Intervention de Jean Gaubert

Réunion du 10 septembre 2014 à 17h30
Commission spéciale pour l'examen du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte

Jean Gaubert, médiateur de l'énergie :

Lorsque j'étais député, j'affirmais déjà que la loi du marché n'a pas de sens dès lors que très peu d'opérateurs ayant tous les mêmes intérêts peuvent facilement manipuler ce marché. Croyez-moi, si j'avais été le seul producteur de cochon en France, je me serais arrangé pour organiser une pénurie et le vendre très cher ! Ce qui m'incite à dire que le monopole privé est peut-être pire que le monopole public.

Le respect des obligations en matière d'énergies renouvelables pose le problème de la sécurisation des relations commerciales entre les consommateurs et les entreprises : c'est pourquoi je suis favorable à une véritable labellisation qui implique des contrôles. Faute de quoi, des personnes peu scrupuleuses continueront d'utiliser l'image favorable d'une grande entreprise pour arnaquer les consommateurs.

Je suis également favorable à la participation des habitants à la gouvernance d'ERDF : je vous rappelle toutefois qu'en tant qu'élus, vous êtes les représentants des habitants. C'est pourquoi je reste dubitatif sur la création de comités Théodule, qui risquent de justifier l'abstention aux élections puisque les décisions seront prises dans le cadre de ces comités.

Oui, monsieur Baupin, il faut encore remettre de l'ordre dans la CSPE, s'agissant notamment des coûts, qui doivent être resserrés au profit de tous.

S'agissant des chèques énergie, je suis favorable à ce qu'ils puissent servir à compléter le plan de financement d'une opération. Attention toutefois à ne pas provoquer une hausse des prix des appareils électroménagers s'il devient possible d'en acheter avec le chèque énergie. On a, en effet, observé que, généralement, les crédits d'impôts renchérissent les produits qui en bénéficient : la solvabilisation d'un plus grand nombre de consommateurs sur un marché qui ne s'y est pas préparé est une véritable aubaine ! De plus, le crédit d'impôt coûte cher aux finances publiques.

J'ai entendu les propositions concernant la gouvernance d'ERDF : a minima, elle doit être calquée sur celle de RTE. À titre personnel, je pense que la France est désormais mûre pour créer deux sociétés de réseaux complètement indépendantes de la maison mère. Il s'agirait de sociétés publiques avec une participation des collectivités locales qui pourraient se substituer aux 15 % d'actionnariat privé actuels. Il n'est pas souhaitable, en revanche, que les collectivités territoriales deviennent majoritaires. L'État doit garder une responsabilité forte pour garantir le fonctionnement du réseau et la cohérence du système, voire pour lui donner de nouvelles orientations en cas de besoin.

Comme l'a souligné le président Brottes, aujourd'hui, Linky rend d'abord service à l'opérateur, qui connaîtra désormais en temps réel la consommation de ses clients et ne sera plus obligé de dépêcher des agents pour relever leurs compteurs : c'est d'ailleurs une partie des économies ainsi réalisées qui financent Linky. Quid, en revanche, du service aux consommateurs ? Certes, il leur sera proposé d'acheter des boîtiers déportés, mais seules les classes moyennes seront tentées de le faire et non les ménages en situation de précarité, alors que ce sont eux qui en auraient le plus besoin. Le gouvernement britannique ne s'est pas posé autant de questions : il a imposé aux opérateurs, et donc également à la filiale britannique d'EDF – EDF Energy plc –, d'installer dans les logements des boîtiers qui affichent la consommation instantanée en kilowattheures et en livres. C'est la seule façon d'inciter les consommateurs, qui voient leur argent filer en temps réel, à réaliser des économies d'énergie. Si le Parlement impose une telle mesure, je l'applaudirai !

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