Intervention de Isabelle Attard

Séance en hémicycle du 17 septembre 2014 à 21h30
Lutte contre le terrorisme — Article 4

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaIsabelle Attard :

Cet article 4 a pour objet de soustraire au régime procédural de la loi de 1881 les délits de provocation aux actes de terrorisme et d’apologie d’actes de terrorisme, afin qu’ils figurent dans le code pénal. Cet amendement tend à ce que le délit d’apologie d’actes de terrorisme demeure sous l’empire de la loi de 1881, tandis que la provocation aux actes de terrorisme, elle, relèverait du code pénal.

En effet, il ne faut pas confondre la provocation et l’apologie. Le rapporteur souligne ainsi que l’apologie du terrorisme est « l’expression d’une opinion, certes potentiellement odieuse, mais qui n’incite pas directement à commettre une infraction ». L’article 4 incrimine d’ailleurs spécifiquement la provocation non publique, mais non pas l’apologie non publique.

Nous, Français, sommes les héritiers de bien des révoltes. Avant de renverser la monarchie, les futurs révolutionnaires de 1789 avaient publié leurs points de vue sur les changements à apporter à la société en utilisant les médias à la mode à l’époque – l’Encyclopédie et les pamphlets – grâce à une invention qui avait démultiplié la puissance de la diffusion des idées, à savoir l’imprimerie.

Il importe que la loi de 1881, qui protège la liberté d’expression, continue à s’appliquer aux délits d’apologie, et non de provocation au crime. À cet égard, la distinction entre l’apologie du terrorisme et d’autres délits d’apologie – relatifs aux crimes, aux crimes contre l’humanité et à la Shoah – ne se justifie pas.

Il y a fort à craindre que l’on assiste à un détricotage de la loi de 1881, qui est une loi majeure de la République. Les modifications récurrentes qui lui ont été apportées, parfois avec des intentions et des objectifs justes, ont eu pour conséquence de la fragiliser, d’autant plus qu’elle est parfois mal comprise par le juge européen.

En démocratie, le pouvoir considérable d’un gouvernement doit être contrebalancé par la garantie des libertés individuelles. De grâce, ne créez pas un nouveau délit d’opinion…

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion