Il est compréhensible que les contribuables disposant d’un revenu imposable inférieur à 6 000 euros n’acquittent pas l’impôt sur le revenu. En 2014, le pourcentage de foyers non imposables à l’impôt sur le revenu était de 51,5 %, part déjà très importante. Le présent projet de loi de finances, en supprimant la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu, accroîtra le nombre de contribuables non assujettis à l’impôt sur le revenu.
Toutefois, l’impôt, et spécialement l’impôt progressif sur le revenu, n’est pas qu’une recette. Il est d’abord une contribution aux charges publiques communes, l’un des principaux liens qui rattachent les citoyens à la communauté nationale. Déjà, la déclaration des droits de l’homme de 1789 disposait que « Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable. Elle doit être également répartie entre tous les citoyens en raison de leurs facultés. »
L’impôt sur le revenu étant un lien entre les citoyens et la nation, il faut éviter une rupture trop généralisée de ce lien civique, de cette contribution, symbole d’appartenance à la communauté nationale. Dès lors, au lieu de supprimer la première tranche, ce qui accroîtrait le nombre de foyers non imposables, l’on pourrait diminuer sensiblement le taux auquel cette tranche est soumise en l’abaissant de 5,5 % à 1 %.
En l’absence de réforme fiscale en profondeur, qui traiterait de la fusion entre l’impôt sur le revenu et la CSG et prévoirait un prélèvement à la source, la progressivité de l’imposition des ménages n’est pas assurée, puisque les recettes de TVA et de CSG sont bien supérieures à celles de l’impôt sur le revenu. La « suppression » annoncée de la première tranche est en réalité un renforcement de la décote que, sur le fond, nous soutenons dans cet amendement puisque l’augmentation des prélèvements obligatoires s’est révélée trop importante ces deux dernières années pour les classes moyennes inférieures.
Néanmoins, en matière de communication, l’annonce de la suppression de la première tranche peut paraître clivante et maladroite. C’est la raison pour laquelle nous préconisons une modulation des taux, tout en maintenant dans notre amendement l’effet favorable de la décote sur les ménages les plus modestes.
J’ajoute qu’il est assez hypocrite de prôner la suppression de la première tranche au motif de justice fiscale, alors même que des taxes et des redevances, sur la télé ou sur le gazole par exemple, qui concernent les personnes les plus modestes, continueront d’augmenter !