Intervention de Sébastien Pietrasanta

Séance en hémicycle du 17 septembre 2014 à 21h30
Lutte contre le terrorisme — Article 5

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSébastien Pietrasanta, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République :

Il s’agit là d’une discussion extrêmement importante et intéressante.

Votre amendement comporte deux points : la suppression de la hiérarchie entre les différents éléments matériels – il s’agit de situer au même plan le fait de détenir, de rechercher, de se procurer ou de fabriquer des objets ou des substances de nature à créer un danger pour autrui et les autres éléments matériels. Or, sur ce point-là, je suis en désaccord profond, pour deux raisons.

Tout d’abord, nous avons souhaité matérialiser l’intention terroriste par un fait extrêmement grave. Il ne s’agit pas d’une association de malfaiteurs mais d’une entreprise individuelle. De ce point de vue-là, il n’est pas possible de pénaliser uniquement une intention : il faut la prouver matériellement. Nous sommes face à une conscience individuelle dont il faut matérialiser l’intention, notamment, par un fait particulièrement grave. Nous avons donc souhaité que parmi ces faits matériels figure obligatoirement celui qui est le plus grave : le fait de détenir, rechercher, se procurer ou fabriquer des objets ou des substances de nature à créer un danger pour autrui. C’est important.

Ensuite, en plaçant l’ensemble des faits matériels sur un même plan, un certain nombre de dérives sont possibles. Si la hiérarchie faite entre ces différents éléments était mise à mal ou si disparaissait l’élément obligatoire – détenir ou de rechercher des armes et des explosifs – il serait possible d’incriminer une personne au chef d’entreprise individuelle de terrorisme parce qu’elle aurait été formée au maniement des armes – dans un club de tir par exemple – et aurait consulté un site terroriste.

Or, je considère que cela n’est pas suffisamment grave et que ces faits matériels-là ne sont pas suffisamment étayés pour caractériser l’intentionnalité d’un passage à l’acte. On peut en effet suivre des cours de tirs dans le cadre de ses loisirs, être formé au tir et, en même temps, consulter un certain nombre de sites par curiosité – fût-elle malsaine.

Encore une fois, cela ne me semble pas suffisant pour caractériser l’intentionnalité ou la matérialisation d’un passage à l’acte terroriste.

En outre, votre amendement vise à améliorer la rédaction de l’article 5 en proposant d’autres éléments matériels. Mais, vous y avez fait allusion, je vais moi-même proposer dans quelques instants un amendement no 109 , ayant le même objectif et prenant en compte un certain nombre de vos propositions, puisqu’il rajoute de nouveaux critères.

Pour ces deux raisons – le danger que représenteraient, en matière de libertés publiques, l’absence de hiérarchie et un désaccord sur les nouveaux critères proposés – la commission a donné un avis défavorable à votre amendement.

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