Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, beaucoup d’orateurs l’ont dit avant moi : votre réforme pose un problème de fond. Vous nous annoncez, messieurs les ministres, une nouvelle carte des régions, arbitraire, sans même de parler de compétences entre l’État et les collectivités, entre les différentes collectivités, sans même parler de dotations, de fiscalité.
S’agissant d’un projet si important et porteur d’espoir, que chacun d’entre nous aurait pu soutenir, je crains que vous n’ayez confondu vitesse et précipitation. Les dernières touches apportées sur un coin de table à l’Élysée, l’examen au Parlement en toute vitesse, au coeur de l’été, sans aucune concertation, et la touche finale décidée par le seul groupe socialiste, tout cela démontre le peu de considération dont vous faites preuve à l’égard des élus locaux et de la France des territoires. Est-ce vraiment cela l’acte III de la décentralisation annoncé par un président Hollande fraîchement élu ? Pourtant, nous nous accordons tous sur le constat. Notre pays aux 36 000 communes et aux vingt-deux régions a évidemment besoin d’une réforme territoriale de grande ampleur, qui doit être adaptée aux nouveaux défis auxquels nous devons faire face : la collaboration avec des eurorégions de grande taille, la concurrence économique avec de nouveaux pays industrialisés ou encore l’arrivée du numérique qui change incontestablement le rapport du citoyen avec les pouvoirs publics et l’information. Le texte proposé est finalement aussi décevant que la communication qui l’a accompagné.
Cette réforme, et vous le savez messieurs les ministres, va à l’encontre des efforts de décentralisation et propose de recentraliser un grand nombre de décisions dans de nouvelles technostructures régionales. Ce projet de loi accroît la distance entre les populations rurales et les pouvoirs publics ; il ne répond ni au défi de la simplification administrative, ni à la réduction du mille-feuille territorial et encore moins à celui des économies pourtant tellement nécessaires. Le report des dates des élections ne parvient pas à masquer votre crainte des échéances électorales à venir. Il ne répond pas à une question pourtant extrêmement simple : une réforme, certes, mais pour quelles compétences ? Enfin, et cela a été dit maintes et maintes fois au Sénat, vous ne mesurez pas les conséquences de ce projet. Vous annoncez des économies allant de 12 à 25 milliards d’euros, alors qu’il n’y a même pas eu d’étude d’impact. Il semble que votre capacité prospective soit réduite à la pratique du doigt mouillé. Malheureusement, nous commençons depuis deux ans et demi à nous y habituer.
Il n’est, par exemple, pas question de savoir comment s’organiseront les effectifs hospitaliers, judiciaires, militaires, préfectoraux ou universitaires. Comment les anciennes préfectures de région et leur cohorte de directions régionales seront-elles réorganisées ?