Intervention de Frédéric Blanc

Réunion du 10 septembre 2014 à 17h30
Commission spéciale pour l'examen du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte

Frédéric Blanc, juriste à l'Union fédérale des consommateurs, UFC-Que Choisir :

L'UFC-Que Choisir salue les objectifs fixés au titre Ier du projet de loi. Ce sont des objectifs ambitieux qui vont au-delà de ceux fixés au plan européen.

Pourtant, dès que l'on entre dans le corps du texte et que l'on recherche les mesures concrètes, on constate de nombreuses lacunes. Quant aux dispositions proposées, elles paraissent parfois contre-productives.

De plus, les mécanismes du projet de loi dépendent beaucoup de l'argent public. On renvoie au projet de loi de finances pour 2015, là où il aurait sans doute fallu rechercher d'autres sources de financement.

Enfin, le texte manque cruellement de mesures protégeant le consommateur.

Le premier pilier du projet de loi est l'efficacité énergétique. Le texte fait de l'efficacité passive du bâti une priorité. Tout en l'approuvant, nous émettons des réserves sur les moyens envisagés pour atteindre l'objectif. Comme Familles rurales, nous regrettons que les aides publiques ne soient pas proportionnelles à la performance énergétique réellement obtenue. On a porté le crédit d'impôt à 30 % quel que soit le produit, même pour des équipements que l'on devrait de toute façon remplacer. Cela ne permet pas de s'assurer de l'amélioration effective de la performance du logement rénové. Par ailleurs, aucun mécanisme n'existe pour inciter les bailleurs, qui ne sont pas directement concernés par la consommation d'énergie du logement loué, à réaliser des travaux. Nous aimerions voir le projet de loi amélioré sur ce point.

Pour nous, j'y insiste, seuls des mécanismes favorisant une responsabilité quant à la performance énergétique réelle après la réalisation des travaux permettront d'atteindre les objectifs en matière d'efficacité passive. Dans un rapport récent, d'ailleurs, l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) invite à sortir du calcul théorique de l'énergie primaire et à se fonder sur la mesure de la performance et sur les usages, de manière à garantir la responsabilité directe des artisans – via le label RGE (reconnu garant de l'environnement), semble-t-il – en matière de performance constatée, indépendamment de toute malfaçon ou désordre matériel. Un mécanisme d'assurance couvrirait cette responsabilité spécifique, de manière à structurer le marché : en garantissant l'effectivité des économies d'énergie et en assurant la solvabilité du consommateur, ce mécanisme sécuriserait le financement privé qui se tournerait alors vers ce type de dépense. Les assureurs seront contraints de prévoir des audits avant et après les travaux, puisqu'il leur faudra distinguer ce qui relève de l'usage abusif et ce qui relève de la performance énergétique défectueuse. Nous souhaitons que ce dispositif, le seul, selon nous, qui permette d'atteindre les objectifs fixés, soit inscrit dans la loi.

L'efficacité énergétique a un autre aspect, actif celui-là, qui concerne les moyens donnés au consommateur pour maîtriser sa consommation. Il faut, en particulier, que le compteur Linky lui délivre, en temps réel, une information sur sa consommation, en kilowattheures et en euros, et nous souhaitons que cela soit inscrit dans la loi. Pour que l'information soit consultable à tout moment, il conviendra que le compteur soit, dans tous les cas, installé sur le lieu de vie. En identifiant le prix du kilowattheure et en localisant les consommations inutiles, le consommateur pourra ainsi adapter et améliorer ses usages.

Nous pensons aussi qu'il faut contraindre les fournisseurs à délivrer une fiche standardisée sur les écogestes essentiels permettant de réduire la consommation. Les études montrent que l'on peut faire jusqu'à 12 % d'économies d'énergie grâce à une meilleure utilisation des appareils.

Les réseaux de distribution constituent le deuxième pilier de la transition énergétique.

Dans le texte, la question est abordée à travers les mécanismes de rémunération du TURPE (tarif d'utilisation des réseaux publics d'électricité). Or l'investissement est aujourd'hui insuffisant. Il est, en outre, principalement curatif et non préventif. La ligne fixée pour la période 2009-2012 n'a pas été respectée : le sous-investissement représente plus de 1,3 milliard d'euros. Les temps de coupure sont en augmentation. Les consommateurs paient très cher les investissements non réalisés : on a surrémunéré le capital d'ERDF (Électricité réseau distribution France) sans prendre en compte le régime concessif et on a permis la captation de provisions pour renouvellement.

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