Notre fédération, qui regroupe 2 400 clubs, est passée en vingt ans de 200 000 à 550 000 licenciés. Cela s'est fait en diversifiant nos pratiques, ainsi que l'a bien décrit Bernard Amsalem, en ouvrant notre champ, en sortant du schéma de la compétition, en ciblant des publics d'enfants et d'adultes et en menant des actions axées sur la santé.
En dépit de l'explosion du nombre de licencié, le nombre de clubs n'a pas changé. Pour faire court, nous avons autant de licenciés que le basket-ball avec deux fois moins de clubs. Cette crise associative profonde, nous devons l'analyser.
Les clubs se plaignent en premier lieu de la complexité administrative, très difficile à vivre pour les dirigeants bénévoles. Dans cette période de vingt ans, 2 000 emplois ont été créés via des dispositifs tels que les emplois jeunes ou les emplois d'avenir, mais les associations peinent à accompagner cette professionnalisation. La fonction d'employeur est pour les dirigeants associatifs un pensum ! Ils n'y ont pas été formés. Cette situation aboutit à des échecs, des conflits et des abandons de bénévolat. Un accompagnement de la fonction employeur est impératif. Bernard Amsalem a suggéré de solliciter les administrations. Mais si ce n'est pas là le métier des CROS et des CDOS (comités régionaux et départementaux olympiques et sportifs), je ne sais pas à quoi ils servent ! Ce sont précisément eux qui devraient offrir un accompagnement à la fonction de dirigeant et d'employeur et des modules de formation adaptés. Or, mis à part les CROS des régions Provence-Alpes-Côte d'Azur et Centre, je n'en connais pas beaucoup qui se donnent cette peine !
De plus, le lien avec l'éducation nationale et les municipalités n'est pas affiné, comme on le voit avec les politiques d'aménagement des rythmes de l'enfant. Le boom associatif annoncé il y a deux ans avec la réforme n'a pas eu lieu. Les plans se succèdent depuis huit ans et rien ne se passe.
Il existe aussi un vrai drame des installations sportives en France. On ne peut continuer à parler de développement des associations si l'on ne crée pas des lieux de pratique. Ces lieux peuvent être modestes, en extérieur. Le plan pour les quartiers nord de Marseille a permis de constater que 30 % des installations sportives étaient dégradées ou inutilisables. Si, au-delà du projet Arena 2015, on ne lance pas en urgence un plan d'installations sportives, nous resterons le pays d'Europe le plus mauvais dans ce domaine.
Car, par ailleurs, on assiste à une explosion de l'offre. Le football en salle, par exemple, entre dans les salles de sports collectifs. Il y a fort à parier qu'avec l'Euro 2016, nous perdrons 30 % de nos créneaux horaires et que 10 % des clubs mettront la clé sous la porte faute d'endroits où pratiquer.
Le monde professionnel n'est pas aussi à l'écart de ces difficultés qu'on le dit. La part des collectivités territoriale ayant diminué ou stagné, il a augmenté sa part de financements privés. On observe des dépôts de bilan dans les divisions de niveau 3 et 4, ce qui signifie sans doute que l'on mélange sport professionnel et sport amateur. Une des recommandations pourrait être de mieux identifier le périmètre du sport professionnel pour éviter d'élargir la conception du professionnalisme à des niveaux qui ne le méritent pas et qui font sauter la caisse des clubs qui s'y fourvoient. Avec Cécile Mantel, la Fédération a mis en place des voies d'accès au professionnalisme qui précisent bien les choses.
Les groupements d'employeurs ont également constitué une réelle aide aux clubs, en leur donnant la capacité, avec d'autres clubs sportifs ou d'autres acteurs, d'agréger des métiers permettant à l'association de vivre.
Plus généralement, il convient d'exiger des fédérations qu'elles explicitent dans leurs conventions d'objectifs quels sont leurs politiques territoriales et les services qu'elles offrent aux associations. Les fédérations sont aujourd'hui des administrations, elles doivent devenir des compagnies de services.
Rappelons aussi une évidence : le sport, c'est bon pour la santé, c'est même aujourd'hui une thérapeutique. Pourquoi ne pas envisager le remboursement de la licence pour certains publics, comme le suggérait Mme Valérie Fourneyron ? Loin de se cantonner à la compétition pour la compétition, les fédérations sportives sont réellement devenues des opérateurs de développement et de santé.
Le service civique, tel qu'il s'est développé ces trois dernières années en dépit des limites budgétaires, est un vrai outil pour que les jeunes s'emparent du club et le fassent vivre. Ne pourrait-on aller plus loin ?
Je terminerai par les politiques publiques d'emplois aidés. Nous avons 1 500 salariés qui ont consolidé l'emploi jeunes dont ils bénéficiaient auparavant, et 300 à 400 emplois d'avenir. Cette dernière formule est positive mais c'est une charge lourde : avec quels outils les dirigeants formeront-ils des personnes en difficulté chargées elles-mêmes d'accompagner des personnes en difficultés ?