Déjà 37 pays ont conclu des accords de type 1, c’est-à-dire de transmission d’informations d’État à État. La lutte contre la fraude fiscale par un échange automatique d’information est globale. Le combat se mène sur tous les fronts.
Nous pouvons, déjà, percevoir les effets de cet accord. Le montant des avoirs dissimulés à l’étranger et rapatriés en France est estimé à 28 milliards d’euros. Ils viennent élargir les bases fiscales pour l’avenir, ce dont nous ne pouvons que nous réjouir.
Cependant, nous devons rester vigilants, car ce projet soulève des questions importantes. Nous émettons, à ce titre, des réserves.
Nous le savons, cet accord découle, à l’origine, d’une démarche américaine qui fut d’abord unilatérale avant de se transformer en une négociation internationale.
En 2010 déjà, les États-Unis avaient adopté un dispositif obligeant les établissements financiers des autres pays à transmettre à l’administration fiscale américaine des informations sur les revenus et les actifs de leurs clients de nationalité américaine.
La loi FATCA a ainsi institué un dispositif américain unilatéral et extra-territorial, qui permet d’appliquer des sanctions aux établissements financiers de pays tiers s’ils ne respectent pas la réglementation américaine.
C’est d’ailleurs en réaction à cette démarche unilatérale, et pour garantir le principe de réciprocité qui prévaut dans la société internationale, que certains États, et notamment la France, ont souhaité inscrire cette initiative dans un cadre bilatéral.
Force est de constater que, par cet accord, la France se voit imposer bien plus de contraintes que son partenaire d’outre-Atlantique : ses obligations sont bien plus détaillées. La France se soumet ainsi à une obligation de diligence d’identification du client, quand les États-Unis restent seuls juges de la nécessité de parvenir à un niveau de transparence équivalent, et de faire évoluer ou non leur droit interne. Ils n’appliqueront ainsi que la législation américaine.
En outre, cet accord implique des différences de traitement frappantes, que madame la rapporteure a relevés dans son rapport. Les soldes, et pour les contrats d’assurance les valeurs de rachat, doivent être transmis par la France, mais pas par les États-Unis.
La liste des versements concernés par la déclaration automatique est plus étroite pour les États-Unis, et n’inclut pas les comptes titres des personnes physiques résidentes en France. L’approche par transparence, qui oblige les institutions financières françaises à chercher les bénéficiaires effectifs, n’incombe pas aux institutions financières américaines.
Des mesures d’anonymat, issues du droits des États fédérés, subsisteront, et offriront aux investisseurs résidents français d’autant plus de possibilités de contournement de l’accord.
Ce ne sont pas de menues différences, mais de vrais fossés, aux conséquences dangereuses. Alors que nous devons relancer la compétitivité française, nous allons donner naissance à un grave désavantage compétitif en défaveur des institutions financières françaises. L’accord leur impose des coûts supplémentaires majeurs : 300 millions d’euros, dont n’auront pas à s’acquitter les banques américaines !
Quels choix s’offrent à nos banques, face à ce coût exorbitant ? Tout refus de leur part entraînerait la taxation de leurs activités américaines, à hauteur de 30 %. C’est le prix de l’accès au marché américain pour les entreprises étrangères.
Le gouvernement nous dit que l’échange systématique de données est appelé à devenir la norme mondiale. Or, aujourd’hui, avec cet accord, les États-Unis ne la mettent même pas pleinement en oeuvre.
Dans le même temps, l’OCDE s’apprête, notamment sous l’impulsion de la France, à mettre en place son propre standard. Ce dernier tranche singulièrement avec la norme mise en place par l’accord-type FATCA. Les banques américaines veulent y échapper et en profiter pour renforcer leurs positions.
Les négociations à l’OCDE ont duré quatre ans, et ont débouché sur d’autres solutions que celles issues de l’accord qui nous est soumis, des solutions qui mettraient à mal l’avantage comparatif des établissements financiers américains.
Le gouvernement français s’apprête à aujourd’hui à aider ces mêmes établissements américains à éviter de faire face à leurs responsabilités sur la scène internationale. Mais surtout, le Gouvernement, en son âme et conscience, handicape encore plus les institutions bancaires françaises. Il convient de s’interroger sur le but véritable de cet accord, imaginé en premier lieu et unilatéralement par les États-Unis.
Tous les soupçons seront défintivement levés quand l’administration du président Obama aura effectivement relevé les standards américains pour mettre les banques américaines au même niveau de transparence et de coopération que les banques françaises.