Nous attendons de la CdP une lisibilité des trajectoires, de la transparence et des éléments de compréhension appropriables par la société civile.
Le site Internet de la CdP compte 57 documents officiels et celui présentant les projets de décision comporte 184 pages et ne dispose pas de sommaire introductif, ce qui rend sa lecture difficile, d'autant qu'il n'y a pas d'indication simple sur le nombre de projets de décision. Cette difficulté n'est d'ailleurs pas nouvelle.
Dans quels instruments les indicateurs de suivi pour la mise en oeuvre du plan stratégique, qui font l'objet d'un processus de révision assez complexe, seront-ils employés ? Se pose également la question du contenu de ces objectifs et de leur efficacité. Une note du secrétariat de la CDB indique qu'il existe davantage d'indicateurs de réponse, traduisant l' intensité des efforts de protection, que d'indicateurs de pression sur l'état des écosystèmes, ce qui est préoccupant. Pour certains indicateurs, des avancées techniques sont attendues. Reste aussi à savoir dans quelle mesure ces indicateurs seront de nature à traduire des progrès à l'égard de la réalisation des objectifs d'Aichi, comme l'objectif D.14, concernant la restauration et la sauvegarde des écosystèmes fournissant des services essentiels.
S'agissant des financements, je rappelle que 10 à 12 milliards de dollars sont dépensés chaque année en faveur de la protection de la biodiversité dans le monde, pour un PIB d'environ 63 000 milliards de dollars. Quant à la France, elle consacrerait seulement 0,06 % de son budget public à la biodiversité, même s'il faut tenir compte également des dépenses des collectivités territoriales.
L'article 21 de la CDB prévoit de donner les moyens aux pays en développement. Trois étapes importantes ont été accomplies : la stratégie de mobilisation des ressources à la CdP 8, les engagements de Nagoya et la CdP 11 d'Hyderabad, avec un engagement plus précis des parties et l'objectif intérimaire de procéder à un doublement de l'aide publique au développement consacrée à la biodiversité d'ici à 2015.
Nous saluons l'effort de la France, qui respecte cette trajectoire : pour 2013-2016, le volume annuel des financements passera de 80 à 160 millions d'euros. Mais que finance-t-elle sur le terrain. Certains crédits de l'Agence française de développement (AFD) bénéficient à l'exploitation durable des bassins du Congo ou à la pêcherie durable. Nous essaierons d'être attentifs aux résultats.
Je me réjouis, monsieur Sticker, que plus d'1,2 milliard d'euros soit susceptibles d'être attribués par notre pays à la conservation de la biodiversité au niveau national, dont 400 millions d'euros par le secteur privé. Mais il existe une tendance à la privatisation de l'aide publique au développement : les agences bilatérales de développement disposent d'une banque adossée à leur activité – en France, il s'agit de Proparco – et une partie de leur aide consiste en un transfert du privé vers le privé. Compte tenu de la montée en puissance des financements pour la biodiversité, cette question devient plus complexe à suivre.
N'oublions pas l'enjeu de la biologie de synthèse. Lors de la CdP d'Hyderabad, un groupe de contact avait travaillé sur des thèmes nouveaux et émergents, dont celui-là. Cette technique consiste à introduire un fragment d'ADN dans une bactérie pour induire ou inhiber des comportements, avec pour but d'avoir des bactéries fabriquant du pétrole ou du gaz, ou épurant l'eau. La décision 11-2 de cette CdP demandait aux parties de réunir et synthétiser les informations disponibles et les exhortait à appliquer une approche de précaution. Or la dissémination de ces organismes constitue un danger : il est intéressant d'en programmer certains pour transformer des eaux usées en gaz ou en pétrole, mais que se passe-t-il s'ils s'échappent dans la nature ? Un projet de nouvelle décision a été élaboré pour la prochaine CdP, mais il semblerait qu'il se heurte à l'opposition des États-Unis, qui ne veulent pas entendre parler de l'application d'un principe de précaution, préférant la formule plus floue de « vigilance prudente ». Les ONG seront attentives à cette question.