Intervention de Bernard Amsalem

Réunion du 23 septembre 2014 à 18h00
Commission d'enquête chargée d'étudier les difficultés du monde associatif dans la période de crise actuelle, de proposeer des réponses concrètes et d'avenir pour que les associations puissent assurer leurs missions, maintenir et développer les emplois liés à leurs activités, rayonner dans la vie locale et citoyenne et conforter le

Bernard Amsalem, président de la Fédération française d'athlétisme :

Je suis contre la suppression du certificat médical. Lorsque le médecin fait les choses sérieusement – ce qui est majoritairement le cas –, la visite est également un moyen de prévention. Ainsi, 20 % des asthmes d'enfants sont détectés à l'occasion de la délivrance de ce certificat.

En outre, la suppression du certificat médical conduirait les compagnies d'assurance à augmenter leurs tarifs, ce qui, au bout du compte, augmentera les charges des fédérations. Sans doute faut-il revoir le protocole de la visite, mais surtout pas la supprimer !

J'en viens à la cotisation. Le montant de la fédération est compris entre 25 et 40 euros. S'y ajoutent la ligue, le comité, etc., puis le club, pour aboutir à 60 ou 70 euros pour les cotisations les moins chères et à 250 euros pour les sports les plus chers. Mais ces montants sont à rapporter au nombre de séances, de compétitions et d'événements organisés par le club en une année : on arrive alors à quelques centimes pour une séance. Aucun autre loisir n'est aussi peu cher.

En outre, les CAF et les CCAS (centres communaux d'action sociale), voire les départements, proposent souvent des aides aux familles rencontrant des difficultés financières. Certes, comme pour le CNDS, cela suppose que le club remplisse des dossiers, mais les moyens existent et la cotisation ne peut être considérée comme un frein. La France compte aujourd'hui dix-sept millions de licenciés, ce qui fait du sport le premier mouvement social du pays. Il faut arrêter de se focaliser sur la cotisation, qui représente une ressource importante à la fois pour la fédération, pour la ligue, pour le comité départemental et pour le club.

Pour ce qui est de l'organisation territoriale, la balle est dans le camp des élus. Les collectivités financent le sport à 85 %. En tant que principal sponsor, il vous appartient d'exiger la mise en place de règles pour éviter des concurrences coûteuses et des dérives. Vous serez forcément écoutés, puisque les subventions dépendent de vous. Certaines agglomérations, par exemple, ont mis fin au saupoudrage et concentré leurs subventions sur les associations ayant une visibilité nationale, voire internationale. Elles ont donc choisi un nombre limité de sports, au détriment des autres qui, eux, continuent d'être soutenus par leur commune.

La balle est d'autant plus dans votre camp qu'il y a trop de fédérations en France. Pour un sport de combat exotique, par exemple, une fédération obtiendra très facilement l'agrément. On émiette ainsi le sport alors qu'il faudrait mutualiser, se regrouper, travailler ensemble. Les partenariats entre fédérations n'existent pas. Chacun est dans son coin, d'où une concurrence que je trouve stupide. Pourquoi ne pas envisager des licences multisports, qui correspondent à l'évolution de la pratique ? Les enfants aiment bien toucher à plusieurs sports avant de choisir, à l'adolescence, celui qui leur plaît le plus.

À l'heure actuelle, nous sommes plus dans des logiques de clocher que dans des logiques de projet. L'État doit arrêter d'agréer toutes les fédérations. Il faut au contraire, encourager des rapprochements entre celles qui existent. Dans les sports de combat, par exemple, l'organisation et la préparation sont à peu près identiques ; seules les techniques diffèrent un peu, mais cela ne justifie pas l'existence d'une fédération par discipline. Pour tous les sports individuels, des rapprochements sont possibles. Aujourd'hui, nous sommes le pays d'Europe qui compte le plus de fédérations : deux fois plus que l'Allemagne ! Il y a là une source intéressante d'économies.

En matière de formation, le ministère chargé de la jeunesse et des sports délivre des diplômes d'État qui offrent immédiatement un débouché professionnel. En parallèle, la filière universitaire des STAPS (sciences et techniques des activités physiques et sportives) ne permet pas toujours de trouver un emploi. Il faudra bien qu'un jour on rapproche les deux filières. Non seulement ce double système est ridicule, mais il ne permet pas aux jeunes de trouver leur voie.

Lorsque l'on parle de la nécessaire « professionnalisation » des clubs, cela ne signifie pas que l'on va rémunérer les bénévoles, mais qu'il faut avoir l'esprit entrepreneurial. La formation des dirigeants doit donc porter sur le management et, pour trouver des ressources, sur le marketing. Les fédérations sont prêtes à faire cet effort. L'État doit nous y aider en améliorant et en simplifiant ses filières.

S'agissant des courses pédestres, nous avons la responsabilité, par délégation du ministère, d'harmoniser les calendriers. Or, depuis le « décret hors stade », qui transpose une directive européenne sur les services et qui s'applique au triathlon, au cyclisme et à l'athlétisme, nous rencontrons de grandes difficultés et nous n'avons plus la maîtrise de l'harmonisation du calendrier : n'importe qui peut, muni d'une autorisation préfectorale, organiser un marathon juste avant le marathon de Paris, par exemple. Ce décret assimile nos courses sur route, pourtant organisées à 98 % par des associations sans but lucratif – clubs, comités des fêtes, associations ad hoc… –, à des activités de sociétés privées. Or seules vingt courses sur les huit mille qui se déroulent annuellement en France sont organisées par de telles sociétés.

L'assimilation à une activité commerciale ne tient pas. Les organisateurs sont bénévoles. Le droit d'inscription sert à financer la sécurité, à acheter des tee-shirts et des sandwiches pour les bénévoles, etc. En dépit de nombreuses démarches auprès du ministère, nous n'avons jamais réussi à obtenir une modification du décret. Lorsque l'on interroge à ce sujet le commissaire européen qui était à l'origine de la directive, M. Michel Barnier, il répond que le texte européen a été en l'occurrence mal interprété.

Pour ce qui est des équipements sportifs, j'aimerais qu'on s'efforce, au-delà du respect des normes, à répondre à ce que sont devenus les clubs : des lieux de vie, des instruments d'animation d'un territoire ou d'un quartier. Si l'équipement n'offre pas de salles où l'on puisse organiser une réunion, une fête, accueillir les enfants après l'école pour qu'ils fassent leurs devoirs avant le sport, on rate quelque chose. Je dis souvent que le club sportif est le dernier rempart de la République : il n'y a plus beaucoup de lieux en France où puissent se mêler des personnes de toutes origines sociales et ethniques et de tous âges ! Si l'on construit des équipements mal conçus, la vie locale s'en ressentira.

Je suis référent au comité national olympique et sportif français (CNOSF) sur la question des rythmes scolaires. À ce titre, j'ai organisé des réunions avec les fédérations pour les inciter à préparer la rentrée 2014 et, plus généralement, à investir le champ scolaire de manière à ménager des passerelles vers les clubs. Mais je leur ai déconseillé de proposer les mêmes activités que dans les clubs, car cela pourrait avoir l'effet inverse. Mieux vaut offrir des activités d'éveil et de découverte sous forme de jeux. Plusieurs fédérations, dont la nôtre, ont saisi l'occasion pour inventer de nouveaux concepts et les résultats sont excellents. Nous n'avons pas perdu de licenciés. En revanche, ceux qui n'ont pas revu leur approche en perdent dans les catégories des moins de douze ans.

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