L'ignorance laisse le champ libre à cet égoïsme de la finance. Aussi, je me félicite que l'éducation ait été déclarée prioritaire dans le budget de la France.
Mais face aux poisons instillés dans notre société par le libéralisme, n'y a-t-il pas aussi urgence à mobiliser la culture ? Oui, cela aurait été un signe fort de changement d'affirmer que les crédits de la culture étaient un levier contre la crise, et devaient donc être maintenus, si ce n'est augmentés.
Ce fut d'ailleurs l'intuition de François Hollande qui, n'ignorant pas la crise, avait affirmé vouloir sanctuariser ce budget. Ce n'est hélas pas le choix qui a été fait.
Pourtant, madame la ministre, vous auriez eu un large appui populaire. Pour en témoigner, j'ai en mémoire la mobilisation de la population de Stains pour sauver son Studio Théâtre malmené par votre prédécesseur, ou bien leur mobilisation pour accompagner la renommée grandissante de son orchestre Divertimento, ou encore, plus récemment, la mobilisation de soutien au théâtre Paris-Villette. Dans vos propos en commission élargie, j'ai perçu une ambition pour votre ministère. Pourtant, le budget qui nous est soumis va à contresens de cet objectif.
Bien sûr, nous ne pleurerons pas l'abandon du projet de M. Sarkozy d'une Maison de l'histoire de France, car nous n'en partagions ni les buts, ni les moyens de réalisation.
Cependant, on peut s'interroger sur la baisse de nombreux crédits, et des activités ainsi mises en cause.
Dans le programme « Patrimoines », en baisse de 9,93 %, on note une diminution de moitié des financements pour les acquisitions, en vue de contribuer à la maîtrise des dépenses publiques. Faut-il y voir la porte ouverte à la répétition de l'épisode malheureux des manuscrits de Robespierre ? Le patrimoine historique et culturel de la France doit-il devenir l'un des nouveaux marchés ouverts à la concurrence alors qu'il représente un élément majeur de compréhension de l'histoire de nos sociétés ?
Quant au programme « Création », nous partageons la volonté de développer l'aide au spectacle vivant. Mais de quelle aide parle-t-on quand il s'agit de répartir la pénurie d'un budget contraint, en baisse de 1,65 % ? Comment aider à de nouvelles créations artistiques sans en laisser dépérir d'autres ?
De même, nous avons des inquiétudes pour le programme « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture ». Concernant l'éducation artistique et culturelle, on nous parle d'une rénovation nécessaire, « qui ne peut se concevoir et se mettre en oeuvre qu'avec les collectivités territoriales et l'ensemble des partenaires impliqués ». Va-t-on faire peser sur les seules collectivités territoriales la responsabilité des choix et des moyens de cette éducation ?
Enfin, un mot sur la ligne budgétaire « Frais financiers ». J'observe que le « tout-partenariat public-privé » de vos prédécesseurs pèse lourd sur votre budget. L'exemple du centre de conservation et de ressources du Musée des civilisations de l'Europe et de la Méditerranée, qui va ouvrir ses portes l'an prochain à Marseille, est patent, avec le versement par l'État d'un loyer de 34,6 millions d'euros pendant vingt-six ans au groupe constructeur, et avec des frais financiers de 22 millions d'euros. Nous espérons que vous allez renoncer à ce dispositif de financement.
Madame la ministre – monsieur le ministre – nous avons bien noté le souhait que vous avez exprimé en commission d'obtenir un meilleur budget en 2014. Au-delà du fait qu'il faudrait pour cela revenir sur l'esprit de la loi organique, nous partageons ce souhait, et dans l'attente de sa réalisation, les élus du Front de gauche s'abstiendront dans le vote sur le budget 2013.