Intervention de Olivier Falorni

Séance en hémicycle du 17 septembre 2014 à 15h00
Règlement du statut des groupes parlementaires — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Falorni :

Néanmoins, plusieurs questions se posent, qui ne sont pas de pure rhétorique, et que je me permettrai de poser pendant les quelques minutes qui me sont accordées.

Le statut d’association permettra d’instaurer des procédures de contrôle répondant aux attentes de nos concitoyens sur l’utilisation des dotations publiques accordées aux groupes parlementaires. Cet objectif est louable, et nous le faisons évidemment nôtre. Mais de quel type de contrôle s’agira-t-il ? Juridiquement, il ne peut s’agir d’un contrôle interne à l’Assemblée. En effet, le Conseil constitutionnel applique aux groupes parlementaires les exigences constitutionnelles de l’article 4 de la Constitution, relatives à la liberté de formation des partis et groupements politiques. Le rapporteur a d’ailleurs confirmé que cet article s’appliquait bien aux groupes parlementaires. C’est à ce titre que, dans sa décision du 18 mai 1971, rendue dans le prolongement de la décision fondatrice du 24 juin 1959, il a estimé qu’une formalité consubstantielle à la constitution des groupes – l’obligation de rendre publique leur déclaration politique – ne pouvait emporter aucun contrôle sur le contenu de ladite formalité.

Or l’exposé des motifs de la proposition de résolution précise que le nouveau statut associatif des groupes « permet la mise en place d’outils de contrôle […] externe ». Quel sera ce contrôle externe ? Celui des citoyens ? Puisque l’objectif est de publier les comptes des groupes sur le site de l’Assemblée nationale, ce sera le seul possible, et ce n’est pas le moindre.

La constitution des groupes sous forme associative – je me permettrai de rappeler que la loi du 1er juillet 1901 n’a absolument pas été rédigée pour servir de cadre juridique aux partis politiques – permettra-t-elle d’interdire aux groupes parlementaires de participer financièrement à autre chose qu’à leur fonctionnement ? A priori, non. Pour clarifier d’un point de vue juridique le régime financier des groupes parlementaires, qui relève in fine du domaine de la loi du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique, il faudrait donc passer par la loi pour préciser le régime des dons dont ils pourraient bénéficier ou qu’ils pourraient effectuer, notamment en provenance ou en direction des partis politiques. Il faudrait, tant pour asseoir le statut des partis que des groupes parlementaires, clarifier la catégorie de « partis et groupements politiques », ce qui implique de se lancer dans une oeuvre législative à la hauteur du système allemand, ce qui n’est pas pour demain, en tout cas pas pour aujourd’hui.

Permettez-moi une dernière remarque : se constituer sous forme associative sera pour les groupes une formalité essentielle, au sens où cela conditionnera le versement par l’Assemblée d’une dotation de fonctionnement. Le statut associatif sera imposé aux groupes au motif qu’ils fonctionnent avec ces dotations. Qu’adviendrait-il si un groupe parlementaire décidait de ne fonctionner qu’avec les cotisations de ses membres ? Ne serait-il pas libre de le faire ? Qu’en est-il, par ailleurs, de la portée exacte du principe d’égalité des groupes parlementaires, récemment affirmée par la décision du 28 février 2013, rendue à l’occasion de la proposition de résolution déposée en son temps par nos collègues écologistes ? Lorsqu’elle fut débattue, la question du respect de l’article 4 de la Constitution avait été posée, et certains de nos collègues avaient estimé qu’il n’appartient pas au règlement de l’Assemblée nationale de régir le fonctionnement interne des groupes, dont l’indépendance et la liberté sont garanties par la Constitution.

À toutes ces questions, le Conseil constitutionnel répondra. Mais comme nous partageons totalement l’objectif de transparence des comptes, nous voterons, malgré les questions qu’elle pose, cette proposition de résolution.

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