L'association GAMS a été créée en 1982 par des femmes originaires de l'Afrique subsaharienne et des femmes occidentales dans l'objectif de travailler à la prévention des mutilations sexuelles féminines et autres violences faites aux femmes.
Nous avons été interpellés sur la question du droit d'asile à partir de 1991, quand maître Linda Weil-Curiel, présidente de la Commission pour l'abolition des mutilations sexuelles (CAMS), fut saisie par une femme sénégalaise risquant une excision avant le mariage dans son pays d'origine. L'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et la Commission de recours des réfugiés (CRR) avaient opposé un refus à la demande, puis le Conseil d'État avait donné son accord, mais sans reconnaître le droit de cette femme à l'asile conventionnel plein et entier.
De 1991 à 2001, dans un contexte de pénurie d'experts francophones sur les violences de genre à caractère coutumier, les pays où la jurisprudence sur l'asile se mettait en place – Suisse, États-Unis, Canada, Australie – nous ont sollicités sur des dossiers. Nous avons alors étudié dans quelle mesure notre connaissance de terrain confirmait ou infirmait le récit des personnes victimes, que nous n'avons pas rencontrées.
En 2001, en l'absence de jurisprudence française, la Commission de recours des réfugiés s'est intéressée aux expertises que nous avions rédigées pour un certain nombre de pays, d'avocats ou d'organismes. Elle nous a alors présenté trois dossiers : celui de la famille Sissoko, qui a fait jurisprudence ; le dossier d'une femme somalienne qui avait perdu sa fille aînée à la suite d'une infibulation et qui souhaitait protéger sa fille cadette ; et un dossier ivoiro-guinéen difficile à défendre. Ces dossiers, pour lesquels nous n'avons pas non plus rencontré les personnes, ont pu être défendus.
De 2001 à 2006, nous avons accompagné des demandeurs d'asile en première instance, mais depuis 2006, vu l'augmentation du nombre de dossiers et le niveau de nos ressources humaines, nous limitons notre travail et nos expertises au stade du recours.
Nous pensions retrouver dans le projet de loi relatif à la réforme de l'asile une grande partie des recommandations sur le genre formulées par le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes (HCEfh). Aussi plusieurs questions peuvent-elles se poser selon nous.
D'abord, si les parents peuvent obtenir auprès de la préfecture un droit au séjour en se fondant sur l'asile conventionnel accordé à leur enfant menacé de mutilation sexuelle féminine, ils doivent néanmoins présenter chaque année, pour obtenir le renouvellement de leur titre de séjour, un certificat médical attestant que l'enfant n'a pas été excisé durant l'année passée. Il est vrai que le risque zéro n'existe pas – certains enfants sont même emmenés à Londres ou Bruxelles pour être excisés.
Ensuite, si l'asile conventionnel est accordé à l'enfant, la mère – même si elle a milité contre les violences faites aux femmes, ou a été victime de mutilation sexuelle, d'un mariage forcé précoce ou de tout autre type de violences – n'est plus protégée, car le titre de séjour est moins protecteur que l'asile conventionnel.
Enfin, les textes français séparent toujours les mineurs et les majeurs. Or nous pensons indispensable que le projet de loi soit protecteur à la fois pour les femmes et les petites filles.