Si, il y a un rapport ! Les coupes budgétaires sont sans précédent : 21 milliards d’euros de dépenses publiques en moins en 2015 ! Bien entendu, la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » n’est pas épargnée.
Prenons l’exemple des crédits de la Journée défense et citoyenneté : ils passent de 93 millions à 19 millions d’euros, soit une division par cinq ! Comment peut-on prétendre vouloir renforcer le lien entre l’armée et la nation dans ces conditions ?
Quant au programme phare de la mission, le programme « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant », ses crédits sont en baisse de 149 millions d’euros, soit moins 5,44 % – M. le secrétaire d’État annonce moins 3,33 % – par rapport à 2014.
Pour la droite, je rappelle tout de suite le bilan de la législature précédente : une coupe de 447 millions d’euros en cinq ans ! Pas mal ! Il y a bien continuité de la politique menée, malheureusement.
Comme on peut s’y attendre avec des crédits en baisse, toutes les revendications ne peuvent être satisfaites, malgré l’érosion démographique de la troisième génération du feu.
Considérant le nombre de disparitions annuelles d’anciens combattants – entre 50 000 et 60 000 –, nous pourrions répondre, à budget constant, aux demandes légitimes du monde combattant.
Il y a urgence car la moyenne d’âge des anciens combattants, comme je vous l’ai déjà dit, monsieur le secrétaire d’État, est de 77,5 ans. Combien seront encore là dans 25 ans, si nous attendons ?
Ainsi, sur la base d’un effectif de 5 000 personnes, on évalue le coût de la création d’une allocation différentielle pour les anciens combattants les plus démunis à environ 5 millions d’euros seulement…
Bien entendu, on peut saluer certaines mesures nouvelles pour l’année prochaine. C’est le cas de la revalorisation des majorations spéciales de pensions des conjoints survivants des grands invalides de guerre, qui va dans le bon sens. La meilleure solution n’est-elle pas d’arriver à un taux de réversion de 50 % ? Il faut y penser.
Nous pouvons aussi nous réjouir de l’attribution de la carte du combattant aux militaires ayant servi au minimum quatre mois en opérations extérieures, une mesure réclamée depuis tant d’années sur tous les bancs.
Mais on peut s’interroger sur la revalorisation de l’allocation de reconnaissance de la nation en faveur des Français rapatriés.
Je renouvelle ma remarque, jamais démentie, sur la refonte de l’allocation différentielle pour les conjoints survivants. Si nous sommes tous d’accord pour porter le montant à 987 euros par mois, il faut en voir le financement.
L’abondement d’1,5 million d’euros à l’ONAC est insuffisant : celui-ci va être placé dans une situation difficile.
Des choix difficiles devront être faits. C’est ce que le Gouvernement et la majorité assument. Il faudrait la transparence sur cette question au moment du vote du budget car, après, il sera trop tard et nous ne pourrions pas dire que nous ne savions pas !
Autre sujet : l’attribution de la campagne double aux anciens d’Afrique du Nord. Je sais que vous y êtes très attentif, monsieur le secrétaire d’État. Le Conseil d’État, je le rappelle, a tranché et a condamné l’État à rétablir l’égalité rompue entre bénéficiaires potentiels, qui sont tous fonctionnaires ou assimilés. Or cette égalité a été très imparfaitement rétablie. On ne peut pas attendre une nouvelle réflexion sur ce sujet : il faut agir ! Le bénéfice effectif de la campagne double pour les anciens d’Afrique du Nord coûterait 2,4 millions d’euros, pour environ 5 500 personnes. Monsieur le secrétaire d’État, vous vous êtes déclaré favorable à la réunion d’une commission. Je souhaite savoir avec qui et quand celle-ci se réunira.
Les députés communistes et du Front de gauche ont pris leurs responsabilités en déposant une proposition de loi. Nous n’acceptons pas qu’avec un tel budget, l’État soit pourvoyeur de pauvreté pour les anciens combattants. On doit pouvoir vivre dignement quand on a dignement servi la France. Plus aucun ancien combattant ne doit être pauvre !
Je rappellerai aussi que la valeur du point de pension militaire d’invalidité, qui détermine le montant des pensions, les retraites du combattant et le plafond des rentes mutualistes, accuse un retard de près de 40 % et que le plafond majorable des rentes mutualistes stagne à 125 depuis 2007. Cela signifie qu’il n’y a ni rattrapage, ni maintien du pouvoir d’achat des pensions militaires d’invalidité.
La perte du pouvoir d’achat est de 7 % depuis quelques années ! Mon amendement sollicitant un rapport a été déclaré irrecevable cette année.
Il y aurait encore tant à dire sur les pupilles, les orphelins de guerre, que l’on fait lanterner scandaleusement. Un mot sur la politique de mémoire. Il faut des moyens pour exposer les causes des conflits aux populations, aux jeunes générations, dans le but de leur permettre d’agir pour empêcher les drames, les injustices, les massacres, les exactions, les crimes de guerre et toutes les atteintes à la dignité humaine.
Une mesure qui ne coûte strictement rien : en cette année du centenaire de 14-18, il faudrait réhabiliter tous les fusillés pour l’exemple de la Première Guerre mondiale. Là encore, François Hollande et le Gouvernement ne veulent pas faire ce geste d’apaisement de la mémoire nationale.
Monsieur le secrétaire d’État, vous l’aurez compris, malgré l’estime personnelle que nous pouvons avoir envers vous et malgré vos efforts, qui doivent se poursuivre, les députés du Front de gauche émettront un avis négatif sur ce budget.