Le sujet dont nous traitons est au coeur d'un débat public majeur qui nous interroge d'abord en termes de sûreté et de sécurité. Il pose la question du développement durable et comporte également des enjeux financiers.
Pour ma part, j'estime que l'industrie nucléaire participe aujourd'hui à la compétitivité de la France. Elle a toute sa place dans notre pays, et elle l'aura pendant encore longtemps. Cela ne doit toutefois pas nous empêcher de nous montrer volontaristes afin de faire diminuer la part de l'énergie d'origine nucléaire dans notre production et de permettre l'émergence des énergies renouvelables – ENR.
Le rapport d'information traite essentiellement des enjeux financiers de la fermeture de Fessenheim. Concernant les enjeux locaux, permettez-moi de vous dire que ma compassion pour les « communes nucléaires » a quelques limites : ceux qui, comme moi, viennent de communes beaucoup plus pauvres auront du mal à les plaindre, ils savent à quel point elles ont pu bénéficier durant des années d'une véritable « rente nucléaire ». Pour en revenir au coeur du rapport d'information, il me paraît un peu court de mettre en avant un scénario unique de fermeture de vingt réacteurs, dont la première ne coûterait pas moins de 5 milliards d'euros, au motif qu'une des hypothèses de RTE se fonde sur la stabilité de la consommation. Ces hypothèses ne sont que des hypothèses, et elles ne se réalisent jamais. Cela est d'autant plus gênant que seul ce scénario sera retenu et diffusé pas les médias.
De la même façon, les calculs prévoyant une indemnisation pour un montant de 4 milliards d'euros se fondent sur une durée de vie de la centrale de soixante ans, ce qui paraît un peu long lorsque l'on sait que l'Autorité de sûreté nucléaire – ASN – ne s'est prononcée que pour une exploitation jusqu'en 2021.
Nous ne pouvons pas mener le débat public sur le nucléaire en faisant primer l'argument économique comme vous le proposez. Parce que la fermeture de toute centrale pose un problème économique, il deviendrait alors impossible de sortir du nucléaire. Si notre Commission veut faire la transparence sur les coûts du nucléaire à partir du cas de la fermeture d'une centrale, il faut qu'elle travaille sur tous les coûts, y compris ceux qui sont masqués. Quid des coûts différés liés au démantèlement inéluctable des centrales ? Quid d'une fermeture que l'ASN imposerait du jour au lendemain ?
Depuis les années 1970, l'énergie nucléaire a beaucoup apporté au pays, y compris en termes de développement durable car elle est faiblement émettrice de gaz à effet de serre. Une transparence d'ensemble serait néanmoins nécessaire, et le rapport d'information aurait probablement gagné, sur ce plan, à être moins caricatural.