Intervention de Barbara Pompili

Réunion du 17 septembre 2014 à 16h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBarbara Pompili :

Madame la ministre, je vous remercie pour votre présence et pour votre disponibilité. Je ne m'étendrai pas sur les attaques indignes dont vous avez été la cible mais j'en profite pour vous faire part de toute ma solidarité. Ces attaques illustrent combien le combat pour l'égalité demeure d'actualité, qu'il s'agisse de la déconstruction des stéréotypes de genre – priorité que nous avons en commun – ou de toute autre forme de discrimination.

Ne donnons pas de crédit à ces rumeurs mensongères et délétères. En revanche, s'agissant de discrimination, je ne voudrais pas laisser certains confisquer un sujet important : l'apprentissage de la langue arabe, notamment dans le secondaire où elle est encore trop peu présente. Les échanges culturels et économiques avec les pays arabophones sont une réalité. Alors que l'apprentissage de nombreuses langues est à corréler avec l'histoire des migrations, pourquoi la langue arable ferait-elle figure d'exception ? Si nous ne donnons pas à nos jeunes d'autres options pour étudier cette langue que de fréquenter certaines officines, quelles seront les conséquences ?

En matière d'éducation, les écologistes soutiennent toutes les initiatives permettant de redonner espoir aux générations actuelles et à venir, qu'il s'agisse de la priorité accordée au primaire, du dispositif « plus de maîtres que de classes » ou encore du rétablissement de la formation des enseignants. Chaque fois qu'il s'agit de combattre le décrochage scolaire, de lutter contre les déterminismes sociaux et d'oeuvrer à la réussite de tous, nous avons clairement indiqué notre soutien – et nous continuerons à le faire – pour que l'école redevienne une promesse crédible et qu'elle prépare les futurs citoyens à exercer pleinement leur citoyenneté.

En ce qui concerne tous ces enjeux, nous avons été et nous continuerons à être force de propositions car nous devons aller plus loin. Tout d'abord, s'agissant des rythmes scolaires, je tiens à nouveau à déplorer l'attitude de certains qui instrumentalisent à des fins politiciennes le bien-être des enfants. Cette réforme est une opportunité pour les élèves dès lors que tous les acteurs concernés décident ensemble des activités à mener, notamment dans le cadre du projet éducatif territorial (PEDT). Encore faut-il, bien sûr, que les conditions du dialogue soient réunies, que les activités soient gratuites et qu'elles représentent un intérêt pédagogique. Dans ma ville d'Amiens, les temps d'activités périscolaires se réduisent à de la garderie alors même que la municipalité bénéficie d'une aide financière non négligeable pour cette réforme.

D'où mes questions. Entendez-vous pérenniser le fonds d'amorçage et mieux cibler son usage en fonction des activités et des territoires ? Pourquoi ne pas mettre en oeuvre des mécanismes de péréquation verticale ou horizontale ? Quel accompagnement est-il prévu pour mutualiser les bonnes pratiques ? On parle beaucoup et à raison de l'inclusion scolaire qui est encore en chantier, mais qu'est-il prévu pour l'inclusion périscolaire des élèves handicapés ?

Autre grand dossier de la rentrée : la crise du recrutement des enseignants. Pour remédier à cela, l'une des pistes à creuser, à laquelle les écologistes tiennent beaucoup, est celle du prérecrutement dès la fin de licence. Qu'en pensez-vous ? Pour que les deux années soient véritablement consacrées à la formation des futurs enseignants et non à du bachotage, que pensez-vous de notre position en faveur d'un concours à l'entrée en master 1 ? Vincent Peillon semblait ouvert à l'idée de refaire une étude à ce propos, notamment sur le coût estimé.

De même, qu'en est-il du grand programme de formation continue au sein des écoles supérieures du professorat et de l'éducation ? La refondation ne se concrétisera pas si les enseignants ne sont pas formés, notamment à la pédagogie, dont 40 % d'entre eux estiment manquer, selon un rapport de l'OCDE.

Qu'en est-il de leur ouverture aux autres acteurs de l'éducation ? L'éducation ne peut plus être considérée comme un domaine réservé à quelques experts. Les relations entre les parents et l'école, sur lesquelles vous avez insisté, en sont un exemple : plus l'école est ouverte sur son milieu, plus elle s'ouvre aux associations de quartier et aux parents, mieux c'est. Pour rapprocher l'école des familles, il faut porter l'ambition de changements au niveau de l'institution.

N'ayons pas peur d'interroger en profondeur notre conception de l'éducation. C'est en changeant d'approche que nous parviendrons à démocratiser la réussite. Il faut favoriser les expérimentations, faciliter l'innovation, adapter les programmes à chaque élève, faire de l'élève un acteur de son éducation. J'espère que le nouveau plan d'action de lutte contre le décrochage scolaire prendra en compte ces enjeux. Le Conseil national de l'innovation y sera-t-il associé ?

La transformation de l'évaluation – autre grand chantier de la rentrée – doit aussi permettre ce changement. La notation chiffrée est vécue comme une sanction, stigmatisante et décourageante. Les réflexions qui vont être lancées vont-elles aussi concerner le baccalauréat et le brevet ?

Enfin, concernant la réforme de l'éducation prioritaire que vous avez évoquée, je serais preneuse de précisions sur le déploiement envisagé. S'il faut renforcer les moyens à certains endroits, et donc mieux cibler, il faut aussi veiller à ce que cela ne se fasse pas au détriment d'autres établissements où l'équilibre demeure délicat.

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