et d’y faire entrer nos territoires, il vaudrait mieux partir de l’observation des évolutions du monde pour dessiner les territoires tels qu’ils se profilent, et tels que les gens aspirent à y vivre.

Applaudissements sur les bancs du groupe UDI et sur quelques bancs du groupe UMP.

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Ce texte, selon moi, fait l’impasse sur trois questions essentielles.

La première est celle de la bonne échelle de proximité. Que signifie la proximité ? À quels territoires les gens sont-ils attachés ? Où vivent-ils et comment aspirent-ils à développer cette proximité ?

La deuxième question, qui est sous-jacente et qui transcende nos débats, est celle de l’échelle du développement. Quelle est l’échelle qui permettra à nos territoires de s’insérer, d’être compétitifs et efficaces dans un monde qui change ? Quels sont ces territoires connectés au monde que tous aspirent à dessiner ?

La troisième question, qui transcende elle aussi nos débats, et qui n’est pas éclaircie, est celle du rôle de l’État dans tout cela.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, si nous ne posons pas à ces questions de l’échelle de proximité, de l’échelle de développement et du rôle de l’État, nous risquons de débattre pendant des heures, des jours, voire des mois, sans jamais aboutir à autre chose qu’à une carte, dont nous sommes plusieurs ici à penser qu’elle ne résoudra pas le problème.

Examinons en détail ces trois questions, et d’abord celle de l’échelle de proximité, que le Gouvernement a tort de ne pas aborder dans ce texte. L’échelle de proximité, est-ce le département, et donc le conseil général ? Ou bien est-ce une intercommunalité de 20 000 habitants ? Quelle est l’échelle de proximité ? Quel est le lieu où vivent les Français ? Il me semble, en examinant la carte de France et la manière dont les gens vivent, que l’échelle de proximité, ce sont ces 300 à 400 villes moyennes qui ont une histoire, un héritage et des équipements publics structurés. Celles-ci constituent, à ce titre, le substrat extrêmement organisé sur lequel la France s’est construite, prospère et se développe, et elles suscitent un attachement très fort. On est de Saintonge, comme on est du pays du Charolais ou du pays de Cornouailles. On est proche d’une ville moyenne qui structure notre vie au quotidien, parce que c’est là que les enfants vont à l’école, c’est là que l’on trouve un hôpital, c’est là que l’on trouve une crèche et un certain nombre d’autres services publics. Ce réseau des villes moyennes pourrait, selon moi, être l’échelle à partir de laquelle structurer et construire une perspective de réforme et d’aménagement du territoire.

Partant de là, l’échelle de développement la plus pertinente est probablement l’échelle régionale. Mais il faut alors se demander quelle est la bonne échelle régionale, et cela n’a pas vraiment été fait dans le texte, ce qui rend le débat un peu confus. Quelle est la bonne échelle pour structurer les régions de demain ?

Trois critères mériteraient, selon moi, de s’inviter davantage dans le débat. Le premier consiste à veiller à ce que chaque région soit animée et irriguée par une métropole. Je vous rappelle, à ce propos, que le Commissariat général à la stratégie et à la prospective, France Stratégie, préconise que soient d’emblée constitués des binômes associant une région et une métropole, capables de dessiner une perspective de croissancLe deuxième critère qui devrait présider au débat sur les délimitations régionales est celui, un peu flou, de la taille critique des régions. Si l’exposé des motifs du projet de loi évoque bien la nécessité d’une taille critique, qui serait capable de dire si cette taille s’établit à 2, 3, 4, 5 ou 6 millions d’habitants ? Lors de la présentation du texte, vous avez indiqué, monsieur le ministre, que ces régions devaient être en mesure de financer des infrastructures. Je vous invite donc à évaluer, en tenant compte du niveau d’épargne des Français, la taille critique qui permettra de reterritorialiser cette épargne et de créer une boucle locale de financement capable d’irriguer les infrastructures et les tissus d’entreprises régionales. Or, avec une épargne moyenne de 16 % en France, le seuil critique pour reterritorialiser des boucles locales de financement et le financement des infrastructures doit se situer, non pas à 3 ou 4 millions, mais plutôt entre 5 et 7 millions d’habitants.

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La question du seuil critique mériterait donc d’être posée à l’aune de critères fiables, comme celui du financement des entreprises et des infrastructures, que vous avez vous-même évoqué, monsieur le ministre.

Le troisième critère qu’il conviendrait d’introduire est celui de l’industrialisation. On entend souvent dire que celle-ci est l’un des grands combats de votre Gouvernement, et le ministre du redressement productif nous le rappelait encore il y a peu. Pour aborder correctement la question de l’industrialisation, il est nécessaire de comprendre le système des chaînes de valeur, de la conteneurisation et de la massification des flux, qui fait que tous nos territoires devraient par exemple être irrigués par l’hinterland des grands ports maritimes français. Si nous ne veillons pas, au moment de dessiner la carte des régions, à ce que tous nos territoires soient situés dans la zone d’influence d’un grand port maritime – et nous avons en la matière des atouts considérables – nous prenons le risque d’aménager le territoire d’une manière complètement décalée par rapport à cette perspective de réindustrialisation. La carte qui nous a été fournie est extrêmement loin de prendre en compte le critère métropolitain et celui d’aménagement du territoire, et relativement loin de prendre en considération celui de la taille critique.

Je veux, avant de conclure, évoquer une autre question qui reste en suspens, celle du rôle de l’État. Ce qui est perturbant dans votre manière de présenter les choses, c’est que vous nous dites que vous allez supprimer les départements, et donc les conseils généraux, mais que vous allez dans le même temps réinstaller une fonction de l’État dans les départements. En remplaçant, comme vous semblez vouloir le faire, les conseils généraux par des super-préfectures, ne risquez-vous pas d’engager un mouvement de recentralisation, que certains évoquent déjà, au détriment de la démocratie et des élus locaux ?

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À partir du moment où nous définissons de nouvelles échelles, une échelle de proximité, d’une part, et une échelle de développement, l’échelle régionale, d’autre part, on serait bien inspiré de mettre, en face de ces échelles, des représentants de l’État. Il s’agit non pas de favoriser la redondance des politiques publiques, que je suis le premier à déplorer, mais de développer la contractualisation. Si nous installions demain le réseau de proximité autour des villes moyennes, peut-être faudrait-il alors, plutôt que supprimer les sous-préfectures, transformer celles-ci en préfectures, et favoriser la contractualisation entre nos villes moyennes et les arrondissements de l’État, de manière à optimiser nos politiques publiques et à mettre en oeuvre, dans le cadre de contrats de plan extrêmement modernes, un partenariat entre l’État et les grandes régions, pour aboutir à des politiques de développement communes, ambitieuses et largement décentralisées.

Aussi longtemps que la question de la proximité ne sera pas résolue, que celle de la taille et de l’intelligence des régions dont nous avons besoin ne fera pas l’objet de critères fiables et que le rôle de l’État n’aura pas été clairement défini, il sera selon moi extrêmement difficile de dessiner une carte des régions. Je regrette que nous ne soyons pas en mesure de partir des territoires, des flux qui les traversent et des réalités de la vie quotidienne pour dessiner une nouvelle carte.

Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, de nombreux intervenants ont souligné l’importance de ce texte. Nous ne sommes pas moins de soixante-dix-huit inscrits dans la discussion générale, ce qui est un record pour cette législature. C’est le signe que le débat a bien lieu dans cet hémicycle : il y est le bienvenu et il se justifiait. Comment pourrait-il en être autrement ? Nous avons en effet de la chance de débattre, comme vient de le dire M. Fromantin, puisque c’est de la France qu’il est question, de ses régions, de ses territoires, et d’abord, bien évidemment, de ses habitants.

Je voudrais m’attacher au fond, avant d’aborder avec précision les cartes proposées pour mon territoire. Le sujet de la réforme territoriale, à condition d’exclure les postures politiciennes, est intéressant, car il soulève deux types de questions : celles dont on ne veut pas voir la réponse, et celles qui révèlent les nombreuses rigidités qui figent aujourd’hui notre pays dans l’inaction et finissent par le scléroser.

Il est heureux que l’on ait à débattre de nos territoires et de nos régions quand, il n’y a pas si longtemps, on se battait tout court. Les historiens et les géographes, depuis des siècles, nous en font le récit : l’histoire de l’évolution des territoires a longtemps été celle des conflits et des guerres. Plutôt que d’être dans la critique permanente, nous pouvons nous féliciter que notre République puisse délibérer sur la légitime proposition du Président de la République lorsque, à nos portes, la même question fait résonner le bruit des bottes et des armes. Certes, comparaison n’est pas raison, mais mesurons la chance que nous avons !

Chacun doit garder à l’esprit ces faits, tout comme les évidences qui montrent qu’il est nécessaire d’entreprendre cette réforme, pour plus de clarté et de lisibilité dans l’organisation des collectivités et l’aménagement de nos territoires. Il s’agit d’une étape obligée vers le redressement de notre économie. Oui, il faut créer des régions stratèges, mais il faut aussi maintenir la démocratie locale, la proximité avec nos citoyens, et prendre en compte la ruralité.

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Ce sont les conditions majeures pour réussir cette réforme et permettre à notre pays de relever les défis qui se présentent à lui.

Mais ces débats exigent aussi objectivité et rationalité, sous peine de dévoiler les raisons personnelles, les petits égoïsmes électoralistes et les arrangements entre amis qui déconsidèrent le politique.

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C’est sur la base du développement économique que, député de l’Aisne, élu de l’actuelle Picardie, je défends depuis le début le projet de fusion des régions Picardie et Champagne-Ardenne. Pour des raisons de cohérence économique, historique, culturelle et géographique, je suis aussi favorable à une fusion avec la région Lorraine.

Cette proposition s’appuie sur des analyses rationnelles. Le président du conseil régional de Champagne-Ardenne nous a présenté un projet cohérent en matière de développement économique et d’aménagement du territoire, qui s’appuie sur des éléments précis. La Picardie et la Lorraine ont développé depuis longtemps des coopérations importantes dans le domaine économique avec la Champagne-Ardenne, qui en était le trait d’union. Ces régions ont des indicateurs démographiques et géographiques très proches, et sont économiquement complémentaires. Elles comptent 5,5 millions d’habitants en tout et revendiquent un PIB de 140 milliards.

Nos liens historiques sont évidents. Les trois régions marquaient la ligne de front lors de la Première Guerre mondiale : bataille de la Somme, chemin des Dames, Reims – ville martyre, qui a vu sa cathédrale incendiée – bataille de la Marne, bataille de Verdun.

Nous partageons aussi un réseau d’autoroutes parfaitement connectées, le neuvième aéroport de France, à Beauvais, avec près de 4 millions de passagers par an, et un aéroport de fret en devenir, Paris-Vatry.

Cet arc Nord-Est est également l’opportunité d’affirmer notre puissance agricole et de nous inscrire dans les filières d’avenir, comme la chimie verte. Il deviendrait ainsi le premier territoire européen de production agricole et de transformation agroalimentaire, et un territoire de production des éco-matériaux industriels de demain. En totalisant près de 50 % de la production éolienne française, nous deviendrions un territoire pilote de la transition énergétique. Nous développons aussi des projets d’économie circulaire, sociale et solidaire qui nous sont communs.

Ce regroupement rendrait son unité au vignoble de Champagne. Le secteur vinicole, créateur de valeur ajoutée, représente un poids économique considérable de 4 milliards d’euros de chiffre d’affaires, dont plus de 2 milliards à l’exportation. Par ailleurs, pour la formation de nos étudiants, beaucoup d’indicateurs plaident en faveur de la fusion.

Point important, cette nouvelle région serait un pôle d’équilibre entre l’Ile-de-France et les pays du nord de l’Europe, un espace de forte attractivité entre le Benelux et Paris.

L’arc Nord-Est, en s’appuyant sur des métropoles de taille humaine, nous préserverait de l’appauvrissement des villes moyennes – Saint-Quentin, Laon, Chaumont, Troyes, Saint-Dizier – et des zones rurales. Souhaitons-nous être aspirés par Paris, Lille, ou Strasbourg, ou construire une région multipolaire de coopération interurbaine et rurale ? Voilà aussi l’intérêt de ce regroupement.

Monsieur le ministre, vous avez évoqué les pôles de compétitivité, l’innovation et la recherche, créateurs d’emplois, et dit, non sans raison, qu’il fallait conforter ces atouts en rassemblant les régions qui partagent cette dynamique. Savez-vous que le projet de rapprochement entre la Picardie, la Champagne-Ardenne et la Lorraine s’est fait en ce sens, et qu’il rassemble cinq pôles de compétitivité ? Son abandon remettrait en cause la compétitivité et l’innovation de ces territoires.

Ensemble, la Picardie, la Champagne-Ardenne et la Lorraine pourraient aller de l’avant. Complémentaires, ce qui les rassemble est bien plus important que ce qui les sépare. J’en suis convaincu et c’est la raison pour laquelle je défendrai l’amendement qui prône leur rapprochement.

Celui-ci repose sur des faits historiques, des analyses et des critères socio-économiques qui prouvent la pertinence du projet initial. Mais, je le sais bien, la carte idéale n’existe pas ! Quelle que soit la carte, le sort des frontières et des franges fera toujours débat. Je comprends que certains d’entre nous ne s’y retrouvent pas, et je comprends la position des députés de la Somme, qui est peut-être aussi celle des députés de l’Oise et du nord de l’Aisne, quoique Jean-Pierre Balligand, ancien député, était favorable au rapprochement avec Reims.

J’aimerais savoir, monsieur le ministre et monsieur le rapporteur, sur quelles bases socio-économiques et sur quel projet vous vous appuyez pour proposer un rapprochement entre la Picardie et le Nord-Pas-de-Calais ? Quelles sont les études, les analyses qui vous ont fait aboutir à cette proposition ? Je reconnais que le travail effectué avec le groupe socialiste a permis de donner plus de cohérence à la copie présidentielle, en proposant par exemple une région qui regrouperait l’Aquitaine, le Poitou-Charentes et le Limousin. Vous avez su rassembler une majorité de députés socialistes sur cette carte.

Mais, monsieur le rapporteur, il n’y a pas d’unanimité ou de consensus sur le rapprochement entre la Picardie et le Nord-Pas-de-Calais ! D’autres parlementaires se sont exprimés contre ce projet. Je ne veux pas croire que seul le rapport de force majoritaire puisse compter en politique : comme vous le savez, au pays de Jean de La Fontaine, la raison du plus fort n’est pas toujours la meilleure.

Le compte n’y est pas pour la Picardie, particulièrement pour le département de l’Aisne. Ce n’est pas seulement le député de la cinquième circonscription de l’Aisne qui vous le dit ; c’est aussi un grand nombre d’élus du Nord, pour qui l’union de ces deux régions est une aberration économique et sociale – je ne m’étendrai pas sur les commentaires qui ont été faits.

Au-delà de l’aspect économique, permettez-moi quelques rappels géographiques, à l’intention, d’abord, de nos collègues UMP qui sont intervenus hier : la Picardie, ce n’est pas seulement le département de la Somme ; elle comprend aussi l’Oise et l’Aisne ! On nous dit : « Vous allez parler ch’ti ! ». Eh bien, quand j’ai quitté Château-Thierry hier, on n’y parlait ni ch’ti ni picard !

Sourires.

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On y parlait le castelthéodoricien et le langage de Jean de La Fontaine !

Le département de l’Oise est peut-être plus intéressé par un rapprochement avec l’Ile-de-France, tout comme le département de l’Aisne, dans sa globalité, peut être intéressé par la Champagne. Je le dis avec force : le château de Château-Thierry a été construit par Thibaut IV le Grand, comte de Champagne !

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Rapprocher la Picardie de la région Nord-Pas-de-Calais reviendrait à tourner le dos à l’avenir et au développement économique. L’AOC Champagne resterait morcelée ; certes, une AOC ne fait pas une région, mais lorsque l’on a la chance d’en avoir une comme celle-ci, on doit essayer de privilégier cet atout économique. Rapprocher la Picardie de la région Nord-Pas-de-Calais, ce serait aussi ignorer les habitants du département de l’Aisne, rassemblés au sein du G10, le groupement des dix villes autour de Reims.

Cette partie de ping-pong avec la troisième proposition de rassemblement pour la région Picardie nous interpelle ; elle ne correspond pas aux attentes des habitants. Ce petit jeu nous interpelle d’autant plus que nos concitoyens, scrutin après scrutin, rejettent de la façon la plus extrême cette façon de procéder. Il est donc urgent de revenir à l’esprit de la réforme, qui est de renforcer l’efficacité de nos territoires.

La diversité des départements de Picardie provoque, de fait, l’éclatement de la région. Pour que l’Aisne puisse rejoindre la Champagne-Ardenne, comme l’a dit avec pertinence le président Roger-Gérard Schwartzenberg, je soutiendrai les amendements sur le droit d’option. Tel qu’il est conçu, avec la règle de majorité, ce droit d’option ne pourra jamais être mis en oeuvre et sera inopérant. Comme l’a proposé le Sénat, il faut prévoir des règles sans majorité particulière.

Oui, je soutiendrai le rapprochement du département de l’Aisne avec son territoire naturel, à savoir la Marne et les Ardennes. Jean de la Fontaine, fabuliste de Château-Thierry, ne disait-il pas qu’il était « un homme de Champagne » ? Au cas où vous ne l’auriez pas compris, notre identité historique, c’est la Champagne.

Comme l’ont rappelé certains des intervenants ce matin, ce sentiment d’appartenance est, en partie, la clef de l’appropriation de cette carte par nos concitoyens. Depuis dix ans, un travail de rapprochement est à l’oeuvre, qui a pour perspective la constitution d’un pôle métropolitain autour de Reims et associe, pour l’Aisne, les territoires et les villes de Château-Thierry, Soissons et Laon. Nos habitants fréquentent les lieux culturels, se soignent et vont étudier à Reims.

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Nos collectivités ont délibéré contre le rapprochement entre la Picardie et le Nord-Pas-de-Calais. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, vous avez déclaré être à l’écoute et souhaiter des améliorations de cette carte ; je compte sur vous, il est encore temps !

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RRDP.

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« Selon moi, la vraie question qui se pose aux régions françaises est leur taille insuffisante, qui ne leur permet pas d’affronter en position de force la concurrence avec leurs partenaires européens. Elles ne peuvent pas non plus s’appuyer sur de grandes métropoles leur permettant de se développer. Il me semble donc essentiel de faire émerger des régions puissantes et articulées sur l’Europe. » Vous ne m’en voudrez pas d’avoir emprunté, en introduction de mon propos, les paroles prononcées par Pierre Mauroy en mars 2010.

Notre pays doit avancer. Il a l’obligation de se réformer, car un pays qui ne se réforme pas est voué au déclin. C’est le défi qui se présente à nous et que nous devons relever, ce qui exige de l’ambition, de la détermination, et parfois des sacrifices.

La réforme territoriale est nécessaire au bon fonctionnement et à la compétitivité de notre pays. La décentralisation initiée par François Mitterrand et Pierre Mauroy, qui surent faire preuve de courage et d’audace, constitue une avancée fondamentale pour notre démocratie et la proximité avec nos concitoyens. Les collectivités locales répondent au quotidien aux besoins de leurs administrés et les élus locaux, premier maillon pour entendre leurs difficultés, sont chaque jour à leur écoute. Ces collectivités participent au dynamisme de notre économie en investissant massivement dans des projets d’infrastructures, des projets sociaux, sportifs, éducatifs ou encore culturels.

Nul ne niera cependant que la décentralisation a complexifié les choses et que les doublons, les guichets multiples et les compétences partagées sont à l’origine d’un manque global de lisibilité et d’une coordination parfois difficile. C’est pourquoi cette réforme est attendue par les Français.

Nous nous devons d’agir maintenant pour que nos territoires soient plus compétitifs en Europe et dans le monde. Il nous faut renforcer leur capacité économique, encourager le développement de nouvelles filières, notamment environnementales, mieux coordonner leurs universités, mutualiser leurs politiques publiques, et mener de grands chantiers en commun.

Nous devons transcender les intérêts personnels, les ego et les clivages partisans. Laissons de côté les visions – ou visées à court terme – : nous construisons la France de demain. Comment nos concitoyens pourraient-ils comprendre que nous réfléchissions sur la base d’arguments politiciens, lorsque nous débattons de ce qui va profondément affecter leur quotidien ?

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Alors que nous célébrons le centenaire de la mort de Jaurès, comment nos concitoyens pourraient-ils comprendre que des élus puissent rejeter leurs voisins au motif qu’ils seraient trop pauvres ?

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C’est à Martine Aubry qu’il faut le dire !

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Comment nos concitoyens pourraient-ils comprendre que nous allions à l’encontre de leur sentiment profond et de leur désir de vivre et de travailler ensemble ? Mes chers collègues, nous construisons la France de demain et nous n’avons pas le choix : il faut nous rassembler et favoriser le mouvement. Comme l’écrivait Antoine de Saint-Exupéry : « Dans la vie, il n’y a pas de solutions. Il y a des forces en marche : il faut les créer, et les solutions suivent. »

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, ce projet de loi, qui prévoit d’abaisser le nombre de régions de vingt-deux à treize et de supprimer les conseils généraux à l’horizon 2020, est loin de recueillir l’approbation des élus, tous bords confondus, et de l’ensemble du peuple de France. L’élue de montagne que je suis considère que ce texte risque de gommer tout ce qui fait notre identité et notre spécificité, dans mon département, la Haute-Savoie, comme dans tous les autres massifs.

S’il est une réforme qui nécessite une adhésion pleine et entière des populations, c’est bien celle de l’organisation de nos territoires. Or, tant sur la méthode que sur le fond, ce projet de loi révèle l’embarras, l’ambiguïté et l’approximation qui caractérisent la politique gouvernementale.

Sur la méthode, tout le monde s’accorde à dire qu’il faut réformer notre millefeuille territorial. Nous avions proposé la création du conseiller territorial, qui aurait permis de diviser par deux le nombre d’élus. Mais cette réforme a été abrogée par la majorité actuelle dès son arrivée au pouvoir. Le Président de la République, François Hollande, a alors proposé, en l’absence totale de concertation, une carte des régions qui prévoit, en ce qui concerne mon département d’élection, la fusion de l’Auvergne et de Rhône-Alpes. Mais comment peut-on décider seul, depuis l’Élysée, du sort de plus de 7 millions de Rhônalpins ? Sur quels critères le Président de la République s’est-il fondé pour décider d’une telle fusion ? Aucune explication ne nous est fournie. J’en ai une : c’est le fait du prince. Vous trouvez cela normal, monsieur le ministre ? Nous avons proposé l’organisation d’un référendum, que près de 70 % de nos concitoyens appellent de leurs voeux, mais vous l’avez refusée, malgré le rejet par le Sénat de la nouvelle carte régionale élaborée par le Gouvernement.

Sur le fond, ce texte est marqué par une vision technocratique des régions. Il ne tient pas compte des réalités économiques des territoires. Il rompt l’égalité entre les territoires et porte atteinte au principe de la décentralisation. Il diminuera les services à la population et ne permettra pas de réaliser les économies attendues. Après avoir annoncé 5 à 10 milliards d’euros d’économies, vous reconnaissez aujourd’hui, finalement, que ce texte n’atteindra pas ces objectifs. Pire : il risque même, dans un premier temps, de générer des dépenses supplémentaires.

Enfin, ce projet de loi va contribuer à éloigner un peu plus les citoyens des centres de décision au niveau régional. Il va faire disparaître la spécificité de la Haute-Savoie, englobée dans une collectivité aux contours toujours plus larges et éloignés. M. Vallini n’est pas présent, mais permettez-moi de faire appel à lui, car il est un élu de l’arc alpin et connaît bien les difficultés des territoires de montagne et des territoires ruraux. Le regroupement de Rhône-Alpes et de l’Auvergne aboutit à une baisse respective de 20 % et de 45 % de la représentation des territoires de montagne dans cette nouvelle région. Une nouvelle fois, le Gouvernement raisonne à partir du fait urbain. On ne peut que le regretter.

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Cette réorganisation territoriale est fondée sur la création de « régions méga-métropoles » et sur la disparition des départements. En cela, elle accentue la fracture territoriale au détriment, principalement, des zones rurales et des zones de montagne. Or je considère que plus la zone régionale est grande, plus il est important de conserver une structure territoriale de proximité.

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C’est particulièrement vrai pour les territoires de montagne et les territoires ruraux aux contraintes géographiques et handicaps naturels importants. Nous le savons bien : un kilomètre à la montagne n’équivaut pas à un kilomètre en plaine !

Avec plus d’un million d’habitants, la Savoie et la Haute-Savoie apportent à la région Rhône-Alpes leur dynamisme démographique et leur potentiel industriel, agricole et touristique. Elles permettent à la région Rhône-Alpes d’avoir une ligne de croissance mondiale et un rayonnement international, grâce à leurs frontières avec l’Italie et la Suisse. Elles sont et font la notoriété de la région Rhône-Alpes et de la France entière en matière de tourisme. La Savoie et la Haute-Savoie partagent une histoire et des valeurs : elles ne veulent donc pas d’une région sans unité, sans identité, qui méconnaîtrait leurs particularités. C’est pourquoi nous avons proposé, avec mes collègues Hervé Gaymard et Christian Monteil, présidents des conseils généraux de Savoie et de Haute-Savoie, la création d’une collectivité territoriale « Savoie Mont-Blanc ».

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Ce projet est fondé sur l’article 72 de la Constitution.

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Il fait l’objet d’un amendement, cosigné par la plupart des parlementaires, visant à renforcer les pouvoirs et les missions de l’assemblée des pays de Savoie. Cette assemblée, qui existe depuis 2001, porte déjà des projets communs dans des domaines aussi variés que le tourisme, avec l’appellation « Savoie Mont-Blanc », l’enseignement supérieur, avec l’Université de Savoie, la culture, le patrimoine naturel et l’agriculture, avec la marque bien connue des « pays de Savoie ».

Tout en contribuant à la baisse de la dépense publique et à la mutualisation des moyens, le conseil départemental « Savoie Mont-Blanc » permettra d’affirmer l’identité savoyarde, née de notre patrimoine et de notre histoire. Surtout, « Savoie Mont-Blanc » aura pour vocation d’offrir un avenir commun à tous les Savoyards et Hauts-Savoyards, en préservant leur identité et en permettant à nos territoires de participer à l’effort national de réduction des déficits. Ainsi, nous permettrons à la France d’être plus compétitive et plus forte.

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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Malgré l’opposition flagrante du Sénat, qui soutient pourtant, paraît-il, le Gouvernement, et malgré l’hostilité d’une grande partie des députés de la majorité, le Gouvernement présente au Parlement deux projets de loi relatifs à la réforme territoriale. Ces deux textes nous serons soumis séparément.

Le premier texte dont nous discutons porte sur les nouveaux dessins géographiques des collectivités territoriales et sur le calendrier des futures élections. Le second aura vocation à remodeler les compétences des collectivités territoriales. On peut s’étonner que ce projet majeur soit ainsi divisé, découpé, saucissonné en deux textes. Mais nous savons toutes et tous que le Gouvernement a voulu faire vite, très vite, afin de respecter les échéances électorales reportées à décembre 2015 pour essayer de mettre la majorité et le Président de la République à l’abri de la colère des Français. En voulant aller trop vite, le Gouvernement prend le risque de la sortie de route. Quels électeurs seront réellement motivés, au mois de décembre 2015, pour se déplacer en masse…

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…afin de choisir au niveau départemental des élus qui auront vocation à fermer la porte ou à éteindre la lumière quelques années plus tard, lorsque les conseillers départementaux disparaîtront ?

Ces projets de réforme arrivent dans un contexte politique bien particulier, celui de la tourmente électorale que connaît le parti socialiste depuis 2012, en même temps que les exigences de réformes structurelles imposées par l’Union européenne et par nos prêteurs.

Le Gouvernement a semblé vouloir proposer aux représentants de la nation un projet d’envergure. Bien lui en prend ! Mais, chers collègues de la majorité, vous tournez, vous hésitez et vous revenez sur vos pas. À peine arrivés au pouvoir, vous avez abrogé la loi portant création du conseiller territorial, qui était pourtant une mesure intelligente, moderne et courageuse adoptée par l’ancienne majorité.

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Vous avez préféré établir un scrutin binominal à deux tours, monstre juridique tellement original qu’il ne verra finalement le jour que pour une seule élection départementale.

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Tout ça pour ça !

Certains esprits, monsieur le ministre, pourraient penser que les réformes institutionnelles et territoriales ne sont pas la priorité des Français, qui veulent voir le chômage reculer, la sécurité renforcée et le pouvoir d’achat restauré. Ils ont raison ! Et pourtant, nul ne peut nier que les institutions constituent aussi le cadre qui permet à l’économie de se développer, aux services publics de fonctionner, et à notre État de rayonner dans le concert des nations. Le Général de Gaulle lui-même a répété cette évidence, y compris dans les moments les plus tragiques de notre histoire, soulignant que la rénovation devait commencer par le commencement, c’est-à-dire par nos institutions. Or nos institutions sont en crise. Elles sont à bout de souffle, du fait de la montée inexorable de l’abstention, des affaires à répétition et du manque total de confiance de nos concitoyens dans l’efficacité de notre administration et dans l’exemplarité des élus qui gouvernent.

Le Gouvernement apporte une proposition de réponse à cette crise. Cette proposition a le mérite d’exister, mais je déplore que cette réponse soit imprécise et peu audacieuse. François Hollande a manifestement souhaité fonder sa réforme sur des régions plus grandes, donc moins nombreuses, et plus puissantes. Je partage cette opinion, qui n’est d’ailleurs pas si neuve : les régions sont administrativement créées depuis 1956 – à l’époque, il s’agissait de « régions de programme » –, et c’est le Général de Gaulle lui-même qui, par les décrets du 24 mars 1964, lance la véritable régionalisation. En 1969, il propose un référendum pour créer des régions plus puissantes, prenant en compte la faillite des départements et la nécessité d’assurer le développement économique et social. « Les régions sont les grandes collectivités territoriales de demain », affirmait-il à Alain Peyrefitte.

Permettez-moi de remarquer perfidement que les socialistes d’hier avaient, en bloc, refusé cette évolution institutionnelle. Permettez-moi aussi de rassurer mes amis gaullistes, qui peuvent penser que renforcer la région revient à affaiblir l’État : on ne peut soupçonner le Général de Gaulle d’avoir voulu commettre un tel crime !

En revanche, il faut savoir adapter notre pays à la réalité et aux évolutions de la modernité. Monsieur le ministre, on peut gloser à l’envi sur le redécoupage politique qui a été proposé. Certes, il n’y a pas de carte idéale que chacun plébisciterait. En revanche, je demande à chacun de réagir non pas en député de sa région, mais en député de la nation.

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Nous siégeons à l’Assemblée nationale, et non dans une assemblée régionale. Cela dit, les questions portant sur vos critères de choix sont légitimes. Est-ce de véritables visions stratégiques, culturelles et économiques qui ont initialement poussé à l’isolement de la Bretagne ou du Nord-Pas-de-Calais ? Est-ce, au contraire, de sombres combinaisons politiciennes qui ont amené le Gouvernement à pousser, dans un premier temps, la Picardie vers la Champagne-Ardenne, et les Pays de la Loire vers personne d’autre ? La nouvelle carte proposée aujourd’hui témoigne de davantage de bon sens, mais j’attendrai la fin des débats pour savoir si le bon sens aura réellement triomphé ou non.

Une réforme territoriale n’a de sens que si elle s’inscrit dans une réforme institutionnelle qui concerne toutes nos institutions. L’État lui-même doit être rénové, car sa perte d’autorité et de moyens est un danger pour toute la nation. Le pouvoir présidentiel devra aussi être réaffirmé en donnant du temps au temps, pour reprendre la formule de François Mitterrand. Pour ma part, je pense que l’instauration d’un septennat non renouvelable donnera au Président de la République à la fois la hauteur de vue et le courage nécessaire pour engager les réformes sans penser à la prochaine élection.

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Le Parlement doit voir son pouvoir renforcé pour exercer enfin son légitime travail de contrôle des politiques publiques, qu’elles soient menées par l’État, les établissements publics ou les collectivités territoriales, au lieu de laisser le quasi-monopole de ce contrôle à une Cour des comptes certes compétente, mais qui n’est pas plus légitime que le Parlement pour juger de l’opportunité de la dépense publique.

Si le non-cumul des mandats est conservé, alors il faudra oser diminuer le nombre de parlementaires afin de les faire élire sur des bases électorales plus grandes,…

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…pour éviter qu’ils ne soient victimes de la guerre électorale que ne manqueront pas de se livrer les maires des grandes communes ou les vice-présidents puissants des collectivités territoriales qui seront préservées.

Monsieur le ministre, votre réforme, même imprécise, même peu audacieuse, va affronter mille difficultés,…

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…notamment celle des conservatismes, qui sont majoritairement dans votre camp. Plus de 150 députés sont en même temps conseillers généraux. Quand le prochain texte sera discuté, leur main tremblera-t-elle ? Évidemment, elle tremblera ! Je crains que cette grande réforme ne finisse par accoucher d’une souris. Chacun voudra, pour citer le général De Gaulle, faire « sa petite soupe sur son petit feu ». Le débat parlementaire, intéressant, enrichissant, nécessaire, ne vous permettra pas, monsieur le ministre, d’imposer vos vues.

Seul le peuple peut approuver et donc imposer une réforme structurelle qui touche, certes, les collectivités territoriales, mais aussi les institutions au sens large, comme j’ai commencer à le dessiner. Si le Gouvernement avait conscience de son rôle et de l’importance du sujet qu’il nous soumet, il en viendrait évidemment à proposer ce projet aux Français par référendum. Mais pour cela, il faut du courage.

Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UMP et UDI.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, l’enchevêtrement de notre organisation territoriale est connu de nous tous. Personne n’avait réellement osé s’y attaquer.

Exclamations sur les bancs du groupe UMP.

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Ce n’est pas possible de dire de telles choses !

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Personne, jusqu’à ce que ce Gouvernement, sous l’impulsion du Président de la République, décide de s’y atteler. Applaudissons la détermination de l’exécutif d’enclencher une réforme structurelle soutenue d’ailleurs par une grande majorité de nos concitoyens.

À l’opposition qui devrait nous rejoindre, je rappelle que la fusion volontaire de régions qu’elle avait proposée en 2010 a été un échec. Elle n’a produit aucun changement. Nous ne pouvons nous satisfaire de lois d’affichage, de faux-semblants, c’est pourquoi je considère que la méthode choisie par le Gouvernement est celle de l’efficacité. Nous avons perdu trop de temps ces dix dernières années.

Ce projet de loi veut conférer à l’action publique locale la lisibilité, l’efficacité et la compétitivité par le dessin d’une carte de France désormais limitée à treize régions. Passer de vingt-deux à treize régions n’est pas un exercice facile. Mais faisons en sorte que la carte qui sortira de l’Assemblée nationale soit celle de choix et de compromis au service de l’intérêt général. Ma future région, la Bourgogne-Franche-Comté, la première à s’être engagée dans cette réforme historique, prend appui sur les synergies actuelles en matière universitaire, de santé publique, voire juridictionnelle et administrative, et sur les complémentarités économiques et industrielles.

En termes de méthode, il est sage que la fusion par bloc de régions ait été privilégiée et salutaire que le projet de loi reporte au 1er janvier 2016 le fameux droit d’option pour les départements.

Il importe aussi que la carte de nos régions ne soit pas déséquilibrée avec de petites régions au Nord, et de grandes et puissantes régions au Sud, mais qu’elle propose une organisation régionale moderne répondant aux mêmes exigences de dynamisme, de culture et de démocratie sociale sur l’ensemble de notre territoire. C’est ce que prévoit d’ailleurs l’étude d’impact de ce projet de loi, validée par le Conseil constitutionnel.

En opportunité, nous devons prévoir, après l’adoption de la présente carte, une procédure très encadrée dans le temps et à la majorité qualifiée, permettant le regroupement de régions ou des modifications de périmètre à la marge.

Les régions ainsi dessinées, avec des compétences clairement identifiées et complétées par la loi future, doivent être le lieu d’une économie compétitive, au service de la croissance et de l’emploi ; pas n’importe quelle croissance, celle portée par la transition énergétique, l’innovation technologique, l’industrie, mais aussi la recherche, la culture et l’éducation.

Ce projet de loi a le mérite de préserver la commune, coeur battant de la république, bassin de vie construit par ses habitants qui lui vouent un attachement remarqué dans tous les sondages. C’est un échelon du lien vivant, utile dans un monde où les repères changent. Ne le négligeons pas à un moment où les centres de décision s’éloignent, mais au contraire associons ces élus locaux dans la mise en oeuvre de cette réforme et convainquons-les de sa pertinence. Le texte confirme également la montée en puissance du bloc intercommunal, à même de porter de nouvelles politiques publiques, et tire les conséquences de l’existence des métropoles et d’intercommunalités puissantes en posant à juste titre la question du devenir du conseil général.

Enfin, ce texte impose une réforme de l’État déconcentré, tant au niveau régional que départemental. Nous y veillerons. Cette réforme s’impose pour que soit strictement respecté le principe constitutionnel de péréquation entre collectivités territoriales et pour garantir l’égalité entre les territoires. La recherche d’égalité doit constituer la porte d’entrée de la réorganisation territoriale. Elle implique donc aussi une réforme de la fiscalité locale et le souci constant que les coûts de fonctionnement soient minorés au profit de l’investissement public, créateur de richesses et d’emplois.

En outre, après avoir supprimé le cumul des mandats avec l’objectif de mettre un terme aux féodalités locales, il est impératif de rééquilibrer, au sein des collectivités régionales, le pouvoir exécutif et le pouvoir délibératif au profit de ce dernier.

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Il nous faudra y travailler.

Ce chantier doit nous rassembler – l’opposition comme la majorité – au-delà des postures politiciennes. Ensemble, nous devons combattre les conservatismes qui s’expriment avec force dans nos territoires.

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Nous savons tous que ce changement s’impose et que c’est le bon chemin.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.

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Cette réforme territoriale est fondamentale et, depuis longtemps, je l’appelle de mes voeux. Elle se heurte, bien sûr à l’immense partie de l’immobilisme qui déploie ses arguties pour bloquer le mouvement. La majorité sénatoriale – votre majorité – la première, s’est abîmée sur la nouvelle carte des régions !

Cette réforme – Philippe Vigier le disait ce matin, à l’instar d’autres d’ailleurs – souffre aussi d’une méthode déplorable !

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Hors de toute concertation, la carte des régions présente des assemblages à la cohérence douteuse, prouvant à quel point le texte a été rédigé dans la précipitation, l’improvisation et l’impréparation.

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Parmi les victimes de cette hâte géographique : la région Centre, que l’on a décidé initialement d’unir au Poitou-Charentes et au Limousin.

Après une levée de boucliers unanime, le Limousin se trouvera finalement rattaché à l’Aquitaine. Le « Limouchentre » ne verra donc pas le jour, c’est un bon début ! Mais il ne faut pas nous arrêter là !

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Rendons cohérente la carte des régions françaises et refusons de voir le Poitou-Charentes séparé de sa région naturelle, l’Aquitaine.

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Des calculs politiciens ne peuvent justifier un rapprochement fantaisiste et démagogique. Peut-on sérieusement imaginer une région allant de Dreux à La Rochelle ?

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Je vous le dis, la vocation de la région Centre est de suivre l’axe ligérien. Nous, habitants de la région Centre, nous voulons suivre le fleuve royal. Et moi, je ne dis pas non, comme le président Roger-Gérard Schwartzenberg, à la comtesse du Poitou-Charentes. Je dis simplement que nous voulons suivre le fleuve royal.

La région Centre a vocation à suivre la Loire et à rejoindre les Pays de la Loire.

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Notre histoire, notre géographie, notre démographie, notre dynamisme et nos synergies économiques, nos projets en cours ou à venir, nos bassins de vie et tant d’autres forces partagées nous rapprochent et nous poussent à la reconnaissance d’une région Val de Loire.

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Pour notre part, – contrairement à vous, monsieur le ministre – nous avons donné la parole aux habitants de la région Centre puisque le Gouvernement n’a pas jugé bon de les consulter. Cette parole, ils l’ont prise pour nous dire très majoritairement – à 78 %, chiffre qui ferait rêver beaucoup de candidats… – combien l’axe ligérien leur paraît naturel. Le Val de Loire est une évidence et une chance.

Alors évidemment, nous nous retrouvons pénalisés par ce nom flou de Centre – et c’est un centriste convaincu qui vous le dit ! –, un territoire géographique que nos concitoyens et même les présentateurs météo ont du mal à situer. Il ne vous aura pas échappé que pour eux, le Centre, c’est l’Auvergne.

Je m’en entretenais hier avec le Président Valéry Giscard d’Estaing lors d’une cérémonie et nous faisions remarquer qu’à chaque fois que l’on parle du Centre à la météo, il s’agit non pas de la région Centre, mais du centre de la France ! Quant au président de la région Pays de la Loire, il a procédé à un sondage en posant une question fort astucieuse. Il est évident en effet que si vous demandez aux habitants de la région Pays de la Loire s’ils veulent fusionner avec la région Centre, ils répondront non – il ne faut pas être Mme Soleil pour le deviner ! – puisque, pour eux aussi, le Centre c’est l’Auvergne.

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C’est à M. Auxiette qu’il faut le dire.

De ce point de vue, je rejoins le président François de Rugy, qui a été excellent sur le sujet ce matin à cette tribune.

M. Auxiette aurait pu faire des économies en se dispensant de nous envoyer un ouvrage massif qui a dû coûter un peu d’argent, pour essayer de faire pression. Si l’on avait demandé aux habitants des Pays de la Loire s’ils voulaient se rapprocher de la région Val de Loire, la réponse aurait évidemment été différente.

Il faudra avoir le courage, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, de changer le nom de la région Centre par voie d’amendement, et lui préférer celui de Val de Loire.

Personne ne semble attiré par le Centre, mais il suffit de rappeler qu’il s’agit d’une grande partie du Val de Loire avec les châteaux de Blois, Chambord, Cheverny, Chaumont, Chenonceaux, Azay-le-Rideau, Valençay, Amboise, Le Clos Lucé… Ils ont évidemment vocation à rejoindre Saumur, Fontevraud, Angers, Brissac, Laval ou Le Lude.

« Très bien ! » sur les bancs du groupe UDI.

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Notre collègue Michel Piron a parfaitement bien expliqué les choses ce matin. Le bon sens voudrait que l’Ile-de-France fusionne au moins avec l’Oise. La question pourrait se poser avec le Loiret et l’Eure-et-Loir, mais la métropolisation du Grand Paris est tellement difficile que cela ne pourra pas se faire. Telle est la réalité, tout le reste, c’est du blabla.

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On pourrait sans doute l’envisager, vous avez raison !

Il suffit, lorsque l’on pense découpage régional, de regarder la France avec l’oeil d’un étranger. La région Val de Loire, notre région future, notre ligne de vie, devient évidente.

Si toutefois l’évidence ne triomphait pas, si cette région Val de Loire n’était pas reconnue, alors, monsieur le rapporteur, sans hésitation, il serait préférable, pour nous, de garder la région Centre en l’état et conserver notre dynamique actuelle. C’est le bon sens.

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Une bonne entente vaut mieux qu’un mauvais mariage !

Il semble, monsieur le rapporteur, monsieur le président de la commission des lois, que vous souteniez les deux amendements que je défendrai avec Philippe Vigier sur ce point. Mes chers collègues, quels que soient les bancs sur lesquels nous siégeons, sachons dire oui à la réorganisation territoriale.

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Sachons dire oui au changement de taille des régions, oui à la simplification et à la meilleure répartition des compétences entre les collectivités locales. Les objectifs d’une telle réforme doivent être clairs : plus d’efficacité pour nos collectivités, plus de visibilité pour nos concitoyens, plus d’économies pour notre pays.

L’efficacité passe par une répartition des compétences juste et cohérente entre nos collectivités, j’y reviendrai.

La visibilité est un facteur d’amélioration majeure. Les Français réclament de comprendre, d’identifier et de connaître leurs institutions et les élus qui les représentent. Sur ce point, comme sur d’autres, refusons le dogmatisme ! Et de grâce, évitons de nous donner des leçons les uns aux autres. Si voulez mettre le « binz » dans un parti politique, il suffit de proposer à l’ordre du jour la question suivante : faut-il supprimer la région ou faut-il supprimer le département ? On entrevoit bien la suite. Eh bien, sur ce point, refusons le dogmatisme ! Si le conseiller général a largement perdu sa visibilité dans les villes, il reste un référent de proximité dans les territoires ruraux et garde, à ce titre, sa place et son utilité. Réfléchissons donc tous ensemble à une évolution pertinente de son statut, particulièrement pour les territoires ruraux.

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Le Président de la République a annoncé la disparition des départements pour 2020 – avec auparavant trois fois rien, juste une élection présidentielle en 2017. Pourquoi pas en 2030 ou en 2050 ? À cette tribune, je fais le pari que dans les territoires ruraux, personne ne voudra faire disparaître le département car il est synonyme de solidarité. Si la question de la pertinence du conseil général ne se pose plus, j’en conviens, là où il y a des métropoles, des agglomérations, des communautés d’agglomération suffisamment fortes, elle se pose et elle se posera dans les territoires ruraux. Nous devrons tous ensemble réfléchir à l’évolution de cette organisation pour la ruralité et conserver le département dans ces territoires. Et celui qui vous dit cela est favorable à la suppression des départements.

J’en viens aux économies et à l’usage optimisé de l’argent public. Les collectivités doivent, par des solutions pratiques et innovantes, travailler à plus d’efficacité. Vous avez procédé à cette mutualisation dans l’exercice de vos mandats locaux, monsieur le ministre de l’intérieur. Nous y procédons, nous aussi, aux conseils généraux du Loir-et-Cher, de l’Eure-et-Loir et du Loiret puisque nous avons lancé un grand chantier de mutualisation il y a plus d’un an, donnant en cela l’exemple.

Pour répondre aux objectifs de la réforme, les solutions sont connues. Il est urgent de les appliquer. Nous n’avons plus les moyens de reculer.

Le chantier majeur porte sur la clarification et la rationalisation des compétences entre les collectivités. Traquons les doublons économiquement désastreux !Agissons avec bon sens et pragmatisme ! L’économie, les transports, les collèges doivent revenir aux régions, c’est une évidence, tout comme s’impose le transfert d’une partie de l’action sociale vers les communautés de communes et d’agglomération.

Rappelons quelques évolutions depuis l’an 2000. Les dépenses ont augmenté de plus de 21 % pour les communes, de 38 % pour les groupements de communes, de 80 % pour les conseils généraux et pour les régions – écoutez bien ! – de 104 %. Les dépenses de personnel ont diminué de 6 % pour les communes, du fait de l’émergence des intercommunalités qui, elles, ont vu ces dépenses augmenter de 78 %. Ces mêmes dépenses se sont accrues de 42 % dans les conseils généraux et de 628 % dans les régions ! Au total, la dépense des administrations publiques locales représente 220 milliards, dont 53 milliards sont consacrés à la rémunération du personnel.

Je vous renvoie à l’excellent rapport de la Cour des comptes sur les finances publiques locales, mes chers collègues : c’est la première fois qu’elle publie un rapport consolidé sur l’ensemble des finances publiques locales. Je veux rendre ici hommage à Philippe Séguin qui a été à l’initiative de ce travail de fond, que poursuit le Premier président, Didier Migaud.

Ce que souligne utilement ce rapport, c’est le problème de la mission de chaque échelon. Le dérapage des dépenses publiques provient du fait que chacun peut tout faire, que cela soit la commune, le conseil général, l’intercommunalité ou la région, avec l’État qui vient se surajouter. Voilà le problème majeur de la « lasagne » territoriale et c’est à dessein que je parle de « lasagne » car, depuis le début de nos débats, j’ai une indigestion de« millefeuille territorial ». Vous comprendrez qu’avec mon tour de taille, la lasagne me semble préférable.

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C’est bien pour cela que j’ai anticipé, monsieur le rapporteur.

Il revient au Gouvernement, monsieur le ministre, de dire « stop ». Nos concitoyens ne savent plus qui fait quoi et quand on avance. Alain Rousset – et il a quelques qualités pour s’exprimer sur la question non seulement en tant que député mais en tant que président de l’assemblée des régions de France – l’a parfaitement démontré ce matin.

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Son intervention était très bonne, effectivement !

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Le problème c’est les doublons et les missions. À nous législateurs, avec le Gouvernement, de procéder à une clarification afin d’établir ce que chaque collectivité doit faire et quel est le meilleur regroupement. Car le véritable enjeu – qui n’est ni de droite ni de gauche, pas même du centre – est le regroupement des communes, des départements et des régions, ce qui implique que l’État dise quelles missions il abandonne, monsieur le ministre.

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Le problème auquel sont confrontées les collectivités locales est moins la dérive de leurs finances publiques, qui n’est pas encore énorme – le déficit n’atteint que 3 milliards – que la confusion.

Comme l’a parfaitement dit Winston Churchill : « Un pessimiste voit la difficulté dans chaque opportunité ; un optimiste voit l’opportunité dans chaque difficulté ». Compte tenu des difficultés à surmonter, je vous laisse deviner mon optimisme et je vous invite tous à le partager.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, chers collègues, l’organisation décentralisée de la République voulue par François Mitterrand, Pierre Mauroy, Gaston Defferre, poursuivie par Jacques Chirac et Jean-Pierre Raffarin, est devenue notre bien commun. Il est de notre responsabilité collective de veiller à ce que la décentralisation demeure toujours un atout pour la France. Et pour cela, il est impératif de la faire évoluer, en tenant compte de ce qui s’est passé depuis plus de trente ans.

Le ministre et le rapporteur du texte ont rappelé avec talent les enjeux de ce projet de loi ainsi que les responsabilités de chacun.

Pour ma part, je retiens trois objectifs principaux de cette grande réforme territoriale, dont nous examinons aujourd’hui le deuxième volet, le premier étant la loi sur les métropoles. Certes,la carte des futures régions est un sujet d’importance. L’obsession des frontières est légitime, mais dès l’automne, nous aurons à débattre de l’essentiel. Et l’essentiel relève de la nécessité de simplifier et de clarifier l’action publique au service des citoyens et de leur vie quotidienne, au service de nos entreprises pour qu’elles se renforcent, qu’elles deviennent plus compétitives et donc qu’elles créent de l’emploi.

Au fil du temps, notre organisation territoriale est devenue trop lourde, peu lisible, avec des responsabilités parfois mal établies qui prêtent le flanc aux critiques et à la défiance. Les Français doivent savoir qui, parmi les collectivités et organismes publics, décide, finance et agit.

L’essentiel consiste également à donner à nos collectivités les moyens d’être plus efficaces afin de leur permettre d’assurer une meilleure qualité de services rendus au public. Cela passe par une organisation territoriale rationalisée avec des ressources et une fiscalité en lien avec les compétences clarifiées des collectivités.

Enfin, l’essentiel – c’est une attente particulièrement forte dans les territoires ruraux, comme vous avez pu le vérifier, monsieur le ministre, lors de votre récente visite dans le Puy-de-Dôme – doit permettre de mieux assurer la solidarité entre les territoires, de garantir la cohésion territoriale et sociale.

Il s’agit très clairement de répondre à la crainte légitime de certains de nos concitoyens d’être délaissés par la République et par sa promesse d’égalité. Cela passe par la définition de complémentarités entre les dynamiques métropolitaines et les dynamiques rurales. Cela passe aussi par une présence renforcée de l’État décentralisé, au plus près des territoires. Cela passe encore par l’accompagnement de l’impressionnante montée en puissance des intercommunalités constatée au cours des dernières années.

Alors que le fait métropolitain vient d’être reconnu par la loi de modernisation de l’action publique et d’affirmation des métropoles, il est indispensable de doter nos territoires d’intercommunalités renforcées. Des intercommunalités plus fortes nécessitent des communes elles aussi plus fortes. C’est pourquoi, avec notre collègue Jacques Pélissard, nous avons déposé des propositions de loi – que nous tâchons de faire converger – afin d’améliorer le dispositif relatif aux communes nouvelles.

Les Français attendent cette réforme territoriale. Nous devons avoir le courage de la mener à terme. Cela exige de nous tous de dépasser les clivages partisans, de dompter nos craintes et nos peurs et d’avoir à chaque instant en ligne de mire l’intérêt général de notre pays.

Mes chers collègues, osons poursuivre la décentralisation !

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la situation financière, économique et sociale de notre pays exige qu’il se réforme en profondeur. Tout doit être mis en oeuvre pour libérer les énergies, développer et renforcer notre compétitivité. Sans prétendre répondre à tous les maux, une réforme des territoires peut y contribuer utilement.

L’émergence de grandes régions, comparables en superficie et peut-être demain en compétences à celles de nos voisins européens, particulièrement nos amis allemands, doit contribuer à donner à notre pays une impulsion nouvelle. En effet, bâtir une grande région, c’est atteindre la taille nécessaire pour que les projets élaborés, les synergies impulsées et les ressources financières mobilisées aient suffisamment de poids pour permettre d’agir !

Tout est loin d’être parfait dans ce projet de loi et, de manière générale, deux volets de la réforme territoriale sont critiquables.

Il s’agit, premièrement, de la suppression du conseil général. Erreur majeure, erreur historique.

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Erreur qui va affaiblir encore plus la ruralité. Le département est l’échelon de proximité : sa légitimité sera encore renforcée dans des régions élargies.

Il s’agit, deuxièmement, de la refonte de la carte intercommunale, avec des EPCI de plus de 20 000 habitants. Elle va déséquilibrer le monde rural en constituant des entités beaucoup trop vastes, sans identité et sans âme.

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Il faut aujourd’hui en parler car la réforme des territoires constitue un tout indissociable.

En revanche, les dispositions du projet de loi soumis à notre examen, à savoir, pour l’essentiel, le regroupement des régions, peuvent aller dans le bon sens. J’entends les débats entre mes collègues sur les choix à opérer dans les regroupements de régions. Chacun le comprendra, pour ce qui me concerne, je me limiterai à parler de la région où je suis élu et du projet de réunion de la Franche-Comté et de la Bourgogne.

Ce regroupement est tout à fait naturel tant les liens entre les deux régions sont forts et anciens. Bien sûr, on trouvera toujours quelques spécialistes pour s’amuser à imaginer des combinaisons auxquelles personne n’osait penser. Il n’en demeure pas moins que si l’on sort de l’anecdotique pour considérer l’essentiel, le rapprochement de la Franche-Comté et de la Bourgogne est de loin la plus raisonnable des solutions pour créer une région plus forte.

Il répond à une logique historique puisque les deux régions ont été à plusieurs reprises associées par le passé. Il s’inscrit dans le prolongement de partenariats économiques, car de nombreuses coopérations existent déjà entre ces deux régions, notamment dans le domaine de la recherche, de l’enseignement supérieur et de la santé publique. Il correspond – et c’est le plus important – aux habitudes de vie, même si la région dôloise est un peu différente du Haut Jura dont nous évoquions avec Marie-Christine Dalloz l’importance dans ce regroupement.

Je reviens à des considérations d’ordre général pour m’interroger avec vous sur les conditions du succès de la réforme. J’en vois une, qui est fondamentale : c’est l’acceptation de la nouvelle carte par le plus grand nombre.

Pour parvenir à une adhésion au projet, il ne faut pas donner le sentiment que le regroupement des régions se fait au bénéfice des uns et au détriment des autres. Dans cette affaire, il ne doit y avoir que des gagnants.

Pour cela, les conditions des regroupements doivent être étudiées avec minutie. Nul ne doit se sentir lésé. Il ne s’agit pas d’une absorption mais bien d’une union. Dans ma région, où nous avons tous les atouts pour réussir, rien ne serait pire que de donner le sentiment que la Bourgogne absorbe la Franche-Comté. Ce serait créer des crispations durables et freiner le projet avant même qu’il ne voie le jour.

Pour éviter cet écueil, il faut opérer une répartition équitable des centres de décision, qu’ils soient institutionnels, administratifs, économiques ou sociaux. Et cela d’ailleurs, pas seulement entre les chefs-lieux des régions actuelles : c’est l’ensemble des territoires qui doit trouver un intérêt à la fusion.

C’est pourquoi j’accueille avec bienveillance toutes les idées qui aboutissent à garantir un certain équilibre dans notre future région : la dissociation du chef-lieu de région de la ville qui accueillera les réunions de l’assemblée régionale ; la possibilité de choisir une ville qui ne soit pas actuellement chef-lieu de région comme capitale régionale, pour ménager les susceptibilités et garantir la centralité de la nouvelle capitale ;…

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…la possibilité enfin de désigner une métropole ou un pôle métropolitain comme chef-lieu de région, qui serait une marque de modernité, voire d’audace, et qui donnerait par la même occasion un coup d’accélérateur au fait métropolitain. L’inscription dans le projet de loi de ces dispositions serait de nature à rassurer les élus locaux, les forces vives des territoires et, à travers eux, bon nombre de citoyens.

Mes chers collègues, si la réforme de notre paysage institutionnel local apparaît juste, équilibrée et équitable, alors elle sera prise en compte et acceptée par les Français ; et si elle est prise en compte et acceptée par les Français, alors elle réussira. Au-delà de la définition des nouveaux périmètres par la loi, qui peut entraîner une adhésion dépassant les clivages politiques, elle enclenchera des dynamiques territoriales nouvelles, créatrices de croissance et de développement partagé.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, plutôt que de discuter jour et nuit d’une nouvelle carte des régions, il serait plus utile pour notre pays que notre assemblée pose les vrais fondements d’une réforme territoriale en répondant à trois questions majeures. La première question est la suivante : quel est le bon niveau d’exercice de chacune des compétences actuellement exercées par les collectivités territoriales, par l’État ou par l’Union européenne ? La deuxième question a trait aux structures : combien de niveaux de gestion, et sur quelle aire géographique ? Troisième question, que peu de monde aborde : quels moyens financiers ?

Je voudrais esquisser quelques réponses à ces trois questions en rappelant en introduction les deux phrases célèbres prononcées à Lyon par le général de Gaulle le 24 mars 1968 – on cite souvent la première, mais moins souvent la seconde. La première est célèbre : « L’effort multiséculaire de centralisation qui fut longtemps nécessaire pour réaliser et maintenir l’unité de notre pays, malgré les divergences des provinces qui lui étaient successivement rattachées, ne s’impose plus désormais. » Seconde phrase : « Au contraire, ce sont les activités régionales qui apparaissent comme les ressorts de sa puissance économique de demain ».

Sur les compétences, mes chers collègues, il semble qu’un consensus émerge sur l’idée que tout le bloc économique doit aller à une structure régionale, qui est le bon niveau de gestion de ces affaires ; à titre personnel, j’intègre dans ce bloc économique tout ce qui est infrastructures de transport et de télécommunication.

Si l’on reste sur ce schéma, se pose alors naturellement la question de l’avenir des départements et en particulier du bloc social, dont on parle peu alors qu’il est majoritaire dans tous les départements ! Il me semble que tant le RSA que l’aide sociale à l’enfance devraient relever de l’État. Le RSA est un système national voulu par l’État dont les caractéristiques sont fixées par l’État ; par conséquent, puisqu’il est géré pour l’essentiel, quant au paiement de la prestation, par les caisses d’allocation familiale et, subsidiairement, par la Mutualité sociale agricole, cela serait logique, y compris l’intégration des personnels concernés. Même chose pour l’aide sociale à l’enfance : c’est quand même un système étrange que celui dans lequel les décisions de retirer l’autorité parentale sont prises par des magistrats dépendants de l’État français, mais qui confie ensuite ces enfants au département ! Il serait me semble-t-il plus logique de mener une politique nationale en la matière. Que dirait-on si l’on distinguait la justice, qui prononce des peines privatives de libertés, des prisons, qui seraient confiées aux collectivités territoriales ? Cette distinction dans un bloc de compétences serait tout à fait incohérente.

Il reste la prestation de compensation du handicap et l’allocation personnalisée d’autonomie : ne peut-on confier la politique du handicap et la politique des personnes âgées aux intercommunalités ? Si l’on va dans cette direction, alors se pose la question suivante : quelles compétences les départements conservent-ils ? Quoi qu’il en soit, cela permettrait au moins de revenir à cinq niveaux de gestion. Je rappelle en effet qu’il existait trois niveaux il y a cinquante ans, et que nous sommes passés à six niveaux : Union européenne, État, région, département, intercommunalité et commune.

Pour ce qui concerne le bloc communal, la grande réforme, monsieur le ministre, consisterait à ériger les intercommunalités en collectivités territoriales, à transformer les communes en sections de l’intercommunalité, avec sectionnement électoral et compétence générale de l’intercommunalité qui pourrait déléguer aux sections communales, lesquelles garderaient leur maire ainsi qu’un conseil municipal probablement plus réduit.

Cette intercommunalité déléguerait, en fonction de l’extrême diversité des situations, aux communes tout ou partie des compétences exercées, y compris les moyens financiers.

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Laissons les élus locaux, secteur par secteur, trouver les bons équilibres, car ce n’est pas la loi qui les trouvera ! Si on faisait cela, on aurait une vraie rationalisation de notre système de collectivités territoriales.

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Je voudrais maintenant développer la deuxième partie de mon propos, concernant les moyens financiers. Le constat actuel, monsieur le ministre, est sans appel : perte quasi totale de l’autonomie fiscale des départements et des régions. Une autonomie subsiste pour les conseils généraux à hauteur de 13 % à 15 % – cela dépend des départements, mais tel est l’ordre de grandeur – et pour ce qui concerne les régions, elle est à peine de 7 %. Seul le bloc communal conserve une autonomie fiscale significative, avec la maîtrise d’une fiscalité locale représentant plus du tiers de ses recettes.

Deuxième constat : notre fiscalité locale est devenue opaque, complexe et injuste pour nombre de nos concitoyens et de nos collègues élus locaux. Elle ne permet plus au citoyen de savoir au bénéfice de qui vont ses impôts et ce qu’ils financent. Cette fiscalité est devenue archaïque puisqu’elle remonte, dans ses fondements, au XIXe siècle, et ses assiettes, pour certaines d’entre elles, à quarante, voire cinquante ans.

Pour réussir l’indispensable réforme du financement des collectivités territoriales, sans laquelle toute réforme territoriale est condamnée à échouer, nous devons articuler cette réforme autour de quatre principes. Premièrement, il faut accroître l’autonomie fiscale des collectivités territoriales et non leur autonomie financière – tous les gouvernements successifs depuis quarante ans ont fait l’inverse, la thèse de Bercy ayant toujours été la même : moins ils auront d’autonomie fiscale, plus on tiendra la dépense ! Telle est la thèse de Bercy : on tiendra la dépense par la recette !

Or cette thèse est fondamentalement antidémocratique ! Pensez que les ministres successifs de tous bords ont laissé faire…

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Même les ministres centristes !

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Même eux, alors qu’ils appartiennent à l’un des derniers partis politiques de ce pays qui devrait combattre cela ! Mais au niveau de notre famille politique, nous continuons à maintenir cette position.

Deuxièmement, il est nécessaire de trouver un juste équilibre entre les impôts pesant sur les ménages et ceux pesant sur les entreprises. Troisièmement, il faut une spécialisation de l’impôt par niveau, sans laquelle le citoyen ne comprend rien et ne peut plus contrôler le bon usage des fonds publics. Quatrièmement, il faut une réforme eurocompatible – il convient d’écarter les idées de TVA locale, d’impôt sur les sociétés local, de TIPP, etc.

Ces quatre principes que je viens d’exposer trouvent leur déclinaison dans chacun des futurs blocs communaux d’une part, et région-département d’autre part. Le financement du bloc communal devrait être assuré par le maintien du versement à hauteur de 100 % des recettes concernant la taxe d’habitation – c’est fait – et en passant à 100 % des recettes perçues sur la taxe sur le foncier bâti acquittée par les ménages. Le foncier bâti est en effet un impôt assez curieux puisqu’il frappe les ménages comme les entreprises, pour respectivement deux tiers et un tiers en moyenne. La participation des entreprises au financement des collectivités du bloc communal – communes et intercommunalités – se ferait par les recettes issues d’une fusion entre la cotisation foncière des entreprises et la part de la taxe sur le foncier bâti payée par les entreprises – voilà un système absurde : nous avons deux impôts frappant la même assiette ! Ce dispositif est plutôt curieux !

Concernant le financement du bloc région-département, tous ceux qui ont étudié cette question au sein du comité des finances locales ont retourné le problème dans tous les sens. Une seule idée émerge : la participation des ménages proviendrait, d’une part, des recettes de CSG, avec une possibilité encadrée de modulation du taux par les assemblées régionales en contrepartie d’une baisse de la dotation globale lors de la réforme, à due concurrence – ainsi, la réforme serait neutre – et, d’autre part, de la mise en place d’un système de péréquation très simple fondé sur l’assiette par habitant. Ceux qui sont au-dessus de cette moyenne contribueraient au fonds national tandis que ceux au-dessous en bénéficieraient. Les entreprises, quant à elles, participeraient au financement du couple région-département par la cotisation existante sur la valeur ajoutée des entreprises, quitte à en augmenter la part par rapport à celle qui resterait au bloc communal.

Pour conclure, mes chers collègues, nous devons désormais avoir un vrai débat sur le fond pour nous saisir pleinement de l’ensemble de ces problématiques. Nous devons être en capacité de débattre de chacune des modalités de cette réforme. Nous devons être en mesure de défendre ce qui est à nos yeux une réforme ambitieuse, permettant d’inscrire de plain-pied la France dans une Europe des territoires. Les députés UDI resteront vigilants afin que cette réforme ne devienne pas un nouvel échec du Gouvernement, car ce ne serait pas l’échec du Gouvernement ; ce serait l’échec de la France !

Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le mouvement républicain et citoyen est attaché à toute entreprise ayant pour objectif le redressement économique de notre pays. Tout découle en effet de cette impérieuse nécessité, depuis la prospérité retrouvée et, avec elle, la confiance dans l’avenir, jusqu’à, nous le savons tous hélas aujourd’hui, la cohésion autour des valeurs républicaines.

La réforme de l’État dans sa dimension territoriale peut-elle contribuer à ce redressement ? C’est au fond tout l’enjeu de ce premier chapitre que vous nous conviez à ouvrir en le mettant sous le signe, nous l’avons bien compris, du renouveau économique. Encore cet esprit de la réforme doit-il aller avec la lettre. Vous admettrez à cet égard, monsieur le ministre, qu’il faut une certaine foi – et même une foi certaine – pour donner une adhésion a priori à une réforme qui définit un contenant sans contenu, des périmètres sans les compétences qui vont avec et qui fait l’impasse sur la question, pourtant cruciale, de la gouvernance des régions qui, redessinées, devraient être aussi repensées.

Nous prenons certes acte, monsieur le ministre, de ce que le Gouvernement n’entend pas réformer pour le plaisir de réformer, bouger pour bouger, comme nous l’avons connu dans un passé récent, dont la devise aurait pu être : « Je change, donc je suis ! » Mais, si l’objectif est légitime, le projet ici présenté prend-il les meilleures voies pour y parvenir ? J’exposerai sans fard nos doutes et nos interrogations.

Première interrogation : la taille des régions est-elle bien l’alpha et l’oméga de la réussite économique ? Nous avons entendu nombre d’idées reçues sur cette question. Or, force est de le reconnaître, la recherche d’un optimum régional par la superficie et la démographie n’emporte pas, tant s’en faut, l’adhésion d’une majorité de chercheurs. Elle se heurte même au bon sens lorsque l’on mesure l’écart entre petites régions riches et grandes régions pauvres, tel l’écart caricatural entre le Val d’Aoste et la Sicile, le premier dix fois plus riche que la seconde avec un territoire dix fois plus petit !

C’est donc sur le fondement d’un enjeu quelque peu mythique que sont définis dans la loi qui nous est présentée des périmètres contestables, mal vécus et même parfois absurdes, soit par l’excès de la taille – je pense à l’Aquitaine, mariée sur le tard avec le Limousin et le Poitou-Charentes –, soit au contraire par le maintien d’une taille réduite, d’ailleurs en contradiction avec l’enjeu de régions agrandies, comme dans le cas de la Bretagne et des Pays de la Loire. Des périmètres issus également d’un rattachement incertain, comme c’est le cas pour la Franche-Comté ou encore pour la Picardie dont je suis l’élue, deux exemples qui illustrent en réalité l’impossibilité de tout rattachement cohérent par bloc régional.

Devant une carte qui contient trop de mauvaises solutions, ne fallait-il pas réinterroger la méthode ? Oubliant les mariages forcés, il était possible de faire le choix d’une interrégionalité, dotée des procédures appropriées, résolvant la question des particularismes, mais surtout permettant une synergie qui aurait été le cadre dans lequel pouvaient être menés de grands projets d’aménagement du territoire et de développement économique. Les universités en donnent l’exemple, telles celles de la Bretagne et des Pays de la Loire. Pourquoi ne pas suivre cet excellent modèle plutôt que de s’enfermer dans le carcan rigide qui pourrait mener, à travers un désamour confirmé, à l’exercice d’un droit d’option incertain et coûteux ?

Deuxième interrogation : quel sera demain le visage de cette créature nouvelle, une région chargée de compétences supplémentaires qui, ajoutées aux compétences actuelles, accroîtront le fardeau gestionnaire alors que l’on veut faire de la même région le pilote du décollage économique ? Et comment concilier avec un visage démocratique l’élection sur des territoires encore plus vastes qu’aujourd’hui, alors que la région peine déjà souvent à assumer le statut réel d’une collectivité territoriale suffisamment identifiée par la population ?

On le voit bien, monsieur le ministre, si l’on veut assurer tant la démocratie que l’efficacité, l’échelon régional demande à être profondément repensé. À défaut d’une conception ferme de ce que sera demain la région nouvelle, nous sommes peu convaincus, à ce stade, de la pertinence de la réforme proposée.

Nous avons bien noté que vous avez refusé d’ouvrir la porte à une identité régionale toute empreinte d’un entre-soi passéiste. Rien ne serait en effet plus funeste que ce repliement en apparence si loin de l’ouverture des frontières, en réalité si adéquat à la mondialisation par le rejet de l’État-nation que l’un et l’autre impliquent.

Craignons cependant que n’entre par la fenêtre la boulimie régionaliste toujours à la recherche de ce que Jean Jaurès appelait ces fiefs locaux que se sont entaillés des notables locaux dans la souveraineté nationale, laissant le soin à l’État de gérer la pénurie territoriale au détriment de cette cohésion nationale qui est l’un des grands atouts historiques de la France, à l’intérieur comme à l’extérieur.

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Monsieur le ministre, alors que la décentralisation fête cette année ses trente ans d’existence, vous nous demandez d’entrer dans une nouvelle étape, celle du XXIe siècle. Le principe même de cette décentralisation est celui du partage des compétences : qui fait quoi, qui s’occupe de quoi, quelles instances – régions, départements, communes – s’occupent de quelle mission ?

Maurice Leroy l’a rappelé tout à l’heure, jusqu’à ce jour la majorité des compétences sociales et médico-sociales décentralisées relèvent du département : l’action sociale, les personnes âgées, les personnes handicapées, la protection maternelle et infantile, la protection de l’enfance, le versement du RSA et le Fonds d’aide aux jeunes, par exemple.

Monsieur le ministre, vous n’êtes pas à une contradiction près puisque, après avoir déclaré le maintien des départements, vous faites maintenant le choix de les supprimer. Vous envisagez donc la suppression de l’échelon départemental pour 2020 et d’évoluer vers trois échelons qui seraient des régions XXL, des intercommunalités élargies et des communes. La grande question sociale est donc celle du partage des compétences. Et si vous êtes affirmatif sur la question des routes, des collèges, des transports scolaires, vous êtes beaucoup plus que flou s’agissant des compétences sociales. C’est d’ailleurs le défaut de la cuirasse de ce projet de loi. Et je ne parle pas, bien entendu, de la proximité ni de l’avenir de la ruralité, qui ne sont absolument pas traités.

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Vous travaillez donc à l’envers de ce qu’il faudrait faire. Définir les périmètres sans les compétences est une totale aberration.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Voilà un propos très nuancé !

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L’histoire nous rappelle que l’une des premières oeuvres de l’Assemblée constituante, en octobre 1789, fut de diviser la France en départements. À l’époque, la décision de leur périmètre avait été prise après avoir entendu les députés des provinces. Aujourd’hui, nous ne sommes plus du tout dans le même cas puisque vous négligez l’avis des députés. Le chef-lieu du département, que l’on appelle aujourd’hui la préfecture, devait se trouver au centre et à moins d’une journée à cheval de la plus éloignée des communes du département, comme l’a rappelé Hervé Gaymard. Nos ancêtres savaient, eux, s’occuper de la ruralité. Restait à résoudre, à l’époque, le choix des chefs-lieux. Une grande rivalité avait vu le jour, à l’origine de luttes, pour savoir quelle ville serait l’élue. Des échanges, des alliances de circonstance s’établirent entre les députés de chaque ville pour faire le choix du chef-lieu du département, c’est-à-dire de la préfecture, et du périmètre de celui-ci.

En relisant notre histoire, je me dis qu’avec ce découpage fait dans l’intimité d’un bureau présidentiel un soir du mois de juin dernier, vous ranimez des querelles, sinon de clochers, du moins de capitales régionales. Et vous inventez, sinon un Meccano, un véritable Monopoly territorial de mauvaise facture : j’achète, je vends, qui aura quoi, on verra à quel prix.

L’ancienne majorité avait été plus logique, ayant anticipé, proposé le rapprochement entre départements et régions avec la création du conseiller territorial. Mais vous l’avez balayé dès que vous êtes arrivés au pouvoir. C’est un regrettable choix idéologique.

Hier, nous devions aborder les enjeux et les défis qui résultaient de la fusion de la région Centre avec les régions Poitou-Charentes et Limousin, portée par le projet de loi initial. Aujourd’hui, c’est autre chose. Comment comprendre la cohérence de votre projet de découpage ?

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Vous aviez construit une seule monstrueuse région, sans queue ni tête, allant de Montargis jusqu’à Tulle ou Brives ou La Rochelle. N’y avait-il pas d’autre choix ? Vous cassez les équilibres qui ont mis trente ans à se construire. Ce projet élyséen semble totalement précipité. Trente années n’avaient pas été de trop pour construire une identité qui, on peut le dire, existe aujourd’hui. Quel amateurisme est le vôtre et quelle influence est née d’acteurs politiques plus ou moins liés au Gouvernement ! Et quel changement de cap survient lorsque, même au sein du parti socialiste, certaines voix s’élèvent plus fortement les unes que les autres.

Mes chers collègues, la Picardie finit là où elle aurait dû aller, contre l’avis du Nord-Pas-de-Calais. La Bretagne, les Pays de la Loire se trouvent seuls, se heurtant ici ou là à des murs de refus pour rejoindre les autres régions. Le Limousin, cher à l’Élysée, finit là où il aurait dû aller dès le départ tant la direction de la région Centre l’irritait. Et comme sorti d’une pochette-surprise, le Poitou-Charentes repart vers le Sud, en Aquitaine, conformément aux voeux de certains, mais contrairement à l’ambition d’autres.

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Comprendra qui voudra !

La région Centre, région Val de Loire ligérienne, se retrouve seule, dans sa construction natale. Et si la population pourrait être satisfaite, elle ne comprenait pas comment on pouvait relier des villes distantes de 500 à 600 kilomètres. Comment fusionner trois CHU, trois universités, trois ARS, trois capitales sans infrastructures routières ou ferrées disponibles et bien établies pour relier les uns et les autres ? Cette région a beaucoup plus de liens avec les départements limitrophes, que ce soit à l’Ouest, comme l’a rappelé tout à l’heure Maurice Leroy, ou à l’Est, beaucoup plus proche de la Bourgogne, de la Nièvre ou de l’Yonne que vers le Sud.

En conclusion, nous ne manquerons pas de militer pour que la région Centre s’ouvre, se fiance ou se marie suivant les circonstances, peut-être avec une partie des Pays de la Loire, à l’Ouest, ou avec une partie de la Bourgogne à l’Est.

Monsieur le ministre, pas tant de précipitation, pas tant d’incertitudes ! Évitons les mariages forcés, contre nature !Et si je peux me permettre un trait d’humour, je dirai que s’il reste des régions seules, orphelines, pourquoi ne pas les rapprocher ? Pourquoi ne pas rapprocher, par exemple, la région Centre avec la Corse ?

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On pourrait peut-être leur trouver des points communs. Par exemple, Napoléon a siégé dans le nord du Loiret et était né en Corse.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.

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« Moi Président de la République, je ferai un acte de décentralisation ».

Exclamations sur les bancs du groupe SRC.

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Deux ans après les élections présidentielles, les éléphants socialistes ont accouché de souris décentralisées.

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Et nous n’avons pas été invités à l’accouchement !

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Après avoir supprimé les conseillers territoriaux, tripatouillé le mode d’élection des conseillers généraux puis annoncé la suppression des conseils généraux, voilà que vous jugez soudainement urgent de modifier la carte des régions de France et le calendrier des élections régionales. Quant aux compétences et moyens d’actions respectifs des collectivités territoriales, on verra plus tard.

Jamais une réforme n’a eu aussi peu de sens, de logique et de cohérence. Vous vendez votre réforme territoriale à la découpe. Vous vendez nos provinces, nos identités, nos cultures, nos enracinements au plus offrant. Sans aucune concertation, sauf avec les présidents socialistes des régions, vous sacrifiez un modèle de décentralisation perfectible mais qui fonctionne sur l’autel d’une réforme informe. C’est fascinant, chers collègues socialistes, avec cette réforme et la « Valls hésitation » du 2 juin dernier, vous avez érigé l’improvisation en mode de gouvernement. Et pourtant, le sujet de l’amplification de la décentralisation aurait mérité une approche globale sur laquelle nous aurions pu vous rejoindre.

J’aborderai rapidement deux points : oui, il faut réformer les régions et les départements, mais ne nous contentons pas des régions et des départements, rénovons la France territoriale du sol au plafond.

Quelles compétences donner à nos régions et départements ? Aux grandes régions, les grands projets structurant le territoire et des compétences limitatives : les infrastructures de transport, le développement économique et le soutien aux filières, les lycées, la formation professionnelle, etc. Aux départements ruraux, la proximité que de grandes régions ne pourraient pas garantir et la capacité à intervenir dans tous les domaines, c’est-à-dire le maintien de la fameuse clause générale de compétence sans laquelle nombre de départements, dont celui de la Vendée, ne connaîtraient pas un tel dynamisme.

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Sans clause générale de compétence, la Vendée n’aurait pas pu conserver le Vendée Globe, son fleuron économique et sportif, le TGV ne pourrait pas passer aux Sables-d’Olonnes et elle n’aurait pas deux autoroutes, et bientôt trois grâce à la promesse du Président de la République que soutiennent Hugues Fourage et Dominique Bussereau. Il faut donc à la fois des régions aux compétences limitées, mais de grandes régions, et des départements qui assurent.

Quelle carte de ces régions, quelle carte dans l’Ouest ? Après le mariage pour tous, vous voilà, mes chers collègues socialistes, les chantres du mariage forcé.

Vous nous aurez décidément tout fait pendant ce mandat. Dans l’Ouest, pour sortir du dialogue de sourds entre ceux qui veulent marier les Pays de la Loire avec la Bretagne et ceux qui plaident pour une union avec le Poitou-Charentes, je propose, avec mon collègue Alain Leboeuf, une solution de compromis : créons une grande région Ouest-Atlantique qui unira dans une communauté de destin la Bretagne, les Pays de la Loire et le Poitou-Charentes.

Exclamations sur divers bancs.

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Ce nouvel ensemble compterait 9 millions d’habitants et représenterait un PIB de 230 milliards d’euros, supérieur à celui du Danemark, de la Finlande ou de la Roumanie. Cette nouvelle région Ouest-Atlantique aurait la taille critique pour peser dans une Europe dont le centre de gravité se déplace toujours plus vers l’Est entre Rome et Berlin. La nouvelle région constituerait un espace économique de premier plan pour l’agriculture, la pêche, l’agroalimentaire ou même la construction navale. Elle aurait la taille critique pour financer de grandes infrastructures que l’État ne veut ou ne peut plus financer, comme le nouveau franchissement de la Loire devenu indispensable à la fluidité des échanges de la façade atlantique, indépendamment d’ailleurs de la question de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes.

Quel mode de scrutin pour ces nouveaux élus ? Ne multiplions pas les élus territoriaux et les assemblées locales concurrentes. Monsieur le ministre, ayez le courage de revenir sur l’excellent principe du conseiller territorial qui siège tout à la fois au conseil général et au conseil régional. C’est le meilleur compromis, garant de la non-concurrence des politiques publiques à l’échelle régionale, de l’ancrage territorial et de la responsabilité locale que ne permettent malheureusement pas les scrutins de liste à la proportionnelle.

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Mes chers collègues, ayons l’audace de réformer en profondeur. Ne nous contentons pas des régions et des départements. Rénovons la France territoriale du sol au plafond. Ne nous contentons pas de bouger les lignes des périmètres et des compétences des régions et des départements. Partageons la même audace réformatrice pour les communes, les communautés de communes, les syndicats de communes, les pays, les communautés d’agglomération.

La France compte 40 % des communes de l’Union européenne. Est-ce vraiment raisonnable et efficace pour relever les défis du XXIe siècle ? Personnellement, je ne le crois pas.

Encourageons les réunions, les fusions, particulièrement quand les communes forment une même entité urbaine, comme c’est le cas au pays des Olones où j’ai l’honneur d’être maire et porteur d’un projet d’union concernant trois communes.

Supprimons les entités publiques intercommunales surnuméraires. Donnons une vraie taille critique à nos intercommunalités, bien au-delà du seuil de vingt mille habitants aujourd’hui évoqué. Osons aussi la décentralisation réelle des décisions de l’État, préférons la décentralisation à la déconcentration. Allons jusqu’au bout de la logique !

Je ne prendrai qu’un exemple : plaçons les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement sous l’autorité politique des futurs conseils régionaux, et non sous celle du ministre. L’État français doit faire confiance aux élus de la République, il doit faire confiance aux élus régionaux et à la décentralisation.

Mes chers collègues, défendons une vraie réforme de la décentralisation ambitieuse, globale et inventive. Ne perdons pas notre temps sur des cartes et des calendriers électoraux rédigés sur un coin de table normale à l’Élysée.

La France, vieille nation tramée d’identités culturelles et régionales,

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP

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mérite mieux que ces petits arrangements entre amis…

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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Monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, il y a deux ans, vous nous annonciez solennellement un acte III de la décentralisation. Depuis deux ans, vous donnez le spectacle d’une poule à qui on aurait coupé la tête. Ça part dans tous les sens !

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Vous avez commencé par abroger la loi de 2010 et supprimer le conseiller territorial. Quelle erreur ! Tout y était, pour qui avait la volonté sincère de réformer en profondeur notre organisation politico-administrative afin de la rendre plus efficace, plus lisible et moins coûteuse.

Mais tel n’est manifestement pas votre objectif. Vos arrière-pensées sont même bien peu avouables.

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Soucieux avant tout de maintenir vos positions électorales, vous avez modifié tous les modes de scrutin : sénatorial, municipal, intercommunal. Vous avez même inventé cet être hybride qu’est le binôme départemental et redécoupé les cantons pour tenter d’éliminer tout ce qui pouvait encore ressembler de près ou de loin à un élu de la droite et du centre.

Aujourd’hui, vous nous soumettez un texte qui redécoupe les régions de France, de façon arbitraire, à la manière du fait du prince. Pétrifiés par les résultats de votre majorité aux élections municipales et européennes,…

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… vous prenez soin de repousser les élections régionales et départementales à décembre 2015, car vous craignez tout simplement de les perdre.

La ficelle est un peu grosse et les Français ne sont pas dupes. Ils sont largement favorables à la fin de ce qu’il est convenu d’appeler le mille-feuille administratif, et ils ont raison ! Mais ils ne vous ont pas chargé de mettre le feu !

Vous auriez voulu fâcher le peu de soutiens qu’il vous reste dans les territoires, que vous ne vous y seriez pas pris autrement.

La bonne méthode, même vos amis élus locaux le reconnaissent, c’est à l’évidence de commencer par débattre de la répartition des compétences. Entre l’État et les collectivités d’une part, entre les collectivités entre elles d’autre part.

Pour ce, la représentation nationale doit disposer d’éléments objectivés et donc d’une étude d’impact sérieuse, sur les conséquences financières, fiscales et sociales de la nouvelle organisation. Vous ne pouvez laisser les Français, leurs élus et les fonctionnaires territoriaux dans une telle incertitude.

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Vous ne pouvez pas imposer sans débattre, vous les chantres de la démocratie participative. Vous ne pouvez ignorer que vous acculez les collectivités, avec une baisse sans précédent de leurs dotations, une pression folle sur leurs dépenses de fonctionnement – merci les rythmes scolaires et l’instruction des permis de construire ! – et un assèchement à craindre de leurs investissements.

Simplification administrative, efficacité de l’action locale, économies structurelles, proximité avec les citoyens : voilà quels auraient dû être les quatre piliers d’une véritable réforme territoriale.

Dois-je vous rappeler – si vous m’écoutez, monsieur le ministre – que la priorité des priorités, c’est la lutte contre le chômage et pour le pouvoir d’achat, pas le tripatouillage électoral ?

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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Au lieu de cela, tels des apprentis sorciers, vous vous êtes amusés à quelques-uns à redessiner la carte de France. Des deux côtés de cet hémicycle, nous cherchons encore la cohérence de ces nouvelles régions. Encore une fois, on nous parle de leurs limites, mais jamais d’un projet de territoire ni de l’intérêt des populations.

Pourtant, la seule question qui vaille est celle de savoir quelle est la région pertinente pour favoriser la compétitivité économique, la cohésion sociale et le respect de l’environnement dans un monde ouvert et une Europe à conforter ?

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Certaines régions ont répondu à cette question, monsieur le ministre. Je pense à l’Alsace. Mais je vous parlerai plutôt de la Bretagne.

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Cette Bretagne, si chère à nos coeurs – n’est-ce pas, Marc Le Fur ? –, cette région à forte identité, à fortes personnalités, à fort potentiel, car elle a maintes fois prouvé par le passé qu’elle savait faire face à l’adversité. Elle vient même de créer sa propre conférence sociale : un vrai succès, celle-là !

Vous avez opéré un redécoupage général, sauf à l’extrême ouest : point de Bretagne à cinq départements, point de Bretagne-Pays-de-la-Loire. Rien !

Ce n’est vraiment pas la peine de compter autant de ministres bretons dans vos rangs !

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Pensant ne fâcher personne, vous avez réussi à mécontenter tout le monde ! Et surtout les Bretons, qui goûtent peu la plaisanterie, monsieur le ministre. Vous les avez échaudés avec la fin des heures supplémentaires défiscalisées, tracassés avec la hausse des impôts et poussés à manifester avec l’écotaxe. Tenez-vous le pour dit, chers collègues de la majorité : le Breton sort, même quand il pleut !

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Et comme on dit en breton : Re ’zo re ! « Trop, c’est trop ! »

Au risque de doucher une nouvelle fois l’espoir né d’annonces si peu suivies d’effets depuis deux ans, je vous propose une petite recette au beurre salé. Premièrement, décidez dans les meilleurs délais possibles de la répartition des compétences et anticipez les conséquences financières, fiscales et sociales. Deuxièmement, permettez la création d’une assemblée unique de Bretagne…

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… qui rassemble dans un premier temps les départements bretons actuels avec la région Bretagne. Nous comptons sur vous, monsieur le président de la commission des lois, pour avoir le courage d’affronter les forces de résistance dans votre propre camp et nous comptons sur les députés bretons ici présents, quelle que soit leur sensibilité politique, pour appuyer cette démarche.

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Il n’y a que des députés de la République ici !

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Troisièmement, autorisez la Loire-Atlantique à rejoindre la Bretagne si tel est son désir. Voire d’autres, qui sait ? Car même si on ne naît pas Breton, on peut aspirer à le devenir.

Et puis pour finir, ou non, plutôt pour commencer, abrogez la loi qui réforme le scrutin départemental et redécoupe les cantons. Est-il bien raisonnable, monsieur le ministre, de modifier le mode d’élection d’une collectivité condamnée à disparaître ? Si l’élection des conseillers généraux, dont nous demandons qu’elle soit maintenue à mars 2015, si cette élection devait être la dernière, faites grâce aux électeurs et à notre porte-monnaie d’en modifier les modalités.

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe UDI.

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Monsieur le ministre, allez-vous parvenir à réformer notre architecture institutionnelle territoriale ?

Le sujet est difficile, je vous l’accorde. Vous tournez autour du pot depuis deux ans et je vous reproche, monsieur le ministre, un problème de méthode. Comme certains de mes collègues, je trouve que le problème est mal posé, pour ne pas dire mal engagé. Comme un certain nombre de mes collègues, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, je me fais un devoir de vous rappeler, pour avoir participé aux travaux sur la réforme territoriale sous la précédente législature, qu’à cette époque vous aviez contesté la création du conseiller territorial – qui n’était pas la panacée mais préfigurait un mouvement possible unissant les conseils généraux et les régions, ce que vous tentez de faire aujourd’hui.

À l’époque, vous aviez dit « non » au conseiller territorial, « non » à la suppression de la clause de compétence générale et surtout « non » à la suppression des conseils généraux. Puis vous êtes arrivés aux responsabilités. Pour ce qui concerne la réforme de l’État, la « modernisation de l’action publique » succède à la révision générale des politiques publiques, avec le même objectif louable : vous avez raison, il faut réorganiser les services de l’État, dans les administrations centrales parisiennes comme dans les services régionaux, et ce par souci d’efficacité, de simplification, de mutualisation, d’économies et d’adaptation aux nouveaux enjeux liés à la construction européenne ainsi qu’à la globalisation des échanges. Il s’agit donc de s’adapter à la mondialisation.

Vous avez commencé à travailler sur le rôle des futures métropoles, en leur confiant de nouvelles compétences et en préparant les pôles métropolitains. Puis est venu le tour des conseils généraux : redécoupage des cantons, élection de binômes paritaires, pour finir par l’annonce de la suppression des conseils généraux, dans son discours de politique générale, par Manuel Valls qui avait précédemment défendu le redécoupage des cantons et les départements !

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Le Président de la République, se voyant un peu dépassé par son Premier ministre Manuel Valls, a jugé bon de susciter un big-bang territorial, qui n’aura finalement pas lieu, parce que notre Constitution reste notre filet de sécurité : elle empêche de réformer nos institutions territoriales dans l’urgence et dans l’impréparation.

Notre Constitution nous oblige à prendre le temps de débattre, monsieur le ministre, ce qui je pense sera une bonne chose pour le pays.

Nous voici aujourd’hui réduits à redécouper la carte des régions de France, avec un seul critère arbitraire : diminuer le nombre des régions de vingt-deux à treize, sans fixer de critères précis, de paramètres précis, et surtout en dissimulant beaucoup d’éléments fondamentaux.

Comment nous mettre d’accord ici sur le redécoupage des régions, si les uns et les autres n’avons pas le même niveau d’information sur les objectifs poursuivis par le Gouvernement, qu’il s’agisse des compétences de ces futures régions, ou des services à la population, aux entreprises et aux territoires ?

Comment nous mettre d’accord, si nous n’évoquons pas ensemble les moyens financiers octroyés à ces régions pour assurer la nécessaire solidarité entre les territoires, la nécessaire péréquation entre les collectivités les plus aisées et les plus pauvres ?

Il faut savoir, pour parler d’une région que je connais bien, que le budget de la Bretagne, qui représente 1 million d’euros aujourd’hui, est à peu près équivalent à celui du conseil général d’Ille-et-Vilaine. en France ? Les budgets des régions, c’est en moyenne 395 euros par habitant, alors qu’en Europe, de tels budgets oscillent entre 2 000 et 3 000 euros.

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En Allemagne, puisque dans cet hémicycle il est souvent fait référence à ce pays, le budget régional s’élève à 4 000 euros par habitant.

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Qu’est-ce que les Allemands nous reprochent ?

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Une autre question a déjà été évoquée par mes prédécesseurs : celle de l’autonomie fiscale.

Enfin, il est un sujet très important pour ces futures régions : c’est le lien démocratique avec les populations. Nous devrions donc saisir l’opportunité du redécoupage pour définir un mode de scrutin, un mode de désignation des futurs conseillers régionaux qui fortifie le lien entre les élus et les populations.

Je viens de le dire, monsieur le ministre, beaucoup de questions, beaucoup d’inconnues, trop d’éléments dissimulés demeurent à ce jour : quel est le cap vraiment voulu par le Président de la République ? Quels objectifs le Gouvernement cherche-t-il à atteindre ? Maîtrise des dépenses publiques, efficacité de l’action publique, économies de gestion liées à une clarification des compétences – car les collectivités territoriales interviennent concurremment ?

Il y a certainement, en effet, matière à des simplifications administratives, de même qu’il est possible de favoriser une meilleure lisibilité pour que l’action publique territoriale soit mieux comprise.

Les faits sont têtus mais bien réels : certains observateurs ou commentateurs de l’actualité politique semblent être étonnés que des députés de la nation issus des diverses circonscriptions de France qui incarnent les territoires interviennent ici en manifestant un amour charnel de leur région dans l’unité de la République française.

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Oui, je dis bien un amour charnel de leur région dans l’unité de la République française.

En effet, nous venons de quelque part, la mondialisation des échanges, la globalisation sont des réalités qui s’imposent à nous et qui doivent nous conduire à fortifier l’action démocratique mais à partir de faits historiques, géographiques et culturels, en faisant en sorte de remettre en permanence l’humain, l’homme, au coeur de nos préoccupations.

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Nous devons concilier les nécessaires modernisation et adaptation de nos institutions tout en appuyant le monde économique à travers le développement d’axes de recherches et d’innovations. Le budget des régions de France dédié à la recherche et à l’innovation s’élève à environ 500 millions contre 9 milliards pour l’ensemble des Länder allemands.

Cette adaptation doit permettre de concilier les enjeux du monde moderne tout en continuant de donner un sens réel et humain à l’action publique.

Monsieur le ministre, voyant la carte que vous proposez, je formule une crainte – dont je ne sais pas si elle sera avérée – à cette heure du débat : je crains le gigantisme territorial, je crains qu’à l’avenir, dans les grands ensembles urbains et métropolitains, dans les grandes régions, ce ne soit les fonctionnaires territoriaux qui décident…

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… et non plus les élus.

Ce qui fausse également le débat, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, c’est que vous annoncez le redécoupage des régions après avoir annoncé la suppression des conseils généraux qui, pour nous, notamment dans les territoires dits ruraux, demeurent un échelon démocratique de proximité.

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La réalité, l’histoire, la géographie, la culture forgent l’identité de nos régions et celle de la France.

Je connais bien une région qui s’appelle la Bretagne. L’association Produit en Bretagne qui regroupe plus de 300 entreprises et 100 000 salariés constitue un exemple édifiant de ce que le monde économique peut réaliser à partir des faits historiques, géographiques et culturels.

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L’introduction à côté des vins, dans la loi d’avenir agricole, des bières, des cidres et des poirés issus de nos traditions locales est emblématique de la reconnaissance des savoir-faire ancestraux des territoires de France. Si nous soutenons certaines stratégies sur les appellations d’origines contrôlées et protégées ainsi que sur les indications géographiques protégées – je songe, par exemple, aux granits de Bretagne, des Vosges ou du Tarn – c’est que nous nous appuyons aussi sur des réalités territoriales, des faits historiques, géographiques et culturels.

Concernant plus particulièrement la Bretagne, il faut dire aux observateurs et aux commentateurs – notamment parisiens – que nous autres, Bretons, sommes marqués par un fait historique datant de 1941, lorsque, par un décret, le gouvernement de Vichy n’intégra pas ce que l’on appelait alors la Loire-Inférieure à la région de Rennes.

Depuis plusieurs dizaines d’années, certains Bretons se battent pour la réunification de leur région et voient dans ce redécoupage une opportunité historique pour procéder à sa reconfiguration. Il n’y a pas de raison pour que ce qui vaut pour la Normandie ne vaille pas pour la Bretagne !

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur

Cela n’a rien à voir !

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On voudrait faire passer ces Bretons pour des passéistes repliés et renfermés sur eux-mêmes. Est-il besoin de rappeler ici l’esprit d’ouverture, de tolérance et d’humanisme qui anime les populations de Bretagne ? Elles ont toujours été au rendez-vous de la construction européenne, elles ont toujours dit oui à l’Europe, y compris au Traité de Maastricht.

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Les Bretons ont toujours repoussé le vote extrême, même dans les périodes difficiles, comme au printemps dernier.

Monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, je formule deux priorités à propos de ce texte visant donc à reconfigurer les régions de France – je vois d’ailleurs des perspectives possibles d’évolution dans le redécoupage actuel concernant l’Ouest…

Sourires

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… et, plus particulièrement, la Bretagne, les Pays-de-la-Loire et la région Centre afin de parvenir à terme, par étapes, pragmatiquement, à la réunification de la Bretagne.

Je formule donc deux souhaits, monsieur le ministre : je défendrai le droit d’option, pour un département, de choisir sa région de rattachement.

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Pour un département, singulièrement, quelle que soit la région actuelle à laquelle il appartienne. Les départements doivent bénéficier de ce droit d’option pour choisir, à terme, leur région de rattachement.

En outre, monsieur le ministre, parce que je suis centriste, Girondin, naturellement favorable à la décentralisation…

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…et à la subsidiarité, je défendrai ici le droit à l’expérimentation.

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Laissons les régions et, notamment, les élus des territoires prendre des initiatives.

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Laissons-les s’organiser ! Des initiatives ont cours dans certaines régions.

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Les Alsaciens ont été des précurseurs en tendant à créer une assemblée d’Alsace.

En Bretagne, plusieurs élus – Jean-Jacques Urvoas, Marc Le Fur et bien d’autres – militent en faveur d’une expérimentation, pour que les élus des territoires puissent s’organiser, définir un schéma de compétence et, en ce qui concerne notre région, s’orienter vers une trajectoire préfigurant une assemblée de Bretagne regroupant dans les meilleurs délais quatre départements, avec la perspective d’en compter cinq à terme – nous sommes pragmatiques.

Je le dis pour les Bretons et pour le pouvoir central parisien : la réunification de la Bretagne ne signifie pas autonomie ou indépendance.

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La réunification de la Bretagne, c’est le projet que nous portons mais dans l’unité républicaine, sous la protection de l’État républicain français.

Cela va sans dire mais c’est aussi important de le dire.

Au final, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, je souhaite souligner les enjeux qui, à mon sens, structurent ce projet de redécoupage des régions : oui à la nécessaire adaptation et modernisation de nos territoires, oui à la clarification des compétences, oui au renforcement du lien démocratique entre les populations et les élus – alors qu’il s’est distendu depuis quelque temps –, oui au renforcement des financements en faveur des régions, oui à l’organisation de la péréquation et de la solidarité entre les territoires et entre les institutions en veillant à trouver le juste équilibre entre les territoires peu denses, ruraux, les villes moyennes et les métropoles, oui à la réalisation d’économies, allons vers la simplification et l’efficacité, soyons-en de fervents acteurs, travaillons au redressement des comptes publics, soutenons le monde économique pour contribuer au redressement productif de la France…

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…et créer de nouveaux emplois ! Enfin, préservons l’identité culturelle de nos régions dans l’unité républicaine !

Applaudissements sur les bancs du groupe UDI et sur plusieurs bancs du groupe écologiste.

Discussion générale

La séance, suspendue à dix-sept heures dix, est reprise à dix-sept heures vingt-cinq.

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La séance est reprise.

La parole est à M. Yves Goasdoué.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, bien que m’appelant Gouasdoué, j’éviterai tout sujet breton.

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C’est dommage, mais cela dépasse ma compétence.

Quelques mois avant le début de la campagne présidentielle, dans ma bonne ville de Flers, le futur chef de l’État me faisait le plaisir de clôturer en ces termes un colloque sur l’aménagement du territoire : « Tout commencera par les régions. » Nous y sommes. La réforme était attendue, demandée par tous, les rapports unanimes sur ce point et nombreux, leurs rédacteurs prestigieux ; bref, tout le monde était d’accord.

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Mais, mal français entre tous, au moment de franchir le pas, toutes les raisons sont bonnes pour différer, demander de nouvelles études, de nouvelles assises, de nouveaux colloques, critiquer la méthode, alors que toutes les méthodes sont critiquables, et surtout…. pour ne rien décider.

La France doit pourtant se doter de territoires à taille efficiente. Je ne crois pas que cela éloigne les responsables, y compris les élus, des citoyens. La confusion sur ce point est assez redoutable, mêlée quelquefois, convenons-en, de mauvaise foi. Les régions n’ont jamais été des territoires de proximité immédiate. Elles n’ont pas pour mission de gérer la quotidienneté, mais ont pour objet d’organiser les fonctions supérieures de vastes territoires – les infrastructures routières, portuaires, aéroportuaires, la recherche, le développement de filières économiques innovantes. Elles exerceront ces compétences dans le cadre des lois de la République. Lors de l’examen du second projet de loi à venir, nous devrons traiter de la quotidienneté dans le cadre du bloc communes-intercommunalités, et certainement aussi réfléchir au devenir des départements.

Territoires plus vastes, certes, mais lesquels ? Il n’y aura jamais de carte parfaite, nous le voyons bien. Beaucoup d’entre vous voudraient légitimement voir adoptée telle ou telle modification. Certaines nous ont été proposées, ce qui prouve que la carte du Gouvernement n’est pas immuable. Des collègues dénoncent à la fois le caractère évolutif des propositions qui nous sont faites et le caractère autocratique, voire technocratique, des regroupements qui nous sont proposés. Il faut, mes chers collègues, choisir l’angle d’attaque car ce ne peut être les deux.

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Le Parlement fait juste son travail. La modernisation des régions françaises est un symbole très fort. C’est une première étape.

À l’automne, nous définirons les compétences des collectivités territoriales. Quel sera à cet égard l’avenir des départements et des groupements de communes ? Comment organiserons-nous les communes ? Comment allons-nous promouvoir la bonne idée de communes nouvelles ? L’effet carte des régions va créer un bouleversement salutaire dans le paysage institutionnel territorial. Nous connaissons les grandes orientations puisque le projet de loi a déjà été déposé sur le bureau du Sénat. Il nous faudra éviter, monsieur le ministre, d’être trop jacobin. Les mêmes solutions ne peuvent pas s’appliquer partout, la France est trop riche et trop diverse pour cela. Mais j’ai noté que vous avez fait, dans votre intervention liminaire, quelques ouvertures sur ce point. Si nous voulons donner une réelle efficience à la décentralisation, nous devrons rénover le cadre fiscal des collectivités locales, spécialement celui des régions ; cela a déjà été dit, mais il faudra beaucoup de courage car ce sera le point délicat de notre affaire, chacun ayant bien compris que nous devrons opérer dans un cadre contraint d’optimisation de la dépense publique. À cet égard, je dois dire que l’intervention de mon collègue de Courson m’a paru très intéressante.

Pour terminer, un mot sur la Normandie, non pas parce que je suis moi-même normand, mais pour illustrer ce que nous devrions collectivement faire.

Pour ce qui est du nom de la future région, c’est très pratique : ce sera « Normandie ».

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Pour le reste, croyez-moi et contrairement à ce que peut laisser croire le lyrisme entraînant de notre collègue Alain Tourret, ce n’est pas si évident que cela.

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En effet, Avranches et le Sud-Manche sont plutôt tournés vers la Bretagne, le pays d’Alençon vers la Sarthe et la région Centre – je n’ose pas parler de Cherbourg devant le ministre parce qu’il pourrait avoir des tentations d’annexion du sud de l’Angleterre. (Sourires.)

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Très bonne idée, surtout avec les îles anglo-normandes !

Sourires.

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Au-delà de cette note d’humour, je souligne qu’aux franges de nos régions, nous avons tous la même difficulté et les mêmes problèmes, le débat le montre.

Mais ceci ne doit pas nous détourner de l’essentiel ni nous empêcher de bâtir des projets pour les habitants de nos nouvelles régions. Construisons des dynamiques économiques, touristiques et culturelles innovantes ; soulignons les atouts au lieu de craindre les faiblesses.

« Le pessimisme est d’humeur, l’optimisme est de volonté », disait le philosophe – normand – Alain. Telle sera notre doctrine en Haute et Basse Normandie. C’est notre responsabilité, et c’est à l’aune de ce principe que nous serons, in fine, jugés par les Français.

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, le projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral se veut un projet d’importance majeure, destiné à modifier en profondeur notre organisation territoriale et nos institutions. Toutefois, les conditions de son élaboration permettent déjà de douter de ses résultats. Élaboré à huis clos au sein du bureau présidentiel, ce texte suscite déjà, en effet, de nombreuses oppositions. Non seulement nos collègues sénateurs l’ont rejeté, mais la majorité de notre assemblée se montre relativement divisée à son sujet, malgré les modifications quotidiennes apportées aux limites des nouvelles régions.

Si la simplification de notre mille-feuille territorial est indispensable, et d’ailleurs souhaitée par un grand nombre de nos concitoyens, elle ne doit pas se faire dans l’improvisation ni dans la précipitation. Et compte tenu du caractère approximatif de la vision territoriale adoptée au plus haut niveau de l’État, ce texte ne saurait être adopté sans avoir recueilli l’adhésion des Français et de leurs élus.

Un retour sur les deux années écoulées permettra de souligner l’incohérence de l’approche. Ainsi, le conseiller territorial, qui avait été institué par la précédente majorité, a été supprimé en 2012. Cette réforme aurait pourtant permis un rapprochement harmonieux entre les départements et les régions, une indispensable clarification des compétences, mais également une représentation de tous les territoires, notamment les territoires ruraux.

Puis, en 2013, la majorité actuelle a adopté une loi concernant l’élection des conseillers départementaux et modifié la carte cantonale. Avant même d’être vraiment entrée en application, cette loi « ruralicide » est donc remise en cause, mais la suppression annoncée des départements signe également la fin de la représentation politique du monde rural.

Il y a quelques mois, en janvier 2014, le Président de la République s’était pourtant déclaré, dans une allocution à Tulle, contre la suppression des départements, la loi du 27 janvier 2014 rétablissant même à leur bénéfice la clause de compétence générale. Mais, quatre mois plus tard, coup de théâtre : le tout nouveau Premier ministre de François Hollande annonce la disparition des départements à l’horizon 2020. Le texte sur les compétences des collectivités territoriales dont nous serons prochainement saisis doit en effet vider de sa substance ce maillon historique de notre organisation territoriale.

Par la suite, au début de juin, les ciseaux de l’Élysée sont sortis pour redécouper à la hâte les régions. Et aujourd’hui, six semaines plus tard, nous nous apprêtons à examiner une nouvelle carte territoriale dont le contenu change presque chaque matin. Cela permet, soit dit en passant, de repousser d’un an une élection bien mal engagée pour l’actuelle majorité, laquelle détient, faut-il le rappeler, vingt et une régions sur vingt-deux !

Le flou est donc savamment entretenu au plus haut sommet de l’État sur ce que doit être l’organisation territoriale de notre pays. Or d’après la meilleure amie de M. Hollande, « avec lui, quand c’est flou, c’est qu’il y a un loup ».

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Dans ce contexte, les parlementaires que nous sommes, qui avons la responsabilité de statuer sur cette nouvelle organisation, ont bien du mal à s’y retrouver. Je plains d’ailleurs les ministres et les députés de la majorité qui, à chaque intervention du Président de la République, se demandent quel reniement il va encore leur imposer. Êtes-vous certain, monsieur le ministre, que vous n’aurez pas à faire machine arrière dans quelques mois ? Décidément, avec François Hollande, le changement d’avis, c’est tout le temps !

Exclamations sur les bancs du groupe SRC.

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Pourtant, mes chers collègues, il ne s’agit pas de faire une réforme territoriale pour le plaisir, mais bien d’adapter et de simplifier notre organisation territoriale, de réaliser des économies, et de trouver les ressources financières dynamiques et pérennes susceptibles de donner aux territoires la capacité d’investir et de soutenir la croissance. La nouvelle organisation électorale devra ainsi maintenir une proximité entre les Français et leurs élus territoriaux et permettre l’aménagement harmonieux et solidaire de l’ensemble des territoires composant les régions.

Or tel n’est pas le cas du projet de loi dont nous discutons. Vous souhaitez, monsieur le ministre, faire adopter une nouvelle carte régionale et réduire le nombre des régions sans que nous ayons pu débattre au préalable de la répartition des compétences induite par la disparition programmée des départements, ni des ressources propres des collectivités. Ces dernières sont pourtant particulièrement touchées par la diminution sans précédent des dotations de l’État, qui risque de remettre en cause le fonctionnement et l’investissement de nombre d’entre elles.

La logique aurait donc voulu que vous présentiez d’abord une loi sur la répartition des compétences.

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Franchement, depuis le début de ce quinquennat, nous marchons souvent sur la tête – quand ce n’est pas à reculons puisque, je le répète, la réforme territoriale que nous avions votée devrait déjà s’appliquer aujourd’hui. Que de temps perdu !

Venons-en néanmoins au texte que vous nous soumettez, ainsi que sur cette nouvelle carte des régions qui suscite bien des interrogations.

Il est nécessaire d’augmenter la taille de nos régions, c’est indiscutable. Mais à vouloir à tout prix accroître leur superficie, vous aboutissez à d’absurdes agrégats de territoires. Alors que vous auriez dû respecter des critères géographiques, historiques et économiques, vous les avez totalement occultés au profit du seul critère politique, ce que confirment les évolutions subies par la carte au gré des consultations du chef de l’État.

Il eût par ailleurs été nécessaire d’opter pour un découpage plus fin et d’inclure dans la discussion la question de l’appartenance de tel ou tel département à telle ou telle région.

Mes chers collègues, chacun de nous sait à quel point il est nécessaire de réformer notre organisation territoriale. Celle-ci a fait l’objet, ces dernières années, de nombreuses réflexions au sein de toutes les tendances politiques. Je ne reproche donc pas à la majorité de vouloir avancer dans ce domaine.

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Cependant, s’agissant d’un chantier qui va déterminer l’organisation de la France pour des décennies, je regrette qu’elle navigue à vue, au gré des vents, ou plutôt en fonction du poids politique des ministres ou des « éléphants » du Parti socialiste. Quoi que vous puissiez en dire, en effet, la réforme a pâti d’une grande improvisation. Oui, il est important de simplifier notre fameux « mille-feuille », mais votre projet n’a rien à voir avec la réforme ambitieuse, réfléchie, et cohérente dont nous avons besoin. Les conditions d’élaboration de ce texte, ses imprécisions laissent malheureusement augurer de lendemains qui déchantent, notamment pour les territoires ruraux et leurs habitants, qui ne seront plus, ou quasiment plus représentés dans les futurs conseils régionaux.

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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Je vous félicite, monsieur le ministre, d’être aussi souvent présent au cours de cet intéressant débat, malgré les nombreuses occupations qui sont les vôtres.

Tous les orateurs s’expriment avec leur coeur et en fonction de leur expérience de la vie locale – beaucoup, en effet, sont encore des élus locaux. Sur de nombreux sujets – comme les limites des régions ou leurs compétences –, on voit bien que leurs opinions transcendent les divisions entre groupes. Par exemple, Jacques Myard souhaiterait une France plus fédérale, comme il nous le confirmera sans doute tout à l’heure…

Sourires.

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Chacun s’exprime donc avec son talent. Mais Hervé Gaymard, en défendant la motion de rejet préalable, a résumé le sentiment de tous les élus de l’opposition en parlant de précipitation et d’improvisation.

Le pire, c’est ce qui s’est passé avec la fameuse clause de compétence générale. Au sein de la majorité précédente, j’étais de ceux qui s’opposaient à sa suppression, et j’ai donc approuvé votre décision de la rétablir. Mais voilà que vous la supprimez à nouveau ! De tels allers et retours ne peuvent qu’étonner nos concitoyens. Les élus locaux n’y comprennent plus rien, non plus que les journalistes de la presse quotidienne régionale.

Je ferai plusieurs remarques au sujet de ce texte et de celui que nous examinerons à l’automne.

Tout d’abord – et je m’excuse auprès de ceux qui pensent autrement –, je suis un girondin.

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C’est ainsi ! J’ai donc, à ce titre, apprécié les grandes périodes de décentralisation qu’a connues notre pays. Je n’étais pas encore parlementaire, mais je participais déjà à la vie publique lorsque le Président Mitterrand, avec Pierre Mauroy et Gaston Defferre, a fait adopter les premières lois de décentralisation, et j’ai plutôt trouvé qu’elles allaient dans la bonne direction. D’ailleurs, une partie de l’UMP et de l’UDF a fini par les approuver après les avoir combattues. Et la même chose s’est produite entre 2002 et 2004, quand M. Chirac était Président et M. Raffarin, Premier ministre. La gauche avait alors hurlé contre le transfert aux départements des agents techniques, ouvriers et de service, mais si vous discutez aujourd’hui avec l’employé d’un collège, il s’estimera bien mieux traité par son conseil général, qui le connaît et le traite comme un individu, que par la Rue de Grenelle, qui le considérait comme un pion et gérait sa carrière par ordinateur. Le mouvement de décentralisation a donc été utile à notre pays ; droite et gauche lui ont donné ses lettres de noblesse, tout en tentant de développer pour le mieux nos territoires.

Or j’ai le sentiment que nous assistons aujourd’hui à un mouvement de recentralisation. Car, à cette entreprise, monsieur le ministre – et peut-être serez-vous d’accord avec cette idée, à défaut de pouvoir le reconnaître explicitement –, il manque une réforme de l’État. La gauche a critiqué la révision générale des politiques publiques, menée par le gouvernement de François Fillon, mais cette politique a eu l’avantage de simplifier considérablement la carte des administrations locales. Dans ce domaine, elle est même allée assez loin – trop loin, peut-être. En tant qu’ancien ministre de l’agriculture, je regrette par exemple la disparition des directions départementales de l’agriculture et de la forêt.

Quoi qu’il en soit, si vous vouliez vraiment faire un geste fort, monsieur le ministre, vous supprimeriez les 95 préfets de départements, ne laissant que les préfets de région pour représenter l’État, tandis que, sur le terrain, un corps de sous-préfets généralistes, assistés de petites équipes, serait au service des élus et de la vie associative, ferait respecter l’ordre public et coordonnerait les forces de sécurité. Mais supprimer les élus dans les départements tout en maintenant les préfets, pour moi, cela s’appelle de la recentralisation.

Il faut adapter l’organisation de l’État. Vous demandez aux élus de faire des économies, mais l’État pourrait donner l’exemple dans les départements. L’absence d’une vraie réforme de l’État est donc la première chose que je reproche à ces deux textes.

J’en viens à la question de la taille des régions, qui fait l’objet d’un débat entre nous, comme l’a admis Hervé Gaymard. Ce dernier, à l’instar d’Alain Juppé, a ainsi pointé le risque du fédéralisme que ferait courir la constitution de trop grandes régions. Pour ma part, ce qui m’intéresse, ce n’est pas leur taille, mais plutôt leur capitale, ou plutôt la métropole qui porte le territoire environnant, celle qui joue un rôle en matière d’aménagement du territoire. Ainsi, à l’échelle de l’Allemagne, la Sarre est une petite région, mais cela ne l’empêche pas de développer un projet politique.

L’important, pour une région, n’est donc pas d’être grande, mais d’être dotée d’une métropole régionale : Lille, Toulouse, Bordeaux, Nantes sont des villes qui comptent à l’échelle européenne. C’est pourquoi je suis sensible à la question de savoir si les régions dont le projet de loi nous propose la création disposeront d’une vraie capitale : pas seulement une capitale au sens administratif et culturel, mais une métropole capable de porter des projets et d’entraîner les territoires situés autour d’elle. À cet égard, l’amendement déposé par le groupe socialiste, et sur lequel, monsieur le président de la commission des lois, vous vous êtes exprimé favorablement à titre personnel, faute d’examen par la commission, me semble aller dans le bon sens.

Ce qui posait problème, par exemple, dans le projet de fusionner le Limousin, la région Poitou-Charentes et le Centre, c’est l’absence de métropole, même si la région ainsi constituée n’aurait pas manqué de villes sympathiques – Limoges, Tours, Orléans, Blois, Poitiers. En revanche, une région regroupant Limousin, Aquitaine et Poitou-Charentes disposerait d’une vraie métropole, reconnue sur le plan national, européen et international : la ville de Bordeaux. Je suis donc favorable à de grandes régions, non pour leur taille, mais dans la mesure où elles peuvent s’appuyer sur de véritables métropoles.

Le danger, dans tout cela, et ce sera l’objet de mon quatrième et avant-dernier point, c’est le mauvais sort que vous faites aux départements. Je ne parle pas de mauvais sort politique, cela a été évoqué tout à l’heure. Il est vrai qu’il est absurde de faire ce redécoupage cantonal très contesté, qui fait l’objet de recours que le Conseil d’État, sur ordre, examine à la vitesse de la mitrailleuse Hotchkiss, mais il est également absurde d’organiser des scrutins au mois de décembre 2015 pour élire des conseillers généraux, ou départementaux, avec ce système bizarre du binôme, pour qu’ils soient appelés à éteindre les lumières ou à couper le chauffage le plus rapidement possible. On entend aussi d’autres bruits : le Gouvernement reculerait finalement sur la suppression des départements, il les garderait en milieu rural. Et il est vrai que lorsque le Président de la République renvoie à l’horizon 2020, il prend une option sur l’avenir pour le moins aléatoire en termes politiques.

Mais laissons là la question électorale. À partir du moment où vous faites de très grandes régions, les départements sont nécessaires. Dans cette région qui me va bien, Aquitaine-Limousin-Poitou-Charentes, lorsque le maire de Bordeaux, Alain Juppé, président de la communauté urbaine de Bordeaux, parlera avec le président de la région, cela aura du poids, mais quand le président d’une communauté de communes de 20 000 habitants, dans la Creuse ou ailleurs, parlera avec le même président de la région, il manquera un élément d’aménagement du territoire, de péréquation : le département. Franchement, autant je comprends ce qu’ont fait Michel Mercier et Gérard Collomb à Lyon, avec une métropole qui reprend les attributions du département et un département de la couronne, autant vouloir faire de très grandes régions et supprimer les départements c’est vraiment vouloir fermer la lumière dans une large part de la ruralité française. Cela passe vraiment très mal sur l’ensemble du territoire, au-delà des frontières politiques qui peuvent nous séparer dans cet hémicycle, mais vous le savez déjà, et vous en aurez la confirmation dans les résultats des élections sénatoriales du 28 septembre prochain.

J’en viens au cinquième et dernier point de mon propos : les propositions du groupe majoritaire pour la région qui est la mienne, la région Poitou-Charentes. Disons-le tout de suite : je suis favorable à ce que vous proposez pour cette région. Je voterai d’ailleurs l’article 1er de ce projet de loi, si tant est qu’il reste en l’état que je souhaite une fois que nous aurons terminé la discussion. Ma raison est la suivante : ce n’est pas tant que nous voulions être unis à l’Aquitaine – nous le voulions, bien sûr –, c’est que nous tenions avant tout à Bordeaux, qui est déjà, pour notre région, une capitale, avec la chambre régionale des comptes, la cour administrative d’appel, la direction interrégionale des routes, la direction interrégionale de la mer, l’aéroport, le journal Sud Ouest. L’organisation administrative et la zone de défense suivent déjà le modèle proposé, autour de la métropole bordelaise ; celle-ci a d’ailleurs connu ces dernières années un développement qui la rend de plus en plus attractive. C’est donc une disposition raisonnable, qui correspond d’ailleurs à la volonté des populations. Le journal Sud Ouest a fait un sondage en Charente-Maritime : l’idée d’une fusion du Poitou-Charentes avec l’Aquitaine recueille 84 % d’opinions favorables parmi les Charentais-Maritimes, y compris à La Rochelle, et 75 % d’opinions favorables parmi les Charentais ; dans la Vienne, plus lointaine, la même possibilité recueille de 65 % à 70 % d’opinions favorables. Et, c’est vrai, l’opinion, les pétitions, les manifestations, les motions votées par tous les conseils municipaux vont dans cette direction. Je suis heureux que le message ait été entendu, et je remercie celles et ceux qui le portent en Charente-Maritime comme dans les autres départements de la région, à gauche, comme Delphine Batho, Suzanne Tallard, Olivier Falorni, ou à droite, comme Didier Quentin.

L’affaire n’est pas neuve. Avec Jean-Pierre Raffarin, que vous-même, monsieur le ministre de l’intérieur, et le Premier ministre citez souvent, nous avions écrit, en 2008, au Président Sarkozy ; Jean-Pierre Raffarin était sénateur et j’étais moi-même membre du Gouvernement. Nous proposions déjà un rapprochement, qui nous semblait de bon sens, entre Poitou-Charentes et Aquitaine.

Je serai attentif à tout ce que diront mes collègues tout au long de cette intéressante discussion générale. L’article 1er sera également l’objet de longs débats et de votes, et nous avons l’intention, tous, d’y participer avec beaucoup de coeur. C’est un moment important mais, je le regrette, je ne voterai pas ce texte, pour toutes les raisons que je vous ai indiquées. Je voterai son article 1er, parce que, quand on me tend la main, j’aime la prendre, mais je trouve que c’est un peu une occasion manquée de faire une vraie réforme de la France. Encore eût-il fallu inclure une grande réforme de l’État. Un troisième texte, dont l’objet serait une telle réforme, nous offrirait peut-être une vraie vision d’ensemble.

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, la réforme territoriale qui nous est présentée repose, sans aucun doute, sur un bon diagnostic, mais, malheureusement, les solutions proposées sont peut-être un petit peu moins bonnes. En effet, dans le discours d’investiture qu’il a prononcé le 8 avril dernier, le Premier ministre Manuel Valls a annoncé une vaste réforme de l’organisation territoriale de la France avec, à terme, un regroupement des régions et la suppression totale des départements. Le diagnostic est peut-être bon car le mille-feuille territorial repose sur des structures dont la configuration n’a pas du tout suivi les évolutions de la société. En revanche, on peut le dire aujourd’hui, la solution n’est pas pertinente.

Plus précisément, le projet de réforme territoriale tel qu’il a été annoncé le 2 juin par le Président Hollande relève, à mon sens, de l’improvisation et du cafouillage. Il relève de l’improvisation car les choix faits ne sont pas très pertinents. Il relève du cafouillage car, d’un jour à l’autre, le président dit tout et son contraire. Il n’est donc pas surprenant que les protestations se multiplient, à l’encontre des futures institutions locales et aussi, encore plus, à l’encontre de la nouvelle carte des régions.

Vous allez en effet créer des institutions sans proximité avec le terrain. Ces nouvelles institutions s’organiseront sur deux niveaux : d’une part, de grandes régions, ce qui entraînera la suppression des départements, et, d’autre part, de grandes intercommunalités ayant vocation à absorber les communes. C’est un non-sens total car, dans l’exercice de leurs compétences, que nous ne connaissons d’ailleurs toujours pas, ces deux niveaux n’auront plus aucune proximité avec le terrain. Si l’on crée de grandes régions, il est alors indispensable de conserver un échelon de proximité, c’est-à-dire les départements. Si, au contraire, on supprime les départements, il faut alors des régions qui correspondent au statu quo actuel. De même, les communes, notamment en zone rurale, remplissent des fonctions indispensables pour la vie au quotidien ; leur absorption par des intercommunalités serait une fausse bonne idée. Si l’on s’obstinait dans cette voie, le bon sens serait au moins de préserver un minimum de proximité avec des intercommunalités n’ayant pas une taille démesurée. C’est tout le contraire de ce que propose le Président de la République et le Gouvernement, qui exigent un minimum de 20 000 habitants pour chaque intercommunalité !

Venons-en à l’importance des départements. Ceux-ci exercent des compétences de proximité – routes départementales, aide sociale… – qui ne pourront pas être gérées correctement dans le cadre de nouvelles grandes régions à la superficie tentaculaire. À l’évidence, si on crée de très grandes régions, il faut parallèlement maintenir des structures de proximité. Cela ne justifie pas pour autant un statu quo des départements. Ceux-ci ont été découpés en 1790, à une époque où les moyens de déplacement et de communication étaient rudimentaires. Comme le préconisait Michel Debré en 1947, dans son livre La Mort de l’État républicain, une cinquantaine de grands départements suffirait pour remplacer la centaine actuelle.

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Pour réduire le mille-feuille territorial, on peut, soit supprimer une couche, soit réduire le nombre de collectivités à l’intérieur de chaque couche. En effet, si on augmente la taille des régions, il faut, au contraire, conserver un échelon intermédiaire indispensable pour la proximité avec le terrain.

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Une réforme réaliste du mille-feuille territorial passerait ainsi par la création de grandes régions subdivisées en grands départements. L’objectif serait de réduire d’environ moitié leur nombre total. Toutefois, une opération de ce type doit aussi tenir compte des spécificités locales. Pour cela, lorsqu’une région de taille modeste a une identité forte, il faudrait la conserver, mais en fusionnant alors la région et les départements concernés.

J’en viens à l’Est de la France, à propos duquel une réflexion un peu plus poussée est nécessaire. Le projet initial de redécoupage des régions dans le Nord et l’Est de la France était globalement pertinent. En effet, le lundi matin, nous avions une région qui réunissait le Nord-Pas-de-Calais et la Picardie, et une autre qui réunissait l’Alsace, la Lorraine et Champagne-Ardenne. Cette configuration géographique très compacte aurait donné une bonne cohérence administrative aux territoires situés entre la région parisienne et les frontières. Du point de vue de l’aménagement du territoire et des infrastructures, les complémentarités étaient évidentes. Au Nord : autoroute A1, TGV Nord, tunnel sous la Manche. Dans l’Est : autoroutes A4 et A31, TGV Est. En outre, cette région Est aurait été équilibrée par une organisation autour de trois pôles urbains : Reims, Metz-Nancy et Strasbourg. Du côté du Nord, la ville de Lille aurait joué le rôle de métropole d’une véritable grande région.

À la suite des cafouillages de dernière minute, le Président Hollande a arbitré en proposant une région Picardie-Champagne-Ardenne. C’est, à mon sens, un mouton à cinq pattes car il n’y a vraiment rien de commun entre le département de la Somme, situé au bord de la Manche et celui de la Haute-Marne, à proximité de Dijon. De même, la Picardie est desservie par l’autoroute A1 et le TGV Nord, alors que Champagne-Ardenne l’est par l’autoroute A4 et le TGV Est.

Le bon sens exige manifestement qu’on revienne au projet initial ; nous l’avons évoqué, et nous avons, pour partie, voté en ce sens. De la sorte, avec une grande région est et une grande région nord, on aurait une parfaite cohérence avec les solidarités territoriales et on éviterait de créer inutilement une région supplémentaire.

Comme mon collègue Dominique Bussereau, je voterai l’article 1er, monsieur le ministre.

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Je le crois effectivement conforme à ce que je souhaite, mais j’attends le terme de l’examen du texte pour me déterminer sur l’ensemble.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe SRC.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, au mois de janvier, le Président de la République lançait une initiative afin de renouveler l’organisation, le rôle et le périmètre de nos régions. Au début, bien que député d’opposition, j’ai pensé que ce projet pouvait être bon pour l’ensemble de notre nation.

J’y voyais une occasion de renouvellement, de respiration, pour nos territoires. J’y voyais aussi une chance à saisir pour ma région, la Bretagne. Au début, je me suis dit « Chiche ! Voilà peut-être une façon intelligente de sortir de la léthargie dans laquelle s’enferme la France depuis deux ans ! » J’y voyais la possibilité de créer des régions non pas seulement administrées mais enracinées dans des réalités locales économiques, sociales et peut-être, plus encore, culturelles. J’y voyais la possibilité de réduire réellement le mille-feuille administratif en supprimant les départements qui ont apporté une contribution à notre histoire mais dont l’histoire, à l’évidence, s’achève. J’y voyais la conjonction de deux exigences, qui ne sont pas contradictoires : réaliser des économies et rendre notre démocratie plus lisible. J’y voyais l’occasion de pousser plus loin la décentralisation et de faire de la région un vrai point d’équilibre face aux métropoles et de rester ainsi fidèle notre organisation du territoire. Pour protéger nos petites villes, pour protéger le monde rural face aux métropoles, les départements ne sont plus à l’échelle, c’est la région qui l’est. J’y voyais, comme Isabelle Le Callennec, comme Thierry Benoit, comme Gilles Lurton, comme Philippe Le Ray, la possibilité de réunifier enfin la Bretagne, de retrouver Nantes et le cinquième département, la Loire-Atlantique. Cela aurait permis d’en finir avec le décret de Vichy de 1941, qui divisa la Bretagne et lui arracha Nantes, et la Loire-Atlantique, Châteaubriant, Clisson et Guérande.

Mais le 2 juin 2014, funeste jour s’il en est, lorsque du haut de son bureau élyséen le Président de la République dessina la carte, j’ai compris que nous allions à l’échec !

Cet échec est fondamentalement dû à l’idéologie jacobine qui sous-tend tout le projet gouvernemental. Ce jacobinisme se révèle d’abord dans la méthode qui a présidé à l’élaboration de ce projet de loi, et de cette nouvelle carte des régions. Pour le jacobin, tout vient d’en haut ! L’idée, puis les décisions doivent émaner d’un être supposé éclairé, et nécessairement parisien. C’est ce à quoi nous avons assisté le 2 juin : une carte – ou pour mieux dire : plusieurs cartes, puisqu’il y en a eu plusieurs dans la même journée – a été élaborée dans un bureau à l’Élysée, puis présentée ex cathedra le soir même au bon peuple.

La France est le seul pays où l’on peut encore assister à de telles dérives ! Imagine-t-on un seul instant Mme Merkel découpant la Bavière à Berlin ? Une carte authentique ne se dessine pas, elle se constate. Hervé Gaymard l’a brillamment dit hier à sa façon. Les pouvoirs publics ont simplement vocation à constater les réalités humaines qui préexistent à leur décision, et qu’ils doivent respecter.

Le 2 juin fut tout autant caractérisé par l’amateurisme que par le dirigisme.

Amateurisme, d’abord : rappelons-nous ce communiqué de presse du Président de la République, transmis aux médias à 18 heures, dans lequel était laissé en blanc le nombre final de régions, qui ne fut connu qu’à 22 heures ! C’est dire si les arbitrages ont été rendus tard !

Dirigisme, ensuite. Ceux qui ont élaboré la carte n’ont à la bouche que les mots de République, de démocratie, de démocratie participative, de débat… Mais il n’y a pas eu de débat, rien du tout ! Les collectivités locales concernées n’ont pas été consultées, et l’on n’a pas pas tenu compte de l’opinion des populations. On n’a pas tenu compte, en particulier, des sondages. Par exemple, les sondages réalisés à propos de l’unification de la Bretagne sont constants, que l’on interroge les Bretons des quatre départements de la Bretagne administrative ou les Bretons de Loire-Atlantique.

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C’est vrai !

Tous aspirent, de manière constante, à construire un avenir commun, mais on ne les écoute pas.

C’est d’autant plus absurde qu’il ne s’agit pas de démembrer l’administration de l’État, mais de bâtir des collectivités humaines. Vous ne tenez pas compte du peuple, et pas davantage de ses représentants : je suis convaincu que la carte ne bougera pas – mis à part quelques évolutions permises par un accord entre les barons du parti socialiste. Une autre méthode était pourtant possible : rappelez-vous le rapport Balladur ! Deux anciens Premiers ministres, Édouard Balladur et Pierre Mauroy, ont travaillé durant des mois, multiplié les auditions, et élaboré une carte intelligente. Cette carte respectait la logique alsacienne, et reconstituait – comme nous le souhaitons – la Bretagne à cinq départements.

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Hélas, la méthode de MM. Balladur et Mauroy n’a pas été retenue, au bénéfice d’une méthode terriblement jacobine. Dans votre logique, tout vient du centre, et la carte ne pourra être amendée qu’à la marge, en fonction des voeux de quelques barons socialistes. Il est vrai que nous n’avons guère entendu les élus bretons défendre la Bretagne à cinq départements ! Pourtant, ces cinq départements ont élu trente députés socialistes, et il y a deux ministres bretons au Gouvernement qui, vu l’importance de leurs fonctions, pourraient avoir une certaine influence. Même le président de la commission des lois est breton, bien qu’on ne l’ait guère entendu s’exprimer en faveur de la Bretagne à cinq départements.

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Je salue Mme Appéré qui, bien que partisane de ce que j’appelle la confusion de la Bretagne et des Pays-de-la-Loire, a au moins le mérite de cohérence.

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C’est réducteur !

Ils étaient nombreux, ceux que nous entendions naguère se déclarer favorables à la Bretagne à cinq départements : on ne les entend plus.

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Il est vrai que la Bretagne multiplie les déconvenues : il y a deux ans, encore, elle accordait sa confiance à l’actuel Président de la République, qui obtenait là 56 % des voix. Que d’eau est passé depuis sous les ponts de l’Ille et de la Vilaine ! Chômage, crise de l’écotaxe, crise fiscale : autant d’occasions où la Bretagne n’a pas été entendue.

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Re ’zo re, trop c’est trop : c’est ce que les Bretons n’ont cessé de dire, et ils n’arrêteront pas de le répéter. La Bretagne n’est pas entendue, non plus que les Bretons. Ils ont pourtant manifesté le 19 avril, puis à nouveau le 28 juin.

Cela suffit, arrêtez avec la Bretagne !

J’y étais, avec Paul Molac, François de Rugy et Christian Troadec, et bien d’autres encore, cher Thierry Benoit.

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La belle équipe ! Une vraie dream team !

Notre collègue Jean-Pierre Le Roch aussi était présent : il a sauvé l’honneur du parti socialiste. Le parti socialiste s’est pourtant identifié, à un moment donné, à la décentralisation, mais cette période est bien lointaine. Nous étions 15 000 à manifester, mais nous n’avons pas davantage été entendus. Le Gouvernement reste sourd aux appels des Bretons : s’il ne les entend pas, c’est qu’il ne veut pas les entendre.

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La dérive jacobine touche la méthode – je viens de le montrer – mais elle se retrouve sur le fond. Le jacobin de 1790 exigeait des départements de taille équivalente. Maintenant, il faut partout des régions de grande taille, mais de taille uniforme. Il fallait au jacobin de 1790 des départements de taille modeste, qui ne puissent résister à l’État. Il faut aux jacobins d’aujourd’hui des grandes régions, pour que celles-ci ne parlent pas au peuple.

Systématiser les grandes régions serait une erreur pour plusieurs raisons. Première erreur : penser qu’il existe une taille optimale, qu’il faut nécessairement de très grandes régions. Voyez l’Allemagne : certes, la Bavière compte plus de 12 millions d’habitants, mais le Land de Brême n’en compte que 600 000, et la Sarre à peine 1 million. La Bretagne à cinq départements compterait 4,5 millions d’habitants : elle serait le sixième Land par la population, et devancerait onze d’entre eux.

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C’est un scandale ! La Bretagne n’est pas un Land ! Je refuse cette germanisation de la Bretagne ! Ils sont barjots, ces Bretons !

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La taille n’est donc pas un critère pertinent, Guillaume Larrivé l’a très bien montré pour la Bourgogne. Il n’est donc pas nécessaire de créer des régions uniformes : elles peuvent être de tailles sensiblement différentes. La solution ne doit pas relever de l’esprit de système ; elle doit tenir compte des territoires.

Une Bretagne à cinq départements compterait 4,5 millions d’habitants. Elle associerait deux éléments d’efficacité : l’identité, qui est facteur de cohésion, et une taille assez grande.

La taille optimale doit être appréciée au regard des compétences transférées. Quelles compétences envisagez-vous de transférer aux régions, monsieur le ministre ? En l’état actuel du projet de loi, vous envisagez de transférer aux régions des compétences aujourd’hui exercées par les conseils généraux : collèges, routes départementales, transports. Dans cette perspective, je ne vois pas l’intérêt de grandes régions. On risque de perdre en proximité, sans pour autant gagner en efficacité. Pour les populations concernées, je ne vois pas d’avantage particulier à éloigner la décision du terrain. Je n’y vois guère qu’un seul avantage : fournir un lot de consolation à un ancien Premier ministre aujourd’hui désoeuvré, Jean-Marc Ayrault !

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Cela, nous n’en voulons pas !

L’élément le plus important pour une région n’est pas la taille, mais la cohérence.

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Le vrai critère, c’est l’affectio societatis. Que signifie cette expression ? Pour que des gens vivent ensemble, pour qu’ils se dessinent un avenir commun, pour qu’ils consentent à des sacrifices, il faut qu’ils soient unis par une solidarité admise, et même revendiquée. Encore faut-il qu’ils aient la conviction de partager une histoire commune, un même sentiment d’appartenance, et – j’insiste sur ce mot – une même identité. Je lâche à dessein ce mot d’identité qui fait peur aux bien-pensants !

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Que c’est pompeux ! Cela fait très IIIe République !

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Oui, il existe des identités régionales, et je constate que vous les niez, car les régions dont l’identité est la plus forte sont les plus lésées par votre carte. J’en veux pour preuve, en particulier, le sort réservé à l’Alsace et à la Bretagne.

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L’Alsace est fondue dans un grand ensemble banalisé : le « grand Est » Champagne-Lorraine-Alsace – un ensemble si vaste qu’on ne sait comment l’appeler. Quand on ne sait pas nommer les choses, c’est qu’elles n’existent pas, c’est qu’elles ne parlent pas aux gens, pas plus à leurs coeurs qu’à leurs esprits.

Oui, il existe une identité bretonne. Oui, nous souhaitons une Bretagne à cinq départements.

Sourires sur les bancs du groupe SRC.

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C’est une condition de notre dynamisme. Nous ne voulons pas de la confusion avec les Pays-de-la-Loire, mais – je m’adresse à mon collègue Yannick Favennec – nous voulons une intense coopération non seulement entre la Bretagne et la Normandie, mais aussi entre la Bretagne et une belle région Val-de-Loire qui comprendrait Orléans, Blois, Tours et Angers.

Exclamations sur divers bancs.

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Je crois à l’identité, qui pousse à prendre des initiatives ensemble, à l’identité qui rend heureux quand on la partage : c’est cette identité heureuse qui doit être le socle de nos régions, une identité non exclusive mais plurielle, une identité respectée et aimée.

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Cette identité est gage d’efficacité. Quelles sont les régions qui marchent en Europe ? Des noms viennent spontanément à l’esprit : la Bavière, la Catalogne, autant de régions à forte identité historique et culturelle. Grâce à cette identité, elles peuvent facilement se projeter dans l’avenir. Elles fournissent un bon exemple : leur réussite est très étroitement liée à leur capacité à rassembler leur population autour de projets communs. Qu’est-ce que la politique, sinon l’art de rassembler, autour de projets communs, des gens très divers : ouvriers, paysans et patrons, jeunes et vieux, caissières de supermarché et intellectuels… C’est cela que nous voulons pour nos régions : nous voulons qu’elles soient capables de rassembler.

En Bretagne, comme en Alsace ou dans les autres régions à forte personnalité, personne ne se retrouve dans votre projet. La déception est d’autant plus grande qu’un espoir s’était levé : celui de voir enfin reconnue la réalité de nos régions, au-delà de leur simple caractère administratif. Vous défendez une carte administrative, monsieur le ministre, alors que nous aspirons à la définition d’une carte humaine !

Le général de Gaulle avait bien compris que le problème était humain et culturel, et l’avait dit dans son discours de Quimper en 1969, lors duquel il annonça son projet de référendum. Pour annoncer cette grande réforme, il avait choisi Quimper, ville marquée par sa langue, sa culture, sa tradition, en un mot : par son identité. Tous les conservatismes se sont ligués contre lui, et depuis lors – je le dis très solennellement – nous n’avons jamais retrouvé le souffle de 1969. Les mouvements de décentralisation qui ont suivi, y compris celui de 1982, ont parlé aux élus, rarement au peuple.

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Vous me rajeunissez, mon cher collègue, en disant que je n’étais pas né en 1969 !

Je constate aujourd’hui que l’on ne parle toujours pas au peuple, et lorsque l’on parle aux élus, c’est aux seuls élus socialistes.

Exclamations sur les bancs du groupe SRC.

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En niant la réalité des régions, en niant le sentiment d’appartenance vous privez nos régions d’une véritable ambition. Pourquoi est-ce grave ? Parce que – chacun le constate – notre État central est irréformable, englué qu’il est dans le conservatisme. Notre État est obèse, et impotent ; il se veut omnipotent, mais n’est que velléitaire ; il n’agit plus sur les choses. Nos électeurs nous le disent : ils constatent notre impuissance. L’État allie la suffisance, la prétention, à l’impuissance.

Si notre société veut retrouver des espaces de liberté, il lui faut des régions fortes, vivantes, que leurs habitants s’approprient. La réforme viendra du bas, car on ne réforme plus par le haut ; ceux qui ont essayé, qu’ils soient de gauche ou de droite, ont échoué. Donnons-nous l’occasion de réformer par le bas, c’est-à-dire à partir d’initiatives locales, à partir d’expérimentations, et au moyen de la décentralisation du pouvoir réglementaire. Il y a bien des évolutions en perspective !

L’État central est désormais assimilé à la glorification du principe de précaution, qui est devenu un principe d’inaction.

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Qui a inscrit ce principe dans la Constitution ? C’est Jacques Chirac !

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Les régions doivent refléter au contraire le dynamisme, l’initiative, l’énergie, pour nous permettre d’aller de l’avant : war rog, comme nous disons en breton !

La société civile, mes chers collègues, va plus vite que nous. Regardez l’association Produit en Bretagne – Thierry Benoit en a parlé, ainsi qu’Isabelle Le Callennec – qui fédère les grandes entreprises bretonnes dans les domaines agricole, industriel et touristique. Ces entreprises sont à la pointe du progrès. Elles promeuvent cette idée de région non seulement par militantisme – nous les en remercions – mais aussi parce qu’elles y trouvent leur compte, parce qu’elles ont compris que l’identité positive dont elles se font les chantres est ressentie très positivement par leur clientèle en Bretagne et au-delà.

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Mes chers collègues, j’entends déjà les critiques jacobines. J’entends déjà la gauche me faire une mauvaise querelle en prétendant que l’identité régionale menacerait l’identité nationale.

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C’est ce que l’on appelle l’irrédentisme !

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C’est une critique classique ; nous l’avons rencontrée lors des débats sur les langues régionales. Je suis très à l’aise pour répondre à ces critiques, car la Bretagne n’a rien à prouver : 250 000 Bretons se sont sacrifiés – ou plutôt ont été sacrifiés – durant la guerre de 14-18 ! Certains pseudo-historiens révisionnistes contestent ce chiffre, comme pour nier la participation de notre région à l’effort national. En 1940, autour du général de Gaulle, les Bretons étaient d’autant plus remarqués qu’il n’y avait pas grand monde avec lui.

Le Général de Gaulle n’a-t-il pas dit, le 2 février 1969, à Quimper : « Nulle part, on ne fut, plus qu’ici, fidèle à la patrie […] quand, au cours de la Grande guerre, la Bretagne sacrifiait, par rapport à sa population, un pourcentage de soldats très supérieur à la terrible moyenne française ; ou quand, pendant la Résistance, elle menait plus vaillamment que partout ailleurs le combat contre l’occupant » ?

Nous sommes Bretons, Français, Européens, sans que chacune de ces appartenances soit en contradiction avec les autres. Il n’y a que les jacobins pour trouver des contradictions là où il n’y a que des enrichissements.

L’identité régionale ne constitue une menace que lorsqu’elle est niée, méprisée, amputée ou salie. À cet égard, des projets comme le vôtre, niant des évidences comme l’appartenance de Nantes à la Bretagne, présente le risque de justifier bien des dérives !

Quarante-cinq ans après le discours du général de Gaulle, saisissons la chance qui nous est offerte de laisser vivre les vraies régions françaises, celles qui suscitent l’adhésion de nos concitoyens, celles pour lesquelles ils sont prêts à donner le meilleur d’eux-mêmes, qu’ils soient originaires de ces régions ou qu’ils les aient choisies.

À l’égard des régions, le Gouvernement cédera-t-il à la méfiance et à la suspicion qui caractérisent le jacobinisme ou, au contraire, notre assemblée fera-t-elle confiance aux régions pour mieux rajeunir et réformer le pays ?

Le débat que nous menons n’est pas un débat technique. Il ne s’agit pas d’optimiser le fonctionnement d’une entreprise. Le débat que nous menons touche à l’essentiel, à la démocratie, à l’identité et à l’enracinement.

Permettez-moi d’évoquer Simone Weil, la grande Simone Weil qui, à Londres, en 1943, quelques mois avant le terme de son existence, a rédigé L’Enracinement, qui est son testament à la fois personnel et politique. Elle écrit ceci : « L’enracinement est peut-être le besoin le plus important et le plus méconnu de l’âme humaine. C’est l’un des plus difficiles à définir. Un être humain a une racine par sa participation réelle, active et naturelle à l’existence d’une collectivité qui conserve vivants certains trésors du passé et certains pressentiments d’avenir. »

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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Il est difficile de prendre la parole après le lyrisme breton !

Sourires.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, sur la modernisation de l’organisation territoriale, on pouvait légitimement attendre une vision claire et un cadre global, même avec une mise en oeuvre par étapes de la réforme.

Une vision claire, d’abord. On ne peut conduire une politique en allant un coup dans le zig, un coup dans le zag. Vos objectifs de réforme de l’organisation territoriale sont incertains et vos propositions très chaotiques – je ne parle pas seulement du puzzle des régions.

Par exemple, le département est aujourd’hui condamné à disparaître – encore que cela ne soit pas affirmé en tant que tel –, alors qu’il était présenté, en 2012, comme essentiel à la proximité. Cette disparition pose le problème de l’échelon de proximité, dès lors qu’il est également prévu d’agrandir considérablement les régions.

Un cadre global, ensuite. Nous avons eu la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite loi MAPAM. Nous examinons aujourd’hui le projet de loi relatif à la carte des régions et aux élections et discuterons demain d’un texte sur le renforcement des régions et des intercommunalités et le socle minimal de compétences des départements. Peut-on rendre compréhensible une nouvelle organisation territoriale de la République en la présentant par morceaux successifs ? Et peut-on traiter séparément structures et compétences ?

Le cadre global doit être complet. Or, que dites-vous des ressources et de la fiscalité ? Que dites-vous de la réforme de l’État et de celle des services de l’État, en écho à cette nouvelle organisation ? Que dites-vous du contrat démocratique ? Je crains que la réponse ne consiste qu’en un long silence.

Sur ce projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral, je souhaite partager quelques réflexions avant d’aborder la discussion des articles.

Selon le Gouvernement, le premier objectif justifiant une nouvelle carte régionale est celui d’atteindre une taille régionale critique suffisante, à l’échelle européenne. Or, nos régions actuelles sont déjà peu ou prou de taille européenne. Huit des seize Länder allemands sont moins peuplés que la plus petite des régions françaises.

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De surcroît, les petites tailles ne sont pas toujours des handicaps. Parler de taille critique revient à rechercher un optimum territorial qui n’existe pas. Les régions ont des fonctions diverses : développement économique, mise en oeuvre de politiques publiques, construction identitaire. Or, ces fonctions ne coïncident pas avec un territoire précis et il n’y a pas de découpage idéal permettant de les remplir.

Quant aux économies qui devraient être induites par les nouvelles régions, elles ne pourront pas être réalisées dans un premier temps, car une telle réforme implique une organisation des services, l’aménagement de locaux, des outils informatiques communs. Ensuite, l’expérience montre que les coûts croissent avec la taille, car il devient nécessaire de mettre en place des antennes territoriales et des instances de coordination.

Les économies viendront plus sûrement de la suppression des compétences concurrentes. Ainsi, supprimer celles des régions et des départements représenterait 18 milliards d’euros. Elles proviendront également de la suppression de structures : s’agissant du bloc commune, EPCI et syndicat de commune, la réduction du nombre de syndicats et les fusions d’EPCI produiraient 7 milliards d’économie.

Pour clore mon propos, je voudrais à nouveau affirmer qu’une réforme territoriale est indispensable, mais elle ne saurait se faire selon votre méthode et avec vos imprécisions, monsieur le ministre. Je regrette que ce texte soit examiné dans des conditions d’improvisation et en fin de session parlementaire. Je suis convaincue qu’il faut « convoquer » les citoyens à ces projets de réforme et entendre leur besoin d’une action publique plus cohérente, plus lisible, plus économe.

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais d’emblée souligner l’absence criante de méthode et de cohérence du Gouvernement dans sa manière d’appréhender la réforme territoriale. On nous avait promis un acte III de la décentralisation, on pourrait plutôt parler d’un acte manqué !

Nous avons adopté, en décembre dernier, le projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles. Et, six mois plus tard, nous redécoupons les régions. Demain, nous étudierons la taille des intercommunalités et les compétences de chaque collectivité. Cela n’a aucun sens !

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Une réforme efficace est avant tout une réforme pensée globalement, et non à l’emporte-pièce. Je m’interroge par conséquent sur la solidité de l’équilibre territorial qui sera trouvé. Nous avons besoin d’une réforme structurelle, avant une réforme de périmètre.

Outre des problèmes de méthode se pose celui du redécoupage des régions prévu dans le texte ; un redécoupage, hélas, tributaire d’opportunités, d’amitiés et d’influences politiques.

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La pertinence des territoires doit reposer sur les pratiques des habitants, le fonctionnement des entreprises et des acteurs économiques, ainsi que sur les projets qui façonneront l’avenir, afin d’atteindre un maximum de complémentarité, de cohérence et d’efficacité économique au sein des futures régions. Infiniment plus que leur nombre, nos futures régions doivent se construire sur ces critères !

C’est la raison pour laquelle, à titre d’exemple, le conseil régional des Pays-de-la-Loire, réuni en session extraordinaire le 13 mai dernier, s’est prononcé à l’unanimité pour une région du Grand-Ouest qui fusionnerait les Pays-de-la-Loire avec la Bretagne. Les Ligériens refusent, en effet, que leur région soit l’une des trois régions françaises laissées pour compte et oubliées de cette réforme territoriale. Nous ne voulons pas, par le statu quo, devenir le maillon faible des régions françaises.

Une telle fusion répondrait pourtant à l’ambition affichée de la réforme d’adapter la carte des régions aux réalités géographiques et à l’Europe des régions, par la constitution de régions fortes, capables de conduire des politiques d’investissement préparant les territoires aux enjeux stratégiques de demain.

Cette fusion prendrait ainsi en compte les liens tissés depuis plus de trente ans entre ces deux régions, qui ont su faire converger leurs stratégies européennes et développer des interactions dans de nombreux domaines, tels que la recherche, l’université, les transports et l’agriculture.

La Bretagne et les Pays-de-la-Loire présentent de nombreuses similarités et complémentarités. Avec respectivement près de 3 200 000 habitants pour la Bretagne et 3 570 000 pour les Pays-de-la-Loire, ces deux régions présentent un équilibre démographique. Cet équilibre se retrouve également dans la densité de population au kilomètre carré et dans leur croissance démographique de ces dernières années et pour les années à venir.

Sur le plan économique, les deux régions comptent parmi les dix plus importantes régions de France pour leur apport à la création de richesse : les Pays-de-la-Loire sont la cinquième région française pour le PIB, la Bretagne la septième. Toutes les deux ont des taux de chômage très proches et inférieurs à la moyenne nationale : 9,7 % pour la Bretagne, 9,8 % pour les Pays-de-la-Loire.

Socialement, Bretagne et Pays-de-la-Loire présentent de grandes similarités : elles se caractérisent par le plus faible taux de pauvreté en France, de l’ordre de 11,6 %. Elles figurent également dans les régions les moins inégalitaires de France. Les Pays-de-la-Loire sont la première région la moins inégalitaire, quand la Bretagne est la troisième.

Avec près de sept millions d’habitants et 9,1 % de la richesse nationale, cette nouvelle région constituerait un avantage compétitif pour la France et contribuerait très largement à la rationalisation de notre organisation territoriale.

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Les Pays-de-la-Loire, cher Maurice Leroy, ne sont pas qu’une région de vacances avec de beaux châteaux.

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Les Ligériens sont d’abord préoccupés par l’emploi, la recherche, l’agroalimentaire, l’agriculture et c’est pour cela qu’ils sont 70 % à se tourner naturellement vers la Bretagne. Je défendrai tout à l’heure avec M. Piron un amendement en ce sens.

Je dis à nos amis bretons, Mme Le Callennec, M. Benoit, M. Molac, M. Le Fur, qu’un tel rapprochement n’aurait aucune incidence sur l’identité bretonne, que nous savons forte, que nous respectons et que nous aimons. J’ai bien entendu la déclaration érotico-territoriale de mon ami Thierry Benoit, et je lui réponds que nous sommes prêts à partager cette région avec lui ! Nous sommes prêts à nous aimer !

Rires.

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Monsieur le ministre, avec le droit d’option, applicable après les élections de 2015, permettant le détachement de départements, vous faites entrer le loup dans la bergerie. Avec ce droit d’option, la région des Pays-de-la-Loire risque, à terme, d’être « éparpillée par petits bouts, façon puzzle ».

Sourires.

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Elle va se retrouver dynamitée, dispersée, ventilée, bref condamnée à disparaître de la carte.

La Mayenne et la Loire-Atlantique rejoindront-ils la Bretagne ? Et la Sarthe, le Maine-et-Loire, la Vendée, qu’en ferez-vous ? En réalité, vous allez tuer l’un des plus beaux exemples de réussite et de dynamique régionale de l’histoire de notre pays.

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En instituant ce droit de sortie, on ouvre la boîte de Pandore : nous allons vers une période de forte instabilité pour nos institutions locales. Que deviendra alors cette carte des régions, monsieur le ministre ?

Si l’objectif de votre réforme est de renforcer les régions, pour financer des projets et établir une stratégie territoriale, il est urgent et nécessaire de stabiliser les structures en mettant fin au flou artistique des périmètres, dès le vote de cette loi.

Enfin, je voudrais dire quelques mots sur les territoires ruraux.

En conclusion, permettez-moi de dire quelques mots des territoires ruraux : le constat est aujourd’hui terrible. Les régions actuelles n’ont pas permis de réduire la fracture qui s’est aggravée entre les métropoles et les zones rurales. L’échelon territorial qu’est le département, et la nécessaire solidarité qui l’accompagne, ne peuvent donc pas être supprimés d’un trait de plume. Vous ne pouvez pas dévitaliser nos départements dans nos zones rurales, je pense par exemple à mon cher département de la Mayenne.

Or, à ce jour, aucune solution n’est proposée, monsieur le ministre. Pour toutes ces raisons, je voterai contre ce projet de loi qui de plus ne répond en rien à quatre problèmes essentiels que sont la répartition des compétences, les moyens financiers, les missions de l’État, et le devenir de nos communes, notamment dans nos territoires ruraux.

Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP

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Quel défi, monsieur le ministre, est lancé aux parlementaires que de redessiner la carte régionale ! Et quelle responsabilité devra assumer le Parlement que de proposer à nos concitoyens un nouveau paysage territorial ! Cette responsabilité, monsieur le ministre, nous allons l’assumer, dans le respect de l’intérêt général, de nos territoires et de nos populations.

Élue d’un territoire de montagne, je ne vous parlerai pas des mariages de certaines régions, ou du célibat d’autres. Non. J’évoquerai la nécessité, à travers ces nouvelles grandes régions que j’approuve, de laisser toute sa place à la montagne, en lui assurant visibilité et légitimité.

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Avec l’agrandissement du périmètre des régions, le danger d’un centralisme régional serait d’autant plus à craindre que le contrepoids de l’assemblée départementale n’existerait plus. Mais, sur ce point, j’ai bien compris que la disparition pure et simple de cet échelon dans tous les territoires était en débat.

C’est pourquoi, au nom de la spécificité de la montagne, je considère que le droit à la différence et à l’expérimentation est, plus que jamais, d’actualité. C’est dans cet esprit que j’ai déposé un amendement d’appel pour le maintien d’une collectivité départementale de plein exercice dans les départements en zone de montagne.

Il faut respecter la diversité de nos territoires. Paris, Lyon ou Marseille, ce n’est pas la Lozère, les Hautes-Pyrénées ou l’Ariège. Il est temps de reconnaître la spécificité territoriale : il n’est pas possible d’administrer de la même manière des zones rurales, des territoires de montagne, et des grandes métropoles, d’autant plus que le remodelage de la carte des régions peut aboutir à un éloignement de la montagne des centres de décision régionaux. D’où l’impérieuse nécessité, dans ces territoires, du maintien d’un échelon intermédiaire qui exerce des solidarités territoriales entre territoires éloignés et moins peuplés, des solidarités entre les plus riches et les plus pauvres, et la solidarité financière par la péréquation.

La loi du nombre joue mécaniquement contre les zones de montagne, caractérisées par des territoires étendus et une faible densité de population. C’est pourquoi j’ai déposé des amendements qui visent à garantir une représentation équilibrée de ces territoires au sein des futures assemblées régionales.

En effet, la répartition initiale conduisait à une baisse importante du nombre d’élus au sein des futurs conseils régionaux. Cette diminution était particulièrement forte dans les départements ruraux, faiblement peuplés, qui vont intégrer les futures régions Rhône-Alpes-Auvergne et Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées.

Mais l’excellent travail de notre rapporteur, qui a déposé un amendement qui supprime le plafonnement à 150 élus, devrait améliorer la situation.

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J’insisterai sur l’amendement que j’ai déposé qui prévoit deux élus minimum dans les départements de moins de 120 000 habitants, et quatre dans ceux dépassant ce seuil de population.

Cette proposition s’inspire du raisonnement développé par le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 9 décembre 2010 relative à la loi portant réforme des collectivités territoriales.

Le juge constitutionnel, considérant qu’il ne peut opérer qu’un contrôle restreint en la matière, a décidé qu’en fixant un nombre minimal de 15 conseillers territoriaux par département, le législateur a estimé qu’il constituait un seuil minimum pour assurer le fonctionnement normal d’une assemblée délibérante locale et que dès lors, « la fixation de ce seuil n’est pas entachée d’une erreur manifeste d’appréciation ».

Je fais confiance à la représentation nationale et au Gouvernement pour assurer une juste représentation de nos populations et de nos territoires.

Pour conclure, je dirais que nous avons besoin de faire évoluer l’architecture territoriale, de la moderniser et de la clarifier. Oui, nous avons besoin de régions fortes, stratèges dans le développement économique et l’emploi, mais nous devons aussi accompagner les territoires ruraux et de montagne, afin d’assurer ces solidarités territoriales et de proximité, auxquelles nos populations sont très attachées.

J’ai bien entendu, monsieur le ministre, vos propos introductifs et votre volonté d’associer, notamment, les associations d’élus à la réflexion sur l’avenir des conseils départementaux, et j’ai également entendu le Premier ministre qui allait dans ce sens, en lien avec le travail à mener sur les prochains textes.

Je vous fais confiance, monsieur le ministre, je fais confiance au Gouvernement, pour avancer sur les futurs textes concernant l’avenir de ces échelons intermédiaires, et, naturellement, je voterai ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC)

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Élu du Pas-de-Calais, j’ai été parmi les premiers à souhaiter, et ce depuis très longtemps, une fusion des régions Nord-Pas-de-Calais et Picardie.

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Je suis heureux de voir que je suis aujourd’hui rejoint par un nombre grandissant de collègues, car plus je m’intéresse à cette question, plus je suis convaincu que cette fusion s’impose si l’on veut avoir demain des structures administratives et politiques lisibles pour nos concitoyens, et cohérentes avec ce qu’ils vivent et ce qu’ils ressentent.

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Rejoins-nous ! On ouvre les adhésions. (Sourires sur les bancs du groupe SRC)

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La culture et nos traditions imposent tout d’abord ce rapprochement entre le Nord-Pas-de-Calais et la Picardie. En clin d’oeil, j’appelais de mes voeux, dès le 3 juin dernier, la création d’une grande région « ch’ti ». Le ch’ti, popularisé par le film Bienvenue chez les Ch’tis, n’est rien d’autre en effet que du picard, une langue de la famille des langues d’oïl parlées dans la France du Nord quand ailleurs on parlait français ou flamand, et dont l’un des tous premiers textes, la séquence de Sainte-Eulalie, a été écrit à la fin du IXe siècle, dans la région de Saint-Amand.

Au Moyen-Âge, le picard va même devenir la grande langue de la littérature du nord de la France, comme le provençal l’était au sud.

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Alors oui, moi qui ai grandi dans les fermes du Pas-de-Calais où on parlait picard, je me sens aussi chez moi quand je rencontre et travaille avec mes amis de la Somme et de la Picardie. Ils pourraient dire comme moi : « Ravisez-nous bin, nous otes, on déminde ch’al fusion pour vive insimble ».

Au-delà de notre langue, je pourrais aussi vous parler de nos beffrois, classés par l’UNESCO, de nos traditions de chasse, de pêche, d’élevage ou des chevaux de trait, qui nous rassemblent tout aussi fortement.

Mais j’entends déjà ceux qui vont me dire qu’il ne faut pas vivre dans le passé et que tout cela n’a pas assez de poids pour fusionner nos deux régions. Je leur répondrai qu’un arbre a besoin de racines nombreuses et profondes pour pouvoir pousser et que c’est sur le passé, la tradition et la culture, qu’on peut construire des institutions durables.

Je leur dirai aussi que cette grande région existe en réalité déjà concrètement et que c’est le découpage administratif actuel qui a en réalité pris du retard.

Les acteurs de la mer et de la côte ont ainsi dépassé les frontières de nos deux régions. Par exemple, le comité régional des marins pêcheurs réunit des professionnels du Nord-Pas-de-Calais et de la Picardie. De même, l’IFREMER et le Parc Marin des Trois Estuaires, que nous venons de créer, couvrent la côte d’Opale et la côte picarde.

Au-delà de l’histoire, c’est donc aussi la géographie qui nous rassemble et qui a conduit, entre autres, à créer une agence de l’eau Artois-Picardie.

Désormais, c’est aussi l’économie qui nous rassemble. L’agriculture et le tourisme que nous avons naturellement en commun, mais pas seulement.

J’en veux pour preuve le nombre incroyable d’entreprises qui ont choisi comme territoire d’intervention non pas le Nord-Pas-de-Calais ou la Picardie, mais la grande région Nord-Pas-de-Calais-Picardie : Colas, AG2R la Mondiale, Pierre

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Le groupe socialiste se réunit tous les mardis matin...

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Martine Aubry devrait y réfléchir, elle qui a vu une poussée importante du Front National dans sa propre ville de Lille, dont elle est maire, aux dernières élections européennes.

Alors mes chers collègues, en conclusion, je vous dirais qu’il est important que, sur ce sujet crucial pour l’avenir de nos régions et de notre pays, l’Assemblée Nationale prenne toutes ses responsabilités.

Au-delà des calculs partisans, ayons le courage de dire oui à l’histoire, oui à la géographie, oui à l’économie, oui à l’avenir, oui à une grande région Nord-Pas-de-Calais Picardie.

Applaudissement sur plusieurs bancs du groupe UMP – Très bien sur quelques bancs du groupe SRC.

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Monsieur le ministre, avec le Premier ministre vous vous êtes déplacé en Lozère il y a une dizaine de jours : je vous en remercie.

Le président du conseil général, Jean-Paul Pourquier et Jacques Blanc, président de l’association des maires, ont exprimé un certain nombre de positions, tant sur la Lozère que sur la région Languedoc-Roussillon.

Maire, conseiller général, député de la Lozère mais également ancien directeur de cabinet du président de la région Languedoc Roussillon, je ne peux que défendre ces deux positions, l’une garante de l’identité rurale que constitue le département peuplé de 78 000 habitants et l’autre, garante de l’identité régionale au travers du sentiment d’appartenance des habitants de l’Aude, des Pyrénées-Orientales, de l’Hérault, du Gard et de la Lozère, qui font la substance même du Languedoc-Roussillon. Un sondage du Midi Libre vient de le rappeler : plus de 70 % des personnes interrogées se disent attachées à cette région.

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Victor Hugo déclarait : « La forme, c’est le fond qui remonte à la surface ». Ce qui remonte à la surface aujourd’hui c’est le bricolage…

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…les choix ont été improvisés sans réflexion d’ensemble. C’est aussi le cafouillage, oui monsieur le président de la commission des lois : d’un jour à l’autre, le Président de la République dit et surtout écrit tout et son contraire. Il a écrit une lettre : si on la reprend aujourd’hui, son contenu est totalement décalé.

Ce qui remonte à la surface, c’est également l’improvisation – une réforme de cette envergure appelait des consultations importantes – et le non-respect du Parlement, le gouvernement ayant engagé la procédure accélérée, imposant ainsi des délais beaucoup trop courts à la représentation nationale.

Ce qui remonte est aussi la méconnaissance de la réalité de nos territoires, en particulier de la ruralité qui se trouvera une nouvelle fois fortement impactée, comme elle l’est déjà avec le conseiller départemental.

Enfin, ce qui remonte est le calcul électoral, à travers un report à décembre 2015, le gouvernement espérant à cette époque avoir regagné un peu de confiance populaire.

Fort de ces constats, je ne saurais souscrire au sentiment exprimé par le rapporteur de la commission des lois, qui a déploré l’attitude du Sénat et stigmatisé le combat procédural mené par la Haute assemblée. Bien au contraire, je salue ce combat mené tant sur l’étude d’impact qu’à travers le vote d’une motion référendaire car cette réforme d’envergure aurait mérité plus de transparence, un très large débat avec nos concitoyens, donc le recours au référendum.

Comment ne pas regretter également l’impréparation de ce texte sur la définition des nouvelles régions, décidée un mardi soir en catastrophe puis remaniée au gré des susceptibilités de certains socialistes au point que nous sommes aujourd’hui non plus à quatorze mais à treize régions après un amendement du rapporteur de la commission des lois ? Vous me parlerez du respect du Parlement, je vous répondrai tripatouillage : que penser de l’étude d’impact initiale, qui n’intègre évidemment pas ce passage de quatorze à treize ?

À ce stade, j’avoue ne pas comprendre la méthode suivie par le Gouvernement qui, après avoir supprimé le conseiller territorial, créé le binôme de conseillers départementaux, réformé le mode de scrutin, créé les métropoles, veut aujourd’hui la suppression des départements, une nouvelle carte de l’intercommunalité et une nouvelle carte des régions.

Bien sûr, tout le monde s’accorde à dénoncer le mille-feuille institutionnel à travers les 36 800 communes, une myriade de structures intercommunales, métropoles, agglos, communautés d’agglomérations, communautés de communes, SIVOM, SIVU, pays, ententes, départements, régions, mais votre projet s’inscrit dans un processus qui manque incontestablement de cohérence.

Il eût été nécessaire de réfléchir au rôle des communes et de leurs groupements, de régler une fois pour toutes la question lancinante de la clause générale de compétence, de clarifier les compétences des diverses collectivités et de permettre enfin des fusions dûment consenties, le tout dans une réflexion globale sur la place de la déconcentration de l’État par rapport à la décentralisation.

Vos différentes démarches depuis deux ans ont créé un imbroglio incompréhensible que votre projet de loi vient aujourd’hui alourdir.

Je limiterai mon propos à trois observations.

D’abord, proposer des intercommunalités à 20 000 habitants de manière arbitraire ne peut évidemment pas être une réponse adaptée à la diversité de nos territoires. Le critère de la population est le critère simpliste de la technocratie parisienne, qui fait fi, avec souvent beaucoup d’arrogance, des réalités territoriales, notamment, de la ruralité, qui représente près de 80 % de la superficie de notre pays.

Ensuite, proposer la suppression des départements tout en ouvrant des perspectives d’option à certains départements ruraux procède d’une vision brouillonne et confuse. Soit le conseil général est une institution de proximité et on le conserve, soit il n’a plus lieu d’être par rapport aux structures intercommunales. Gouverner, c’est choisir, et faire croire qu’il peut y avoir une sorte de menu à la carte est un non-sens.

Enfin, vous proposez de passer de vingt-deux régions à quatorze, puis aujourd’hui à treize, sans aucune consultation préalable des conseils régionaux existants, sans aucune consultation des populations concernées, en ajoutant un droit d’option à venir pour les départements qui pourront quitter demain telle ou telle région. Franchement, où va-t-on ?

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Personne ne pourra s’y retrouver, personne ne croira, pas même votre secrétaire d’état, M. Vallini, aux affirmations erratiques, aux économies, à la clarification et à la simplification, qui sont pourtant les trois axes sur lesquels se sont accordés les nombreux rapports sur la réforme de la décentralisation.

Pour toutes ces raisons, je voterai contre votre projet, à moins qu’il ne soit profondément amendé, la lucidité pouvant toucher le Gouvernement à un moment donné, étant précisé que j’aurai l’occasion dans le cadre de l’article 1er de m’exprimer sur l’identité du Languedoc-Roussillon, que je souhaite conserver.

Monsieur le ministre, n’oubliez pas ce que disait Frédéric Mistral : « la Provence chante, le Languedoc combat ».

Applaudissements sur quelques bancs des groupes UMP et UDI.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne vais pas répéter des arguments déclinés à l’envi depuis le début de la discussion générale : notre collègue Claude Molac a très bien cerné la problématique de ce texte.

Vous avez peut-être un jour visité l’Alsace. Vous avez vu des maisons à colombage, de coquets villages, une cathédrale chef-d’oeuvre mondial de l’art gothique. Votre regard a été attiré par la cocarde tricolore sur la coiffe alsacienne. Vous avez peut-être même appris l’histoire de cette région frontalière, irriguée depuis plus de cinq siècles par l’humanisme rhénan.

Au-delà de ces images d’Épinal, que l’on peut qualifier de folklore suranné, il y a l’âme alsacienne et, si vous avez compris ce qu’il y a dans l’âme de cette région, vous comprendrez que l’Alsace ne peut être dissoute dans une vaste région.

Cette fusion est une erreur historique sans précédent pour notre région. Louis XIV avait décidé de laisser les Alsaciens gérer leurs affaires. Napoléon Bonaparte disait des généraux alsaciens : « Qu’importe s’ils parlent l’allemand, pourvu qu’ils sabrent à la française. » L’Allemagne de Bismarck a maintenu les contours de notre région, qui n’ont été remis en cause qu’une seule fois dans son histoire, et très brutalement, entre 1940 à 1945, par son rattachement administratif au pays de Bade.

Je sais qu’il y a toujours la volonté d’agiter le chiffon rouge du régionalisme, voire de l’autonomisme. François de Rugy a parfaitement dénoncé ce matin cet amalgame inacceptable.

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Certains cherchent même à nous culpabiliser en considérant que notre souhait de maintenir les contours de notre région relève d’un repli sur soi et de la folklorisation d’une entité administrative, alors que l’Alsace est historiquement la région la plus ouverte sur l’Europe.

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Comment deux députés socialistes sur les quinze députés que compte notre région, comment un parti politique qui représente moins de 12 % aux dernières élections européennes dans notre région peuvent-ils infliger une mesure qui maltraite ainsi une région, son histoire et son âme ? Les Alsaciens demanderont lors de la prochaine alternance le retour à ses frontières naturelles, historiques et linguistiques.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.

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Ce que vous imposerez aujourd’hui sera avec certitude défait demain, monsieur le ministre : faites donc les choses bien tout de suite.

Nous savons qu’il faut simplifier le mille-feuille administratif. Malheureusement, votre projet de fusion des régions ne répond pas à cet impératif puisque les départements sont maintenus, même si c’est sous la forme de coquilles vides.

Aussi, les treize députés de la majorité alsacienne vous proposent de fusionner dès maintenant les conseils généraux du Haut-Rhin et du Bas-Rhin avec la région Alsace.

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En présentant un amendement en ce sens, nous ne ferons qu’appliquer par anticipation le projet du Gouvernement à échéance de 2020. Mes chers collègues, acceptez de voter notre amendement créant le conseil d’Alsace.

Je ne reviendrai pas sur la question du référendum de 2013, notre collègue Alain Tourret l’a parfaitement synthétisée ce matin.

Monsieur le ministre, je sais que le Gouvernement mise un peu sur l’esprit de discipline, voire la docilité des Alsaciens, mais une colère sourde est en train de monter dans cette région, qui refuse l’injustice. Ils n’accepteront pas que ce qui est accordé à la Corse et à la Bretagne soit refusé à l’Alsace.

Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je m’exprime en tant que député issu d’un département rural, le Cantal, souvent cité d’ailleurs depuis le début de ce débat comme un exemple emblématique d’un territoire qui aurait beaucoup à perdre dans cette réforme. Je suis de ceux qui, au contraire, pensent que le principe directeur de cette réforme, l’axe intercommunalité-région peut être une chance pour la ruralité.

De cet axe découle, de façon logique, la disparition à terme des conseils généraux, dont les limites cantonales sont obsolètes et sans signification. Revendiquer, comme certains collègues le font, le maintien à l’identique des conseils généraux après 2020 me paraît une idée non seulement contraire à l’esprit de la réforme mais nuisible à sa lisibilité.

Néanmoins, j’en suis convaincu, il faut réfléchir, en zone rurale, à une nouvelle organisation capable de fédérer les intercommunalités là où elles ne peuvent atteindre la taille minimale nécessaire à l’exercice d’éventuelles compétences qui leur seront attribuées.

Alors, c’est vrai, une crainte liée à la concomitance entre la création de grandes régions et la suppression des conseils généraux est largement partagée, celle de l’éloignement et de l’abandon de la proximité.

À mon sens, il y a trois ou quatre éléments qui sont de nature à préserver, voire à améliorer la proximité indispensable. Encore faut-il qu’ils deviennent réalité et s’appliquent dans les faits.

Il y a d’abord le renforcement des intercommunalités. Dans certains domaines, si elles en ont les capacités humaines et financières, les intercommunalités peuvent rendre des services plus efficaces et plus proches que ce n’est le cas aujourd’hui.

Le renforcement de l’État départemental est également un aspect indispensable. Le retour de l’État départemental, doté d’une vision horizontale et territoriale autour du préfet, sera le garant de l’égalité républicaine, en particulier devant l’accès aux services publics et aux services au public.

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Autre élément, peut-être le plus important, la solidarité infrarégionale. Je ne crois pas que des conseils généraux conservés mais exsangues soient capables d’assurer la cohésion territoriale : c’est bien aux nouvelles régions de le faire. Dans le texte à venir sur les compétences, il faudra leur donner la responsabilité d’organiser le développement équilibré de tous leurs territoires. Cette solidarité infrarégionale, qui devra compléter les solidarités nationales, doit être une exigence pour renforcer la cohésion territoriale au sein même des régions.

Enfin, la proximité passe aussi par une représentation minimale des départements les moins peuplés. Des amendements permettront, je l’espère, d’améliorer le texte à cet égard. C’est aussi une condition d’appropriation de la réforme par les citoyens habitant dans les zones les plus rurales des nouvelles régions.

Vous le voyez, monsieur le ministre, on peut être l’élu d’un territoire très rural tout en envisageant cette réforme indispensable et urgente avec détermination, sérénité et espoir, en considérant que, sous certaines conditions, qui doivent être traduites dans les faits, la proximité et la ruralité ont une chance à saisir avec cette réforme territoriale.

Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.

Debut de section - Permalien
Plusieurs députés du groupe SRC

Il va proposer la création d’une région européenne…

Sourires.

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Monsieur le secrétaire d’État chargé de la réforme territoriale, votre titre réel est-il bien celui de ministre ? N’êtes-vous pas plutôt devenu le chef des hobereaux ressuscités ? Êtes-vous le fossoyeur des acquis de la Révolution, qui créa les départements et mit fin aux fiefs du Moyen-Âge ?

La logique de votre projet, c’est le retour radical aux fiefs de l’Ancien régime, et ce que j’ai entendu parfois me conforte malheureusement dans cette opinion : ici, le duc d’Aquitaine, là, la baronne du Pas-de-Calais, le roi de Lotharingie ; au centre, la comtesse de Chambord, et n’oublions pas la duchesse de Bretagne.

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Que vous le vouliez ou non, votre projet met en place un logiciel de puissance, un logiciel de pouvoir, et c’est sa première faute, car c’est un processus dangereux pour l’unité nationale chèrement acquise au fil des siècles.

Il est en effet évident que tous ces hobereaux ne se contenteront pas d’inaugurer les chrysanthèmes. Ne croyez pas que le duc d’Aquitaine, pour ne pas le nommer, se contentera d’ouvrir les bouteilles de bordeaux, celui que je connais ne boit d’ailleurs pas. Tous ces grands du royaume n’auront de cesse d’accéder au niveau international. À l’évidence, vous rêvez de l’époque des Habsbourg, chère aux gnomes de Bruxelles, qui veulent casser l’État-nation.

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Deuxième faute, vous prétendez faire des économies. Vous rêvez ou quoi ? Où est la loi dégageant les cadres ? Vous ne ferez aucune économie, et pour une raison simple, c’est que ces fiefs gigantesques auront besoin d’une armada de fonctionnaires, c’est une évidence.

« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.

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L’absence d’une réelle étude d’impact est un aveu de votre part.

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Troisième faute, les treize fiefs présidés par les hobereaux en mal de puissance pourront dans votre esprit muscler le tissu économique comme le feraient les Länder. Voilà une erreur tragique, une faute historique. Ce ne sont pas les Länder qui ont fait la puissance économique de l’Allemagne,…

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…c’est le complexe militaro-industriel qui a construit cette puissance depuis plus d’un siècle. C’est ça la réalité.

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En un mot, la puissance économique a précédé les Länder et non l’inverse. Les Länder, au passage, ont été imposés par les Alliés, dont la France, pour éviter l’État-nation allemand, qui aura malheureusement été à l’origine, au vingtième siècle, de tragédies. Et il faut y ajouter, ce qui manque dans ce pays, la politique industrielle tacite de l’Allemagne, du Stammort Deutschland, à savoir ce qui fonde véritablement cette politique industrielle et qui est une vieille préférence nationale. C’est ça, la réalité de l’Allemagne !

Quatrième faute : vous soutenez, pour justifier votre réforme proprement réactionnaire, au sens étymologique de ce terme, les exemples étrangers. Bref, il y aurait une nécessité législative de mimétisme. En premier lieu, vous montrez à l’envi, mais cela vaut à droite comme à gauche, l’exemple allemand. L’Allemagne est un pays fédéral, je l’ai rappelé, dont la forme fédérale a été imposée par les Alliés. Mais, surtout, écoutez les Allemands : ils n’ont de cesse de critiquer la lourdeur des Länder,…

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…coûteux, lointains, sans être efficaces. C’est vrai, et c’est bien cela qui vous gêne !

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Je vais vous donner un second exemple, qu’à l’évidence vous ne connaissez pas.

Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.

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L’Italie, il y a quelques années, est allée dans le sens que vous souhaitez aujourd’hui. Apprenez quelque chose : l’Italie est en train de remettre en cause les régions pour revenir aux provinces, qui sont plus proches et plus efficaces.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d’état chargé de la réforme territoriale

Pas du tout ! C’est le contraire !

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Si, monsieur le secrétaire d’État ! Vous vous trompez. Les régions, trop lointaines, sont remises en cause par les Italiens eux-mêmes.

À l’évidence, vous faites erreur. Le fondement de la démocratie, c’est la proximité, et vous l’avez oublié.

Alors, oui, il faut simplifier,…

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Vous savez simplifier le débat ! C’est déjà ça !

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…et, je vais vous dire, à l’article premier, il faut supprimer les régions. Je n’ai pas voté la réforme de Jean-Pierre Raffarin car j’y voyais un logiciel qui allait dans le mur. Il faut bien évidemment regrouper les départements, mais en laissant le choix, sur la base de l’affectio societatis, aux départements eux-mêmes. Ce n’est pas quelque chose qui doit venir d’en haut. Il faut que ce soit un processus, vers une France de cinquante départements, pour répondre à la simplification et à l’efficacité.

Enfin, l’État doit retrouver sa place dans une politique forte d’aménagement du territoire. Seul l’État est garant du vouloir-vivre ensemble, mais, plus encore, il doit être le garant des solidarités nationales et se donner les moyens de sa politique, au besoin en réformant les aides d’État, au regard de Bruxelles.

Malheureusement, monsieur le secrétaire d’État, vous laisserez votre nom dans l’histoire comme celui qui a créé le chaos territorial.

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Vous avez ouvert la boîte de Pandore et vous n’avez pas fini d’en subir les conséquences.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, monsieur le rapporteur pour avis, chers collègues, permettez-moi de dire ces quelques mots : guete owe bisame, liewe friend. C’est une des langues de France qui n’est pas le français : c’est notre langue alsacienne.

Je ne veux pas redire au cours de ces quelques minutes tout ce que les autres ont dit. L’essentiel a d’ailleurs déjà été dit. Un point que nous partageons, c’est l’idée qu’il faut une réforme, pour gagner en pertinence, en lisibilité, faire des économies si c’est possible, mais aussi, écoutez bien parce que c’est un beau mot, gagner en proximité, et là-dessus je crois qu’il y a une véritable difficulté.

Mais votre réforme est-elle la bonne ?

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Je crois que non. Votre projet était de doter notre pays de grandes régions, de grandes intercommunalités, et de faire disparaître le conseil général. Vous êtes tombés sur un double écueil : la Constitution mais aussi – ce dont on parle peu – la capacité de nos intercommunalités à assumer un certain nombre de compétences sociales. De ce point de vue, vous avez commis une erreur d’analyse.

Nous avons aujourd’hui une carte un peu bricolée,…

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Pourquoi ne pas le dire ? C’est dommage, parce que vous êtes peut-être en train de rater une grande réforme dont notre pays a besoin. À titre personnel, je crois que la grande réforme consistait avant tout à rapprocher les compétences du conseil général et de la région. C’était en tout cas le moyen le plus sûr de faire des économies, de gagner en pertinence, en lisibilité – pourquoi pas ? –, en proximité.

Avant de parler de la carte, permettez-moi de dire quelques mots de la méthode. Je suis élu local depuis dix-neuf ans et j’ai, dans mon territoire, une opposition socialiste. Je n’arrête pas d’entendre parler de démocratie participative, de temps nécessaire au débat, de consultation du citoyen… C’est un mythe qui s’écroule, au vu de cette réforme.

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Oh oui, deux jours, cher ami ; et combien de citoyens ?

Sur le fond, vous faites, me semble-t-il, deux erreurs. La première concerne la taille des régions. Vous semblez obsédés par le souhait d’avoir de grandes régions.

Sourires.

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Or, si la dimension était un élément déterminant, plus de la moitié des régions d’Europe seraient des zones de pauvreté puisqu’elles sont plus petites que la moyenne des régions de France.

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La Sarre, en Allemagne, compte un million d’habitants ; le Vorarlberg, en Autriche, 372 000 habitants ; le Sud-Tyrol, en Italie, 476 000. Ce sont des régions qui devraient nous faire rêver, pour leur PIB par habitant, leur croissance, leur taux de chômage : 3,2 % dans le Vorarlberg, 5,5 % dans le Sud-Tyrol, 6,2 % en Sarre. Eh bien, ces régions sont bien plus petites que l’Alsace ou que la si improbable région Midi-Pyrénées-Languedoc-Roussillon. Mais ces régions sont avant tout des régions dans lesquelles les citoyens se reconnaissent.

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La Croix du Languedoc et la Place du Capitole ! Ce sont le haut et le bas Languedoc !

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La seconde erreur, c’est que vous pensez que le mécano géographique, voire le mécano institutionnel, permettra de réduire les dépenses. Une question : pourquoi les dépenses des collectivités ont-elles augmenté depuis deux décennies ? Pour trois raisons.

C’est dû, tout d’abord, aux nouvelles compétences que l’État a transférées aux collectivités, je pense notamment aux compétences sociales, pour le conseil général, qui ont augmenté de manière extrêmement dynamique : personnes âgées, handicap…

Il y a ensuite les changements de notre société. La construction de l’intercommunalité a permis de répondre à un certain nombre de besoins. Nos concitoyens veulent plus de services périscolaires, ils veulent des crèches, des services sportifs et culturels ; nos communes, nos intercommunalités ont répondu à ce besoin, et cela a été un facteur d’augmentation de la dépense publique.

Enfin, le troisième élément, que personne n’a à l’esprit et que l’on devrait vraiment mettre en exergue, c’est l’addition des coûts de toute la réglementation entrée en vigueur : l’addition réglementaire. Les élus locaux savent à quel point gérer une piscine, un réseau d’eau, une station d’épuration, un système de traitement d’ordures ménagères est devenu particulièrement coûteux, parce que les décisions nationales ont renforcé les coûts de gestion de nos collectivités. Je tiens à le dire clairement : le mécano géographique ne réglera absolument pas le problème du coût de gestion de nos collectivités.

J’aimerais vous livrer une réflexion. Il y a longtemps, j’ai eu la chance, la grande chance d’être étudiant en Bretagne, à l’École de la santé,…

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…et j’ai retenu quelques petites choses, notamment une étude sur le coût de l’appendicectomie : plus l’hôpital est grand, plus le coût est élevé. C’est évident : la technocratie, les étages intermédiaires de gestion s’insinuent dans les structures les plus grandes.

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Vous voulez de grandes régions, eh bien vous aurez de grandes dépenses. C’est aussi simple que cela.

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Les économies d’échelle, cher collègue ? Comparez les dépenses de fonctionnement des régions françaises. Les grandes régions sont-elles fondamentalement plus économes que les petites ?

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Vous aurez ainsi la réponse à votre question.

Pour finir, deux mots de la région qui est la mienne, ou la nôtre puisque nous sommes de nombreux députés alsaciens ici.

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L’histoire de notre région est faite de peines et de souffrances. Notre région est une région rhénane, profondément rhénane, tournée vers le sud de l’Allemagne et la Suisse. Elle se situe géographiquement, vu de Paris, derrière un massif montagneux, les Vosges. Sa culture et ses traditions restent très vivantes et très fortes. Vous voulez aujourd’hui la rattacher à la Lorraine, et puis, depuis quelques dizaines d’heures, à la Champagne-Ardenne, alors qu’elle a peu de liens et d’échanges avec ces régions, par ailleurs très respectables, je tiens à le dire.

Une majorité d’Alsaciens considèrent qu’il s’agirait là d’une blessure, celle de la disparition institutionnelle de l’Alsace ; ce sont des Alsaciens d’origine et des Alsaciens de coeur qui se sont installés dans notre région. À titre personnel, je trouve ce triple mariage assez absurde et même un peu humiliant. Je trouve que la disparition de notre région est un viol.

Exclamations sur les bancs du groupe SRC.

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Pensez aux 220 000 personnes qui sont victimes de viol chaque année !

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Pour moi, comme pour de très nombreux Alsaciens, il s’agit d’une fêlure dans le pacte républicain qui nous unit et nous permet de faire tant de belles choses ensemble.

Les Alsaciens sont des gens calmes, qui ne manifestent pas, qui gardent leurs émotions et qui sont réticents à la violence. Mais c’est au fond des urnes que vous trouverez la réponse, et croyez-moi, à titre personnel, je réfléchirais à deux fois avant de faire le lit de l’extrême droite.

Messieurs les ministres, mes chers collègues, n’humiliez pas l’Alsace ! Nous vous proposons aujourd’hui d’être un laboratoire pour la France : notre projet de fusion des deux départements et de la région pourrait être une préfiguration de ce que devrait être la France de demain, de celle que vous voulez pour demain. Aujourd’hui, nos projets peuvent se retrouver, pour peu que nous ayons tous envie d’avancer ensemble et que nous ayons l’esprit ouvert.

Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.

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Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, beaucoup d’orateurs l’ont dit avant moi : votre réforme pose un problème de fond. Vous nous annoncez, messieurs les ministres, une nouvelle carte des régions, arbitraire, sans même de parler de compétences entre l’État et les collectivités, entre les différentes collectivités, sans même parler de dotations, de fiscalité.

S’agissant d’un projet si important et porteur d’espoir, que chacun d’entre nous aurait pu soutenir, je crains que vous n’ayez confondu vitesse et précipitation. Les dernières touches apportées sur un coin de table à l’Élysée, l’examen au Parlement en toute vitesse, au coeur de l’été, sans aucune concertation, et la touche finale décidée par le seul groupe socialiste, tout cela démontre le peu de considération dont vous faites preuve à l’égard des élus locaux et de la France des territoires. Est-ce vraiment cela l’acte III de la décentralisation annoncé par un président Hollande fraîchement élu ? Pourtant, nous nous accordons tous sur le constat. Notre pays aux 36 000 communes et aux vingt-deux régions a évidemment besoin d’une réforme territoriale de grande ampleur, qui doit être adaptée aux nouveaux défis auxquels nous devons faire face : la collaboration avec des eurorégions de grande taille, la concurrence économique avec de nouveaux pays industrialisés ou encore l’arrivée du numérique qui change incontestablement le rapport du citoyen avec les pouvoirs publics et l’information. Le texte proposé est finalement aussi décevant que la communication qui l’a accompagné.

Cette réforme, et vous le savez messieurs les ministres, va à l’encontre des efforts de décentralisation et propose de recentraliser un grand nombre de décisions dans de nouvelles technostructures régionales. Ce projet de loi accroît la distance entre les populations rurales et les pouvoirs publics ; il ne répond ni au défi de la simplification administrative, ni à la réduction du mille-feuille territorial et encore moins à celui des économies pourtant tellement nécessaires. Le report des dates des élections ne parvient pas à masquer votre crainte des échéances électorales à venir. Il ne répond pas à une question pourtant extrêmement simple : une réforme, certes, mais pour quelles compétences ? Enfin, et cela a été dit maintes et maintes fois au Sénat, vous ne mesurez pas les conséquences de ce projet. Vous annoncez des économies allant de 12 à 25 milliards d’euros, alors qu’il n’y a même pas eu d’étude d’impact. Il semble que votre capacité prospective soit réduite à la pratique du doigt mouillé. Malheureusement, nous commençons depuis deux ans et demi à nous y habituer.

Il n’est, par exemple, pas question de savoir comment s’organiseront les effectifs hospitaliers, judiciaires, militaires, préfectoraux ou universitaires. Comment les anciennes préfectures de région et leur cohorte de directions régionales seront-elles réorganisées ?

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Quelle est votre vision de l’aménagement équitable du territoire ? Prenons la région Grand Est née il y a deux jours de la réunion du PS : quelle place y aura-t-il pour les métropoles de Strasbourg, de Nancy-Metz ou de Reims-Châlons-Épernay ? Nous n’en avons aucune idée. La réforme de la carte militaire nous fait craindre le pire : nombreux sont encore les endroits dans lesquels des friches restent les derniers témoins d’une époque révolue. Le Nord-Est a déjà beaucoup donné, cette nouvelle réforme ne doit pas condamner encore un peu plus notre région. Nous réclamons clairement et avec force l’adoption d’une approche équitable de la répartition des services de l’État au sein de ces nouveaux territoires.

Une réforme concertée serait une réforme fondée sur le développement des atouts de nos régions. La fusion entre la Picardie, la Champagne-Ardenne et la Lorraine, que j’appelle de mes voeux, dispose incontestablement de puissants atouts qui rendraient ce découpage finalement assez naturel. Premier pôle de métallurgie, leader de la production de matériel ferroviaire, l’arc Nord-Est constitue la troisième région française en termes de PIB agricole et industriel. Il dispose par ailleurs d’un réseau de villes fortes. Il constitue le premier pôle agro-industriel, pôle important de chimie verte, et produit 50% de l’énergie éolienne française. Une telle fusion permettrait une unification de l’appellation « Champagne », importante pour le tourisme et l’agriculture, mais surtout pour le commerce extérieur. Elle prendrait aussi en compte les bassins de vie, ce que votre réforme semble totalement oublier.

Je tiens à rappeler que la partie ouest de la Champagne-Ardenne actuelle est à deux heures quarante-cinq de Strasbourg. Il existe un respect mutuel entre ces deux régions viticoles, mais fort peu de communauté de destin, alors que la Champagne-Ardenne est à proximité directe de l’Île-de-France – Reims est à quarante-cinq minutes de Paris, à trente minutes de Roissy et de fait la porte d’entrée est du Grand Paris. Cette carte Picardie-Champagne-Ardenne-Lorraine permettrait également à l’Alsace de voir reconnue la spécificité qui est la sienne,…

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…une région à forte identité, qui a déjà entrepris sa réorganisation, à l’instar de la Bretagne,…

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…tout en organisant un axe nord-est frontalier du Benelux. Le véritable enjeu est celui de l’organisation des services de l’État, qui devra être d’une efficacité supérieure avec un coût moindre. Un tel objectif ne se décide pas en quelques semaines. Il doit être le fruit d’une concertation d’envergure nationale, et non celui de quelques décideurs parisiens éloignés de la réalité quotidienne de la province. Votre réforme, monsieur le ministre, traduit un mépris du Parlement, en particulier de la commission des lois de l’Assemblée nationale qui voit son travail écarté par la seule ingérence d’une majorité déconnectée de ses propres relais locaux. Je le redis : il y a un mépris des élus locaux, qui comptent visiblement bien moins que les apparatchiks de votre famille politique.

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Les apparatchiks, vous, vous les licenciez en ce moment !

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Il y a, enfin et surtout, un mépris des citoyens, qui sont les mieux placés pour parler de la cohérence de leurs territoires en termes de déplacements, de compétitivité et de dynamique territoriale. En tant qu’élue, je plaide pour une approche fondée sur la complémentarité de nos territoires et non pas sur des contingences politiciennes entre le Président de la République et sa majorité et des arbitrages à la petite semaine qui fluctuent selon l’opposition de cette même majorité aux réformes voulues par le Gouvernement.

Monsieur le ministre, nous savons tous – et c’est là notre point d’accord – que cette réforme est indispensable, alors écoutons les Français, les élus locaux et dessinons ensemble un autre projet ! Reprenons la copie, parlons de compétence et de complémentarité des territoires et clairement de l’avenir des régions françaises en Europe.

Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.

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Madame la présidente, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le débat public sur la nouvelle carte est passionné et c’est une bonne chose pour notre démocratie, mais il doit rester serein. Il ne faudrait pas que les controverses, les divisions ou le statu quo l’emportent,…

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…car cette réforme est nécessaire pour que nos régions soient armées pour relever les défis de demain et pour qu’elles puissent s’appuyer sur des métropoles qui deviendront au fil des années des locomotives pour nos territoires. L’enjeu est donc de renforcer certaines régions en leur donnant une taille critique suffisante sur le plan géographique, démographique et surtout économique, lequel est, qu’on le veuille ou non, le coeur de métier de la région. Autour de nous, de nombreux pays ont fait évoluer leur organisation territoriale et nous pouvons, d’ailleurs, constater que l’administration locale en Europe est marquée par une très grande diversité. Il serait vain de chercher un modèle unique – il n’y a pas de modèles allemand, italien ou espagnol –, mais l’on peut observer des évolutions similaires vers davantage de décentralisation, davantage de liberté et de responsabilités locales.

En Angleterre, un vaste redécoupage administratif a été mené depuis les années 2000, sans s’embarrasser des frontières historiques légales. La dernière réforme de 2011 a officiellement abrogé le découpage historique du pays, en créant neuf nouvelles régions. On peut aussi citer d’autres exemples, comme la Finlande ou la Suède. Ces deux pays ont mené au cours des dernières années des expériences qui visaient à regrouper des échelons territoriaux afin de renforcer leurs compétences, notamment dans le domaine économique. Toutes les réformes de l’organisation territoriale prennent du temps et c’est pourquoi je pense que cette carte n’est qu’une étape et qu’elle demandera, dans les années à venir, des évolutions, car à mon sens les frontières ne doivent pas être étanches.

Par exemple, je suis satisfait de la fusion prévue des Haute et Basse-Normandie. Cependant, la communauté urbaine d’Alençon que je préside inclut dans son périmètre cinq communes appartenant à la région des Pays de la Loire, ce qui implique, bien évidemment, des coopérations interrégionales déjà en place, notamment dans le transport ferroviaire. La réforme ne doit pas empêcher des coopérations renforcées de villes qui n’appartiennent pas forcément aux mêmes régions et le travail entre des villes issues de régions différentes doit être possible voire encouragé. Les pôles métropolitains en sont des exemples concrets. Je ne souhaiterais pas que, sous prétexte que des collectivités n’appartiennent pas aux mêmes régions, elles ne puissent coopérer ni instaurer des politiques communes. Il faut, au contraire, inciter et favoriser ces rapprochements dès qu’une logique de cohérence et de complémentarité s’impose. Ce dispositif peut être une voie possible pour les départements qui ne se reconnaîtront pas dans leurs nouvelles régions.

Cette réforme n’aura de sens que si, parallèlement, le maillage territorial de proximité est complété, plus particulièrement au niveau des départements ruraux et des villes moyennes, qui devront avoir une fonction spécifique en l’absence de métropoles. Ces espaces ont eux aussi vocation à mettre en oeuvre des politiques publiques, à valoriser des savoir-faire locaux, mais également à expérimenter des modes de gestion dans le cadre d’un partenariat novateur. Ce qui importe à nos populations, c’est de pouvoir trouver à proximité de leurs lieux de vie des emplois, des équipements, des services de qualité et un environnement équilibré. Nous devons veiller à ne pas créer une France des régions à plusieurs vitesses. Il est de notre responsabilité d’assurer l’égalité d’accès de tous aux mêmes chances dans nos territoires.

C’est pour ce motif, monsieur le ministre, que le deuxième volet de la loi, en discussion à l’automne prochain, concernant les compétences des collectivités locales, m’apparaît nécessaire et indispensable. Je souhaiterais que nous puissions réfléchir, à cette occasion, à un texte pour relancer la création de communes nouvelles autour des villes moyennes et favoriser la transformation des EPCI en communes nouvelles pour répondre à ceux qui, à juste titre, critiquent le mille-feuille administratif.

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En effet, ce dispositif peut être un bon outil pour fédérer des territoires fragiles qui ne peuvent agir seuls, afin de leur donner les moyens de gérer des équipements de bon niveau et les services indispensables à la vie de nos concitoyens. Je soutiens ce projet de loi et je serai particulièrement attentif au deuxième volet concernant les territoires, les communes et les départements, que notre assemblée examinera à la rentrée. Si l’État est responsable de la cohésion de l’édifice national, il doit veiller à ce que les fondations que nous construisons soient solides afin de garantir certes l’efficacité économique et la justice sociale, mais également l’équité au sein de nos territoires. Voilà quels sont, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, les motifs de mon soutien au projet de loi.

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

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Madame la présidente, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, l’un d’entre nous l’a dit à cette tribune : ce débat est une chance ! Jamais, depuis la Révolution française, n’a été confié au Parlement le soin de dessiner les contours de circonscriptions, et encore moins de collectivités infra-étatiques. Cette chance, le Sénat, la chambre qui représente les collectivités territoriales, a refusé de la saisir. Quant à elle, la chambre qui représente directement les citoyens ne peut ni ne doit la laisser passer. La réforme est attendue et, depuis trente ans, trop de temps a été perdu : il nous faut désormais agir. Cette chance nous est aujourd’hui offerte, parce que le Gouvernement a fait le choix d’une méthode, celle de la démocratie parlementaire,…

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…celle de la délibération collective, dans la transparence et sous le regard vigilant et attentif de nos concitoyens. Nous avons bien compris que d’aucuns à droite auraient préféré un décret.

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Les députés du groupe SRC se félicitent, eux, que la voie parlementaire ait été préférée à une démarche autoritaire. Bien évidemment, l’exercice est à ce point singulier qu’il ne va pas sans déstabiliser le législateur lui-même, invité, comme le dit l’adage, à légiférer d’une main tremblante. En effet, dessiner les contours des régions de France invite, encore plus que de coutume, à la prudence et à l’humilité, tant les soubassements de la discussion sont chargés symboliquement, historiquement, sociologiquement, économiquement, en un mot, politiquement. La singularité de ce débat est d’autant plus grande que le cheminement intellectuel auquel nous sommes appelés nous conduit à avancer les pieds dans la glèbe et la tête dans les étoiles, comme aurait dit Confucius.

De fait, si nous sommes tous les élus d’un territoire, nous sommes dans le même temps les représentants d’une seule nation, chargés de rechercher ensemble l’intérêt général. Dessiner une carte ! La tâche est assurément plus ardue que si un petit prince, celui de Saint-Exupéry, nous avait demandé de lui dessiner un mouton. Mais, comme le petit prince qui n’était jamais satisfait du dessin que lui faisait Saint-Exupéry, certains dans cet hémicycle voudraient qu’en tout désespoir de cause, comme Saint-Exupéry, nous dessinions une caisse, à l’intérieur de laquelle se trouverait non pas un mouton mais une carte, la carte idéale des régions de France.

Cette carte idéale, elle n’existe pas. Mais il faut bien tenter de s’en approcher, en passant par le réel. Lorsqu’on a le courage, sur un tel sujet, de se confronter au réel et d’engager une délibération collective, il faut chercher avec humilité un point d’équilibre et accepter que, jusqu’au terme de la discussion parlementaire, des évolutions, ou plutôt des améliorations, puissent être apportées.

La carte initialement proposée par le Gouvernement a évolué, et elle va encore évoluer.

Applaudissements et « Bravo ! » sur les bancs du groupe UMP.

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D’aucuns s’en émeuvent, et ils ont tort, car il est bien légitime que les parlementaires que nous sommes assument pleinement leurs responsabilités.

C’est un fantasme que d’imaginer que la carte des régions de France a été élaborée sur un coin de table.

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La carte des régions de France sera élaborée ici, dans la seule enceinte légitime pour représenter, dans toute leur diversité, les citoyens et les territoires, dans la seule enceinte légitime pour dialoguer dans la transparence avec le Gouvernement.

De nombreux orateurs nous ont invités à prendre de la hauteur pour dessiner cette carte, et ils ont raison.

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Attention tout de même à ne pas monter trop haut !

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Car si nous ne légiférons assurément pas pour l’éternité, nous le faisons plus certainement pour les cinquante ans qui viennent.

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Pour prendre de la hauteur, nul besoin de se placer au sommet de quelque éminence que ce soit, ni de gravir les marches de je ne sais quel beffroi. Il suffit de se placer dans la perspective du temps long et, sans s’abstraire du passé, ni des contingences du présent, d’être pour l’essentiel tendu vers l’avenir. C’est ce que les députés du groupe SRC ont l’intention de faire, en allant dans le même sens que le rapporteur, dont je salue le remarquable travail d’audition et de concertation, car concertation il y eut, avec l’ensemble des élus régionaux de France.

Nous dessinerons une carte formée de treize régions…

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…qui toutes, sans exception, auront le poids et la taille critique nécessaire pour penser et mettre en oeuvre des stratégies de développement économique qui permettront à notre pays de retrouver durablement le chemin de la croissance et de la création d’emploi.

Treize régions, au lieu de vingt-deux…

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…qui vont simplifier notre organisation territoriale.

Treize régions…

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…pour des politiques publiques plus efficaces, au seul service de nos concitoyens.

Treize régions, définitivement, oui ! Ne soyons pas superstitieux. Je crois que ce débat est une chance : saisissons-la !

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

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Madame la présidente, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, à ce moment du débat, chaque orateur doit sûrement s’interroger, comme moi, sur la pertinence de son propos, eu égard à la fatigue apparente des ministres et du président de la commission, qui ont entendu maints arguments, assenés certes avec talent, mais de manière, il faut en convenir, un peu répétitive… Il nous faut donc croire à la vertu de la répétition et espérer qu’après nous avoir écoutés attentivement, M. Cazeneuve modifiera quelque peu son point de vue, ce qui devrait lui permettre de sortir de son aporie.

Alors que la situation économique de notre pays ne cesse de se dégrader et rend la vie quotidienne de nombre de nos compatriotes de plus en plus difficile, le Président de la République propose un redécoupage des régions destiné, selon lui, à simplifier le mille-feuille territorial, à réaliser des économies budgétaires, et à rendre plus efficace la gestion de nos territoires.

Si l’on peut a priori, et comme beaucoup de Français, partager ces intentions, en revanche, sur la forme, la méthode utilisée, ou plutôt l’absence de méthode, laisse pantois ! En effet, décidée sans consultation des élus locaux et des habitants, mais surtout sans définition préalable de critères précis de population, de bassin de vie économique ou de compétences propres, cette annonce ressemble plus, dans sa forme, au fait du prince qu’à une véritable démarche de réforme de la décentralisation. C’est d’ailleurs ce qu’ont souligné l’Association des maires de France et l’Association des présidents de conseils généraux. Quelle cohérence y a-t-il, en outre, à débattre aujourd’hui d’un texte découpant la France en super-régions, et de traiter à l’automne de l’essentiel, c’est-à-dire des compétences et de l’articulation de ces compétences avec les autres collectivités ?

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Absolument ! Il fallait commencer par redéfinir les compétences !

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En l’état, ce redécoupage va d’ailleurs créer de nouvelles disparités, en témoignent les exemples emblématiques des Pays de la Loire et de la Bretagne, qui ne font l’objet d’aucune modification.

Sur le fond, le postulat de départ, selon lequel la région serait l’échelon territorial d’administration locale le plus pertinent et le plus efficace, n’est nullement démontré, et il semble même que ce ne soit pas le cas, si l’on examine le train de vie de ces collectivités au cours des dernières années, ou la situation des autres régions européennes. Cessons par ailleurs de croire, ou de faire croire, comme l’a souligné très justement notre collègue Hervé Gaymard, que la taille des budgets des régions serait l’alpha et l’oméga économiques de nos territoires.

Le redécoupage qui nous est proposé, et qui est soi-disant inspiré du modèle les Länder allemands, fait abstraction de notre histoire et de notre organisation territoriale, notamment de notre organisation communale, laquelle serait, dit-on, responsable de la gabegie publique, alors que chacun connaît le dévouement quasi bénévole des maires et des conseillers municipaux de nos communes !

Alors que la réforme territoriale proposée par la précédente majorité, soucieuse de définir les compétences propres à chaque collectivité, avait instauré un conseiller territorial départemental, élu au scrutin majoritaire et administrant le conseil régional, ce qui avait l’avantage de supprimer près de trois mille conseillers régionaux et généraux, sur le modèle des conseillers municipaux qui administrent les communautés de communes, ces nouvelles entités régionales élues au scrutin proportionnel vont contribuer à éloigner plus encore les élus et les centres de décision de la gestion locale et des habitants, notamment de ceux des zones rurales et périurbaines.

Que penser, enfin, de la supposée efficacité d’une gestion à distance des collèges, des lycées, des routes départementales, des services de secours et d’incendie, ou encore des transports scolaires, sinon qu’elle porte en elle les germes d’une recentralisation qui ne dit pas son nom ? C’est la crainte qu’a exprimée hier à cette tribune Roger-Gérard Schwartzenberg. Comment ne pas être inquiet quand vous nous dites, monsieur le ministre, que vous voulez renforcer la présence des services déconcentrés de l’État pour pallier la suppression des conseils généraux, ce qui reviendra à créer de nouvelles strates technocratiques de gestion des fonctionnaires et des agents des collectivités départementales, qui existeront toujours ? Ce sont autant de procédures qui ne manqueront pas de susciter des dépenses supplémentaires, non compensées par la suppression des seuls conseillers départementaux.

Prenez le temps, monsieur le ministre de l’intérieur, d’écouter et de consulter les élus locaux, notamment les élus ruraux, qui sont très majoritairement inquiets – lorsqu’ils n’y sont pas opposés – face à ce redécoupage prématuré. Prenez le temps de la réflexion, si vous ne voulez pas contribuer à la mise en oeuvre d’un nouveau schéma d’incohérence territoriale.

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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Nous allons à nouveau avoir le plaisir d’entendre le Nord Pas-de-Calais, après avoir entendu Daniel Fasquelle !

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Madame la présidente, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, le débat relatif au découpage territorial est important, utile, et même essentiel pour notre nation. Nous devons améliorer le fonctionnement de nos administrations, garantir à notre pays de meilleures collectivités locales, qui soient capables d’assurer leur développement économique et social, et rapprocher les élus, les pouvoirs publics et la population.

Votre réforme, monsieur le ministre de l’intérieur, est-elle à la hauteur de ces enjeux ? La réforme territoriale est nécessaire, mais celle que vous proposez doit être fortement amendée et précisée. Par ailleurs, même si votre méthode est douteuse, il faut que nous accoutumions les conservateurs à songer à la prochaine génération, plutôt qu’à la prochaine élection.

La réforme territoriale est nécessaire, disais-je, mais elle doit être fortement amendée et précisée.

Oui à la fusion des régions, et oui à la disparition des départements, même s’il faut à mon sens laisser perdurer dans certains départements ruraux, si ce n’est la présence de l’État, du moins celles d’autres collectivités locales susceptibles d’accompagner ces territoires particuliers. Je m’étonne d’ailleurs, monsieur le ministre, que vous fassiez dans ce projet de loi une exception pour la métropole de Lyon, qui va continuer à s’occuper des collèges, alors que vous déniez cette faculté à d’autres territoires. La République, si elle est unie, n’est pas uniforme !

Oui, la réforme territoriale est nécessaire, car elle favorisera le développement économique et social, ainsi que son corollaire, les grands projets de transports. Dans l’entretien qu’il accorde à Michel Droit quelques jours avant le référendum de 1969, le général de Gaulle estime que les départements ont failli à leur double mission.

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D’une part, ils n’ont pas fait oublier les provinces, puisque subsistent l’Auvergne et les Auvergnats, mais aussi les ch’tits gars du Nord – c’est le général de Gaulle qui le dit, et non Daniel Fasquelle.

Sourires.

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D’autre part, le département n’est pas le cadre dans lequel peuvent se réaliser ces grands développements économiques et sociaux.

Si elle est nécessaire, votre réforme, monsieur le ministre, doit être précisée et amendée, et trois problèmes importants demeurent, que vous n’avez pas réglés.

Le premier est celui de la proximité, qui peut être réglé par le mode de scrutin. Il importe de rapprocher le peuple et les élus.

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Pour cela, faites le choix du scrutin uninominal, messieurs les ministres ! Engagez-vous aujourd’hui à ce que les territoires et les populations soient réellement pris en compte et abandonnez la proportionnelle, qui fera la part belle aux apparatchiks des partis politiques, mais qui entraînera aussi la non-représentativité des territoires.

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M. le ministre Cazeneuve a précisé que certains départements auraient deux élus pour être plus justes ; en réalité, ils auront juste deux élus ! Passez au scrutin uninominal, qui combinera la grandeur de la proximité et l’efficacité de la majorité.

Le deuxième problème est celui des économies. Vous dites, monsieur le ministre, qu’il y aura des économies, mais on ne sait pas quand, ni combien. Et lors de ses interventions dans les médias, le ministre Vallini a donné des chiffres qui fluctuent. On n’en est manifestement plus à quelques millions ou à quelques milliards près, au Gouvernement !

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Et nous apprenons dans le même temps que Mme Lebranchu, qui ne siège pas avec nous aujourd’hui – espérons qu’elle nous rejoindra ce soir, car c’est tout de même elle qui est en charge du dossier – a écrit aux fonctionnaires territoriaux pour leur rappeler qu’il n’y aurait pas de suppression de postes.

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Comment faire des économies sans supprimer des postes de fonctionnaires territoriaux ? Heureusement que nous avons devant nous une longue nuit pour tenter de résoudre cette quadrature du cercle !

Le troisième problème laissé en suspens est celui de l’efficacité. Nous ne connaissons ni les moyens, ni les dotations, ni les compétences des régions. Nous ne savons même pas si les régions auront demain le levier fiscal, c’est-à-dire le vrai pouvoir.

Même si votre méthode est douteuse, monsieur le ministre, il est, me semble-t-il, de notre devoir de vous accompagner. Et il convient, je le répète, que les conservateurs songent davantage à la prochaine génération qu’à la prochaine élection. Votre méthode, disais-je, est douteuse : le redécoupage évolue sans cesse et l’on ne sait plus quelles sont les régions qui vont fusionner. Peut-être que demain, la nuit portant conseil, Mme Aubry sera moins courroucée contre le Gouvernement. Et nous saurons enfin si c’est à l’Élysée, au sein du groupe socialiste, à la commission des lois, à la commission du développement durable, au Sénat, ou à l’Assemblée nationale que s’exprime la vérité législative. Que dire du débat en deux temps, avec des compétences que nous connaissons, mais dont nous ne pouvons pas discuter, puisque cette question ne sera abordée qu’en septembre ?

Vous donnez l’impression, monsieur le ministre, de vous comporter comme un mauvais étudiant qui, n’ayant pas révisé au cours de l’année, passe une nuit blanche avant l’examen. Au lieu de fusionner dans un premier temps les collectivités, les départements et les régions – c’était l’esprit du conseiller territorial –, vous préférez faire une révision générale du programme la veille de l’examen, ce qui n’est pas la meilleure manière de le réussir.

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Cela étant, de mauvais arguments ont été utilisés, aussi bien dans le camp politique que je représente que dans le vôtre. À ce sujet, même si nous sommes élus de la nation, je voudrais revenir sur le cas particulier de la fusion du Nord-Pas-de-Calais et de la Picardie. Si j’ai bien compris l’argument de Mme le maire de Lille qui, depuis sa défaite aux élections législatives, ne siège plus parmi nous et ne peut donc pas défendre ses arguments ici…

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C’est pour cela qu’elle est hostile au cumul des mandats !

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…nous ne pouvons pas fusionner le Nord-Pas-de-Calais et la Picardie, parce que la région tomberait entre les mains du Front national.

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Son argumentaire me paraît particulièrement mauvais. Depuis la création des régions, le Nord-Pas-de-Calais a toujours été socialiste. S’il y a donc un risque de voir le Front national l’emporter, c’est peut-être du fait de la mauvaise gestion des socialistes…

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L’intérêt général voudrait que l’on fasse le bilan de cette gestion, plutôt que d’empêcher, par l’adoption d’un mode de scrutin particulier ou par un redécoupage voulu par le Gouvernement, Marine Le Pen de devenir présidente de région. Imaginez ce que pensent les habitants de la Picardie et du Nord-Pas-de-Calais des arguments de Mme Aubry ! Ils se disent que, tout étant perdu sauf l’honneur, il faudrait que le Gouvernement soit aux ordres de Mme le maire de Lille pour éviter qu’une région ne revienne au Front national.

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La vérité, c’est que les socialistes, et particulièrement Mme Aubry, n’ont aucun projet ! Ils traitent avec une condescendance terrible les habitants du Nord-Pas-de-Calais, et surtout ceux de la Picardie. Je crois, pour ma part, que tout nous rapproche de la Picardie. M. le président de la commission des lois, qui est breton, pourrait dire que c’est le climat,

Sourires.

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mais pas seulement ! Il y a l’histoire, la géographie, la culture, et jusqu’à l’art culinaire. Il y a aussi les grands projets qu’ont soutenus tous les gouvernements, de droite comme de gauche, tel le canal Seine-Nord, qui donnera demain les moyens à Lille d’être une vraie métropole, face à Bruxelles, à Paris et à Londres.

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Qui que soient les futurs dirigeants de la région que nous appellerons Nord-Pas-de-Calais-Picardie ou Picardie-Nord-Pas-de-Calais, ils devront agir dans l’intérêt de sa population, et cela ne se fera pas avec les arguments de Mme Aubry, car je crois que les tracts de Mme Le Pen pour les socialistes, notamment M. Percheron, sont déjà édités. C’est une population courageuse qui a souffert de deux guerres mondiales, de la désindustrialisation, de la fin de l’industrie textile, du chômage de masse, et qui demande aujourd’hui la solidarité de la nation, au sein d’une grande région forte. Messieurs les ministres, si les conservatismes de vos partis politiques empêchent de faire cette fusion, seul le peuple, plein de bon sens, pourra vous donner raison.

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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Madame la présidente, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, je ne reviendrai pas sur les conditions d’émergence de cette réforme : elles sont improbables. Vous avez commencé par procéder au découpage alors qu’il fallait d’abord décider des compétences dévolues aux régions.

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Vous avez donc pris le problème à l’envers. De toute évidence, vous ne savez pas précisément où vous allez. Vous semblez surtout n’être guidés que par des considérations internes au parti socialiste. Vous êtes une nouvelle fois en train de cliver les Français alors que notre pays a plus que jamais besoin de concorde et de rassemblement.

Il est d’ailleurs possible de se demander pourquoi la majorité présidentielle s’est empressée de supprimer le conseiller territorial, qui était pourtant une réponse pertinente pour réformer durablement et sans heurts notre pays. Dont acte.

Venons-en maintenant à l’esprit de votre projet de loi. Il reste très flou. Pour réduire le mille-feuille institutionnel français, deux solutions se présentent d’un point de vue opérationnel. L’une consiste à faire de très grandes régions. Dans ce cas, pour préserver la proximité, il est nécessaire de maintenir les conseils généraux, contrairement à ce que vous affirmez. L’autre solution consiste à supprimer les conseils généraux, et en ce cas il faut garder des régions de taille raisonnable afin de maintenir la nécessaire proximité avec nos concitoyens.

Ceci étant dit, permettez-moi de faire un petit détour historique. Je voudrais revenir sur un processus législatif dont nous fêtons cette année le quatre-vingt-dixième anniversaire. Il s’agit des lois incorporant le droit local d’Alsace-Moselle au droit français, votées en 1924 après cinq années d’un intense travail.

Le rapporteur de ce texte dans notre hémicycle était alors Robert Schuman, celui qui s’illustrera plusieurs décennies plus tard en devenant, avec De Gasperi et Adenauer, l’un des pères fondateurs de notre Europe politique contemporaine.

Que disait Robert Schuman en 1924, lorsqu’il était rapporteur ? Il plaidait en faveur de la prise en compte des spécificités locales de l’Alsace-Moselle. Cette dernière avait quitté le giron de notre République pendant près d’un demi-siècle. Son retour nécessitait une adaptation du droit et une prise en compte de ce que l’on appelait le droit local. Sachez que l’Allemagne de Bismarck avait accordé dès 1911 à l’Alsace-Moselle des pouvoirs législatifs et réglementaires spécifiques, à l’instar des autres Länder allemands. Mais ce n’est pas ce que nous demandons aujourd’hui, nous demandons que l’Alsace soit respectée.

Tout cela a contribué à donner à cette région une identité très forte. Souvenons-nous du discours de Foch au retour des troupes françaises à Thann, en 1914 : « Vous êtes l’Alsace, je suis la France. Je vous apporte le baiser de la France qui ne vous quittera plus jamais ».

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L’Alsace est évidemment fortement attachée à la France, mais elle est aussi soucieuse d’affirmer ses spécificités qui, loin d’appauvrir notre nation, ne peuvent que l’enrichir.

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C’est la raison pour laquelle Robert Schuman plaida en faveur d’un droit à l’expérimentation en matière juridique pour l’Alsace-Moselle…

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…alors que d’aucuns préconisaient la solution qui avait prévalu pour les deux Savoie et Nice quelques décennies plus tôt, c’est-à-dire la suppression du droit local et l’imposition du droit français dès le retour de l’Alsace à la France. Heureusement, nos prédécesseurs dans cet hémicycle ont eu la sagesse de suivre les propositions du rapporteur Robert Schuman. Ce droit local fut d’ailleurs confirmé par le constituant de 1958 et inscrit explicitement dans la Constitution de la Ve République.

Robert Schuman était persuadé que l’incorporation du droit local au droit français apporterait une richesse extraordinaire. Cela permettait d’allier unité de la République et prise en compte des contingences et des spécificités locales. Il s’agissait d’une pensée très largement inclusive plutôt qu’exclusive, pour reprendre la terminologie utilisée par Edgar Morin dans ses thèses sur la complexité. Permettez-moi de vous dire, messieurs les ministres, mes chers collègues, que nous sommes dans une situation similaire aujourd’hui.

Forts de l’idée qu’il faut effectivement réduire le mille-feuille institutionnel, nous ne sommes pas moins de treize députés alsaciens sur quinze à porter le projet d’un Conseil unique d’Alsace.

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Ce projet consiste à fondre les conseils généraux des deux Rhin et le conseil régional d’Alsace en une seule entité. Un amendement vous sera soumis en ce sens. Une telle proposition est une vraie réforme. C’est aussi, nous le pensons profondément, une attitude responsable, et respectueuse de l’Alsace dans ce qu’elle a de spécifique.

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Mon plaidoyer est donc simple : vouloir fondre l’Alsace dans un ensemble du Grand Est n’a aucun sens.

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Cela ne correspond à rien. C’est une ineptie historique, sociale, culturelle et économique.

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En Alsace, notre culture est rhénane. Vouloir le nier est commettre une erreur historique.

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L’Alsace ne peut être traitée comme une simple variable d’ajustement dans un jeu de domino improbable et surréaliste.

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Relisez les comptes rendus de notre Assemblée lorsqu’en 1919, les députés alsaciens sont revenus siéger dans cet hémicycle. Ce fut un moment de liesse et de concorde nationale. Nous ne pouvons pas aujourd’hui trahir leur mémoire ni leur combat. Ils se sont battus pour que notre terre, réintégrée légitimement au sein de la République, soit pleinement respectée et nos concitoyens reconnus dans la plénitude de leurs spécificités. De là vient la reconnaissance de notre droit local.

Dès 1924, l’Alsace fut donc pour notre nation une nouvelle terre d’expérimentation au sein de notre République. Exactement quatre-vingt-dix ans plus tard, en mémoire de ceux qui se sont battus pour que nous soyons fiers d’être Français, la réforme territoriale est une fantastique occasion de proposer que l’Alsace soit une nouvelle fois cette terre d’expérimentation au service de la France et de la nation.

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Vous serez traités exactement comme le Languedoc-Roussillon !

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Vous l’aurez compris : malgré les modalités d’émergence de ce projet de loi, nous sommes dans une vraie démarche de proposition. Messieurs les ministres, mes chers collègues, treize députés sur quinze dans une région, ce n’est pas rien, cela représente une véritable légitimité démocratique.

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C’est pourquoi nous comptons sur votre soutien à tous pour permettre à l’Alsace d’apporter, dans le respect de son identité et de sa culture, sa contribution à une réforme territoriale qui mérite bien mieux que de petits arrangements partisans entre socialistes. L’Alsace c’est la France, mais l’Alsace a aussi une histoire singulière. Vous ne pouvez pas la rayer d’un trait de plume. Elle veut servir la France, mais pour cela elle souhaite que la nation la respecte dans toutes les dimensions constitutives de son identité singulière.

Nous comptons donc sur vous tous pour que l’Alsace puisse apporter sereinement sa contribution à la réforme de nos institutions républicaines, grâce à la création du Conseil d’Alsace. Je vous en supplie, ne bafouez pas notre identité ! L’Alsace est fière d’être française, ne trahissez pas cette fierté par de simples calculs politiciens aussi mesquins qu’improbables. À l’occasion de cette réforme territoriale, nous souhaitons que le Conseil d’Alsace contribue à la réforme de nos institutions.

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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Nous allons voir s’il est meilleur que Mme Pécresse !

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Monsieur le ministre, monsieur le président, monsieur le rapporteur, chers collègues, après l’intervention très claire de Patrick Hetzel, après le travail de préparation d’Hervé Gaymard sur cette loi, et après l’intervention très nette de notre collègue Frédérique Massat qui s’exprimait au nom des élus de montagne, relayant une préoccupation qui dépasse les partis politiques au sein de cette Assemblée, je voudrais revenir sur la rupture profonde du contrat républicain que constitue, pour l’organisation du territoire, votre réforme des grandes régions.

Vous présentez cette réforme comme uniquement technique, destinée à réaliser des économies. Vous camouflez derrière cette réforme les ruptures extrêmement importantes dans l’organisation nationale de la République, ainsi que l’abandon d’un certain nombre de territoires. Le contrat républicain français a toujours reposé sur une attention spécifique portée aux petites communes, aux territoires ruraux, à l’aménagement du territoire et à la place de la montagne dans la République.

Cette attention a toujours dépassé les clivages politiques. C’était celle de Ferry qui déclarait : « Les populations des campagnes sont le fond même de la société française () La République doit les protéger. » C’était également l’attention de Gambetta lorsqu’il déclarait : « Hé bien, je voudrais qu’on fit pénétrer dans la tête de l’électeur rural que ce bulletin de vote, que ce carré de papier, c’est sa destinée, que c’est lui, quand il écrit un nom sur son carré de papier, qui se prononce souverainement sur le bien ou le mal qui doit lui arriver. »

La conception de la République française selon laquelle c’est l’État qui a forgé la nation reposait sur l’idée que la République ne devait laisser aucune commune de côté, qu’il n’y avait pas de petites et de grandes communes dans les contreforts des vallées vosgiennes, pas plus qu’il n’y en avait en Bretagne ou en Auvergne, et que la République devait avoir la même attention pour chacune de ces communes.

Rien n’est plus beau, dans l’histoire de la IIIe République, que le moment où toutes les communes de France se sont couvertes d’écoles. La République était partout, elle faisait preuve d’attention pour chacun de ses territoires et avait même une vigilance accrue pour la ruralité, la montagne et ses petites communes, tout simplement parce qu’elle refusait de s’inscrire dans une simple logique arithmétique.

Cet esprit s’est ensuite incarné dans l’expression de Pierre Mendès France ainsi que dans celle de Blum, dans celle du Général de Gaulle aussi bien que dans celle de Jacques Chirac ou de François Mitterrand. C’est cette ruralité que vous trahissez aujourd’hui avec votre carte des grandes régions. Ce meurtre, vous l’avez commencé avec la carte cantonale.

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Le Premier ministre n’a aucun respect pour la ruralité. Il est issu d’un territoire urbain.

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Il est vrai que Nicolas Sarkozy était un grand rural !

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Malgré les alertes successives que nous avions lancées à l’époque, M. Colmou a littéralement massacré la ruralité sur la carte cantonale, contrairement à tous les engagements qui avaient été pris à l’époque.

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Et M. Marleix, en son temps, il avait bien découpé lui aussi !

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Vous avez fondu la plupart de nos petites communes dans de grands ensembles, afin qu’elles ne pèsent plus. Vous l’avez fait conformément à un plan politique conçu pour donner plus d’importance aux territoires urbains, dont vous pensez qu’ils vous sont plus favorables, conformément aux idées de fondations proches de vous telle que Terra Nova, qui avait très clairement esquissé ce plan politique.

Aujourd’hui, vous revenez à la charge exactement de la même manière, avec une carte de grandes régions qui repose en réalité sur un système politique qui va faire disparaître la représentation des petits départements.

Il faut bien comprendre ce que vous faites : vous affichez artificiellement sur votre carte un nombre d’élus par département, mais il est totalement fictif, et vous le savez très bien. C’est un pur mensonge, puisque votre système électoral crée une représentation fondée uniquement sur le nombre de voix. Cela aboutit à ce que le nombre d’élus que vous affichez ne correspondra pas à la réalité.

Prenons un exemple parmi d’autres, celui du Cantal : vous prétendez qu’il aura à peu près six élus, alors qu’il devrait en réalité avoir moins de trois élus, ce qui représente une perte de 40 %. À l’inverse, dans les territoires urbains, les pertes seront limitées à 8 %. Dans les territoires de montagne et les territoires ruraux, la perte de représentation sera en moyenne de 30 % à 40 %.

Vous faites cela de façon hypocrite car vous n’avez pas le courage d’afficher clairement dans votre loi le nombre d’élus qui sera attribué à ces petits départements que vous avez choisi d’abandonner.

Ce ne sont pas tous des départements de droite, mais ce sont tous des départements de la République. Je pense à l’Ariège, que vous trahissez et qui sera très peu représentée, et aux contreforts de montagne de la région Rhône-Alpes, que vous devriez théoriquement connaître, monsieur Vallini, et qui perdront de façon dramatique leur représentation au sein d’un ensemble dans lequel ils n’auront plus voix au chapitre. Je pense aussi à ce petit territoire de Lozère, qui sera tellement dilué que vous avez été obligés de lui concéder un seul conseiller régional, sans même avoir la garantie qu’il sera de la même majorité que celle qui sortira des urnes dans ce département.

Vous opérez une rupture majeure dans le contrat de la République. Vous portez un coup de poignard dans le dos des territoires ruraux et des territoires de montagne. Vous pourriez nous répliquer que la ruralité et la montagne appartiennent au monde d’hier, qu’elles ne doivent plus être défendues, qu’elles n’ont plus leur place dans la République. C’est exactement l’inverse que vous devriez faire. La mondialisation, que vous prétendez combattre, aboutit à une concentration de tous les avantages sur les grandes métropoles, ce qui pourrait potentiellement priver d’avenir les territoires ruraux qui auraient encore plus besoin d’une politique d’aménagement du territoire. Plus que jamais, par rapport au contrat initial de la IIIe République, ces territoires ont besoin de nous ! Mais c’est ce moment que vous choisissez pour les abandonner et pour les diluer dans la représentation démocratique. Ce projet de loi empêchera l’expression de la montagne et de la ruralité : quel que soit le groupe auquel ils appartiennent, les députés qui voteront ce texte auront des comptes à rendre !

C’est ce qu’avait très bien compris Jaurès, dont vous trahissez la vision. La grande responsabilité de la République est de veiller à être présente dans chaque commune. Mieux encore : la République doit veiller tout particulièrement sur les communes les plus petites et les plus fragiles. C’est notre contrat fondateur. Quiconque reviendrait sur ce contrat prendrait une lourde responsabilité.

En créant ces grandes régions, vous actez, à des fins politiciennes, la mort de la ruralité et de la montagne. Ce sujet devrait nous unir ; pourtant, vous avez choisi de restaurer les baronnies du Moyen-Âge, d’affaiblir l’État nation et de tourner le dos au contrat républicain que nous avions signé dans les actes fondateurs de la IIIe République.

Votre réforme n’est pas une petite réforme. Elle aboutit à priver de voix les territoires ruraux. Il est encore temps de faire machine arrière ; en tout cas, il ne faut pas aller plus loin sans apporter des garanties quant à la place et à la bonne représentation de la ruralité au sein de la République.

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, il y a peut-être une bonne nouvelle dans ce long débat : il semblerait que je sois le dernier orateur de la discussion générale.

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Dans ce cas, je retire cette bonne nouvelle, qui était peut-être l’une des seules que nous ayons entendues au cours de ce débat. Le dernier mot sera donc à l’Alsace, et je m’en réjouis.

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Dans ce contexte, être le dernier orateur, c’est tout un symbole !

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Comme de coutume dans notre noble assemblée, nous avons entendu des arguments pertinents de part et d’autre. Malheureusement, nous n’avons pas échappé, ici ou là, à quelques postures politiques bien connues. Mais, dans les interventions de certains de nos collègues venant de régions à l’identité particulièrement forte, il y avait autre chose qu’une simple posture politique. Il y avait de l’émotion et l’appel à la grande histoire de France. Il y avait aussi, bien sûr, l’évocation de la République une et indivisible que nous chérissons.

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Mais il y avait également le rappel de la diversité de nos territoires, de nos populations, de notre histoire et de tout ce qui fait, au fond, la singularité de la France. Je pense que vous le ressentez aussi, monsieur le secrétaire d’État, comme chacun de nous : cela mérite la considération, l’écoute – vous l’avez eue – et le respect.

Nous avons tous ressenti ce qui transparaissait dans certaines interventions récentes : au-delà d’un découpage presque banal, nous touchons à l’essentiel, à ce que Renan appelait, dans un grand discours à la Sorbonne en 1882, un « principe spirituel », « l’âme des peuples », « le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l’héritage qu’on a reçu indivis ». Il y avait tout cela dans ces interventions.

Prenons garde à ne pas trop bousculer ces principes. Il faut réformer, cela a été dit et nous en convenons tous. Mais, en touchant à l’essentiel, veillons à ne pas heurter, à ne pas blesser et à ne pas laisser croire qu’une réforme aussi importante que celle que la majorité souhaite engager ne serait qu’un redécoupage purement administratif, qui revêtirait une dimension beaucoup trop technique ou technocratique pour rendre compte de cet essentiel.

Monsieur le secrétaire d’État, j’aimerais que vous confirmiez l’engagement que vous avez pris au Sénat d’organiser à l’automne une deuxième lecture de ce texte. Il fallait faire vite : ce sont des propos que nous tenons régulièrement, dans la majorité comme dans l’opposition. Mais ne tombons pas dans un excès de précipitation. Je crois véritablement que nous avons tous ici, députés de la majorité et de l’opposition, intérêt à prendre du temps. Il est fondamental que cette deuxième lecture, si vous la confirmez, puisse avoir lieu à l’automne,…

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Le Gouvernement s’y est déjà engagé, il ne va pas revenir sur sa parole !

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…parallèlement à l’examen du projet de loi relatif à la définition des compétences des régions. Nous pourrions alors débattre d’un ensemble beaucoup plus cohérent que le seul texte qui nous est soumis en ce moment.

J’ai évoqué la République une et indivisible, et j’y reviendrai à la fin de mon intervention. Je veux maintenant revenir sur la diversité. Puisque chacun d’entre nous s’est fait le héraut de son territoire, il me revient l’honneur de parler du « coeur de France », c’est-à-dire, dans un vocabulaire plus technique, de la région Centre. J’ai été quelque peu chagriné de la voir ballottée de-ci de-là, au gré des évolutions de cartes et des revirements. Cette belle région du « coeur de France » était tour à tour fusionnée…

Sourires.

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…avec le Limousin ou même, cher Dominique Bussereau, avec la belle région Poitou-Charentes. Ces mariages de raison étant rejetés, on a ensuite évoqué un « Val de Loire », dont on ne connaît d’ailleurs pas précisément la définition ni le périmètre, avant de parler d’aller s’acoquiner, parce qu’il ne restait plus grand-chose, avec la région Île-de-France. Ces fluctuations n’ont aucun sens : elles illustrent bien l’arbitraire qui a initialement prévalu. Nous ne pouvions évidemment pas nous satisfaire d’un regroupement de la région Centre avec le Limousin, ni avec le Poitou-Charentes – pas plus que nous ne pourrions nous satisfaire, monsieur le secrétaire d’État, d’un regroupement avec les Pays de la Loire ou, a fortiori, avec l’Île-de-France. Je le répète, tout cela n’a pas de sens ni de cohérence.

Dans la nouvelle carte proposée par le groupe socialiste, il semblerait que la région Centre conserve son périmètre actuel. Cela nous convient. En effet, la région Centre est déjà, géographiquement, une grande région ; elle n’est pas la plus peuplée…

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Elle compte quand même 2,7 millions d’habitants !

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…mais, par son étendue, l’une des plus grandes de France. Nous craignons beaucoup qu’un regroupement aboutisse à la création d’une région dont les extrémités seraient distantes de quelque 500 kilomètres. Maintenant, le bon sens revient, et la proposition de maintenir le périmètre actuel de la région pourrait nous convenir. Permettez-moi de vous préciser que le conseil municipal de la capitale de la région Centre, Orléans, a voté à l’unanimité pour le maintien de ce périmètre, lequel conserve une cohérence qu’il avait déjà été difficile de faire émerger dans cette région.

Si l’on voulait adopter un découpage véritablement cohérent, alors il faudrait regarder vers la région Bourgogne, plus précisément vers l’Yonne et vers la Nièvre. Cela n’a jamais été évoqué, et je m’en étonne. L’Yonne est un département jumeau du Loiret, tandis que la Nièvre est jumelle du Cher. Nous créerions alors une entité caractérisée par une véritable cohérence historique, territoriale et de développement. Mais je mesure la difficulté que causerait cette option à l’actuelle Bourgogne, qu’il est prévu de rapprocher de la région Franche-Comté.

Je veux terminer mon intervention par quelques considérations sur la République une et indivisible et sur les objectifs assignés à cette réforme. J’ai cru comprendre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, qu’il y en avait au moins deux que vous considériez comme importants, et que nous partageons.

Le premier objectif consiste à donner à l’entité régionale une taille critique lui permettant d’exister davantage et de disposer des leviers d’action suffisants pour engager les politiques nécessaires, notamment en matière de développement économique.

Deuxième objectif : il est aujourd’hui impérieusement nécessaire de réaliser des économies dans la dépense publique. Les intentions sont bonnes, mais la proposition ne l’est pas. Je donnerai quelques chiffres pour objectiver le débat, chercher à dépassionner nos échanges et démontrer que nous pourrions procéder autrement. La dépense publique est proche de 1 200 milliards d’euros par an : le budget de l’État tourne autour de 350 milliards d’euros et celui des collectivités locales autour de 240 milliards. Le budget agrégé des régions s’élève aujourd’hui à moins de 30 milliards d’euros – 28 milliards en 2012.

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Il représente donc environ 12 % du budget total des collectivités territoriales, et il va encore diminuer, notamment sous l’effet de la baisse de l’autofinancement des régions. Divisez 28 milliards par vingt-deux régions, le calcul est simple : le budget moyen d’une région est de l’ordre de 1,5 milliard d’euros. Vous allez modifier les périmètres et procéder à des regroupements de régions, dont vous allez réduire le nombre, mais ce n’est pas pour autant que vous allez changer le faible poids budgétaire des régions par rapport aux autres niveaux de collectivités.

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C’est d’autant plus vrai que ces 28 milliards d’euros comprennent plusieurs parts pratiquement incompressibles. Ce n’est pas parce que vous allez regrouper les budgets des régions, par deux voire par trois, que vous allez atteindre la masse financière critique permettant de développer des actions plus fortes. Le budget moyen d’une région passera, grosso modo, de 1,5 milliard à 2 ou 2,5 milliards d’euros : cela ne changera absolument rien au fait que nos régions représentent une faible part de l’ensemble des dépenses des collectivités territoriales. Ce n’est pas l’accroissement par fusion de la taille des régions qui va augmenter significativement leur capacité d’action.

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Comment faire ? L’un de nos collègues vient de proposer une solution pour l’Alsace, qui pourrait être généralisée : pour créer un effet de masse et permettre une convergence des actions, il faudrait engager la fusion des départements avec leur région.

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L’agrégation de ces budgets donnera aux futures entités de réelles capacités d’action, notamment en matière de développement économique.

Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.

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Dans ce cas, il ne faudrait pas trop augmenter la taille des régions, car nous créerions de très grandes entités qui ne disposeraient plus de la proximité territoriale suffisante pour agir. Il peut donc y avoir quelques regroupements de régions ici ou là, mais ce principe ne peut pas être, me semble-t-il, le fer de lance d’une véritable réforme afin que nos collectivités pèsent plus et agissent mieux.

S’agissant de la question des économies, vous allez peut-être, dans un premier temps, faire des économies sur 12 % de la totalité de la dépense. On laisse de côté les 88 % des départements et du bloc communal. Si au moins cela revenait à cela, on pourrait dire que ce n’est pas négligeable : après tout, réaliser quelques économies sur 28 milliards d’euros, c’est intéressant. Mais ce n’est pas ainsi que cela se passera. Pourquoi ? En raison de la part de dépenses incompressibles dans les budgets régionaux. Je citerai un exemple. Les régions contribuent au financement de la SNCF via les TER etc. Investissement plus fonctionnement, cela représente un budget de 3 milliards d’euros. Ces 3 milliards ne seront pas touchés par la fusion des régions, cela ne changera absolument rien à la dépense actuelle.

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En fait, une région dépensera la somme des deux régions antérieures.

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Très bonne démonstration. Il n’y aura pas d’économies.

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Pour ce qui est de la compétence lycée, une des grandes compétences régionales, vous ne ferez aucune économie là non plus. Les effectifs des agents territoriaux représentent environ 1,8 million d’agents. Mes chers collègues, quelle est la totalité des agents régionaux ? Comme vous le savez tous, je vais vous donner la réponse : 80 000.

M. le ministre qui connaît et manie bien les chiffres a indiqué en commission des lois que l’on ferait des économies en raison de la suppression des doublons. Mais que représentent 80 000 agents par rapport à 1,8 million ? De plus, au sein de ces 80 000, 80 % des effectifs sont dans des lycées. Il paraît évident que ces derniers ne seront pas touchés. En d’autres termes, il n’y aura aucune économie s’agissant des effectifs.

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Les vraies économies sont à réaliser sur le bloc communal-intercommunalité – soit 60 % de la dépense – et les départements avec 30 % de dépenses.

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Quant aux 1,8 million d’agents, cela concerne essentiellement le bloc communal-intercommunalité.

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Pourquoi Jean-Pierre Raffarin a-t-il proposé cela ?

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Monsieur le secrétaire d’État, ayez le courage d’aller là où personne n’est allé jusqu’à présent. De par mon expérience de maire, je peux vous assurer qu’il y a des gisements d’économies importants dans la fusion des communes en milieu urbain. Vous réaliserez ainsi de véritables économies de structure, de gouvernance et de cohérence dans les actions qui sont conduites au quotidien et pour le futur.

À ce stade, nous attendons une véritable réforme des collectivités locales. Jusqu’à présent, elle n’a jamais vu le jour. Depuis plus de trente ans qu’elle est attendue, il est impératif de la conduire pour des raisons d’économies à réaliser dans la dépense publique, de cohérence dans nos actions, mais surtout, et peut-être plus fondamentalement, de respect des identités des uns et des autres.

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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La parole est à M. Frédéric Reiss, dernier orateur inscrit.

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Bien qu’étant le dernier orateur dans cette discussion générale,…

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…je veux m’insurger contre les conditions dans lesquelles nous débattons d’un projet de loi « pour le demi-siècle à venir » – je reprends les mots du rapporteur.

Nous vivons effectivement un moment historique, déterminant pour l’avenir de la France, qui aurait mérité une autre approche et une réelle concertation au-delà de celle qui a eu lieu entre les socialistes et le Gouvernement. Qu’en est-il de la démocratie participative chère à la gauche ? Il aurait fallu mobiliser les Français, discuter du contenu de cette réforme et favoriser ainsi la réussite de ce projet ambitieux. Une étude d’impact aurait été bienvenue.

En séance de nuit, nous allons commencer à examiner l’article 1er, alors que nous sommes jeudi soir, en plein mois de juillet et que l’on nous demande de légiférer dans la précipitation sur un découpage aléatoire de la France où l’improvisation et l’impréparation sont malheureusement criantes !

Contrairement aux élèves enthousiastes en cette saison de se consacrer à leur cahier de vacances, les députés découvrent dans le leur des exercices nouveaux relatifs à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales, et à la modification du calendrier électoral. Chacun pare au plus pressé, défendant la position qui lui semble la plus favorable pour sa région. Il est légitime et humain qu’un parlementaire défende les intérêts de sa circonscription, au sein de sa propre région que chacun espère la plus prospère possible.

Le moins que l’on puisse dire est qu’il existe beaucoup de nuances, des lignes de partage fluctuantes au fil du temps et des nouvelles cartes, un foisonnement d’interrogations et d’objections, parfois au sein d’une même famille politique.

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Où est l’intérêt général de la France dans tout cela ?

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Il est indéniable que nous vivons une période de crise économique, sociale, environnementale.

Le Président de la République a du mal à fixer un cap aux Français, son intervention du 14 juillet n’ayant rassuré personne, et le Premier ministre essaie d’asseoir son autorité devant les députés frondeurs de sa majorité. Pendant que nous redessinons la France, les entreprises, petites, moyennes grandes, souffrent le martyre pour essayer de préserver leur compétitivité et leurs emplois. Je pense en particulier aux entreprises de travaux publics qui voient leur chiffre d’affaires baisser significativement avec des appels d’offres en chute libre.

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Les collectivités locales n’ont plus les moyens d’investir et d’améliorer leurs infrastructures routières avec la baisse annoncée de 11 milliards d’euros des dotations de l’État. Environ 60 000 emplois pourraient être menacés.

Alors, le salut arrivera-t-il par ce projet de loi ? La réponse est non.

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Une enquête menée par la presse quotidienne régionale indique que 77 % des Français sont attachés à leur région et refusent leur disparition. Sans surprise, ce sentiment d’appartenance à une région est le plus fort en Bretagne et en Alsace,…

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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Et la dernière version de la carte de France des régions est malheureusement défavorable aux régions ayant la plus forte identité.

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En fait, le Gouvernement nous propose deux étapes dans cette réforme structurelle : une première aujourd’hui avec de belles enveloppes aux contours incertains, une deuxième avec les compétences. C’est évidemment une erreur stratégique !

L’objectif de vouloir simplifier le mille-feuille administratif est louable, tout le monde y souscrit. Mais deux questions se posent. Quelles seront les économies réalisées ? Comment les perspectives de croissance seront-elles dopées par ce projet de loi ?

L’une des raisons de l’échec du référendum alsacien du 7 avril 2013 a été l’absence d’annonce d’économies, voire de baisses d’impôt attendues par les électeurs.

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Avec le recul, on peut affirmer que la communication a sans doute été un peu maladroite, et que l’abstention a été trop forte. De plus, les responsables politiques n’ont sans doute pas su quantifier les économies que l’on peut réaliser en fusionnant trois collectivités en une seule. Ce matin, Alain Tourret a parfaitement compris l’enjeu et Serge Grouard vient d’évoquer les avantages d’une telle solution.

Passée l’heure des regrets en Alsace et dans de nombreuses régions françaises, il faut se rendre à l’évidence que les Alsaciens prouvent qu’ils ont de la suite dans les idées en défendant le conseil unique d’Alsace. Nous les députés alsaciens, nous sommes persuadés que la majorité de nos concitoyens y sont également favorables. Comme l’a démontré mon collègue Laurent Furst, agrandir la taille des régions n’apportera aucune amélioration sensible aux graves maux de la société française. Fondre l’Alsace dans une grande région de l’est sera peut-être synonyme de petits bénéfices, mais probablement d’importants problèmes. Ne confondons pas taille et puissance.

En Alsace, nous sommes viscéralement attachés à notre région. Notre histoire singulière a façonné une âme alsacienne, cela est sensible pour les autochtones, mais aussi pour tous ceux qui s’y sont installés. Éric Straumann, Laurent Furst et Patrick Hetzel l’ont brillamment évoqué et si Claude Sturni avait pu être présent il aurait sans doute fait de même.

Nous défendons l’Alsace aux Alsaciens pour relever le défi de la proximité dans une région où la cathédrale est l’étendard d’un territoire,…

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…capable de jouer sa partition dans le concert européen. Nous soutiendrons tous les amendements qui vont dans le sens d’une collectivité unique en Alsace.

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Le mot de la fin sera celui d’un internaute : « Bien que ne résidant plus en Alsace depuis 1978, pour moi, l’Alsace doit rester telle qu’elle est avec sa culture, sa langue, son passé, ses racines. »

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Rester telle qu’elle est ! C’est ridicule !

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« Pour moi qui suis alsacien dans l’âme, ne plus avoir cette région serait un choc difficile à supporter. Je serai toujours fier d’être Alsacien avec un besoin viscéral de faire référence à ma région. »

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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La discussion générale est close.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

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Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures quarante-cinq :

Suite du projet de loi relatif à la délimitation des régions.

La séance est levée.

La séance est levée à vingt heures vingt-cinq.

La Directrice du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Catherine Joly

La Directrice du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Catherine Joly