Intervention de Lionel Tardy

Séance en hémicycle du 15 novembre 2012 à 21h30
Abrogation du conseiller territorial — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLionel Tardy :

…vous allez voir ce qu'il en est de mener une réforme qui change les règles du jeu pour les élus et contrarie leur organisation. On commence d'ailleurs à entendre parler – je pense aux déclarations du président du groupe SRC à l'Assemblée nationale – d'un référendum à ce sujet. On passerait ainsi complètement par-dessus la tête des élus, sans débat parlementaire. On renouerait ainsi avec la pratique du général de Gaulle qu'un certain François Mitterrand qualifiait de coup d'État permanent…

Madame la rapporteure écrit dans son rapport que la réforme du conseiller territorial a été « conçue sans respect de l'avis des élus locaux intéressés et née au forceps à la suite d'une procédure d'examen parlementaire heurtée ». Que dirait-elle d'une réforme du cumul des mandats adoptée par référendum à cause d'une opposition déterminée des élus écartant complètement le débat parlementaire ? Si la réforme du conseiller territorial a été accouchée au forceps, celle du cumul des mandats risque de naître par césarienne… Vous n'avez donc pas vraiment de leçons à nous donner !

Sur le fond, cette réforme du conseiller territorial a voulu régler de manière innovante un problème récurrent : notre trop grand nombre de collectivités, et surtout le fait que nous avons au moins un niveau de trop. La création du conseiller territorial répondait à un vrai besoin de modernisation de notre démocratie locale et permettait d'accroître la lisibilité démocratique, l'efficacité politique et la vertu économique.

Accroître la lisibilité démocratique : tel est bien le défi majeur auquel voulait répondre la création du conseiller territorial. Celui-ci est – ou était – une réponse pragmatique à la défiance croissante et inquiétante de nos compatriotes à l'égard de leurs élus. En effet, il est urgent de rapprocher nos élus d'électeurs qui ne comprennent plus qui fait quoi dans un paysage démocratique atomisé.

Qu'est-ce que le conseiller territorial ? Un élu mieux identifié, siégeant à la fois au conseil général et au conseil régional. Le lien entre l'électeur et son élu est maintenu, tout comme la représentation des territoires qui composent chaque région et chaque département. N'en déplaise à la nouvelle majorité, il est parfaitement envisageable que ce conseiller siégeant à la fois dans les assemblées délibérantes du département et de la région s'investisse autant pour l'un que pour l'autre.

Pourquoi porter par avance sur ces élus une appréciation négative ? Il s'agit simplement d'améliorer la cohérence et la lisibilité, de faire en sorte que lorsqu'un responsable d'association s'adresse à un conseiller territorial, ce dernier s'exprime à la fois comme conseiller général et comme conseiller régional. Un chef d'entreprise, une association, un maire ou un particulier aurait pu ainsi trouver dans son conseiller territorial un interlocuteur unique qui représenterait à la fois le département et la région. Que de temps gagné pour eux ! Que de simplification apportée ! Cet effort de lisibilité dans ce que l'on appelle à raison le millefeuille des collectivités était la véritable valeur ajoutée de ce nouvel élu.

De plus, le conseiller territorial serait le véritable moteur d'une meilleure articulation entre les conseils régionaux et les conseils généraux. Ses actions dans ses deux collectivités d'élection gagneraient en cohérence et en complémentarité, ce qui renforcerait leur efficacité politique. La concurrence des interventions du département et de la région – même s'ils sont de la même couleur politique – sur un même territoire identique ne serait plus possible. Au contraire, les interventions complémentaires du département et de la région seraient facilitées.

Supprimer un niveau apparaît impossible : une telle mesure serait politiquement et techniquement trop complexe à mener. Il faut alors fédérer pour arriver à deux strates. La première strate est composée des communes et de l'intercommunalité ; la deuxième ne peut donc résulter que d'un rapprochement entre les départements et les régions.

Pour ce rapprochement entre le département et la région, nous avons voulu reprendre un modèle qui a fait ses preuves pour la strate des communes et de l'intercommunalité, et qui consistait à faire siéger les mêmes élus aux deux niveaux. Regardez les intercommunalités : on y trouve des délégués des communes. Il n'y a donc que des cumulards ! Même si les intercommunalités ne sont pas formellement des collectivités locales, la charge de travail qu'elles assument dans les faits, en temps passé comme en responsabilités, est celle d'une vraie collectivité locale. Le fait que ces élus soient à la fois des élus communaux, avec tout ce que cela peut impliquer comme charge de travail, et des élus intercommunaux pose-t-il problème ? Pourquoi le fait d'être en même temps conseiller régional et conseiller général poserait-il plus de problèmes ?

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