Intervention de Ericka Bareigts

Séance en hémicycle du 4 novembre 2014 à 15h00
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 - projet de loi de finances pour 2015 — Outre-mer

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEricka Bareigts :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur spécial, messieurs les rapporteurs pour avis de la commission des lois, monsieur le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, chers collègues, les territoires d’outre-mer font face depuis longtemps à d’importantes difficultés ; elles sont plus graves depuis le début de la crise. Nos territoires sont victimes du chômage de masse et de la pauvreté, dans des proportions plus grandes que dans l’Hexagone. En 2013, la Réunion, avec un taux de chômage de 28,9 %, était ainsi la quinzième région d’Europe la plus touchée par le chômage, derrière les régions les plus pauvres de Grèce, d’Espagne et de Macédoine.

Ces difficultés sont également sociales et sanitaires. Ce sont les territoires de France où les inégalités sont les plus prégnantes : selon l’INSEE, les inégalités dans les DOM étaient plus proches en 2008 de la situation de la France de 1900 que de celle du XXIe siècle. Sur le plan sanitaire, chaque territoire a ses défis propres, mais tous sont plus sérieux les uns que les autres.

C’est très certainement pour ces raisons que le Président de la République a déclaré le 21 août dernier, lors de son passage à la Réunion, que les outre-mer sont une priorité pour la France.

Nous allons voter cet après-midi le budget du ministère des outre-mer. Pour la troisième année consécutive, il sera en progression. C’est une nécessité dans le contexte que je viens de décrire. La modestie de cette progression ne doit pas masquer l’effort fait par le Gouvernement pour les territoires ultramarins depuis plusieurs années.

Dans un contexte budgétaire contraint, ce budget se recentre sur l’essentiel : l’aide aux plus démunis et les conditions de la croissance économique. Selon l’Agence française de développement, les outre-mer ont trente ans de retard sur la France métropolitaine en termes de développement humain.

Nous avons donc besoin d’une politique budgétaire forte pour faire face à l’urgence sociale, au rattrapage des retards éducatifs, à l’effort sanitaire et à la nécessité de la croissance économique pour l’emploi. Les collectivités d’outre-mer ont besoin du soutien national pour les projets de développement qu’elles ont construits.

Ce soutien se matérialisera notamment par la nouvelle génération de contrats de plan État-région, en hausse de 25 %, qui permettront de financer les priorités définies par les conseils régionaux.

Pour les conditions de vie outre-mer, les crédits du logement sont recentrés sur la construction de logements sociaux, ce qui devrait permettre à tous, et donc aux plus modestes, de se loger. C’est répondre à une question de dignité tout en relançant le secteur du BTP qui s’enfonce dans une crise grave dans les outre-mer.

Le maintien à un niveau inchangé des crédits de la LBU nous inquiète, alors que les besoins se sont accrus, notamment avec la réforme du crédit d’impôt logement outre-mer l’an dernier. D’autres dispositifs de soutien au secteur sont cependant prévus. Par exemple, et bien que ce soit hors du domaine strict de cette mission, le débat parlementaire en commission a permis d’obtenir des assurances de la ministre sur la prise en compte des spécificités ultramarines dans plusieurs dispositifs nationaux relatifs au logement en cours d’examen. Ainsi, un travail est en cours sur l’adaptation des critères du crédit d’impôt transition énergétique aux outre-mer, ainsi que sur le plafonnement trop bas du dispositif dit Pinel dans les DOM. Vous nous avez totalement rassurés sur cette question, madame la ministre, et nous vous en remercions.

Ce budget affirme également une volonté de donner à nos jeunes une formation qualifiante pour relancer l’emploi. Des crédits supplémentaires sont ainsi accordés au service militaire adapté pour répondre à son objectif « SMA 6 000 ».

C’est également la raison de la réforme de la continuité territoriale, système dont la croissance n’était pas soutenable et qui aboutissait, à la Réunion, à sanctionner les familles défavorisées et, dans l’ensemble des outre-mer, à engorger son gestionnaire, LADOM, au détriment de ses actions de formation.

Tout en permettant de maîtriser la dépense, cette réforme dégage les moyens nécessaires pour financer des billets supplémentaires pour les étudiants passant plusieurs épreuves en métropole dans la même année. Je me félicite particulièrement que nous ayons pu trouver une solution pour les deuxièmes accompagnants d’évacués sanitaires.

Le développement exige aussi une croissance économique car celle-ci apporte emplois, revenus et perspectives d’avenir.

Le Gouvernement a ainsi annoncé un crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi renforcé à 9 % dans les outre-mer.

Un plan en faveur de l’économie sociale et solidaire a également été adopté par le ministère. Je salue cette nouvelle approche tant cette économie, trop souvent sous-estimée, est un réservoir de croissance et d’emplois. L’aide à la première embauche – une des actions de ce plan – est une mesure très importante, dont les jeunes ultramarins attendent le résultat.

Enfin, je tiens également à saluer ici la décision de renforcer le crédit d’impôt recherche dans les outre-mer.

J’avais regretté lors du précédent budget que les dispositifs de l’État en outre-mer n’orientaient pas assez l’économie vers des secteurs riches en emplois qualifiés pour nos jeunes, en croissance et en valeur ajoutée. Je ne peux donc que me réjouir de l’adoption pour les outre-mer d’une version renforcée du dispositif phare de la recherche en France. J’espère que notre discussion permettra cependant de proposer la même évolution pour son jumeau, le crédit d’impôt innovation. Celui-ci me paraît plus adapté aux petites entreprises qui constituent l’essentiel de notre tissu économique.

Pour toutes ces raisons, madame la ministre, le groupe socialiste votera ce très bon budget pour l’outre-mer.

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