En mars dernier, l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale a publié son septième rapport, intitulé Crise économique, marché du travail et pauvreté.
Ce rapport, qui porte sur des données de 2009 et 2010, constitue la première enquête d'envergure sur les conséquences sociales de la crise débutée en 2008. Le constat est effarant : la pauvreté s'est accrue dans notre pays en même temps que se sont accentuées les inégalités.
La pauvreté se concentre particulièrement sur les publics les plus fragiles, notamment les mères isolées et les chômeurs. Mais les salariés ne sont pas épargnés : la proportion de salariés pauvres est repartie à la hausse depuis 2009. Près d'un salarié sur six gagne moins de 1 055 euros par mois. Notons que, parmi ces salariés pauvres, les trois quarts travaillent à temps partiel, ce qui nous fait d'autant plus regretter le rejet par le Gouvernement de nos amendements présentés lors de l'examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, visant à sanctionner le recours abusif au temps partiel.
Au-delà des chiffres, les acteurs sur le terrain nous décrivent une intensification de la pauvreté et une aggravation des comportements de désespérance etou d'agressivité. Face à cette situation, je me réjouis de constater que le budget consacré à la solidarité, à l'insertion et à l'égalité des chances est encore préservé dans ce climat d'austérité généralisée. Après la baisse l'an dernier de ce même budget, votée par la précédente majorité, nous nous félicitons de son augmentation de près de 5 %. Nous voterons donc ce budget.
Nous tenons cependant à faire plusieurs remarques.
La hausse, tout d'abord, est largement contrainte puisque due, pour une grande part, à la revalorisation exceptionnelle de l'allocation aux adultes handicapés, décidée – rendons-lui cet hommage – par l'ancien gouvernement.
Concernant le RSA, l'importance du non-recours à ce dispositif pose problème : 36 % des allocataires potentiels du RSA socle et 68 % de ceux du RSA activité, soit 1,7 million de personnes, ne demandent pas à en bénéficier alors même qu'ils y ont droit et en ont besoin.
Ces taux de non-recours s'expliquent par plusieurs facteurs, notamment la complexité du dispositif et la stigmatisation de ses bénéficiaires, entretenue par certains de nos collègues de droite allant jusqu'à parler de « cancer de l'assistanat ». Plutôt que de se satisfaire de cette situation – permettant certes à l'État de réaliser des économies, mais sur le dos des plus pauvres –, il conviendrait de la combattre.
Concernant le RSA jeune, les conditions très restrictives pour y accéder sont très choquantes au regard des études qui montrent que le taux de pauvreté est particulièrement élevé chez les jeunes de 18 à 25 ans, catégorie où il atteint près de 20 %. La précédente majorité, qui a imposé ces conditions drastiques, craignait que le RSA ne dissuade les jeunes de poursuivre leurs études ou de travailler. Outre que cette crainte témoigne d'une certaine forme de mépris à leur égard, les jeunes étant considérés comme incapables de trouver en eux-mêmes la motivation suffisante pour travailler ou étudier, elle est surtout battue en brèche par une étude récente de l'INSEE, montrant que le RSA n'a pas d'effet « désincitatif » sur l'emploi des jeunes. Il convient donc, si l'on considère que le RSA est un bon outil pour lutter contre la pauvreté, de l'ouvrir plus largement aux jeunes de moins de 25 ans.
Par ailleurs, les mesures annoncées par le Gouvernement dans la foulée du rapport Gallois ne peuvent qu'aggraver la situation. Nos concitoyens les plus modestes seront les plus durement frappés par la hausse de la TVA, même assortie d'une réduction homéopathique pour les biens de première nécessité.