Intervention de Hervé Mariton

Réunion du 30 septembre 2014 à 16h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHervé Mariton, rapporteur spécial :

Nous avons eu beaucoup de plaisir à élaborer ensemble ce rapport qui vise à éclairer les débats en séance du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte.

Ce travail nous est apparu d'autant plus nécessaire que ni le projet de loi sur la transition énergétique ni son étude d'impact ne font apparaître les coûts, en particulier budgétaires, qui résulteraient de deux choix : plafonner la production nucléaire à 63,2 gigawatts, ce qui impliquera la fermeture de réacteurs nucléaires au moment de l'entrée en service de l'EPR de Flamanville en 2016-2017 et limiter à 50 % la part du nucléaire dans le mix électrique à l'horizon de 2025, ce qui provoquera la fermeture d'une vingtaine de réacteurs nucléaires.

Ces décisions engendrent des conséquences sociales, économiques et énergétiques, particulièrement sensibles au niveau local. Elles impliquent aussi une indemnisation de l'entreprise EDF – puisque ces choix industriels lui sont dictés par la loi – et donc des coûts budgétaires. Il était donc important que notre Commission et l'Assemblée nationale en soient informées avant la délibération en séance même si, jusqu'à présent, l'État et Électricité de France ne se sont pas beaucoup investis dans le chiffrage.

Les deux grands principes du projet de loi, que je viens de rappeler, conduisent à des fermetures anticipées de centrales nucléaires. Aucune autre raison ne justifie leur fermeture dans le calendrier prescrit.

Cette fermeture est anticipée puisque l'Autorité de sûreté nucléaire a d'ores et déjà délivré des autorisations de prolongement d'exploitation qui vont au-delà de 2017 et qui mènent à une durée d'exploitation de quarante ans. Par ailleurs, l'état des réacteurs, la stratégie de l'entreprise et la référence à d'autres pays peuvent permettre d'envisager un prolongement de la durée de vie d'un réacteur très au-delà de quarante ans. EDF évoquait un objectif de soixante ans et, aux États-Unis, une durée de vie de quatre-vingts ans est envisagée pour certaines centrales.

Une centrale nucléaire finira toujours par fermer. Nous n'avons pas construit notre raisonnement sur l'idée que les centrales seraient éternelles mais toute la question est de savoir à quel moment elles doivent fermer, compte tenu des investissements réalisés, des exigences de sécurité à respecter, de la valeur ajoutée économique et des profits engendrés.

La diminution à 50 % de la part du nucléaire dans le mix électrique en 2025 conduit à la fermeture anticipée d'une vingtaine de réacteurs. Une centrale possède entre deux et six réacteurs ; Fessenheim en compte deux. Notre travail s'est appliqué à cette dernière centrale, ciblée à plusieurs reprises par le Président de la République. Cela étant, ce rapport vaut quel que soit le réacteur fermé car les conséquences sont les mêmes : pertes de valeur, compensation pour l'opérateur, suppressions d'emplois, baisse des recettes pour les collectivités et autres effets induits. Pour limiter la production nucléaire à 63,2 gigawatts, on peut fermer les deux réacteurs de Fessenheim ou répartir les fermetures sur plusieurs sites. Pour diminuer à 50 % la part du nucléaire dans le mix électrique en 2025, il faut fermer une vingtaine de réacteurs.

La diversification du mix énergétique nous paraît très justifiée et nous n'écrivons pas que la part d'électricité nucléaire doit rester à 75 % pour l'éternité, mais il n'est pas raisonnable d'en précipiter artificiellement la baisse. Quant au développement des énergies renouvelables, il nous paraît souhaitable à bien des égards. Mais ces énergies devraient d'abord remplacer des énergies fossiles – qui ont un impact négatif sur l'environnement et sur la balance commerciale – et non pas se substituer à une capacité de production nucléaire arrêtée de manière anticipée.

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