Monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, la mission « Santé » ne se porte pas bien. J'ai cru entendre la ministre de la santé dire que c'était une priorité du Gouvernement : 6 % de baisse des crédits d'intervention, c'est plutôt inquiétant !
C'est vrai que les actions en faveur de la santé publique sont du ressort, pour l'essentiel, de la loi de financement de la Sécurité sociale, mais il est difficile, et ce n'est d'ailleurs pas souhaitable, de séparer un budget de l'autre, dans la mesure où les deux servent la même politique et visent les mêmes objectifs. D'ailleurs, Mme la ministre nous a indiqué que la baisse de certains crédits de cette mission serait compensée par des financements en provenance de l'assurance maladie. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? En tout cas, on ne comprend pas bien la logique de vos choix quand, ici, vous réduisez la voilure de 46 millions, tandis que, là, il y a quelques jours, vous avez augmenté les dépenses de santé de 350 millions d'euros en portant l'ONDAM de 2,5 à 2,7 %.
Il eût mieux valu, reconnaissez-le, en bonne logique de maîtrise des dépenses publiques, faire le contraire. C'est d'ailleurs ce que la Cour des comptes recommandait au Gouvernement, pour qu'il soit en mesure d'atteindre les objectifs d'équilibre que le Président de la République lui a assignés.
J'évoquerai tout d'abord le programme 204, pour pointer une nouvelle contradiction entre les objectifs généreux qui sont les vôtres et la réalité des actions engagées. Je veux parler de la santé des jeunes, visée notamment par l'action n° 12. Vous parlez là de priorité majeure, et c'est absolument le cas quand on sait par exemple que, faute de moyens et d'un remboursement satisfaisant de leurs dépenses de santé, les étudiants se soignent de moins en moins bien, et que la précarité gagne. Pourtant, les crédits alloués à l'accès et à l'éducation à la santé enregistrent une baisse de 15 %, cependant que ceux destinés aux projets régionaux de santé, que vient d'évoquer Dominique Tian, chutent de 17,8 %. Pardonnez-moi, mais il y a là un vrai et grave problème de cohérence.
Un autre problème de cohérence apparaît sur un sujet qui a donné lieu à de longs débats, sur lesquels je ne reviendrai pas si ce n'est pour vous demander, monsieur le ministre, de ne pas susciter d'espoirs que vous vous apprêtez d'emblée à décevoir. Je veux parler, au sein du programme 183, de la stabilisation à 588 millions d'euros des crédits consacrés à l'AME. Cette stabilisation ne me semble pas cohérente avec la suppression du droit de timbre, qui a vocation à ouvrir complètement l'accès à l'AME en élargissant le champ de ses bénéficiaires et le panier de soins. On ne peut pas ouvrir un droit tout en demeurant budgétairement au statu quo ante. Il me semble que vous faites là de l'affichage budgétaire, à tout le moins imprudent, voire insincère.
J'espère que cela ne se traduira pas au quotidien par des démarches des services de l'AME dans les territoires, ce qui rendrait de plus en plus difficile l'accès à ce droit. Or c'est ce que l'on m'a rapporté, sur la base de cas très concrets, ici et là, que je suis prêt à vous communiquer.
J'ajoute pour finir que nous sommes nombreux à souhaiter qu'une réflexion sur la coordination, la cohérence et la rigueur des politiques publiques de santé, balkanisée entre de trop nombreux opérateurs, puisse se mettre enfin en place. Plutôt que de procéder par ajustements ponctuels, selon les besoins du moment ou par grignotage sur des fonds de roulement, sans véritable logique si ce n'est purement comptable, il nous semblerait plus pertinent de viser des objectifs plus politiques, plus ambitieux et plus durables. L'inspection générale des finances a déjà évoqué ce sujet. La ministre nous a avertis d'audits sur les vingt-sept agences que compte le champ de son ministère, agences dont les compétences ne sont pas toujours suffisamment et clairement précisées pour éviter tout risque de redondance.
Nous soutiendrions, monsieur le ministre, tous vos efforts de cohérence et de justice sociale, mais nous ne les avons malheureusement pas identifiés dans cette mission. C'est la raison pour laquelle le groupe UDI ne pourra se prononcer favorablement sur ces crédits. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)