Intervention de Pierre Cahuc

Réunion du 8 novembre 2012 à 9h15
Mission d'information sur les coûts de production en france

Pierre Cahuc, professeur à l'école Polytechnique, directeur du Laboratoire de macroéconomie du Centre de recherche en économie et statistique – CREST –, chercheur au Centre for Economic Research – Londres – et à l'Institute for the Study of Labor – Bonn :

Vous avez raison, monsieur Barbier, en Suisse, la qualité du dialogue social va bien au-delà du fonctionnement de l'entreprise. La fabrique de la défiance , ouvrage que j'ai écrit l'année dernière avec Yann Algan et André Zylberberg, montre, sur la base d'un très grand nombre de travaux, le manque de confiance qui prévaut en France dans les relations sociales en général, mais aussi entre salariés et employeurs, voire entre salariés eux-mêmes. Plusieurs causes, issues de choix de société, alimentent cette défiance. D'abord, le fonctionnement de notre système scolaire, qui met en avant la notation et la concurrence, et non le travail en équipe. Ensuite, le manque de transparence des institutions publiques de la France par rapport aux autres pays de l'OCDE. Enfin, la mauvaise qualité du dialogue social.

Cette défiance se traduit par des problèmes de santé publique : la consommation de médicaments traitant la dépression est très importante en France. La Suisse a choisi des voies très différentes, notamment en ce qui concerne l'enseignement. Ce pays est caractérisé par une forte hétérogénéité entre les cantons : ceux qui ont une culture plus proche de la culture française sont dans une situation intermédiaire. Les travaux de Rafael Lalive, professeur à l'université de Lausanne, sur l'assurance chômage apportent un éclairage intéressant en montrant que les comportements des demandeurs d'emploi sont très différents selon les cantons.

Le premier thème du rapport Gallois concerne le financement des entreprises, qui pose effectivement problème en France. Je ne suis d'ailleurs pas persuadé que la Banque publique d'investissement permette de progresser dans ce domaine. Les effets de seuil sont réels – beaucoup d'obligations légales jouent à partir de dix, vingt et surtout cinquante salariés –, mais je n'y vois pas un élément essentiel. Sur ce thème, des travaux récents ont été produits par l'INSEE. Pour nous, le développement des entreprises est avant tout lié à la qualité du dialogue social, à la confiance mutuelle, domaine dans lequel la situation en France est catastrophique.

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