Intervention de Bérengère Poletti

Séance en hémicycle du 17 juillet 2014 à 21h45
Délimitation des régions et modification du calendrier électoral — Article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBérengère Poletti :

Notre pays, on le voit encore ce soir, est très riche de sa grande diversité, et, malheureusement, très pauvre, parfois, de ses égoïsmes. Certaines régions déjà existantes ont une forte identité territoriale, d’autres moins, voire beaucoup moins. Certains départements de nos régions actuelles se situent en périphérie, entre deux territoires, ce qui ne leur donne pas le droit de parler pour les autres ; d’ailleurs, je pense que personne n’a vraiment le droit de le faire, mais, malheureusement, nous allons devoir nous y contraindre demain, je pense. Les régions à forte identité se projettent difficilement au-delà de leur territoire. On le voit avec la Bretagne et l’Alsace.

En revanche, bâtir une grande région, s’agrandir, ne pose pas de problème à Rhône-Alpes, qui est une région qui réussit. L’argument de qualité identitaire, pour nos nouvelles régions, est essentiel.

C’est précisément ce qui manque à la région Champagne-Ardenne, depuis bien longtemps, petite région de 1,3 million d’habitants, pour laquelle on a additionné quatre départements tout en longueur, le sud étant fortement attiré par la Lorraine et la Bourgogne, la Marne étant pour sa part très proche de l’Aisne et posant la question des liens avec la Picardie. Le département des Ardennes, à lui seul, a une très forte identité départementale, qui ne s’est pas dissoute dans la région Champagne-Ardenne. Ses habitants se sentent ardennais et, malheureusement, peu champardennais.

La région Champagne-Ardenne travaille depuis de nombreuses années dans un grand ensemble, qu’on appelle le Grand Est : Alsace, Lorraine, Champagne-Ardenne, Bourgogne et Franche-Comté. La Bourgogne et la Franche-Comté ont décidé, déjà, de se marier. Reste, à mon avis, un ensemble très cohérent, dans lequel une majorité des habitants de mon département se reconnaissent. Chez nous, nous nous sentons de l’Est. L’autoroute de l’Est nous traverse. Le TGV Est nous irrigue.

Je redoute qu’un mariage entre les régions Picardie et Champagne-Ardenne ne reproduise ce défaut d’identité qui nous nuit depuis longtemps dans la région Champagne-Ardenne. Sans vouloir décider du destin des autres régions, j’affirme que je suis ici pour exprimer une intime conviction, étayée par l’histoire et la géographie – tout le monde l’a dit ici ce soir – mais aussi par la vie quotidienne de mes concitoyens et les arguments d’une élue membre du conseil régional de Champagne-Ardenne depuis 1998. C’est la raison pour laquelle je voterai l’amendement qui redonne une cohérence, à mon avis, à mon territoire et à l’ensemble de la région Champagne-Ardenne, en la rapprochant de la Lorraine et de l’Alsace.

Le pire me semblerait de plaider pour une région Picardie-Champagne-Ardenne-Lorraine dont presque personne ne veut, sauf quelques élus de la Marne. Je ne les blâme pas : ils ont leurs intérêts, mais je pense que ce n’est pas l’intérêt d’une grande région. Une grande région doit être à la hauteur de nombreux enjeux, notamment de développement économique, de formation, d’éducation, d’offre universitaire, d’offre de soins, de transport des personnes et aussi des marchandises, d’échanges transfrontaliers, et une grande région ne me semble pas du tout compromettre les identités des territoires.

Non, monsieur Krabal, nous n’avons eu aucun débat au conseil régional de Champagne-Ardenne sur un projet d’union régionale, juste un petit débat au cours duquel l’unanimité ne s’est pas faite, un petit débat qui fut malheureusement bien tardif. Je regrette simplement que mes concitoyens n’aient pas eu la parole dans cette histoire, d’autant qu’ils auraient vraiment exprimé ce même sentiment d’appartenance que j’éprouve pour une région Grand Est.

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