Intervention de Stéphane le Foll

Réunion du 17 octobre 2012 à 16h45
Commission des affaires européennes

Stéphane le Foll, Ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt :

Je précise à Germinal Peiro, que jusqu'à présent seule l'Italie a interdit l'emploi du Cruiser sur les cultures de maïs. J'ai demandé à l'ANSES, qui a validé l'étude ayant abouti à l'interdiction du Cruiser sur le colza, d'expertiser la décision italienne. Une décision d'interdiction serait plus facile à prendre aujourd'hui parce qu'il existe désormais des produits de substitution efficaces tout en étant beaucoup moins nocifs, notamment pour les abeilles. Je vais examiner cela de façon approfondie et prendrai les décisions qui s'imposent.

Un plan Protéines me paraît évident. Il ne nécessite pas d'aides supplémentaires. Il est possible, avec la diversification des cultures, de réserver des surfaces à la production de protéagineux. On pourra également utiliser des surfaces d'intérêt écologique pour produire des légumineuses. L'objectif de parvenir à une plus grande autonomie en protéines végétales est une priorité, d'autant qu'il va de pair avec celui d'une agriculture plus durable.

Les restitutions à l'exportation ne s'élèvent plus aujourd'hui en Europe qu'à 180 millions d'euros. Elles ne sont plus appliquées que pour le poulet et ne sont de surcroît activées qu'en cas de crise. L'Union européenne ne peut donc plus être accusée de déstabiliser les producteurs africains. Les pays d'Afrique sont aujourd'hui plutôt concurrencés par un pays comme le Brésil qui, sans pratiquer de restitutions à l'exportation, est extrêmement compétitif. La réforme de la PAC prévoit la disparition totale des restitutions en 2013. L'Union européenne fait d'ailleurs preuve, en la matière, de plus de vertu que les Etats-Unis qui continuent de subventionner largement leurs exportations. Il faudra beaucoup de doigté dans les négociations commerciales sur ce point et être attentif aussi aux enjeux de court terme.

Je suis d'accord avec Régis Juanico que le PEAD fait l'objet d'une vraie bataille. Elle n'est pas gagnée, car l'Allemagne est fortement opposée au maintien de ce programme. Il se trouve qu'elle n'en bénéficie pas. Disposant d'un système d'aide alimentaire organisé au niveau des Länder qui fonctionne très bien, elle ne comprend pas pourquoi il lui en serait imposé un autre à l'échelon européen. Nous avons mobilisé les associations caritatives françaises pour qu'elles mobilisent à leur tour leurs homologues allemandes. Nous allons essayer de faire évoluer l'un des pays de l'actuelle minorité de blocage. Nous avons pensé à la République tchèque, mais, je ne cache pas que ce ne sera pas facile.

Je reconnais, Nathalie Chabanne, que la situation est tendue sur le lait. Il est difficile de dire comment le marché va évoluer. Le prix de l'alimentation du bétail augmente du fait de l'envolée du prix des céréales – même si, il faut être honnête, beaucoup de producteurs laitiers produisent aussi des céréales. Nous ferons dans les prochaines semaines des propositions sur la contractualisation. Nous regarderons aussi dans le « paquet lait » les indices pris en compte pour le calcul des prix : il faudrait parvenir à un lissage permettant aux producteurs d'avoir une vision à plus long terme et éviter que les prix ne varient tous les mois. Le problème est complexe, car derrière les producteurs, il y a les transformateurs et derrière les transformateurs, des coopératives ou des industriels privés – lesquels sont en compétition. Quant aux contrats des coopératives, ils ne sont pas toujours à l'avantage des producteurs même quand ceux-ci sont coopérateurs. Nous ferons des propositions pour améliorer la situation des producteurs vis-à-vis des transformateurs. Une réunion aura lieu le 21 novembre sur l'organisation de la filière. La grande distribution, elle-même divisée sur le sujet, y sera associée. Le dialogue n'est pas productif s'il n'a lieu qu'entre producteurs et transformateurs. En effet, ces derniers disent qu'ils ne peuvent pas augmenter leur prix d'achat, la grande distribution refusant de payer plus cher les produits – à moins de pouvoir elle-même répercuter la hausse de prix, auquel cas c'est le consommateur qui paie. Le président de l'enseigne Système U est d'accord pour refonder le système : sa position sera un point de départ. Nous essaierons de mettre en place un mécanisme plus satisfaisant que ce qui existe aujourd'hui, en cherchant à concilier les intérêts de tous les acteurs de la filière.

Il sera difficile de revenir sur la suppression définitive des quotas laitiers en 2015. L'Allemagne, les Pays-Bas, le Danemark sont farouchement opposés à tout rétablissement, pour des raisons liées d'ailleurs non aux quotas eux-mêmes, mais au marché de ces quotas. Le prix d'achat des droits à produire dans ces grands pays producteurs de lait est monté jusqu'à deux euros le litre, ce qui y rendait impensable tout projet d'installation. Leurs exploitations laitières sont d'ailleurs lourdement endettées. Cela explique la bataille qu'ils ont menée pour le démantèlement des quotas. J'essaie, pour ma part, de parvenir à un « pacte de stabilité » sur le marché du lait. Un pays qui ferait n'importe quoi en matière de production laitière devrait pouvoir être sanctionné. Mais la bataille n'est pas gagnée.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion