La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
La parole est à M. Michel Piron, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.
Monsieur le Premier ministre, quand, autour du barrage de Sivens ou de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, des minorités imposent leur refus à des majorités élues ; quand, instrumentalisant la mort d’un jeune pris dans leur réseau de violence, des militants interrompent et bloquent des projets élaborés, décidés et votés par de larges majorités d’élus locaux, départementaux et régionaux, où est l’État de droit ?
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.
Où est la démocratie dès lors que l’on place sur un pied d’égalité le point de vue de manifestants qui ne représentent qu’eux-mêmes et celui d’élus au suffrage universel qui représentent leurs concitoyens ? Qui du refus selon la rue ou du projet selon la loi détient la légitimité de choisir et décider ?
Mêmes mouvements.
Lorsque l’on s’habitue, année après année, à ce que la voix mesurée des majorités soit de plus en plus couverte par celle, bruyante voire violente, de minorités, et à ce que l’on renonce à tout projet dépourvu de l’aval de tous ceux qui n’en veulent aucun, en est-on réduit à constater l’affaissement de l’État et l’impuissance des gouvernants ? Voilà qui serait inacceptable car le droit des minorités à s’exprimer ne saurait remplacer celui des majorités à décider ! À ces questions, monsieur le Premier ministre, et dans les circonstances actuelles, quelles réponses apportez-vous ?
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.
La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.
L’État de droit, monsieur le député, c’est de toujours faire prévaloir l’intérêt général. L’État de droit c’est de savoir rassembler des points de vue au départ très divergents, mais dont tous les citoyens qui les formulent ont envie, à un moment ou à un autre et pour peu qu’on les y aide, de faire prévaloir l’intérêt général.
Exclamations sur plusieurs bancs des groupes UDI et UMP.
L’État de droit c’est de répondre aux préoccupations des uns et des autres : celles des élus qui ont la responsabilité de leur territoire et s’engagent pour le développer et y créer des emplois, celles de la profession agricole qui a besoin en l’occurrence de ressources en eau pour travailler et celles des associations de défense de l’environnement qui font valoir l’intérêt général de la protection de la nature.
« Non ! » sur plusieurs bancs des groupes UMP et UDI.
L’important, lorsqu’il y a des crises et des conflits dans une démocratie, c’est de savoir renouer les fils du dialogue et de savoir faire émerger des solutions durables au service de l’intérêt général. Pour ce faire, chacun doit comprendre qu’une part de sa vérité est susceptible d’être remise en cause afin de construire en commun la vérité commune selon laquelle aménager notre pays tout en respectant les critères du développement durable et la création d’activité et d’emploi. C’est ce à quoi s’attelle le Gouvernement afin de sortir par le haut d’une situation encore très tendue avec toutes les parties prenantes dont je me réjouis de constater qu’elle sont à présent autour de la table pour y travailler !
Applaudissements sur quelques bancs des groupes SRC et Écologiste.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Ah ! " sur les bancs du groupe UMP.
Je sais que les avis divergent souvent au sein de notre assemblée sur la politique à mener en matière d’écologie, mais je suis persuadée que tous ses membres déplorent la mort injuste de Rémi Fraisse. Le groupe écologiste souhaite donc consacrer une minute de cette question à une minute de silence
Exclamations sur les bancs du groupe UMP
pour dire combien nous sommes touchés par la mort de ce jeune manifestant qui ne faisait que défendre la nature.
L’oratrice interrompt son propos . - les députés du groupe écologiste se lèvent et se disposent à observer une minute de silence.
Madame Duflot, il est de tradition, dans notre hémicycle, de saluer par une minute de silence les décès survenus parmi nos forces armées ou parmi des otages. Je vous demande donc de poursuivre votre question.
Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI. - L’oratrice continue à observer le silence.
Je vous demande de poursuivre votre question, madame Duflot. Chacun a compris votre émotion, mais maintenant, il faut poser votre question.
L’oratrice continue à observer le silence. - Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
…
Madame la ministre, une fois de plus, le dernier rapport du GIEC a sonné l’alarme. Chacun sait que les enjeux du dérèglement climatique sont d’une gravité extrême. Heureusement, partout sur la planète, des femmes et des hommes, en particulier des jeunes, se dressent pour agir, pour sauver notre avenir.
Brouhaha sur plusieurs bancs des groupes UMP et UDI.
Mêmes mouvements
Le barrage contre lequel il manifestait est un non-sens écologique. Vous l’avez dit, c’est un projet périmé, qui menace notre avenir.
Alors, madame la ministre de l’écologie, ma question est simple : qu’allez-vous faire pour mettre un terme à ce projet de barrage et aux autres projets stupides et dangereux, comme la « ferme des mille vaches », et permettre à la France d’être à la hauteur de l’enjeu historique de décembre 2015 ?
Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.
Si ce n’est pas de l’instrumentalisation, il faut nous dire ce que c’est !
La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.
Monsieur le président, madame la députée, nous devons à la mémoire de Rémi Fraisse l’obligation de tenir le débat à un haut niveau de dignité et de responsabilité.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur les bancs des groupes UMP et UDI, ainsi que sur quelques bancs du groupe écologiste.
Ce haut niveau de dignité et de responsabilité nous appelle à trouver des solutions durables, qui ne soient pas des solutions dogmatiques, ni d’un côté, ni de l’autre. Ce haut niveau de responsabilité nous appelle à écarter tout propos agressif ou injuste, notamment ceux qui ont été tenus à l’égard du ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve.
Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe SRC, sur quelques bancs des groupes GDR et RRDP et sur de nombreux bancs des groupes UMP et UDI.
Ce haut niveau de responsabilité nous appelle aussi à condamner des propos inadmissibles qui ont été tenus par des responsables de l’UMP, traitant les militants écologistes de « Khmers verts » : c’est inacceptable.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe écologiste.
Par conséquent, je veux vous dire que personne dans notre pays ne pourra, par la violence, interdire la réalisation de travaux et d’équipements qui sont indispensables au développement économique de nos territoires.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.
Nous le ferons dans le cadre du respect des principes du développement durable, mais nous le ferons.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Barrage de Sivens
La parole est à M. Christian Jacob, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Monsieur le Premier ministre, le 6 septembre dernier, vous teniez devant les Jeunes agriculteurs les propos suivants : « Mobiliser la ressource en eau est un élément décisif pour l’installation des jeunes agriculteurs. C’est pour cela que nous avons tenu bon à Sivens », disiez-vous. « Les travaux de ce barrage vont enfin commencer, et il s’agit simplement d’appliquer le droit. »
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.
Eh bien oui, monsieur le Premier ministre, c’est bien le moins que l’on puisse attendre d’un gouvernement : appliquer le droit et garantir l’ordre républicain !
Comme tous les Français, nous avons été émus et profondément affectés par la mort de Rémi Fraisse. Mais comme tous les Français, nous ne supportons plus que des groupes de militants ultra-politisés saccagent tout sur leur passage, comme cela a été le cas à Dijon, à Nantes, à Toulouse !
Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.
À ce stade, il est indispensable de vous entendre, monsieur le Premier ministre, sur la position de votre gouvernement. Les Français doivent savoir si, oui ou non, vous incarnez l’autorité de l’État ! Ils doivent savoir si la violence inacceptable de quelques militants politiques vous a paralysé et vous a tétanisé !
Nous avons l’habitude de vous entendre dans cet hémicycle, monsieur le Premier ministre. Vous allez sans doute, pour me répondre, prendre un ton martial, avoir le verbe haut, avoir le verbe fort. Mais la réalité, la triste réalité, c’est que les Français voient bien que lorsqu’il s’agit d’agir, il n’y a plus personne à la barre, vous n’êtes plus là, vous vous défaussez !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP
Ma question est simple : allez-vous, oui ou non, céder devant des militants d’extrême gauche, devant des voyous, devant des casseurs ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le président Jacob, je me suis exprimé ici même, dans cet hémicycle, il y a une semaine, et j’avais trouvé, me semble-t-il, un écho dans cette assemblée. D’abord, comme l’a fait il y a un instant, de nouveau, la ministre de l’écologie, en pensant à ce jeune homme qui a trouvé la mort dans des circonstances qui doivent être éclairées pleinement par la justice, après une enquête qui doit pouvoir se dérouler dans la plus grande sérénité ; et il est difficile d’admettre dans notre pays, grande démocratie, qu’on puisse mourir à l’occasion d’une manifestation, et pour un tel sujet.
J’ai eu l’occasion de dire ici, avec la plus grande fermeté, et nous pouvons nous retrouver là-dessus, monsieur Jacob – nul besoin d’anticiper mes propos et mon attitude –, sur la condamnation la plus ferme de la violence. Et moi, je ne dévie en aucun cas de cette ligne, et je condamne avec la plus grande fermeté toutes les violences à l’égard des forces de l’ordre. Je l’ai fait ici même, quand j’étais ministre de l’intérieur, quand, à quelques dizaines de mètres de l’Assemblée nationale, on s’en prenait aux forces de l’ordre. Et c’est au nom de cette cohérence, monsieur Jacob, c’est la mienne, que je condamne avec la plus grande fermeté les violences qui s’exercent à l’égard des forces de l’ordre ou des bâtiments publics
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et UMP et sur plusieurs bancs du groupe RRDP
à Nantes, à Dijon ou à Toulouse.
Dans une démocratie comme la nôtre, on a le droit de manifester, de s’opposer, de voter. On ne peut en aucun cas, et sur n’importe quel sujet, accepter la moindre violence. Et sur cette condamnation de la violence, sur tous les sujets, vous me trouverez toujours au premier rang ; et je souhaite que chacun, à chaque fois, quels que soient les motifs de la manifestation, prenne exactement la même position, monsieur Jacob. En tout cas, encore une fois, moi, j’ai cette cohérence. Et sur ces sujets-là, je vous invite à ne pas faire trop d’amalgames…
Précisément, on ne peut pas, monsieur Jacob, mettre dans le même paquet ceux qui s’opposent à un projet, quels que soient leurs motifs, qui manifestent pacifiquement, qui se sont désolidarisés des violences, et ceux qui s’en prennent aux bâtiments publics et aux forces de l’ordre.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe UDI.
Et précisément, moi, je nous invite tous à éviter les amalgames. Nous sommes dans une société difficile, où il y a la violence, et, la ministre vient de le dire, où on a besoin, sur tous les sujets, non seulement de la légalité nécessaire, mais aussi de la légitimité qui s’impose. Et la ministre, encore une fois, réunira tout à l’heure tous les protagonistes de ce dossier…
… parce qu’on a besoin de retrouver du dialogue et de la sérénité.
On a besoin de retrouver, dans notre société, du dialogue et de la sérénité.
Je termine en vous disant quelque chose de très clair. Pour un gouvernement et dans un État de droit, il est hors de question de céder à la violence, notamment quand il s’agit de projets qui préparent l’avenir.
Hors de question ! Et le Gouvernement, de ce point de vue, aura toujours la même attitude. Non seulement on ne cède pas à la violence, mais on a besoin d’éclairer nos concitoyens sur des projets qui sont utiles pour l’avenir, pour leur pays et pour leur région. Et j’espère qu’à ce moment-là, on se retrouvera tous, précisément, pour porter l’avenir du pays.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Bruno Le Roux, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Assurer quotidiennement la sécurité des Français, maintenir l’ordre public, collecter et analyser les informations qui permettent de déjouer la menace terroriste dans notre pays, protéger l’exercice des libertés et permettre l’application des droits : telles sont, monsieur le ministre de l’intérieur, les responsabilités que vous assumez avec un grand professionnalisme, un grand souci de l’efficacité et avec une grande dignité.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.
Vous avez eu à faire face – le Gouvernement, l’État, la République – à un drame terrible à Sivens : la mort d’un homme. J’ai souhaité dès la semaine dernière que nous lui rendions hommage par la dignité des questions que nous avons posées. La conséquence d’un tel drame, pour un ministre de l’intérieur, doit être la recherche de l’explication, de la vérité des faits. C’est ce que vous avez déclaré et mis en application dès la survenance de ce drame.
Les mises en accusation, les mises en cause personnelles, voire les insultes, n’ont pas leur place lorsque le seul souci que vous avez manifesté est celui de la recherche de la vérité.
Vous continuez bien entendu à travailler. Hier, à Calais, vous avez entendu ceux qui sont dans la détresse et l’impuissance. Vous avez mis en place un dispositif de sécurité et annoncé la création d’un centre d’accueil de jour pour les migrants. Sur ce dossier extrêmement complexe, vous avez pris, là encore, toutes vos responsabilités de républicain et de ministre de l’intérieur.
Monsieur le ministre, je voulais vous dire ici, au nom du groupe SRC, que dans ces moments qui sont forcément difficiles, nous sommes à vos côtés et nous voulons vous apporter un soutien massif.
Pouvez-vous nous dire comment vous exercez la responsabilité éminemment républicaine d’assurer la sécurité des Français et de la République ?
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le député, nous vivons dans une société de violence.
La violence frappe lorsqu’un jeune homme meurt à l’occasion d’une manifestation, comme cela s’est passé dans la nuit de samedi à dimanche dernier à Sivens.
La violence frappe lorsque, sur l’espace numérique, sans aucune régulation, on voit se déployer l’antisémitisme, la xénophobie, l’homophobie, toutes formes d’exclusion qui blessent des hommes et des femmes au plus profond d’eux-mêmes.
La violence se déploie, comme en attestent ces images de journalistes que l’on décapite ainsi que tous les actes terroristes perpétrés à travers le monde, qui suscitent une immense émotion en même temps qu’un immense effroi.
La violence se déploie aussi lorsque l’on jette des cocktails molotov, des bombes d’acide, sur des forces de l’ordre qui, quotidiennement, s’exposent pour que la sécurité des Français soit assurée.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SRC, RRDP, UDI et UMP.
Lorsque l’on est dans une société de violence et que l’on exerce une responsabilité publique, quelle qu’elle soit, on doit avoir une boussole, et une seule : le sens de l’État et le sens des responsabilités.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
Le sens de l’État cela veut dire que, lorsque la violence est partout et qu’elle prétend imposer sa force en soumettant souvent les plus modestes à la loi du plus fort, le droit doit passer et s’ériger comme une protection. Quand on est dans la République, il ne peut être accepté que l’on impose la force en contravention avec le droit, parce que les valeurs de la République placent le droit au coeur des choses.
À tous ceux qui souhaitent l’apaisement, je veux dire ici qu’il y a dans les valeurs de la République, dans le respect du droit et dans le respect que nous nous devons les uns aux autres, la meilleure des réponses.
Applaudissements les bancs des groupes SRC, GDR et RRDP, et sur plusieurs bancs des groupes UDI et UMP.
La parole est à M. Christian Estrosi, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le ministre de l’intérieur, il n’y a pas que les journalistes que l’on décapite : ce fut hélas le sort réservé aussi à mon ami Hervé Gourdel, alpiniste de Nice.
Hier matin, la radio RTL nous a appris qu’une note confidentielle de la direction générale de la sécurité intérieure faisait état de plusieurs tentatives d’attentats déjouées en Île-de-France, à Lille et à Nice, en mars dernier. Cette note indiquerait notamment que le carnaval de Nice, qui reçoit chaque année un million de visiteurs, aurait été visé. Vous-même, monsieur le ministre de l’intérieur, l’avez confirmé.
Pourtant, hier soir, le représentant du Gouvernement dans mon département annonçait, par un communiqué laconique, qu’aucun lien n’était établi avec cette manifestation, et ce malgré les affirmations des journalistes. Où est la vérité ? La question se pose.
Tout en saluant le travail des forces de l’ordre, qui aurait permis l’interpellation de cet individu dangereux, je ne peux accepter que la loi et la convention signée entre l’État et la ville, qui stipule que les informations les plus importantes en matière de sécurité concernant la ville sont portées immédiatement à la connaissance directe du maire par le responsable des forces de sécurité de l’État, n’aient pas été respectées. Cela aurait permis de renforcer la vigilance par l’action de la police municipale et la mise en place de portiques de sécurité, de la vidéosurveillance et de la fouille des sacs.
Exclamations sur les bancs du groupe SRC.
Tout cela ne peut que nous inquiéter, alors même que, tous les jours, vous sont adressés de nombreux signalements, à l’image de cette famille niçoise de onze personnes signalées aux autorités comme étant endoctrinées et risquant de partir faire le djihad, sans réaction de l’État.
Serions-nous passés d’un scandale d’État à un mensonge d’État ?
Protestations sur les bancs du groupe SRC.
Monsieur le ministre de l’intérieur, vous devez la vérité aux Français. Pouvez-vous leur dire si, oui ou non, cette note existe et qui se rend coupable de mensonges : les journalistes ou le représentant du Gouvernement ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.
Monsieur Estrosi, je peux comprendre votre question, et je ne doute pas un seul instant que le ministre de l’intérieur est prêt à vous recevoir pour évoquer ce type de sujet, mais tout de même : Bernard Cazeneuve vient de parler du sens de l’État et du sens des responsabilités !
Je veux saluer le fait qu’une nouvelle fois, l’ensemble de la représentation parlementaire s’est retrouvée, comme il y a deux ans, pour voter à la quasi-unanimité le texte renforçant les dispositions de lutte contre le terrorisme.
Mais comment parler de scandale d’État, de mensonge d’État, à partir d’informations sorties dans la presse…
…alors que vous savez que nos services de renseignement intérieur et extérieur accomplissent un travail difficile, de très grande qualité, que nous avons renforcé au cours de ces derniers mois ?
Comment parler de scandale d’État et de mensonge d’État sur des sujets aussi graves qui nécessitent, comme je viens de le dire, l’unité et le rassemblement, pour lutter contre le terrorisme ?
Le terrorisme est un danger majeur pour notre pays, pour nos compatriotes, par le fait des dizaines, pour ne pas dire des centaines d’individus qui vont combattre dans des organisations terroristes, alors que nous avons des forces armées engagées dans la lutte contre le terrorisme au Sahel et en Irak.
Aussi je pense, très honnêtement, que vos propos ne sont pas à la hauteur de la situation.
Moi aussi, sur ce sujet, j’en appelle au sens de l’État et des responsabilités !
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.
La parole est à Mme Françoise Dubois, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Ma question s’adresse à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.
Madame la ministre, il y a quelques jours, le Conseil européen a adopté le second paquet énergie-climat pour 2030. Les Vingt-Huit ont fait preuve de responsabilité et d’exemplarité. Dans la perspective de la Conférence de Paris qui se déroulera à la fin de l’année prochaine, c’est un signal fort adressé aux principales puissances étrangères émettrices de gaz à effet de serre.
La publication, dimanche dernier, du cinquième rapport de synthèse du GIEC fait écho à ce signal. Le GIEC rappelle une nouvelle fois que les États doivent réagir et s’accorder, qu’il y a urgence. On ne peut plus attendre, ni se diviser face aux dangers engendrés par le dérèglement climatique, des dangers qui guettent l’environnement, les populations et leur territoire.
Les températures augmentent, les océans s’acidifient, la terre s’assèche, les glaciers fondent. Si rien n’est fait, si les gouvernements préfèrent l’isolement à la coopération, leurs intérêts propres à l’intérêt général, il faudra affronter demain des menaces considérables au plan international, que ce soit en termes de sécurité alimentaire et énergétique, d’accès aux ressources, d’approvisionnement en eau potable ou encore de déplacements de populations.
L’échec n’est pas une option. Nos enfants, les générations à venir ne le pardonneraient pas, que ce soit en France ou ailleurs, car c’est leur avenir que l’on assombrirait. Notre pays a un rôle particulier à jouer pour qu’un accord mondial contraignant soit conclu à Paris, l’an prochain, pour contenir le changement climatique.
Pourriez-vous, madame la ministre, nous faire part, tout d’abord, de la réaction du Gouvernement concernant la dernière publication du GIEC ? Pourriez-vous, ensuite, nous présenter les enjeux des négociations qui auront lieu à Lima et nous dire comment le Gouvernement aborde la dernière ligne droite que constitue la conférence Paris Climat 2015 ?
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.
La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.
Madame la députée, je vous remercie de votre question.
M. Kumar Pachauri sera en effet à Paris demain pour remettre officiellement le rapport publié à Copenhague au Gouvernement français. Il est intéressant de voir que, contrairement à ce qui se passait encore voilà quelques années, les pays du monde entier, la presse du monde entier se sont saisis de cette publication ; en d’autres termes, il n’y a plus de doute aujourd’hui sur la réalité du réchauffement climatique, l’enjeu étant de maintenir celui-ci sous le seuil de deux degrés.
Des efforts considérables doivent donc être faits, c’est évident, pour se prémunir contre les quatre dangers que pointe le rapport du GIEC : les vagues de chaleur sur l’Europe ; l’acidité des océans et la montée du niveau de la mer, qui menace l’existence de nombreux pays insulaires ; la disparition massive de nombreuses espèces animales et la réduction de la biodiversité ; enfin, les déplacements massifs de populations, qui peuvent être à l’origine de conflits mondiaux.
La France a un rôle majeur à jouer ; le Parlement, l’Assemblée nationale l’a assumé avec le vote en première lecture du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte. L’Europe a également pris ses responsabilités, et le monde devra prendre les siennes au sommet de Paris sur le climat qui aura lieu l’année prochaine. Plusieurs actions doivent être menées : la diminution massive des émissions de gaz à effet de serre, c’est-à-dire de l’utilisation des énergies fossiles ; l’arrêt de la déforestation, car les forêts sont une barrière contre le réchauffement climatique ; le renforcement de l’efficacité énergétique et la diminution du gaspillage énergétique ; la protection de l’eau et la garantie de la sécurité alimentaire.
La nouveauté dans le rapport du GIEC, c’est qu’il est désormais admis que ce défi est aussi une chance : une chance pour changer nos modèles de développement, une chance pour créer des activités et des emplois, une chance pour développer les technologies et les innovations liées à l’avenir de la planète. C’est cette chance que nous devons saisir.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC et sur les bancs du groupe écologiste.
La parole est à Mme Marie-Louise Fort, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le Premier ministre, voilà plusieurs mois, le Président de la République promettait une baisse durable des prélèvements obligatoires via le pacte de responsabilité. Vous-même, il y a quelques semaines, promettiez dans votre discours de politique générale d’arrêter d’augmenter les impôts. Monsieur le Premier ministre, avez-vous vraiment parlé de pause fiscale ?
Après la hausse de la taxe diesel, quelle surprise ce matin de découvrir que vous envisagez de taxer les résidences secondaires via une surtaxe d’habitation dans les zones tendues ! Outre que cette mesure ajoute encore à l’instabilité fiscale, elle montre que vous continuez bien d’augmenter les impôts des Français.
Souhaitez-vous par ailleurs continuer de discréditer à ce point la parole politique en faisant, comme d’habitude, le contraire de ce que vous annoncez ? La réalité, c’est que vous ne parvenez pas à faire des économies et préférez les mesures d’appoint, l’augmentation des impôts et des taxes, pour tenter de réduire le déficit. Et cette politique nous conduit dans le mur : la Commission européenne annonce ce matin que le déficit de la France – 4,7 % en 2016 – sera le plus gros de la zone euro.
La réalité, c’est qu’en taxant les résidences secondaires, vous confirmez votre incapacité à mener de réelles réformes de structures. Et tant que vous ne ferez pas de réformes structurelles, il n’y aura pas de rétablissement durable de nos comptes publics. Et vous pourrez faire tous les arrangements que vous voulez avec Bruxelles, avec votre politique, les Français continueront de payer encore plus d’impôts.
Cette nouvelle taxe serait-elle destinée à porter un nouveau coup au marché de l’immobilier ou à masquer à bon compte, et sur le dos des contribuables, la perte des dotations de l’État en direction des collectivités locales ? Enfin, monsieur le Premier ministre, après la taxation des résidences secondaires, quelle sera votre prochaine cible ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Madame la députée Marie-Louise Fort, que vous propose le Gouvernement ?
Il vous propose de réfléchir à une mesure ciblée, réservée aux zones tendues. Chaque conseil municipal disposerait de la faculté – il pourra accepter ou refuser de le faire – d’instaurer une majoration de la taxe d’habitation pour des résidences secondaires qui ne sont pas toujours occupées
Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP
et pour répondre à une situation que vous connaissez bien. La ville de Paris, par exemple, compte 175 000 résidences secondaires alors que 170 000 demandes de logement sont en attente.
Les communes pourront refuser d’exercer la faculté qui leur sera proposée, et en cas de majoration de la taxe d’habitation, seules les communes, et non l’État, pourront disposer du produit de cette contribution.
C’est une proposition que le Gouvernement soumet au Parlement, qui, comme pour chaque disposition inscrite en loi de finances, sera amené à en débattre. Nous aurons l’occasion de le faire dans le cadre du projet de loi de finances rectificative.
La mesure est destinée, vous l’aurez compris, à fluidifier le marché du logement…
Exclamations sur les bancs du groupe UMP
…pour remettre sur le marché un certain nombre de logements dont l’occupation pourrait être orientée vers la résidence principale. Tels sont le souci et l’objectif du Gouvernement. C’est le Parlement qui décidera de retenir ou non cette faculté pour les communes.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Jean-Claude Buisine, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le ministre des finances et des comptes publics, j’ai bien en tête ce qui s’est passé après la crise de 2008 : les dérives du secteur financier spéculatif ont conduit à une crise mondiale. Depuis que nous sommes aux responsabilités, nous avons pris des mesures pour encadrer le monde de la finance.
En premier lieu, la taxe sur les transactions financières a été mise en place en France dès août 2012 et sera mise en oeuvre au niveau européen dans le cadre d’une coopération renforcée, afin de protéger notre économie en limitant les transactions hasardeuses. Il faut séparer le bon grain de l’ivraie : il y a une économie productive et positive, que nous avons le devoir de protéger, et une économie dangereuse et court-termiste, qui met en danger les États et que nous condamnons.
En deuxième lieu, nous luttons contre la délinquance économique et la fraude fiscale qui coûtent cher au contribuable. Grâce à la loi que nous avons adoptée, nous avons renforcé les moyens de cette lutte et les peines encourues. Le produit de la fraude fiscale nous a permis de financer les baisses d’impôts pour les plus modestes. L’affaire HSBC, dévoilée ces derniers jours par la presse et concernant des opérations de blanchiment d’argent, est éloquente.
Enfin, l’Union bancaire, que le Parlement européen a créée en avril dernier, va mettre fin à la prise d’otage des États par des banques peu scrupuleuses ou en état de faillite.
Récemment, la Banque centrale européenne a réalisé un diagnostic de santé des banques européennes. Les résultats des banques françaises sont très satisfaisants : aujourd’hui, nous sommes armés pour faire face à des chocs économiques et financiers.
Monsieur le ministre, réguler le monde de la finance est un travail de longue haleine. Ce combat, nous le menons en France, nous le menons en Europe, nous le menons au niveau international. Pouvez-vous nous dire…
Merci, monsieur le député.
La parole est à M. le ministre des finances et des comptes publics.
Monsieur le député, la régulation de la finance est impérieusement nécessaire.
Comme vous l’avez dit, il s’agit d’abord de lutter contre les dérives morales de ceux qui pensent que tout est permis, individuellement ou collectivement, pour gagner de l’argent à court terme sur le dos de ceux qui font fructifier l’économie française, de ceux qui offrent ou qui ont un emploi, de ceux qui travaillent à la productivité et à la compétitivité de notre économie.
Ensuite, comme vous l’avez dit, il faut se souvenir de l’origine de la grande crise de 2008-2009.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
C’était cette finance folle qui, au niveau international, menait des attaques spéculatives sans aucun respect ni pour les États, ni pour les individus, ni pour les entreprises.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.
Vous avez rappelé les actions que nous menons. D’abord, nous luttons contre la fraude fiscale. La semaine dernière, avec plus de cinquante autres ministres des finances, j’ai signé un grand accord de lutte contre la fraude fiscale : le secret bancaire c’est aujourd’hui terminé.
Ensuite, nous agissons pour mettre en oeuvre le système dit « d’union bancaire » qui permettra de couper le fil qui reliait les banques en mauvais état au budget de la France, et donc aux contribuables. Désormais, ce n’est plus le contribuable qui viendra, en cas de besoin, au secours des banques : les banques seront obligées de s’assurer elles-mêmes, par le biais du versement d’une contribution.
Enfin, la taxe sur les transactions financières est indispensable. Cela fait tellement longtemps qu’on en parle ! J’ai proposé à dix autres pays de l’Union européenne d’agir ensemble pour mettre en place cette taxe sur les transactions financières.
Ce sera fait dès vendredi prochain. Au 1er janvier 2016, une taxe sur les transactions financières sera établie en Europe : elle nous permettra de lutter contre ces transactions à la fois irrégulières, immorales et inefficaces.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes SRC et Écologiste.
La parole est à M. Jean-Pierre Barbier, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le Premier ministre, Henri Miller disait : « La parole et les actes mènent des vies séparées. » Vous, vous en avez fait un principe de gouvernement !
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.
Des déclarations d’amour aux entreprises un jour, un coup de poignard un autre jour.
Lors de la discussion du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, vous avez laissé adopter un amendement visant à soumettre les dividendes perçus par les dirigeants de sociétés au paiement de charges sociales. Ainsi, d’un seul coup, vous portez à plus de 60 % la taxation des dividendes. Où est la pause fiscale annoncée ?
Faire peser des charges sociales sur des dividendes qui rémunèrent un risque est absurde. L’entrepreneur qui investit doit pouvoir espérer un rendement à la hauteur de sa prise de risque. Comme à votre habitude, vous tuez l’esprit d’entreprise, l’initiative, le mérite et le travail.
Mais cette mesure est à l’image de votre PLFSS : bâclée et insincère. En effet, cet amendement n’a fait l’objet d’aucune discussion en commission. De manière biaisée et fallacieuse, le rapporteur et le secrétaire d’État chargé du budget l’ont présenté comme un amendement de coordination, à la rédaction obscure.
Aujourd’hui, le rapporteur du budget de la Sécurité sociale reconnaît un manque de préparation. C’est le moins qu’on puisse dire ! Alors que notre pays a besoin de confiance, de stabilité fiscale et législative pour relancer la croissance, vous n’hésitez pas à remettre en cause vos engagements par voie d’amendement pour satisfaire l’aile gauche de votre parti. Tout cela pour obtenir peu glorieusement une approbation de votre PLFSS par une majorité toute relative !
Monsieur le Premier ministre, vous engagez-vous à retirer cette mesure nuisible pour nos entreprises, notre croissance et notre pays ?
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Monsieur le député, je veux mettre les choses au clair. En quoi consiste cette mesure ? Pardon de faire un peu de technique, mais s’il y a eu défaut d’explication, nous pouvons rattraper le temps perdu. Tout dirigeant de société, tout propriétaire d’une entreprise à hauteur de plus de 50 % des parts – ce n’est pas le cas général – qui percevrait des dividendes supérieurs à 10 % du capital social – ce n’est pas non plus le cas général – se verrait assujetti à des cotisations sociales pour la part du montant des dividendes perçus dépassant les 10 % du capital social.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
Écoutez, mes chers collègues ! On vous donne l’explication : écoutez-la !
Mesdames, messieurs les députés, l’optimisation fiscale à l’échelle internationale est insupportable. Elle l’est tout autant lorsqu’elle est réalisée dans notre pays par le biais de salaires déguisés.
Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.
Je le répète, monsieur le député : cette mesure vise des cas marginaux.
Exclamations sur les bancs du groupe UMP.
En aucun cas il ne faut considérer que cet amendement, d’une portée extrêmement limitée,…
Mêmes mouvements
…aurait eu le retentissement que vous semblez dénoncer. Néanmoins, je l’ai dit dès le premier jour, le Gouvernement, qui a effectivement laissé adopter cet amendement par votre assemblée en première lecture, est prêt à mettre à profit la navette parlementaire pour travailler sur cette disposition, dans le cadre de la première lecture au Sénat ou de la deuxième lecture à l’Assemblée nationale, en vue d’éviter l’optimisation des cotisations sociales.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Ary Chalus, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Monsieur le Premier ministre, à l’instar du garde des sceaux, je pense qu’il y a urgence à nous interroger sur le sens des condamnations et des peines. Les innovations et les expérimentations originales et efficaces devraient être connues et se répandre. Le dispositif mis en place par la loi du 26 décembre 2011 permet de proposer aux mineurs délinquants âgés de 16 à 18 ans, à titre d’alternative à une peine d’incarcération et sur la base du volontariat, d’accomplir un contrat de service en établissement public d’insertion de la défense – EPIDE.
Ce dispositif, même s’il pourrait être amendé, me semble aussi aller dans le sens de la volonté du Président de la République d’étendre le service civique. Cette mesure ciblée me paraît complémentaire à la nouvelle contrainte pénale qui, comme elle, vise à créer une nouvelle peine en milieu ouvert et non plus en prison.
L’astreinte du jeune condamné à un ensemble d’obligations et d’interdictions ainsi qu’à un encadrement militaire, dont les vertus républicaines ont été démontrées dans le cadre des EPIDE, est un bon moyen de prévenir la récidive tout en favorisant une réelle insertion, citoyenne et professionnelle – apprendre un métier ou passer différents permis de conduire, par exemple.
La France compte dix-huit EPIDE, et aucun en outre-mer. Nous pourrions envisager de faire évoluer les conditions d’accueil au régiment du service militaire adapté – RSMA – pour mettre en place un dispositif accessible, sur la base du volontariat, aux mineurs et aux jeunes adultes délinquants condamnés à des peines d’incarcération.
Rappelons que c’est le succès du RSMA outre-mer qui a inspiré, en 2005, la création des centres défense deuxième chance et de l’établissement public d’insertion de la défense. Le Gouvernement envisage-t-il d’ouvrir un dispositif visant l’encadrement militaire des mineurs délinquants afin qu’en outre-mer aussi, l’on puisse mieux répondre aux besoins des jeunes en voie de marginalisation ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe RRDP.
Monsieur le député, vous le savez, l’EPIDE est chargé d’organiser et de gérer un dispositif d’accompagnement à l’insertion sociale et professionnelle des jeunes sans diplôme, sans titre professionnel ou en voie de marginalisation. Il est placé sous la triple tutelle du ministre chargé de la défense, du ministre chargé de la ville et du ministre chargé de l’emploi, ce qui me vaut le plaisir de vous répondre.
Vous l’avez relevé, l’EPIDE dispose de plusieurs centres pouvant accueillir au total 2 085 jeunes sur quinze régions en territoire métropolitain. Il fonctionne en internat et repose sur une discipline et un règlement intérieur stricts, avec des effectifs réduits, ce qui permet de donner les meilleures chances à la pédagogie.
Dans le contexte budgétaire qui est celui de l’ensemble de l’administration et de ses établissements publics, l’EPIDE doit réaliser de nombreux efforts, en matière de gestion et de réorganisation de ses centres et de son siège afin de rationaliser son offre de services auprès des jeunes et des partenaires publics et privés.
En outre-mer, le service militaire adapté joue un rôle qui pourrait être proche. Aussi devons-nous réfléchir à l’articulation entre l’EPIDE et le service militaire adapté qui est, en outre-mer, un dispositif militaire de formation et d’insertion qui a fait les preuves de son efficacité. En effet, alors que 36 % des jeunes accueillis sont illettrés, le taux d’insertion à l’issue du parcours au SMA est supérieur à 76 %.
Vous le voyez, monsieur le député, les outre-mer ne sont pas oubliés et nous réfléchissons ensemble à cette articulation.
La parole est à M. Marc Le Fur, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le Premier ministre, demain, dans toute la France, le monde paysan manifestera, avec celui de l’agroalimentaire, deux mondes dont l’avenir est associé, deux mondes très inquiets. Inquiets du fait des crises, mais aussi du fait de l’inaction de votre gouvernement. Nous l’avions déjà vu il y a quelques mois, lorsque vous ne vous étiez pas battu pour préserver les restitutions à l’exportation. Nous en voyons les conséquences aujourd’hui – je pense en particulier à Tilly-Sabco en Bretagne, mais le chômage se multiplie aussi ailleurs.
Inaction du Gouvernement encore quand il s’agit du formalisme administratif. On nous parle de choc de simplification mais, de fait, c’est le contraire qui se passe ! Voyez ainsi la déclarations annuelle de flux d’azote, un document que l’on impose à nos agriculteurs : quinze pages, et cent cases à remplir ! Voilà où en est la simplification !
Inaction encore quant aux conséquences de l’embargo russe. Je ne commenterai pas cette affaire mais je constate simplement que les agriculteurs en sont les premières victimes. Ce sont eux qui paient !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.
Exclamations sur les bancs du groupe SRC
mais il reste une mesure que vous pourriez prendre : l’étiquetage des produits agroalimentaires. Le consommateur doit savoir d’où proviennent les produits agricoles qu’il consomme – de France, d’Europe ou d’ailleurs ?
C’est possible pour la viande fraîche, mais aussi pour les plats préparés et pour la restauration collective : 80 % des viandes consommées dans les cantines scolaires par nos enfants sont d’origine étrangère. Nous devons savoir où l’animal est né, où il a été élevé, abattu, transformé. Ce sont des choses simples, que l’on peut faire à moindre coût.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Quand M. Hamon était ministre, il avait engagé ce débat mais il ne se passe plus rien depuis. L’inaction du Gouvernement, il faut qu’elle cesse !
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
La parole est à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
Monsieur le député, la caricature ne permet pas forcément de faire avancer le débat. Permettez-moi de vous rappeler ainsi que c’est sous un gouvernement de votre majorité qu’a été engagée la fin des restitutions à l’exportation, en 2004. Tout le monde savait depuis une dizaine d’années que le dispositif des restitutions parviendrait à échéance en 2013. Et vous n’avez rien fait !
C’est au contraire grâce à nous qu’aujourd’hui, une entreprise peut exporter du poulet sans restitution et gagner enfin de l’argent. C’est cela, la vérité !
S’agissant des déclarations annuelles de flux d’azote, nous avons en effet voté dans le cadre de la loi d’avenir une expérimentation en Bretagne. Je l’ai dit ce matin – mais vous étiez parti –, nous allons revoir la circulaire pour simplifier la procédure.
Quant à l’étiquetage, dès le 1er avril 2015, il sera applicable à toutes les viandes fraîches et pas seulement les viandes bovines.
Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.
Par contre, l’étiquetage des produits transformés relève de la responsabilité de l’Europe. L’engagement a été pris et la négociation est engagée.
Monsieur Le Fur, puisque vous êtes si attaché à l’origine des viandes, permettez-moi de vous rappeler que c’est sous ce gouvernement qu’a été instauré l’étiquetage Viandes de France. Sans attendre l’Europe, nous avons mis en place une traçabilité française. Je proposerai dans dix jours un guide pour que s’appliquent dans les marchés publics les règles tout en favorisant l’achat des produits français et des produits locaux.
Ayez au mois l’honnêteté de reconnaître, monsieur Le Fur, que pour un gouvernement qui n’agit pas, les choses avancent.
Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et GDR.
La parole est à M. Jean Grellier, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Monsieur le président, chers collègues, ma question s’adresse à Mme Carole Delga, secrétaire d’État chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire.
Madame la secrétaire d’État, nous avons créé de nouveaux droits pour les Français, dont deux sont récemment entrés en vigueur : un nouveau droit pour les consommateurs et un nouveau droit pour les salariés.
Le premier concerne l’action de groupe, intégrée au texte de loi portant sur la consommation et longtemps attendue par les consommateurs – et surtout leurs associations représentatives. Nous savons que plusieurs actions de groupe ont déjà été engagées depuis le vote de la loi. Pouvez-vous, madame la secrétaire d’État, nous dresser un premier bilan de cette mesure ?
Le second droit a trait à l’information des salariés lors d’une cession ou d’une transmission d’entreprise ; il a été intégré dans la loi portant sur l’économie sociale et solidaire. C’est un droit nouveau qui doit s’inscrire dans le cadre d’un dialogue social de qualité au sein des entreprises concernées.
Pour mettre concrètement en oeuvre cette disposition de la loi sur l’économie sociale et solidaire, vous venez d’en publier les décrets d’application. Ceux-ci devraient permettre la mise en place de procédures simples et pragmatiques respectant l’équilibre entre toutes les parties de l’entreprise, dans une période importante pour en assurer sa pérennité. Ces décrets doivent aussi inciter tout ou partie des salariés de l’entreprise à s’engager dans l’entrepreneuriat, quel que soit le statut choisi, tout en rappelant que la décision finale revient au chef d’entreprise qui a choisi de céder ou de transmettre.
Pouvez-vous, madame la secrétaire d’État, nous préciser les grandes lignes que vous avez inscrites dans ces décrets d’application afin de répondre aux questions qui pourraient encore se poser, voire aux craintes qui subsisteraient, alors que cette mesure doit permettre d’assurer des cessions et des transmissions réussies de nos entreprises sur tous nos territoires ?
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire.
Vous m’interrogez tout d’abord, monsieur le député, sur une disposition de la loi sur la consommation défendue par Benoît Hamon qui concerne l’action de groupe.
Murmures sur les bancs du groupe UMP.
Depuis quelques semaines, cette mesure s’est en effet traduite par quatre initiatives qui démontrent combien elle était attendue par les consommateurs, car elle leur donne un pouvoir supplémentaire. L’une des entreprises concernées par ces actions de groupe a d’ores et déjà cessé les pratiques contestables qui lui étaient reprochées, résolvant ainsi un problème dans l’intérêt des consommateurs.
De même, avec la loi relative à l’économie sociale et solidaire défendue par Benoît Hamon
Exclamations sur les bancs du groupe UMP
et Valérie Fourneyron, nous avons institué le droit d’information préalable des salariés. Ce dispositif est essentiel : 26 000 emplois sont en effet supprimés chaque année faute de repreneurs dans des entreprises pourtant viables.
Nous devons adopter une vision unie de l’entreprise, car les chefs d’entreprise et les salariés sont complémentaires. Informer les salariés, c’est donner une chance supplémentaire de vivre aux entreprises. En 2013, les services du Trésor ont mené une étude qui démontre que la durée de vie des entreprises reprises par les salariés est supérieure.
Ce décret est simple et pragmatique : il simplifie naturellement les modalités d’information tout en offrant de réelles possibilités aux salariés, tandis qu’un guide est conçu à l’intention des chefs d’entreprise.
Cela étant, le droit d’information est complémentaire du droit de formation prévu dans la loi sur l’économie sociale et solidaire, ainsi que de la SCOP d’amorçage et des financements de la Banque publique d’investissement.
Oui, le Gouvernement est mobilisé pour donner davantage de droits aux consommateurs ! Oui, le Gouvernement est mobilisé pour faciliter la transmission et la reprise de TPE et de PME ! Nous y travaillerons au cours des prochains mois, et une mission parlementaire permettra d’évaluer l’ensemble du dispositif et des nouvelles mesures !
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Bruno Nestor Azerot, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le ministre de l’agriculture, ma question, à laquelle j’associe mon collègue Ary Chalus, a trait au respect de la parole du chef de l’État.
Nous souhaitons, monsieur le ministre, vous faire part de notre inquiétude concernant les crédits consacrés à l’agriculture d’outre-mer dans le projet de loi de finances pour 2015 qui prévoit non seulement une nouvelle diminution des crédits consacrés à la diversification agricole, mais également une baisse substantielle de l’enveloppe nationale de la filière canne-sucre, dite « enveloppe sucre ».
Il y a là un motif d’incompréhension. En effet, lors de son récent voyage à La Réunion, le Président de la République lui-même avait donné des assurances à la filière et aux élus sur la sanctuarisation des crédits nationaux, allant même jusqu’à annoncer une enveloppe nationale supplémentaire de 38 millions d’euros pour compenser les handicaps structurels des sucreries des départements d’outre-mer par rapport aux sucreries betteravières de métropole, afin de tenir compte de la fin des quotas sucriers à partir d’octobre 2017. Or, le PLF 2015 prévoit au contraire une baisse de 2,4 millions d’euros des crédits de l’enveloppe sucre.
Il en va de même de l’enveloppe « diversification » qui, dotée de 40 millions d’euros dans le budget 2010, est désormais ramenée à 31,4 millions d’euros. C’était pourtant l’une des priorités du très bon projet de loi d’avenir de l’agriculture que nous avons soutenu et voté, monsieur le ministre.
Comprenez dès lors que je m’interroge : en fin de compte, c’est non seulement la filière canne-sucre qui est mise à mal, mais aussi les filières de diversification qui tentent de se structurer pour faire exister une production locale sur les marchés locaux. La baisse de 25 % en trois ans des crédits alloués à la diversification agricole outre-mer ne peut qu’avoir pour conséquence une diminution du même ordre de la production locale. Or, c’est tout l’inverse qui était préconisé dans la loi d’avenir pour l’agriculture pour l’outre-mer !
Je souhaite donc que l’État clarifie ses intentions, monsieur le ministre, et qu’il procède à une amodiation dans le cours de la discussion budgétaire. Qu’en sera-t-il ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe GDR.
La parole est à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
Vous avez, monsieur le député, évoqué le budget agricole, dont nous avons discuté ce matin, ainsi que la question de la diversification agricole dans les outre-mers et celle de la filière sucrière. Vous avez rappelé que le Président de la République s’est rendu à La Réunion et mentionné la fin des quotas programmée pour 2007, ainsi que les engagements pris pour compenser la fin de l’Organisation commune du marché du sucre.
Je vous le dis : ces points-là ne sont pas remis en cause. Il faudra évidemment discuter avec les opérateurs afin que les aides servent à positionner la production sucrière des outre-mers français, car les aides ne sauraient être accordées sans entraîner de positionnement stratégique.
J’en viens à votre question sur les crédits budgétaires. Le PLF 2015 prévoit 6 millions d’euros en tout, dont 3 millions environ pour la diversification et 3 millions pour le sucre. Sur notre proposition, l’ensemble de ces crédits ont été fléchés dans le cadre d’un plan d’investissements d’avenir, qui prend la place des ex-aides de FranceAgriMer.
Il n’y a donc aucune diminution du budget, et il n’y en aura pas davantage à l’avenir. Si c’est la modalité du plan d’investissement d’avenir qui suscite le doute, alors nous ferons avec M. le ministre du budget des propositions en séance publique pour y remédier, car il est hors de question de remettre en cause le soutien nécessaire à la filière sucre et à la diversification de l’agriculture dans les outre-mers. C’est l’enjeu de la loi d’avenir et, tout, simplement, celui du développement agricole dans les outre-mers !
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.
La parole est à M. Yves Fromion, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche, depuis le 28 octobre, une réglementation européenne, publiée il y a deux ans par l’Agence européenne de la sécurité aérienne, interdit aux hélicoptères monomoteurs de survoler les zones habitées.
La conséquence est implacable : 80 % du trafic de l’héliport de Paris-Issy-les-Moulineaux devient hors la loi et, de manière plus globale, ce sont 80 % d’un chiffre d’affaires annuel de 280 millions d’euros qui sont mis en péril. Le parc d’hélicoptères étant essentiellement composé de monomoteurs, les vols privés commerciaux sont en effet condamnés par cette législation.
La direction générale de l’aviation civile, la DGAC, tout en reconnaissant un problème complexe de conformité réglementaire, refuse d’assouplir la mise en oeuvre de cette réglementation…
…arguant du fait que les hélicoptéristes ont eu deux années pour effectuer la mise en conformité.
Cette réponse est une provocation car le renouvellement du parc de monomoteurs en bimoteurs est une hypothèse extrêmement coûteuse qui ne peut se faire du jour au lendemain, surtout dans un contexte économique tendu.
Le vrai problème tient surtout au fait que votre gouvernement, depuis deux ans, ne s’est pas préoccupé de l’adaptation de ce texte à la situation française. Or les enjeux, dans notre pays, ne se limitent pas seulement aux 1 800 emplois du secteur du transport par hélicoptère privé. Il y a, derrière, une filière majeure, celle de la construction d’hélicoptères, où notre pays occupe la première place depuis de longues années grâce à notre fleuron industriel Eurocopter et au succès commercial de monomoteurs comme l’Écureuil, motorisé par Turbomeca, qui est sans doute le modèle le plus répandu dans le monde.
Que comptez-vous faire, monsieur le secrétaire d’État, pour remédier à cette situation et empêcher la casse, non seulement du secteur du vol commercial par hélicoptère, mais aussi de toute la filière française de production des hélicoptères civils monomoteurs ?
La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Monsieur le député, effectivement le règlement appelé AIR-OPS, publié en octobre 2012, est entré en vigueur le 28 octobre 2014. Ce règlement, que vous connaissez et qui a été longuement négocié au cours des années 2010 et 2011, impose l’utilisation d’hélicoptères bimoteurs pour l’atterrissage et le décollage en environnement urbain dense, que l’on qualifie, selon l’expression européenne, de « zone hostile habitée », pour des raisons de sécurité que chacun comprend. Ces dispositions étaient déjà inscrites en filigrane, mais avec une réglementation plus souple, dans le droit national.
Aujourd’hui, les procédures administratives attachées à ce règlement nous obligent à constater un écart vis-à-vis de la réglementation – je ne dis pas un non-respect – lorsque des hélicoptères monomoteurs de transport commercial atterrissent et décollent dans un tel environnement, ce qui est le cas de l’héliport de Paris-Issy-les-Moulineaux.
Selon les dernières statistiques établies, les vols exploités dans le domaine du transport public en monomoteur représentent 35 % des mouvements de l’héliport, qui lui-même enregistre environ 10 000 mouvements annuels.
Jusqu’à présent, il est vrai, l’urbanisation autour de l’héliport avait permis de considérer l’héliport et les trajectoires de décollage et d’atterrissage comme se trouvant dans un environnement « non hostile », selon la définition européenne.
Aujourd’hui, chacun doit comprendre que l’urbanisation a évolué et que nous sommes, depuis la mise en place de ce règlement, régulièrement rappelés à l’ordre par l’Agence européenne de sécurité aérienne qui nous demande tout simplement de respecter un règlement dont le but est de protéger la sécurité des tiers.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.
La parole est à Mme Conchita Lacuey, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.
Madame la secrétaire d’État chargée des droits des femmes, le 4 août 2014, la loi sur l’égalité réelle entre les femmes et les hommes a été promulguée. C’est une grande avancée et nous pouvons nous en réjouir.
Le 28 octobre dernier, le nouveau classement des pays en matière d’égalité femmes-hommes a consacré la forte avancée de notre pays sur ces questions – la France est passée du 45ème au 16ème rang en un an –,…
… en évaluant les pays du monde selon quatre critères que sont l’éducation, la santé, la place des femmes dans la vie politique et leur participation dans l’économie. Ces avancées résultent d’une politique volontaire et efficace, ainsi que des actions menées depuis 2012 par notre majorité et les ministres chargés de cette question.
Avec la mise en place du premier gouvernement paritaire, c’est notre majorité qui a fait de l’égalité une priorité politique, associant l’ensemble des ministères, des collectivités locales, des entreprises et des associations.
Les mesures comme le renforcement des sanctions dans les entreprises qui ne respectent pas l’égalité salariale, l’objectif de 40 % de femmes dans les conseils d’administration d’ici à 2017, l’accompagnement des PME pour plus d’égalité, voient apparaître leurs premiers effets bénéfiques.
Nous savons bien que l’avancée d’une société se mesure à la place qui est faite aux femmes et à leur émancipation.
Pour autant, de nombreux obstacles à l’égalité réelle persistent dans notre société et prennent parfois des formes surprenantes, comme la fameuse taxe rose. Madame la secrétaire d’État, que comptez-vous faire pour lutter…
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.
Merci !
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des droits des femmes.
Vous avez tout à fait raison, madame la députée, de souligner la progression de la France de 29 places, en un an, en matière d’égalité femmes-hommes. La France est à la première place dans les secteurs de l’éducation et de la santé et à la quatrième pour la représentation des femmes en politique.
À l’heure où il est de bon ton, pour certains, de dénigrer la France, nous pouvons toutes et tous nous réjouir de ce résultat, qui est le fruit de la volonté politique du Président de la République, du Premier ministre et de l’ensemble du Gouvernement, mais aussi de l’engagement sans faille de Najat Vallaud-Belkacem, que je tiens à saluer, et de celui des femmes et des hommes présents dans cet hémicycle et d’autres encore, issus de la société civile ou élus locaux.
Néanmoins, nous avons beaucoup d’efforts à accomplir pour faire progresser l’égalité dans notre pays, notamment en matière d’égalité salariale entre les femmes et les hommes. La loi du 4 août et sa mise en oeuvre nous y aideront.
Il n’est pas acceptable qu’aujourd’hui encore on constate un écart salarial de 24,5 % en moyenne, mais il n’est pas acceptable non plus, madame la députée, que dans leur consommation quotidienne, les femmes de notre pays subissent une autre injustice, celle de la taxe dite « rose » dénoncée par le collectif Georgette Sand, que j’ai reçu le 21 octobre dernier au ministère.
Écoutez bien, chers collègues, car les électrices vous écoutent, elles aussi !
Ce phénomène a été également décelé aux États-Unis, où il est appelé woman tax, et il est évalué pour les femmes à près de 1 400 dollars par an de surcoût.
C’est pourquoi mes collègues Carole Delga, Emmanuel Macron, Marisol Touraine et moi-même avons décidé de saisir la DGCCRF afin qu’elle effectue des relevés de prix sur les produits et services afin de mesurer les écarts existants. Car à produit égal, à service égal, doit correspondre un prix égal.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe écologiste.
La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures quinze.
La Conférence des présidents, réunie ce matin, a arrêté les propositions d’ordre du jour suivantes pour la semaine de l’Assemblée du 24 novembre 2014 :
Proposition de résolution tendant à modifier le règlement de l’Assemblée nationale ;
Sous réserve de son dépôt, proposition de résolution visant à réaffirmer le droit fondamental à l’interruption volontaire de grossesse.
Il n’y a pas d’opposition ?… Il en est ainsi décidé.
Nous abordons l’examen des crédits relatifs à l’outre-mer (no 2260, annexe 33 ; no 2262, tome XII ; no 2267, tomes X et XI).
La parole est à Mme la ministre des outre-mer.
Monsieur le président, monsieur le rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, messieurs les rapporteurs pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, monsieur le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, mesdames et messieurs les députés, j’ai l’honneur de vous présenter aujourd’hui un budget en hausse de 2,6 % pour 2015 et de 7,6 % sur les trois prochaines années. L’évolution des crédits de la mission témoigne donc de la priorité que constituent les outre-mer, au coeur de la République et des préoccupations du Gouvernement.
Dans les documents qui ont été soumis à la représentation nationale, cette hausse est optiquement ramenée à 0,3 % en 2015 et 4,7 % dans le budget triennal. C’est l’effet d’une mesure de périmètre qui conduit simplement à modifier le circuit de certaines compensations d’exonérations de charges.
Il n’en reste pas moins qu’il s’agit là d’un budget de développement et de croissance ; un budget pour l’emploi et la jeunesse ; un budget au sein duquel il a fallu faire des choix responsables, que j’assume devant vous aujourd’hui. C’est aussi et surtout un budget qui nous donne les moyens de poursuivre et d’approfondir l’action mise en oeuvre par le gouvernement auquel appartenait Victorin Lurel depuis 2012, au profit des outre-mer, des Ultramarins, et au service de leur avenir.
J’insiste sur ce dernier point : dans l’exercice qui est le nôtre, il ne s’agit pas de s’en tirer mieux ou moins mal que mes homologues ; il s’agit de disposer des moyens de notre politique, au service d’un objectif et d’une vision stratégique de l’évolution des outre-mer, lesquels sont et demeureront, comme l’a dit le Président de la République, une chance pour la France.
C’est à la consolidation de cette vision stratégique que nous nous sommes attelés ; les arbitrages budgétaires du Gouvernement pour les outre-mer la matérialisent, tout comme la feuille de route pour la croissance et l’emploi que j’ai présentée à la rentrée et qui constitue aujourd’hui le cadre concret et ambitieux dans lequel va s’inscrire notre action dans les mois à venir.
Notre principale priorité commune, c’est l’emploi.
Nous avons pu percevoir cette année des signes encourageants sur le front de l’emploi des jeunes dans les territoires d’outre-mer. Sans doute faut-il y voir le fruit de la politique volontariste que nous avons menée pour mobiliser les contrats aidés, notamment les emplois d’avenir. J’espère que les expérimentations en cours – notamment à la Réunion –, prévoyant la prise en charge de ces contrats par l’État à 90 %, permettront de faire encore mieux.
Mais l’emploi, c’est avant tout le fait des entreprises. Je me suis adressée à elles en mettant en place une déclinaison améliorée du pacte de responsabilité et de solidarité outre-mer que nous avons pu obtenir. Avec plus de 1,2 milliard d’euros de compensation d’exonérations de charges en 2015 et une dynamique croissante sur le budget triennal, les crédits en faveur de l’abaissement du coût du travail augmentent de près de 200 millions d’euros sur le quinquennat, soit près de 20 %. J’y vois tout sauf un coup de rabot.
Parallèlement, dans les DOM, la majoration du CICE à 9 % apportera près de 290 millions d’euros supplémentaires d’allégements, en plus des 590 millions d’euros du taux de droit commun. J’ai entendu les voix qui s’exprimaient en faveur d’un taux renforcé pour les secteurs exposés à la concurrence. Je m’en suis fait le relais, car j’estime cette demande légitime et fondée.
Le Président de la République et le Premier ministre m’ont très clairement confirmé leur volonté d’y répondre favorablement, sans pour autant passer par le CICE, car il faudrait alors y ajouter un nouvel étage. Cela poserait des difficultés et n’irait pas dans le sens de la lisibilité de la mesure. Ces secteurs étant d’ores et déjà ciblés dans le cadre de la loi pour le développement économique des outre-mer, la LODEOM, le Gouvernement a pris la décision de mobiliser ce vecteur en proposant un allégement supplémentaire de charges d’un effet équivalent, qui entrera en vigueur dès 2016. Je vous apporterai les précisions utiles, si vous le souhaitez, en réponse à vos questions sur le sujet.
Mais l’emploi dépend aussi d’autres facteurs. La feuille de route que je vous ai présentée à la rentrée, arbitrée par le Premier ministre, prévoit de nombreuses mesures visant à encourager localement la création de valeur et d’emploi. Ainsi, le cadre fiscal incitatif pour l’investissement sera stabilisé au cours des prochaines années, comme s’y était engagé le Président de la République. Le crédit d’impôt recherche sera majoré afin d’encourager la localisation d’activités à forte valeur ajoutée dans les territoires d’outre-mer. Nous allons également jeter les bases d’une stratégie commune pour relancer le tourisme outre-mer et élaborer un cadre pour mieux accompagner les entreprises à l’export. Il est aussi prévu d’engager un véritable plan de rattrapage de l’économie sociale et solidaire outre-mer pour les quatre prochaines années. Enfin, un dispositif d’aide au premier recrutement sera créé dans les très petites entreprises.
Ces mesures répondent à une exigence : redonner aux entreprises des marges et des perspectives pour investir, se développer, croître et créer de l’emploi. C’est un enjeu pour l’avenir de tous nos territoires. Le Gouvernement a fait sa part du chemin ; à présent, j’y insiste, c’est aux entreprises de faire la leur.
Pour cela nous continuons de nous situer dans le champ d’une concertation que je demanderai aux préfets d’animer dans les territoires au début de l’année prochaine. Je souhaite que nous puissions trouver ensemble les réponses qui s’imposent, sur le fondement d’engagements respectifs et adaptés à la réalité de chaque territoire.
Notre seconde priorité est de redonner du sens au terme « avenir » en répondant aux aspirations de la jeunesse des outre-mer. Avec des crédits en augmentation de 3 % – ils s’élèveront à 154 millions d’euros en 2017 –, le service militaire adapté disposera des outils pour atteindre l’objectif qui lui a été fixé, à savoir 6 000 stagiaires sur l’ensemble du quinquennat. Nous pourrons ainsi offrir à un plus grand nombre encore les solutions d’insertion sociale et professionnelle que ce dispositif essentiel offre aujourd’hui aux jeunes ultramarins de tous les territoires. Je sais que tous les élus sont attachés au SMA et saluent les résultats obtenus.
Parallèlement, l’action de l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité, dite LADOM, en faveur de la formation des jeunes et de leur mobilité sera confortée au cours des trois prochaines années. J’aborderai ce sujet en réponse à vos questions, mais j’indique d’ores et déjà que nous avons sauvé ce dispositif en le réformant et en l’encadrant plus strictement.
S’agissant de la politique du logement, la ligne budgétaire unique a été stabilisée – elle affiche même une progression –, ce qui nous permet de sauvegarder la construction de logements sociaux.
Je tiens à saluer la mobilisation des parlementaires pour sauvegarder les outils fiscaux de la politique nationale de relance du logement outre-mer. Nous avons obtenu des résultats satisfaisants. Ainsi, il a été possible d’améliorer la situation du logement intermédiaire – le Gouvernement vient de rendre un arbitrage extrêmement positif sur cette question.
L’importance de la commande publique outre-mer explique que nous ayons maintenu les engagements du Fonds exceptionnel d’investissement, le FEI. Ils sont certes légèrement inférieurs à ceux de l’année précédente, mais les crédits de paiement de la politique contractuelle sont en hausse.
Dans la totalité des collectivités d’outre-mer, nous avons obtenu que les budgets soient en hausse. Cela concerne non seulement le budget du ministère des outre-mer, mais également celui des autres ministères. Au total, l’aide pour l’outre-mer, tant pour les crédits en interne que pour les crédits européens, se situe à un niveau incomparable. Dans le cadre des contrats de projets État-région, l’aide accordée est de 480 euros par habitant en moyenne en outre-mer, contre 162 euros par habitant en métropole. Nous avons également obtenu un tiers des crédits européens versés à la France.
Ce budget est donc tout à fait remarquable. Il s’inscrit dans une politique du Gouvernement qui maintient sa priorité aux outre-mer. Je pense que les Ultramarins seront sensibles à cette déclaration de confiance du Gouvernement qui souligne l’importance des outre-mer pour la France en général et pour l’Europe tout entière.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs des groupes GDR, écologiste, RRDP et UDI.
Je vous rappelle, mes chers collègues, que le temps attribué au Gouvernement et à chacun des orateurs a été arrêté en Conférence des présidents ; il est de cinq minutes.
Nous en venons aux orateurs des groupes.
La parole est à Mme Ericka Bareigts, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen, pour cinq minutes.
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur spécial, messieurs les rapporteurs pour avis de la commission des lois, monsieur le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, chers collègues, les territoires d’outre-mer font face depuis longtemps à d’importantes difficultés ; elles sont plus graves depuis le début de la crise. Nos territoires sont victimes du chômage de masse et de la pauvreté, dans des proportions plus grandes que dans l’Hexagone. En 2013, la Réunion, avec un taux de chômage de 28,9 %, était ainsi la quinzième région d’Europe la plus touchée par le chômage, derrière les régions les plus pauvres de Grèce, d’Espagne et de Macédoine.
Ces difficultés sont également sociales et sanitaires. Ce sont les territoires de France où les inégalités sont les plus prégnantes : selon l’INSEE, les inégalités dans les DOM étaient plus proches en 2008 de la situation de la France de 1900 que de celle du XXIe siècle. Sur le plan sanitaire, chaque territoire a ses défis propres, mais tous sont plus sérieux les uns que les autres.
C’est très certainement pour ces raisons que le Président de la République a déclaré le 21 août dernier, lors de son passage à la Réunion, que les outre-mer sont une priorité pour la France.
Nous allons voter cet après-midi le budget du ministère des outre-mer. Pour la troisième année consécutive, il sera en progression. C’est une nécessité dans le contexte que je viens de décrire. La modestie de cette progression ne doit pas masquer l’effort fait par le Gouvernement pour les territoires ultramarins depuis plusieurs années.
Dans un contexte budgétaire contraint, ce budget se recentre sur l’essentiel : l’aide aux plus démunis et les conditions de la croissance économique. Selon l’Agence française de développement, les outre-mer ont trente ans de retard sur la France métropolitaine en termes de développement humain.
Nous avons donc besoin d’une politique budgétaire forte pour faire face à l’urgence sociale, au rattrapage des retards éducatifs, à l’effort sanitaire et à la nécessité de la croissance économique pour l’emploi. Les collectivités d’outre-mer ont besoin du soutien national pour les projets de développement qu’elles ont construits.
Ce soutien se matérialisera notamment par la nouvelle génération de contrats de plan État-région, en hausse de 25 %, qui permettront de financer les priorités définies par les conseils régionaux.
Pour les conditions de vie outre-mer, les crédits du logement sont recentrés sur la construction de logements sociaux, ce qui devrait permettre à tous, et donc aux plus modestes, de se loger. C’est répondre à une question de dignité tout en relançant le secteur du BTP qui s’enfonce dans une crise grave dans les outre-mer.
Le maintien à un niveau inchangé des crédits de la LBU nous inquiète, alors que les besoins se sont accrus, notamment avec la réforme du crédit d’impôt logement outre-mer l’an dernier. D’autres dispositifs de soutien au secteur sont cependant prévus. Par exemple, et bien que ce soit hors du domaine strict de cette mission, le débat parlementaire en commission a permis d’obtenir des assurances de la ministre sur la prise en compte des spécificités ultramarines dans plusieurs dispositifs nationaux relatifs au logement en cours d’examen. Ainsi, un travail est en cours sur l’adaptation des critères du crédit d’impôt transition énergétique aux outre-mer, ainsi que sur le plafonnement trop bas du dispositif dit Pinel dans les DOM. Vous nous avez totalement rassurés sur cette question, madame la ministre, et nous vous en remercions.
Ce budget affirme également une volonté de donner à nos jeunes une formation qualifiante pour relancer l’emploi. Des crédits supplémentaires sont ainsi accordés au service militaire adapté pour répondre à son objectif « SMA 6 000 ».
C’est également la raison de la réforme de la continuité territoriale, système dont la croissance n’était pas soutenable et qui aboutissait, à la Réunion, à sanctionner les familles défavorisées et, dans l’ensemble des outre-mer, à engorger son gestionnaire, LADOM, au détriment de ses actions de formation.
Tout en permettant de maîtriser la dépense, cette réforme dégage les moyens nécessaires pour financer des billets supplémentaires pour les étudiants passant plusieurs épreuves en métropole dans la même année. Je me félicite particulièrement que nous ayons pu trouver une solution pour les deuxièmes accompagnants d’évacués sanitaires.
Le développement exige aussi une croissance économique car celle-ci apporte emplois, revenus et perspectives d’avenir.
Le Gouvernement a ainsi annoncé un crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi renforcé à 9 % dans les outre-mer.
Un plan en faveur de l’économie sociale et solidaire a également été adopté par le ministère. Je salue cette nouvelle approche tant cette économie, trop souvent sous-estimée, est un réservoir de croissance et d’emplois. L’aide à la première embauche – une des actions de ce plan – est une mesure très importante, dont les jeunes ultramarins attendent le résultat.
Enfin, je tiens également à saluer ici la décision de renforcer le crédit d’impôt recherche dans les outre-mer.
J’avais regretté lors du précédent budget que les dispositifs de l’État en outre-mer n’orientaient pas assez l’économie vers des secteurs riches en emplois qualifiés pour nos jeunes, en croissance et en valeur ajoutée. Je ne peux donc que me réjouir de l’adoption pour les outre-mer d’une version renforcée du dispositif phare de la recherche en France. J’espère que notre discussion permettra cependant de proposer la même évolution pour son jumeau, le crédit d’impôt innovation. Celui-ci me paraît plus adapté aux petites entreprises qui constituent l’essentiel de notre tissu économique.
Pour toutes ces raisons, madame la ministre, le groupe socialiste votera ce très bon budget pour l’outre-mer.
Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe GDR.
La parole est à M. Daniel Gibbes, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, messieurs les rapporteurs pour avis, mes chers collègues, dans un contexte particulièrement difficile et contraint de retour à l’équilibre des finances publiques du pays, notre assemblée est appelée à se prononcer cet après-midi sur les crédits relatifs aux outre-mer.
Dotée pour 2015 de 2,019 milliards d’euros en crédits de paiement, la mission « Outre-mer » apparaît sensiblement épargnée par les coups de rabot auxquels sont soumises les autres missions budgétaires.
Les autorisations d’engagement sont, quant à elles, en légère baisse, de 2,3 %. Cependant, si les perspectives de progression de 4,7 % sur le budget triennal 2014-2017 sont respectées, cela ne me semble pas de nature à porter préjudice à nos territoires ultramarins.
Comme j’ai eu l’occasion de le dire lors de l’examen des crédits de la mission « Outre-mer » en commission élargie la semaine passée, c’est avec un certain soulagement que le groupe UMP accueille le budget consacré en 2015 aux outre-mer, en ce sens qu’il démontre que le Gouvernement demeure conscient des urgences auxquelles restent confrontés nos douze territoires ultramarins, des territoires – est-il besoin de le rappeler, madame la ministre ? –, dont l’économie est d’une grande fragilité, enlisés dans les retards structurels et victimes d’un taux de chômage, particulièrement chez les jeunes, deux fois plus élevé que dans l’Hexagone, pour un PIB par habitant deux fois moindre ; des territoires qui méritent donc un budget en adéquation avec leurs réalités et des mesures singulières prenant en considération leurs particularismes et leurs handicaps.
Votre budget, madame la ministre, présente plusieurs motifs de réelle satisfaction. Je pense notamment aux 3 millions d’euros d’augmentation des crédits du service militaire adapté et à la promesse affichée du Gouvernement d’aboutir à 6 000 volontaires à la fin du budget triennal.
Je pense aussi a la majoration de 50 % du crédit d’impôt recherche…
…à l’heure où nos économies ultramarines ont plus que besoin d’innovation et sont à la recherche de nouvelles filières économiques à développer.
Je pense encore au maintien du dispositif de la TVA dite non perçue récupérable, applicable dans les DOM.
Je pense également au maintien du dispositif d’exonération des charges pour nos entreprises outre-mer, renforcé par votre engagement sur un crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi renforcé, dont je ne peux que me féliciter, ayant été à l’origine avec M. Fruteau, de cette proposition de CICE majoré au nom de la délégation de l’Assemblée nationale aux outre-mer.
Mais votre budget, madame la ministre, est également la source de quelques déceptions et d’inquiétudes.
Je pense tout particulièrement à la baisse des crédits de votre ministère à l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité, qui chutent de 17 % à périmètre constant, ou encore à la diminution drastique du Fonds exceptionnel d’investissement.
Permettez-moi également d’en revenir à l’article 57 du projet de loi de finances, rattaché à la mission « Outre-mer », qui supprime l’aide à la rénovation des hôtels situés dans les départements d’outre-mer, ainsi qu’à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon.
Cette aide de 3 millions d’euros, instaurée par la LODEOM de 2009 et qui devait produire ses effets jusqu’au 31 décembre 2017, peu utilisée par nos professionnels – sans doute en raison de sa complexité –, se voit ainsi purement et simplement supprimée, sans aucun dispositif de sortie.
J’ai entendu les arguments du ministère sur l’inefficacité de cette aide et les vôtres, madame la ministre, sur la compensation par un CICE renforcé, voire super renforcé, pour les DOM. Cependant, vous n’ignorez pas que les hôteliers de Saint-Martin sont les principaux bénéficiaires de cette aide – ils représentaient un tiers de l’enveloppe l’an passé ! – et que cette collectivité d’outre-mer, dotée de l’autonomie, ne bénéficie pas du CICE.
Je m’interroge donc une nouvelle fois sur la compensation de ce dispositif pour les collectivités d’outre-mer : mercredi, en commission élargie, vous avez parlé, madame la ministre, à propos de Saint-Martin, de « rançon de la responsabilisation ».
Je souhaite que cette expression ne soit pas annonciatrice d’une renonciation de votre gouvernement, alors même qu’une politique de soutien digne de ce nom doit être apportée en urgence aux entreprises de Saint-Martin, en particulier dans le secteur touristique, pour les aider à résister à la concurrence de la partie néerlandaise de l’île et de ses voisins immédiats.
C’est en raison de ces zones d’ombres et de ces imprécisions, notamment s’agissant de la juste prise en considération de la situation économique des collectivités d’outre-mer, que, malgré un budget préservé, le groupe UMP s’abstiendra sur le vote de ces crédits.
Je tiens toutefois à préciser que c’est, non pas une abstention constructive, comme j’ai l’habitude de le dire, mais une abstention positive.
Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.
La parole est à M. Philippe Gomes, pour le groupe Union des démocrates et indépendants.
C’est un honneur pour moi d’intervenir sous la présidence du président de l’Assemblée nationale. Il est de tradition que le président de l’Assemble nationale préside les travaux relatifs au budget des outre-mer. C’est un symbole fort, et vous savez que, dans nos territoires, la symbolique est importante. Aussi, je vous remercie une nouvelle fois, monsieur le président, de sacrifier à cette tradition qui nous fait chaud au coeur. Que serait la République sans son outre-mer ? Je n’ose y penser.
Sourires.
S’agissant du budget présenté, nous avons tous salué l’effort qui est fait.
Il est vrai, madame la ministre, que les rigueurs budgétaires sont actuellement de nature polaire. Réussir, dans ce contexte, à ce que le budget des outre-mer soit préservé constitue un exploit ; soyez-en remerciée, ainsi que le Premier ministre.
Certaines politiques centrales menées par l’État en matière d’emploi et de logement se trouvent même renforcées. L’effort particulier de majoration du CICE a notamment été salué : son taux doit en effet passer de 6 % à 9 %. Cette majoration de 50 %, très significative, permettra, je n’en doute pas, de faciliter le développement de l’activité et la création d’emplois dans nos territoires.
On se demande souvent comment l’Espagne résiste, alors qu’un jeune sur deux y est au chômage. Eh bien, dans nos territoires d’outre-mer, depuis plusieurs décennies, c’est exactement ce qui se passe.
Pourtant, nos sociétés sont suffisamment fortes et solidaires pour dominer cette situation. Il est donc positif que le Gouvernement, dans le contexte actuel, fasse l’effort nécessaire pour nous accompagner et nous aider.
Je salue également l’initiative qui a été prise d’accroître l’effort pour les entreprises exposées à la concurrence – le détail nous en sera fourni ultérieurement.
Je regrette toutefois, madame la ministre, que les collectivités françaises du Pacifique ne bénéficient pas d’une attention particulière de l’État en matière de développement économique et de création d’emplois car la Polynésie française comme la Nouvelle-Calédonie connaissent des situations de grande fragilité.
En Nouvelle-Calédonie, notamment, s’ajoute à la fragilité économique issue de la fin des deux grands chantiers de réalisation des usines métallurgiques du Nord et du Sud, une fragilité politique, avec le référendum sur l’avenir du pays qui nous attend en 2018.
C’est pourquoi, madame la ministre, je demanderai au Gouvernement de bien vouloir réfléchir à la possibilité de supprimer ou de repousser la date limite de 2017 pour l’application du dispositif de défiscalisation dans nos pays. En effet, cette limite est mortifère dans la mesure où Bercy considère qu’en 2017, les projets devront être livrés, et non pas seulement lancés. En conséquence, les entreprises ont d’ores et déjà mis un terme à leurs projets d’investissement, en attendant qu’une nouvelle perspective soit tracée. Il faut donc, madame la ministre, qu’un nouvel horizon soit offert aux collectivités françaises du Pacifique, même si elles devancent un peu les autres en matière de développement économique et de création d’emplois.
Par ailleurs, l’État continue de faire un effort pour le logement, comme l’attestent la stabilisation des crédits de paiement de la ligne budgétaire unique et la préservation des autorisations d’engagement pour la construction neuve et la réhabilitation.
Je regrette toutefois que, s’agissant de la construction de logements intermédiaires, les appels nombreux et répétés de parlementaires de tous les bancs n’aient jusqu’à présent pas été pris en considération.
Or les classes moyennes de nos territoires ultramarins subissent une double peine : elles ne sont ni assez riches pour accéder au marché du logement privé ni assez pauvres pour accéder aux logements sociaux. Cette situation dure depuis plusieurs années ; le nombre de constructions a été divisé par dix à la Réunion, par quatre ou cinq en Nouvelle-Calédonie ou en Polynésie française.
Aussi, je dépose de longue date des amendements, avec mon excellent collègue Patrick Ollier, pour faire en sorte que le plafond de défiscalisation soit revu à la hausse, de 10 000 euros à 18 000 euros, pour des raisons objectives…
Je vous remercie pour cette annonce, madame la ministre. C’est une bonne nouvelle pour les classes moyennes de nos territoires ultramarins. Je remercie également l’ensemble des parlementaires pour le travail effectué. Nous avons défendu ensemble ce dossier en faveur de nos populations.
Le seul bémol que j’apporterai, madame la ministre, concerne la continuité territoriale, dont les crédits subissent cette année une baisse de près de 20 %. Or ce n’est pas à vous que je vais apprendre combien coûtent les billets pour la Polynésie et la Nouvelle-Calédonie. Dans ces territoires, le niveau de revenu est si faible que les personnes concernées ne pourraient acquitter le reste à payer qu’en s’endettant ou en épargnant à un niveau impossible pour elles. Le nombre de bénéficiaires de la continuité territoriale en Nouvelle-Calédonie est ainsi tombé de 12 000 à 3 000 personnes par an.
Enfin, des efforts sont demandés à la Polynésie française. Elle est prête à y participer car elle souhaite contribuer à l’effort national. N’oublions pourtant pas sa situation de fragilité économique et sociale, depuis près d’une décennie. La politique d’assainissement des comptes dans laquelle elle s’est lancée nécessite un accompagnement particulier de l’État.
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP et sur certains bancs du groupe SRC.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi d’indiquer combien il m’est agréable de participer aujourd’hui aux débats sur l’outre-mer.
Alors que d’autres sujets nous conduisent parfois à des postures proches de la caricature, j’apprécie dans vos travaux – que je ne suis pas assez mais auxquels je participe avec grand plaisir – la capacité à se retrouver tous ensemble, droite, gauche, écologistes, centristes, afin de construire pour les territoires d’outre-mer. Ceux-ci, en effet, souffrent : comme l’a rappelé l’orateur précédent, le chômage y touche un jeune sur deux, et ce depuis des décennies.
Continuons donc ainsi, afin de réussir ce pour quoi nous avons été élus, c’est-à-dire proposer une réponse sociale, dans des territoires, d’abord, et dans l’ensemble de la France, ensuite.
Ce budget, par ses objectifs et ses moyens, est globalement satisfaisant. La politique pour l’emploi est judicieuse, car elle joue sur deux leviers : la compétitivité des entreprises et le renforcement de l’insertion et de la qualification des jeunes.
Il est satisfaisant également de constater que le Gouvernement a pris la mesure du problème du logement, notamment du logement social.
Cependant, les moyens restent concentrés sur l’incitation au développement de l’économie marchande. Il est annoncé dans le document budgétaire qu’une réflexion sera engagée sur le développement de l’économie sociale et solidaire et la création d’emplois dans les TPE. Il faudra creuser bien plus avant cette piste intéressante. Pour le moment, la traduction budgétaire ne nous semble pas encore à la hauteur ; après ce premier pas, nous attendons le suivant.
Si loin de l’Hexagone, les îles, les territoires, les régions, qui importent 90 % des biens, ne sortiront de leur hyperdépendance que s’ils renouent avec un modèle fondé sur la préservation et l’utilisation des ressources locales. Désormais, la priorité doit être de favoriser la relocalisation et la transition vers un modèle d’économie circulaire, source d’emplois, d’innovations – sociales, technologiques, organisationnelles – et de liens d’une nouvelle nature. À condition que l’on s’en donne les moyens – car les territoires sont prêts à aller de l’avant –, ces innovations pourront inspirer les territoires métropolitains et s’y déployer. Oui, les outre-mer sont l’avenir de la France.
L’outre-mer dispose d’atouts formidables, qu’il faut continuer à valoriser et à structurer. L’État doit impulser cette politique, en s’appuyant naturellement sur les régions et les territoires, pour mettre en place les circuits courts, la souveraineté alimentaire, la gestion autonome des déchets, le développement des transports publics et des énergies renouvelables, bien sûr, sans oublier de nouvelles formes de partage des biens et du savoir.
Les outils législatifs existent et de nouveaux vont s’y ajouter, notamment grâce à la future loi de transition énergétique pour la croissance verte. Saisissons cette chance pour l’outre-mer, afin de donner le même avenir aux enfants ultramarins et aux enfants de métropole. Il y va de notre responsabilité d’élu : que l’on soit d’ici ou de là-bas, nous sommes tous responsables dans cet hémicycle.
À travers vous, madame la ministre, je remercie le Gouvernement d’entamer cette transition. Il lui reste à confirmer cet engagement lors des prochains rendez-vous. Le groupe écologiste votera ce budget.
(Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et sur plusieurs bancs des groupes S ita
ita_fin , GDR et UDI.)
La parole est à M. Stéphane Claireaux, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur spécial, messieurs les rapporteurs pour avis, mes chers collègues, le groupe RRDP salue ce budget de l’outre-mer pour 2015, qui prouve, si cela était encore nécessaire, la place toute particulière qu’occupent les outre-mer dans l’esprit et dans l’action du Gouvernement.
Comme c’est le cas de façon continue depuis 2012, le budget de l’État traduit un soutien résolu aux départements et collectivités d’outre-mer, dans les domaines économique et social. Au-delà de l’augmentation régulière du budget de l’outre-mer depuis 2012, ce sont pas moins de 4,7 % d’augmentations supplémentaires qui sont d’ores et déjà inscrites dans ce budget entre 2015 et 2017. Dans un contexte d’inflation atone, c’est plus qu’un soutien, c’est un message fort adressé par notre gouvernement à l’ensemble des Français d’outre-mer.
Le renforcement de LADOM, l’augmentation des crédits du service militaire adapté, l’attention particulière réservée à la LBU et aux dispositifs d’incitation fiscale pour le logement locatif social, le renouvellement des contrats de plan et de développement, la poursuite du programme d’investissements publics financés par le Fonds exceptionnel d’investissement, ou encore le plan très haut débit sont autant de preuves tangibles de l’action concrète de ce gouvernement en faveur de l’amélioration du quotidien des outre-mer.
Évidemment, ce budget est l’occasion de soulever de nombreuses questions, qui méritent des réponses claires, madame la ministre. Nous sommes nombreux, au premier chef nos amis réunionnais, dont mon collègue Thierry Robert, à nous interroger sur les conséquences des modifications de l’aide aux transports aériens dans le cadre de la continuité territoriale, un dispositif pourtant essentiel dans le contexte spécifique de chacun des départements et collectivités d’outre-mer. Nous serons tous sensibles, sur ces bancs, aux garanties et aux clarifications que vous serez en mesure de nous apporter sur ce sujet.
S’agissant du CICE et du CITE, le débat reste également ouvert. Nombre de nos collègues plaident pour un taux plus élevé que le taux renforcé actuellement prévu pour les secteurs prioritaires et particulièrement exposés à la concurrence, tels que le tourisme. Le rapport Fruteau-Gibbes avait préconisé un taux renforcé de 12 %. Comment le Gouvernement compte-t-il répondre à cette préoccupation bien réelle ?
De même, la question du relèvement du plafond ouvrant droit à réduction d’impôt dans la construction de logements intermédiaires demeure entière. À ce titre, je me permets de souligner une nouvelle fois l’inapplicabilité des mesures nouvelles de ce budget 2015 dans les collectivités d’outre-mer, qu’il s’agisse du Pacifique, de Saint-Martin et Saint-Barthélemy ou de Saint-Pierre-et-Miquelon : les crédits d’impôts ne peuvent y être mis en oeuvre, compte tenu du statut et des compétences de nos territoires.
Cette déficience de l’action de l’État, tant en matière économique, qu’en matière sociale, de logement ou encore de transition énergétique doit être compensée, au bénéfice des COM, d’autant que d’autres dispositifs sont supprimés en parallèle, tel que l’aide à la rénovation hôtelière.
Vous l’aurez compris, les députés du groupe RRDP seront particulièrement attentifs aux réponses qui pourront être apportées sur ces points spécifiques, dans un souci de parfaire ce qui demeure globalement un très bon budget pour l’outre-mer.
Permettez-moi, madame la ministre, d’en souligner particulièrement le caractère positif pour Saint-Pierre-et-Miquelon, avec un budget global en augmentation de 3,7 %, – 7,9 % hors dépenses de personnel. En ce qui concerne la seule mission « Outre-mer », dont nous savons tous ici la place fondamentale pour le développement économique et la qualité de vie dans nos collectivités isolées, les autorisations d’engagement augmentent, pour mon archipel, de 15,5 % et les crédits de paiement de presque 23 %. Je tenais à le souligner, bien qu’il s’agisse de sommes comparativement minimes et que l’effet statistique soit sans doute à nuancer, compte tenu de certaines baisses corrélatives opérées entre 2013 et 2014.
Lors des travaux en commission élargie sur cette mission, j’ai eu l’occasion de vous interroger, madame la ministre, sur les problématiques spécifiques à notre archipel. Ainsi, les entreprises locales, qui ne peuvent bénéficier du crédit d’impôt, demandent un soutien financier à l’investissement et à l’export, grâce à la mise en oeuvre de produits adaptés par la Banque publique d’investissement.
Dans le domaine du soutien aux familles, formalisé encore dernièrement par la caisse de prévoyance sociale, l’extension locale de dispositifs essentiels tels que l’allocation de soutien familial, le complément de libre choix du mode de garde, l’assurance vieillesse des parents au foyer, ou encore les allocations logement, qui demeurent inapplicables dans notre archipel alors qu’ils existent partout ailleurs en France depuis bientôt quarante ans, est très attendue.
Je vous le dis en toute amitié, madame la ministre, les Saint-Pierrais et Miquelonnais attendent aujourd’hui, non plus des explications et des justifications, mais bien des solutions, qu’il convient de trouver, notamment avec le ministère des affaires sociales.
Vous avez indiqué, à l’issue de cette commission, que ces dossiers pourraient être traités à l’occasion de la venue du Président de la République dans notre archipel, le 23 décembre – un instant privilégié. Je le souhaite, madame la ministre, et j’insiste aujourd’hui sur ces problématiques, afin qu’il en soit bien pris note et que ces dossiers, sur lesquels nous avons eu l’occasion de travailler ensemble, puissent avancer et se concrétiser. Le groupe RRDP votera évidemment cet excellent budget.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SRC et UDI.
La parole est à Mme Huguette Bello, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, dans une unanimité rare, le troisième budget de cette législature a été salué pour sa stabilité, voire pour sa légère augmentation, d’autant plus notable que le contexte général ne s’y prête guère.
La préservation de la LBU, la compensation des charges sociales enrichie d’un CICE majoré – et même bientôt, dans certains cas, super majoré –, le développement du SMA, la croissance de l’investissement public, la dynamisation de l’économie sociale et solidaire, un recours plus facile au crédit impôt recherche traduisent une ambition réaffirmée à l’égard de nos territoires et recueillent, à ce titre, l’assentiment de tous.
Pourtant, ce concert de louanges n’est pas parvenu à reléguer au second plan le débat qui s’est noué autour d’une ligne budgétaire représentant à peine 2 % de la mission. Ni la baisse d’un montant équivalent du Fonds exceptionnel d’investissement ni la suppression du dispositif de rénovation des hôtels n’ont provoqué un tel retentissement. Seule la diminution de la dotation de continuité territoriale suscite une vive émotion. Personne n’est dupe des postures de circonstance et des arrière-pensées politiciennes. Mais nous savons tous que la desserte aérienne est une question sensible et essentielle.
Elle est le lieu où se concrétise la relation entre la France et les outre-mer, où le politique retrouve la géographie, où le principe d’égalité qui fonde notre Constitution se heurte au dogme de la concurrence libre et non faussée qui inspire l’Europe. Elle symbolise aussi les oligopoles et la vie chère. Les billets d’avion sont jugés trop onéreux et les tarifs trop opaques. Ils sont vécus comme un obstacle majeur aux déplacements, plus insupportable encore dans ces temps de mondialisation.
Pour la première fois depuis sa création, ce dispositif est révisé à la baisse, au motif d’une augmentation trop rapide des montants sollicités au titre de l’aide à la continuité territoriale « tout public ». Il est, en somme, victime de son succès, mais aussi de son ambiguïté, que révèle d’ailleurs le nom qu’on lui a donné. Le dispositif créé en 2003 et réformé en 2009 s’apparente davantage, s’agissant de l’État, à une aide sociale qu’à une véritable mesure de continuité territoriale telle que la Corse nous en fournit l’exemple. Il est destiné aux plus modestes et l’aide est modulée en fonction des revenus.
Quand elles interviennent, les régions complètent ces aides selon des modalités différentes. Contrairement à la Martinique, qui s’inscrit dans la logique d’aide sociale en réservant ses interventions aux personnes déjà éligibles, la Réunion a adopté de nouvelles règles et mobilisé un budget plus de dix fois supérieur. Elle a créé une nouvelle catégorie de bénéficiaires, ne prévoit aucune aide pour les plus modestes et verse une contribution d’autant plus élevée que le quotient familial est important. Les critères sociaux ont disparu de ce dispositif régional et le nombre de bénéficiaires a augmenté fortement.
Ainsi, à la Réunion, non seulement la modulation des aides est inversée, mais les Réunionnais financent eux-mêmes une pseudo-continuité territoriale, qui leur coûte de plus en plus cher. Cela ne manque pas de surprendre, surtout quand on sait que ces mêmes contribuables financent déjà la compagnie aérienne régionale qui opère sur cette destination.
En se substituant à l’État, la région Réunion est amenée, d’année en année, à engager des sommes toujours plus importantes. Mais la plus grande part des 73 millions d’euros qu’elle a déjà affectés à ce poste n’affecte en aucune manière le budget de l’outre-mer. Depuis 2010, l’aide au voyage « tout public » est, à la Réunion, de 360 euros.
Une sorte de répartition des rôles s’est établie entre l’État et la région : l’État finance seul les personnes dont le quotient familial est compris entre 0 000 et 6 000 euros, tandis que la Réunion intervient seule dans la tranche qui va de 12 000 à 26 000 euros. Les deux dispositifs coexistent uniquement dans la tranche intermédiaire, qui cumule donc aide sociale et aide à la continuité territoriale. C’est la croissance de cette tranche, qu’il finance aux deux tiers, que l’État souhaite limiter.
Mais la mesure adoptée, même si elle épouse en gros les contours de la réalité, réduira aussi les droits des plus modestes et le niveau des aides. C’est pourquoi nous aurions préféré le maintien des crédits budgétaires, assorti d’une révision des critères, dans la perspective d’une véritable continuité territoriale, encore à inventer et seule à même de faire baisser de manière durable les tarifs aériens.
Cet objectif requiert dans l’immédiat une opération transparence : la formation des prix, la part de la surcharge transporteur, la forte saisonnalité des tarifs, la politique commerciale des compagnies, les ententes entre pétroliers, l’influence des aides au voyage sur les prix, tout est devenu suspect, tout donne lieu à controverse, tout doit être clarifié.
À travers ce débat sur la continuité territoriale se pose la question plus générale du désenclavement de nos territoires, donc de leur développement. Comme partout ailleurs, qu’il s’agisse du Grand Paris ou de grandes liaisons ferroviaires nettement plus coûteuses, ce développement est intimement lié à la problématique des transports, laquelle intègre nécessairement, pour nous, l’aérien.
À l’évidence, la diminution des crédits budgétaires relatifs à l’aide au voyage aérien ne s’inscrit pas dans cette logique et je ne peux donc, contrairement aux autres lignes du budget, l’approuver.
La parole est à M. Serge Letchimy, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour un rappel au règlement.
Monsieur le président, je me permets de faire un rappel au règlement, au titre de l’article 58, alinéa 1er, pour indiquer que les conditions d’organisation des débats, que je respecte car définies au plus haut niveau, ne laissent pas suffisamment de temps à l’expression. Le débat est tellement réduit que les rapporteurs pour avis ne peuvent même pas intervenir.
J’aurais pourtant souhaité saluer la stabilité du budget ; dire mon désaccord, comme vient de le faire Mme Bello, sur la diminution de 10 millions de la somme allouée à LADOM ; regretter la diminution de l’ordre de 10 millions de la dotation au Fonds exceptionnel d’investissement ; faire une dizaine de suggestions en matière de politique touristique pour accompagner, madame la ministre, votre ambition de proposer un CICE renforcé.
À cet égard, il serait bon de préciser si ce CICE renforcé concerne l’ensemble des dispositifs de la LODEOM ou seulement le secteur du tourisme. S’appliquera-t-il dès 2016 ? S’agissant d’un dispositif nouveau, il est très important de le savoir.
J’aurais aimé, enfin, développer la grande idée de lancer un équivalent du programme POSEIDOM pour le tourisme, afin de développer les politiques touristiques en outre-mer.
Monsieur Letchimy, je qualifierai votre rappel au règlement de « cavalier oratoire ».
Sourires.
Comme vous le savez, l’organisation des débats a été décidée en Conférence des présidents. Je ne fais donc qu’appliquer cette décision, mais je reconnais votre habileté…
Mêmes mouvements.
Outre-mer
Nous en venons aux questions.
Je rappelle que la durée des questions et des réponses est fixée à deux minutes.
Nous commençons par les questions du groupe SRC.
La parole est à Mme Chantal Berthelot.
Madame la ministre, bien consciente du contexte budgétaire dans lequel s’inscrivent nos discussions, je me dois de saluer la stabilité du budget 2015 qui témoigne du maintien de l’engagement du Gouvernement envers les territoires d’outre-mer, ce dont je vous remercie.
Bien consciente également de la situation de mon territoire, j’ai, il y a un an jour pour jour, demandé à Victorin Lurel, alors ministre des outre-mer, la mise en place d’un pacte d’avenir pour la Guyane.
J’ai été entendue : en décembre dernier, lors de sa visite en Guyane, le Président de la République confirmait l’élaboration d’un pacte pour l’avenir de la Guyane qui guidera l’action publique de l’État, de la future collectivité de Guyane et de tous les acteurs publics pour les dix ans qui viennent.
Ce pacte d’avenir doit répondre à un défi majeur, celui de la croissance démographique de la Guyane, dont la population passera de 250 000 habitants à 400 000 habitants en 2030, selon les projections de l’INSEE. La croissance démographique sera une chance pour la République et pour notre territoire, si nous nous donnons collectivement les moyens de l’accompagner et de la sublimer.
À cet effet, le pacte d’avenir doit marquer un engagement accru de l’État dans ses compétences régaliennes – sécurité et justice –, ainsi que dans les services publics, notamment l’éducation et la santé. Il doit reposer sur des fondations solides et des investissements structurels conséquents en matière de logements et d’infrastructures routières. Le pacte d’avenir doit également permettre de mobiliser les ressources endogènes de la Guyane en les mettant au service de son développement par le renforcement de son autonomie énergétique, l’acquisition de sa souveraineté alimentaire et par le soutien à une recherche ambitieuse, car c’est par la connaissance que nous réussirons à valoriser notre biodiversité.
Mais le pacte d’avenir n’aura de sens, madame la ministre, que si nous le mettons au service de notre avenir et de son meilleur ambassadeur – notre jeunesse. En outre, il ne sera pertinent que s’il s’inscrit dans une volonté de renforcer l’intégration de la Guyane dans son environnement régional.
Madame la ministre, pour donner à notre territoire les moyens de son développement, je voudrais savoir quand ce pacte d’avenir, que la Guyane attend, deviendra réalité.
Madame la ministre, en cette période de budget extrêmement contraint, non seulement vous maintenez, mais vous augmentez les crédits de la mission « Outre-mer », tout en choisissant l’efficacité et l’efficience des politiques publiques conduites dans ces territoires. Cette stratégie de mobilisation cohérente des leviers disponibles se manifeste à travers vos choix pour l’utilisation des crédits et la répartition des crédits non utilisés, insuffisamment utilisés ou peu efficients.
Vous l’avez dit, madame la ministre, vous avez pris vos responsabilités. Aussi, je voterai ce budget qui marque la volonté du Gouvernement de mobiliser des outils adaptés aux spécificités des outre-mer, d’agir concrètement et positivement sur la vie quotidienne, en particulier pour nos jeunes, que vous replacez au coeur du dispositif de l’emploi pour en faire des moteurs de l’économie.
Madame la ministre, pourriez-vous nous préciser quels seront les secteurs concernés par l’économie sociale et solidaire, à laquelle j’accorde une importance toute particulière ? Comment son développement sera-t-il financé en outre-mer ? Par ailleurs, quels seront les effets, dans nos territoires, de la baisse de 3,7 milliards d’euros des dotations des collectivités locales, pour lesquelles l’investissement – et par conséquent l’emploi – revêt une importance essentielle ?
Dans la situation difficile que traversent les finances publiques du pays, vous venez, madame la ministre, de nous présenter une mission « Outre-mer » qui réaffirme la forte volonté du Gouvernement de faire face aux principaux défis qui se présentent à nos régions. Je pense notamment aux efforts en faveur de l’emploi et de la qualification professionnelle des jeunes ultramarins.
Ma question porte sur les efforts en matière d’investissement dans les outre-mer. Outre les investissements portés par le FEI et le plan très haut débit, les contrats de projets État-région 2015-2020 dans les DOM, qui sont un pilier important de l’investissement public, sont en cours de discussion ; la contribution de l’État est en partie portée par le programme 123 de cette mission. Pouvez-vous nous indiquer le niveau de l’effort de l’État dans cette génération de contrats et, naturellement, dans ceux qui sont consacrés aux COM et sont en cours d’exécution ?
Plus spécifiquement, pour le département de Mayotte, cette contractualisation sera la première effectuée dans le cadre du statut de région d’outre-mer, en même temps que nous négocions notre premier programme opérationnel européen en qualité de région ultrapériphérique, ou RUP, et ce à l’heure où des incertitudes pèsent sur le système des ressources fiscales locales dont la ventilation entre le département et les communes est en débat.
Deux indicateurs doivent nous interpeller : d’une part, la dernière estimation de l’INSEE évalue le PIB de Mayotte à seulement 7 900 euros par habitant en 2011 ; d’autre part, le document de politique transversale sur l’outre-mer annexé au présent projet de loi de finances fait ressortir dans ses états récapitulatifs que l’effort budgétaire et financier consacré à ce département – 3 650 euros par habitant – se situe aux deux tiers de ce qu’il est en moyenne dans les outre-mer.
Dans ces conditions, pourriez-vous nous éclairer sur l’évolution des crédits que l’État entend consacrer à ce contrat pour accompagner cette nouvelle région ultrapériphérique dans cette étape décisive et nous indiquer votre sentiment sur la capacité financière du département de Mayotte à faire face à cette double contractualisation avec l’État et avec l’Europe ?
Je veux remercier les orateurs pour leurs propos positifs à l’égard du budget de l’outre-mer.
Monsieur Letchimy, je suis consciente de l’importance du tourisme et je connais votre intérêt pour ce dossier. Je peux vous assurer que les hôtels bénéficieront des mesures visant à alléger les charges qui pèsent sur les entreprises au-delà du taux de 9 %, même si nous ne pouvons pas à proprement parler mettre en oeuvre un CICE.
Madame Berthelot, nous sommes conscients des difficultés spécifiques de la Guyane. Des réunions de concertation ont eu lieu pour mettre sur pied le pacte pour l’avenir de la Guyane. Nous avons notamment travaillé sur quatre sujets : la mobilisation des leviers de la croissance économique du territoire ; la promotion de la jeunesse ; les infrastructures et les équipements collectifs ; l’intégration de la Guyane dans son environnement.
La concertation est en cours et je viendrai la clôturer à la fin du premier trimestre 2015. Nous nous reverrons à ce moment-là. L’effort de l’État en faveur de la Guyane est important, puisque l’on note une hausse de 78 % par rapport à la précédente maquette. La Guyane est devenue le deuxième territoire de la République, après Mayotte, où l’aide par habitant est la plus forte. Nous essayons de répondre au mieux aux difficultés qui se posent à la Guyane.
Madame Louis-Carabin, je rappelle que, lors d’une visite sur le terrain, nous avons noté les efforts tout à fait remarquables des petites entreprises. Je suis convaincue que l’économie sociale et solidaire – M. Lambert a également abordé le sujet – peut constituer un gisement d’emplois et de progrès considérables pour les outre-mer.
Le 30 septembre dernier, j’ai signé une convention avec la Caisse des dépôts et consignations, le ministre de l’emploi et la secrétaire d’État chargée de l’économie sociale et solidaire, dans laquelle nous avons adopté deux mesures : d’abord, un plan quadriennal de rattrapage pour encourager l’émergence d’acteurs et de projets et, ensuite, des mesures de soutien pour accompagner l’embauche de premiers salariés dans les très petites entreprises.
Nous travaillons donc sur l’économie sociale et solidaire, sans exclure le moindre secteur. Il vous reviendra de nous faire des propositions. Je rappelle que les régions d’outre-mer ont dû faire des efforts : elles participent, à hauteur de 3 milliards d’euros pour 2015, à l’effort de redressement. Il nous semblait indispensable que les collectivités d’outre-mer y participent, mais nous avons tout fait pour minorer leur contribution. Nous avons plaidé en faveur d’une soutenabilité de l’effort et nous sommes parvenus à une situation juste.
Monsieur Aboubacar, j’insiste sur l’effort qui a été réalisé pour tenir compte des retards et des difficultés de Mayotte en matière de développement. Mayotte est en effet la première région en termes d’aides consenties par l’État, rapportées au nombre d’habitants, à un niveau cinq fois plus élevé que dans l’Hexagone, ce qui est considérable.
À Mayotte, les fonds européens représentent quinze fois les montants du précédent Fonds européen de développement. Dans la mesure où cette collectivité exerce ses responsabilités depuis peu de temps, l’État a conservé le contrôle des fonds européens.
Quoi qu’il en soit, nous avons les moyens de développer Mayotte à la hauteur de ses besoins. Quant au FEI, il est bien engagé, puisque Mayotte a perçu 10 millions d’euros depuis 2013. Nous sommes donc pleinement conscients de l’ampleur de l’effort à fournir pour contribuer à développer Mayotte.
Nous en venons à une question du groupe UMP.
La parole est à M. Didier Quentin.
Madame la ministre, c’est en tant que député suivant depuis longtemps les questions ultramarines, mais également en tant que membre du Conseil de promotion du tourisme, créé récemment par Laurent Fabius, que j’appelle votre attention sur l’économie touristique outre-mer. Je souhaite associer mon collègue Patrice Martin-Lalande à ma question.
Comme vous le savez et comme l’ont rappelé nos collègues Daniel Gibbes, Stéphane Claireaux et Serge Letchimy, le tourisme dans les départements d’outre-mer est fortement exposé à la concurrence internationale. Aux Antilles comme à la Réunion, les professionnels du tourisme – notamment de l’hôtellerie – soulignent la difficulté de maintenir leur compétitivité avec un coût du travail jusqu’à dix fois supérieur à celui des destinations concurrentes voisines et avec une importante différence entre l’euro et le dollar.
Je précise que la situation aux Antilles n’a pas d’équivalent puisqu’elles sont entourées de territoires touristiques ayant des coûts de travail très inférieurs et des transport à bas prix, low cost. Les professionnels du tourisme ne peuvent donc s’en sortir qu’en compensant ces conditions défavorables de concurrence par un dispositif spécifique du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi.
J’ajoute enfin que le renforcement du CICE en faveur du secteur du tourisme ultramarin est conforme à l’esprit du rapport auquel il a déjà été fait allusion, adopté à l’unanimité par la délégation aux outre-mer, de nos collègues Jean-Claude Fruteau et Daniel Gibbes sur la déclinaison en outre-mer d’un tel dispositif.
C’est la raison pour laquelle, madame la ministre, je vous demande si vous entendez renforcer le CICE applicable au secteur du tourisme, particulièrement exposé à la concurrence internationale, dans nos départements d’outre-mer.
Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.
Vous avez raison, monsieur le député, de souligner l’importance du tourisme dans les économies ultramarines. La solution que nous avons adoptée n’est pas exactement un CICE renforcé. Les entreprises hôtelières vont bénéficier du CICE renforcé à 9 %, ce qui tient compte de leur situation. Nous avons obtenu du Premier ministre un allégement supplémentaire de charges en direction de ces entreprises exposées à la concurrence.
Dans la feuille de route que nous avons présentée, nous avons indiqué un certain nombre d’autres éléments qui peuvent aider le tourisme : sécurisation du cadre fiscal en faveur de l’investissement, car l’on sait que les entreprises ont besoin d’une certaine stabilité pour pouvoir s’engager ; renforcement du crédit d’impôt recherche ; développement de produits spécifiques de la BPI ; plan en faveur de l’économie sociale et solidaire ; CICE renforcé.
Par conséquent, il me semble que nous tenons compte de la réalité. S’agissant de Saint-Martin – M. Gibbes a rappelé l’importance du tourisme dans ce territoire –, le président Ollier a déposé un amendement visant à compenser la suppression de l’ARH.
Là encore, nous examinerons de près la question. Les autres mesures prises pour aider les secteurs exposés à la concurrence devraient permettre à l’économie de Saint-Martin de résister – notamment aux effets de la concurrence et de l’ouragan. Nous avons en effet constaté les dégâts que vous avez subis et salué la résilience admirable des hôteliers, qui se sont remis immédiatement au travail.
Nous en arrivons aux questions du groupe UDI.
La parole est à Mme Maina Sage.
Nous sommes aujourd’hui au rendez-vous des promesses et des longues discussions que nous avons eues pour la préparation de ce budget.
Je tiens au préalable à observer que le budget des outre-mer est stable, voire en légère augmentation, ce qui est une bonne chose pour l’ensemble des Ultramarins ici présents. Dans le détail, on observe cependant des coupes budgétaires dans certains programmes, notamment pour ce qui concerne la défiscalisation et la continuité territoriale, comme nous l’avons déjà souligné. Nous espérons que vous pourrez renforcer ces crédits cette année ou l’année prochaine.
Pour ce qui concerne la Polynésie, j’évoquerai le contrat de projet et la DGA. Concrètement, le contrat de projet fait l’objet d’une coupe de 20 % des autorisations d’engagement. Comme je l’ai expliqué en commission et auprès du ministère de l’outre-mer, nous insistons pour que les autorisations d’engagements soient revues à la hausse, car certaines opérations sont d’ores et déjà prêtes à démarrer et, contrairement à ce que laissent penser les estimations faites à Paris, nous manquerons sérieusement de crédits pour engager des opérations tout à fait prioritaires pour la collectivité en matière de logement social et de santé. Le Gouvernement peut-il revenir sur cette baisse affectant le contrat de projet ?
Quant à la DGA, sur laquelle je reviendrai tout à l’heure à l’occasion d’un amendement d’appel, nous nous réjouissons du maintien de ses crédits, mais que pèse aujourd’hui l’outre-mer dans le PIB national ? Ramené aux dépenses de l’État, quel est l’effort réellement consenti pour assurer une solidarité plus forte en faveur des territoires d’outre-mer, peut-être plus vulnérables encore que l’Hexagone ? Cette question s’adresse notamment à M. le secrétaire d’État chargé du budget, que nous avons la chance d’avoir parmi nous. Ces indicateurs économiques sont utiles pour mener à bien la réflexion sur l’effort réel réalisé par la nation en faveur de l’outre-mer.
Permettez-moi tout d’abord de vous féliciter, madame la ministre, pour ce premier budget des outre-mer que vous présentez. Un tel exercice, dans le contexte budgétaire actuel de la nation, n’est pas chose facile. Félicitations également pour la révision du dispositif des cessions à l’euro symbolique des immeubles domaniaux inutiles de l’armée au tribunal foncier de la Polynésie.
Merci pour l’appui technique des ministères et des services nationaux sur des dossiers tels que ceux du taux de participation de l’État au financement du régime de solidarité de la Polynésie ou de la proposition d’adaptation des règles de succession, qui sera présentée prochainement – autant d’avancées législatives et de rapports d’experts pour la Polynésie française qui, s’ils ne font pas tous plaisir, font au moins sourire.
Malheureusement, sans soutien financier, ni plan d’action concret, ni partenariat rénové, ces textes resteront des mots. Or la Polynésie a besoin de bien plus. Elle a besoin d’un accompagnement fort et massif de ses politiques sectorielles pour la croissance, l’emploi, la santé, la gestion du foncier, le logement social, l’éducation, l’écologie, les transports et la lutte contre la vie chère. Elle a besoin d’un accompagnement pour maintenir la dynamique impulsée en mai 2013 par le président Flosse et animée aujourd’hui par son successeur, conformément aux engagements pris par le Tahoeraa Huiraatira devant la population polynésienne.
Les efforts de redressement, les Polynésiens s’y résignent, et même doublement car, en plus de participer à celui des comptes publics de la nation par le biais de la baisse de la DGA, ils participent également à celui des comptes d’une Polynésie laissée au bord de la faillite par l’ancienne majorité locale. Un examen attentif des crédits de la mission que vous défendez et de l’ensemble des missions du projet de loi de finances pour 2015 nous laisse penser que cet accompagnement ne se fera pas en 2015. Madame la ministre, après tous nos efforts, pouvons-nous espérer un accompagnement plus juste en 2016 ?
Madame la ministre, je reviendrai sur la question du logement, à propos de laquelle je vous ai vue gesticuler tout à l’heure. Compte tenu de la situation politique et économique qu’a subie la Polynésie ces dix dernières années, ce secteur est particulièrement sinistré. Alors que nous produisions précédemment entre 600 et 800 logements par an, nous avons aujourd’hui plus de 6 000 dossiers en souffrance et nous avons besoin de votre aide. Nous souhaiterions à ce propos un engagement fort de l’État. Que peut faire le Gouvernement pour nous aider dans ce domaine, notamment en matière de logement social et de logement intermédiaire ?
Par ailleur, mes collègues de l’UDI, notamment du Pacifique, et moi-même lançons depuis deux ans des mises en garde à propos du logement intermédiaire. Le plafonnement à 10 000 euros du dispositif en faveur de l’investissement locatif intermédiaire nuit considérablement à l’attractivité de ce dispositif. Il est urgent de porter ce plafond à 18 000 euros afin de relancer la construction de ce type de logements outre-mer et de permettre ainsi à nos concitoyens un meilleur parcours locatif.
Les amendements que nous avions déposés l’an dernier et cette année en première partie du projet de loi de finances n’ayant pas été adoptés, nous reviendrons à la charge lors de la navette parlementaire. Pouvez-vous nous apporter votre soutien à cet égard ?
Madame Sage, en réponse aux inquiétudes que vous exprimez, je rappellerai que, le contrat pour 2008-2013 ayant connu des retards d’exécution, l’État a majoré exceptionnellement la dotation en 2014, afin d’en améliorer le taux final d’exécution. Ce sont ainsi 177 millions d’euros qui ont été inscrits pour une période de six ans. À ma connaissance, le nouveau contrat bénéficie des mêmes montants et ne connaît aucune diminution. Nous avons inscrit ce montant de 177 millions d’euros sur cinq ans, au lieu de six ans précédemment, et suivrons cette question avec beaucoup d’intérêt.
Ce qui vous inquiète, c’est que nous avons diminué la dotation de crédits en autorisations d’engagement. Or, nous avons cependant précisé que, si la dotation allouée se révélait insuffisante, nous pourrions allouer une dotation complémentaire afin de pouvoir fermer l’exercice. Vous n’avez donc aucune inquiétude à avoir.
Je peux également ajouter que, conformément aux échanges que vous avez eus avec mon cabinet, si l’exécution des projets du contrat de développement permet l’engagement des 25 millions d’euros de crédits en autorisation d’engagement, le ministère de l’outre-mer positionnera en gestion 2,6 millions d’euros supplémentaires à partir de septembre 2015. Une hausse significative des crédits de paiement de surcroît doit donc vous permettre de mener à bien les opérations que vous souhaitez.
Pour ce qui est de la continuité territoriale, je suis consciente de la question qui se pose à cet égard en Polynésie. Lorsque nous avons revu la continuité territoriale, nous avons fait en sorte de sauver dispositif. Aucun dispositif budgétaire, quel qu’il soit, ne peut en effet connaître une augmentation exponentielle et non contrôlée. Si donc les crédits connaissent bien une diminution sévère, l’important est que nous ayons sauvegardé la continuité territoriale pour des motifs de formation et d’accès à l’emploi.
Je suis cependant prête à évoquer à nouveau ce dispositif, dont certains éléments sont à revoir. Le plus injuste est en effet qu’il fonctionne dans un sens, mais pas dans l’autre, ce qui se traduit par une continuité territoriale intermittente. Je le répète : je suis disposée à y réfléchir, mais l’important était de sauvegarder ce dispositif pour des motifs essentiels. Lorsqu’une région – je pense évidemment à la Réunion – consacre autant d’argent aux voyages, elle pourrait également en consacrer à l’emploi, sujet essentiel dans les outre-mer.
Monsieur Tahuaitu, je vous remercie d’avoir exprimé votre appréciation de l’action du Gouvernement. De telles appréciations sont toujours très positives pour nous. Nous avons tenu, même si cela n’est pas toujours perçu comme suffisant, à réaffirmer la solidarité à laquelle la Polynésie a droit et avons rétabli des crédits, en procédant notamment à une dotation exceptionnelle de 50 millions d’euros en 2012 et à une avance de trésorerie de 42 millions d’euros en 2013, alors que la période précédente avait vu une diminution importante des crédits destinés à la Polynésie française.
Cette dernière est donc assez bien traitée en termes d’évolution de ses dotations, comme je viens de le rappeler à Mme Sage. Nous consacrons en effet les mêmes crédits que précédemment au prochain contrat de développement, nous avons sauvegardé le dispositif de défiscalisation des investissements dans les collectivités d’outre-mer et mettons en place des contrats de redynamisation des sites de défense en Polynésie française. Nous avons rencontré le président Fritch et les parlementaires et sommes sur un chemin très fructueux de collaboration apaisée et positive avec la Polynésie.
Monsieur Tuaiva, vous avez évoqué les logements sociaux et les logements intermédiaires, qui ont préoccupé à juste titre les élus du territoire. En Polynésie, le logement social a été un axe majeur du contrat qui s’achève, à hauteur de 37 % de la programmation. Il y a cependant eu, entre la programmation et l’exécution, une différence importante. Nous sommes donc prêts, aujourd’hui, à accompagner la relance du logement social en Polynésie. L’AFD a récemment accordé une aide de 7 millions d’euros à un programme qui bénéficiera à 200 familles. Le logement social sera également l’axe du prochain contrat. Nous avons rencontré récemment Mme Iriti, sénatrice de Polynésie, qui nous a interpellés quant à la possibilité de modifier les règles relatives notamment à l’habitat dispersé, afin de faciliter les opérations. Nous examinons toutes ces questions.
Surtout, le Premier ministre nous a autorisés à renforcer l’attractivité du dispositif Pinel en outre-mer. Alors que nous avions déjà obtenu le maintien d’un différentiel de réduction d’impôt de 11 points sur toutes les durées d’amortissement, je puis aujourd’hui vous confirmer que le Gouvernement a fixé à la réduction d’impôt en faveur de l’investissement locatif intermédiaire un plafond de 18 000 euros, comme le demandaient les parlementaires, au lieu de 10 000 euros précédemment. Nous avons donc avancé et c’est là un bon résultat.
Applaudissements sur de nombreux bancs.
Merci, madame la ministre, pour l’excellente nouvelle que vous venez de nous annoncer en faveur des classes moyennes de nos territoires.
Pour compléter les propos de ma collègue Maina Sage, je précise que l’indice de développement humain place la France au vingtième rang, la Nouvelle-Calédonie au cinquantième, la Réunion au soixante-douzième et la Guyane au soixante-dix-septième. Si l’on analyse les choses tant sur le plan économique que sur le plan social, il y a donc effectivement une très grande différence en termes de conditions de vie entre l’Hexagone et nos territoires.
Je souhaite vous parler de l’université de la Nouvelle-Calédonie, même si je sais que cela ne relève pas des crédits de votre ministère : j’ai compris votre pouvoir d’influence auprès des autres ministères et je souhaite en user, bien évidemment.
Sourires.
L’université de la Nouvelle-Calédonie est un outil majeur en termes de rééquilibrage dans le domaine fondamental pour nous qu’est celui de la formation des hommes : outil majeur tout d’abord pour l’ensemble des communautés dans notre pays, afin de permettre à celles qui ont été écartées de la réussite scolaire et des responsabilités d’exercer demain des responsabilités dans notre pays – je pense notamment aux communautés océaniennes, et plus particulièrement à la communauté kanake – ; outil majeur également, dans le cadre de l’émancipation qui est la nôtre et des responsabilités de plus en plus larges que nous avons vocation à exercer, pour disposer des compétences locales permettant de les assumer.
Cette université, créée en 1999, dans le prolongement de l’accord de Nouméa, accueille 2 600 étudiants et délivre chaque année 250 licences, ce qui n’est pas facile puisque 35 % des étudiants en première année viennent des bacs pros ou des bacs technos qui, en l’absence de filières adaptées, ne peuvent aller ailleurs qu’à l’université.
Aujourd’hui, cette université porte des projets majeurs pour la poursuite de son oeuvre : d’une part, la création d’un IUT, qui sera opérationnel à la rentrée 2015 et fournira un débouché aux bacs pros et technos et, d’autre part, l’ouverture d’une antenne en Province Nord pour continuer à contribuer au rééquilibrage.
Mais le problème majeur demeure celui des moyens dont elle dispose pour assumer ces responsabilités, essentielles dans notre pays. Ces moyens sont attribués par le ministère de l’éducation nationale dans le cadre d’une grande machine dont elle a le secret, qui s’appelle SYMPA – ou « système de répartition des moyens à la performance et à l’activité » –, mais qui n’est pas du tout sympa pour la Nouvelle-Calédonie ! Ce n’est pas sympa parce que notre université est trop petite ; ce n’est pas sympa parce que nous sommes une île et que l’insularité n’est pas prise en compte ; ce n’est pas sympa parce que nous sommes loin de l’Hexagone, loin de tout, et que cela non plus n’est pas pris en compte ; ce n’est pas sympa non plus parce qu’on ne considère pas l’enjeu majeur que constitue la formation des hommes dans notre vie. Il est donc essentiel de « customiser » cette dotation de l’université de la Nouvelle-Calédonie. Cela serait-il nouveau sur l’ensemble du territoire de la République ? Pas du tout : une université beaucoup moins émancipée que la nôtre, l’université de Corse, bénéficie justement d’un dispositif adapté pour rattraper son retard.
J’espère, madame la ministre, que ma voix sera entendue sur ce sujet !
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.
Je tenais tout d’abord à vous rassurer, monsieur Gomes, puisque vous avez fait état de vos craintes que le contrat soit moins important pour la Nouvelle-Calédonie : à ma connaissance, nous sommes sur un budget de plus de 400 millions d’euros. Le dispositif est donc normalement préservé.
S’agissant de la défiscalisation, vous avez souligné votre inquiétude concernant l’après-2017. Je tiens à souligner que, si le terme légal de la défiscalisation est fixé à 2017, cela ne devrait pas avoir de conséquences sur les décisions qui seront prises concernant le renouvellement. Nous allons très prochainement examiner pourquoi il existe, à vous entendre, un blocage sur ces dossiers de défiscalisation puisque, selon nous, cela ne devrait pas être le cas.
Un certain nombre de difficultés se posent du fait de l’autonomie grandissante de la Nouvelle-Calédonie : certains dispositifs ne peuvent s’appliquer chez vous. Nous devons travailler pour trouver des dispositifs complémentaires, comme l’adaptation du crédit d’impôt au contexte particulier des collectivités d’outre-mer, afin qu’il puisse bénéficier à des sociétés qui investissent chez vous. Nous devons en outre réfléchir à des alternatives, notamment à un fonds de collecte et de placement de l’épargne qui limiterait les coûts d’intermédiation.
S’agissant de l’université, vous avez soulevé une question importante : nous savons tous que, au sens de l’accord de Nouméa, le rééquilibrage des responsabilités est une idée essentielle. Par conséquent, pour y parvenir, on a besoin d’une université qui fonctionne bien. Il est vrai que les résultats de l’université de Nouvelle-Calédonie qui nous sont communiqués ne sont pas totalement satisfaisants. Nous allons donc examiner de plus près à quoi cela est dû. Je ne suis pas sûre que cela soit uniquement une question matérielle : les investissements nécessaires pour l’université de Nouvelle-Calédonie sont prévus ; cela ne devrait donc pas poser de problème. Nous avons en outre reçu M. Léopold, qui est en charge de ce secteur pour le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, et nous avons parlé avec lui des raisons pour lesquelles nous n’avons pas obtenu les résultats souhaités. La situation financière de l’établissement n’est pas désastreuse, mais c’est l’adaptation des filières, l’adaptation des enseignements à la formation des jeunes que nous devons réexaminer. Vous le savez, ce secteur me tient à coeur : je suis donc tout à fait disposée à y travailler avec vous.
La parole est à M. Ary Chalus, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.
Avant de commencer, j’aimerais saluer la solidarité dont ont fait preuve ce matin les parlementaires ultramarins en présence du ministre Stéphane Le Foll concernant l’agriculture.
Madame la ministre, je ne reviendrai pas sur le logement social ni sur la mobilité territoriale : vous avez déjà apporté les réponses sur ces points, pour lesquels nous rencontrons les mêmes difficultés. En revanche, notre inquiétude concernant la diminution des crédits de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, dite ANRU, demeure : nous pensons que cela risque d’impacter les rénovations urbaines, par exemple à Pointe-à-Pitre et aux Abymes.
Par ailleurs, concernant l’agriculture, nous n’avons pas le sentiment d’avoir quitté le modèle traditionnel pour aller vers un véritable modèle de diversification agricole. Or, s’il y a une politique à mettre en oeuvre, c’est celle d’une agriculture diversifiée tournée vers l’autoconsommation. J’ai moi aussi réagi à la question des investissements réels consentis à l’innovation et à la recherche.
J’aimerais également que vous puissiez nous répondre concernant les difficultés que nous rencontrons avec les sargasses en outre-mer, sachant que la Martinique a déjà dépensé plus d’1 million dans ce domaine et que plus de 3,5 milliards d’euros seront prélevés sur les collectivités en 2015.
Ce n’est pas seulement de moyens supplémentaires que nous avons besoin ; il nous faut également élaborer une nouvelle stratégie, porter un nouveau regard sur nos régions et privilégier la concertation en amont des décisions prises afin d’en améliorer l’exécution. Nous pensons que s’il y a une personne en mesure de le comprendre, c’est bien vous, vous qui pouvez mesurer l’attente de nos populations et la grande qualité des projets élaborés. Comment traduire en actes budgétaires cette volonté et cette intelligence qui s’expriment dans nos territoires ? Ce que vous faites pour moi, sans moi, vous le faites contre moi, disait Nelson Mandela : nous nous tenons donc à votre disposition pour aller plus loin, ensemble, dans l’intérêt de nos territoires. Nous voulons seulement savoir si vous vous engagez à accompagner et à soutenir les territoires et collectivités d’outre-mer qui, aujourd’hui, rencontrent d’énormes difficultés financières.
Monsieur Chalus, vous savez que je suis attachée à la concertation étroite avec les parlementaires : j’organise ainsi régulièrement des réunions pour vous informer des projets et de leur état d’avancement. Par conséquent, je suis tout à fait prête à continuer sur ce type de politique. Cela me semble en effet utile, tant pour les parlementaires que pour nous, puisque cela nous permet de mener des actions concertées et d’avancer ensemble. C’est comme cela que nous avons travaillé pour augmenter la LBU ; c’est ainsi que nous nous sommes mobilisés pour tenter de préserver les crédits de l’ANRU et la réforme de la politique de la ville. Je dois du reste me rendre dans les outre-mer avec mon collègue Patrick Kanner – nous avons la chance d’avoir un ministre de la ville très intéressé par les outre-mer et qui les connaît bien.
La réforme de la continuité territoriale permet quant à elle d’ouvrir de nouveaux droits aux jeunes et au public en formation – je n’y reviens pas.
Les très petites entreprises bénéficieront de l’économie sociale et solidaire ainsi que de mesures en faveur de la compétitivité.
Vous avez parlé de l’agriculture : là encore, l’action menée en commun par les parlementaires et ce ministère a permis de rétablir les choses conformément aux annonces qui avaient été faites par le Président de la République. L’enveloppe allouée à la canne à sucre est ainsi sanctuarisée et les crédits liés à la diversification sont préservés.
S’agissant de l’investissement dans l’innovation, je vous rappelle que la loi de finances majore déjà le crédit d’impôt recherche en outre-mer : nous avons ainsi tenu compte de la situation sur ce point.
Concernant les sargasses, vous avez raison de dire que ce problème est majeur, mais je me permets de souligner que celui-ci est plus important encore à la Martinique : c’est peut-être la raison pour laquelle l’action de la préfecture a été plus efficace en Martinique qu’en Guadeloupe. Cela étant, nous avons demandé l’intervention de l’IFREMER – l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer – pour comprendre le phénomène. S’il est vrai que l’agriculture intensive explique le développement des algues en Bretagne, on ne comprend pas très bien en revanche pourquoi, dans les outre-mer, les sargasses se développent ainsi.
Il faut, d’une part, que l’on comprenne d’où vient le phénomène et, d’autre part, que l’on trouve comment valoriser ces algues, sans se contenter de les ramasser et de les détruire, ce qu’aujourd’hui l’armée aide les collectivités à faire au maximum.
Nous en venons aux questions du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
La parole est à M. Alfred Marie-Jeanne.
Madame la ministre, l’article 51 du projet de loi de finances pour 2015 prévoit la suppression de l’indemnité de départ à la retraite, pourtant favorable aux artisans et commerçants dont l’activité leur procure de très faibles revenus. Or ce dispositif permet à l’heure actuelle de compenser l’absence de possibilité de valorisation de leur fonds de commerce. Cette perspective de disparition fixée au 1er janvier 2015 suscite l’incompréhension des représentants de la caisse du régime social des indépendants des Antilles-Guyane ainsi que l’émoi des bénéficiaires éligibles.
En outre-mer, cette indemnité répond à un objectif social, contrairement à ce qui a été affirmé, en raison des difficultés rencontrées par les indépendants et de l’extrême modestie des niveaux de retraite dans le secteur privé comparativement à la moyenne française. Ainsi, en 2013, agissant pour le compte de l’État, cette caisse a soutenu 1 330 indépendants.
Le financement du régime de protection sociale des travailleurs indépendants est par ailleurs attaqué à cause de la diminution de la contribution sociale de solidarité des sociétés exigible des entreprises réalisant au moins 760 000 euros de chiffre d’affaires hors taxe.
Face au risque d’effritement des garanties de protection sociale de travailleurs indépendants et de la baisse substantielle des revenus au moment du départ à la retraite, pensez-vous qu’il soit juste, madame la ministre, de supprimer cette mesure dans un budget que vous venez vous-même de déclarer remarquable ?
Madame la ministre, le budget de la mission « Outre-mer » englobe 2 milliards d’euros de crédits de paiement prévus pour 2015, dont 1,1 milliard d’euros destinés à la seule compensation des exonérations de charges sociales patronales. Il s’agit là d’un effort qu’il faut souligner, tant le tissu économique d’outre-mer est essentiellement, pour ne pas dire exclusivement, constitué de petites entreprises.
Nous pourrions espérer encore un autre effort dans le métier global de l’engagement financier de l’État en outre-mer, bien que le contexte économique soit plus que difficile, des marges de progression étant possibles pour le logement intermédiaire, pour le Fonds exceptionnel d’investissement ou pour le tourisme. Mais globalement, je vous remercie, madame la ministre, d’avoir conservé cet engagement, même si nous formons toujours le voeu d’une grande politique publique de l’outre-mer.
J’ai évoqué le tourisme : le projet de loi de finances pour 2015 comporte la mise en place du taux majoré du crédit d’impôt compétitivité emploi qui sera porté dès 2015 à 7,5 % et 9 % en 2016. C’est aussi un effort supplémentaire de 160 millions d’euros pour les entreprises, qui sont en manque de fonds propres et les salariés, qui sont en manque d’emplois.
Mais vous connaissez la situation de retard de développement de l’outre-mer : nous avons besoin de supplément d’âme, qui consiste dans l’idée d’un « CICE méga renforcé » pour l’outre-mer pour des secteurs en difficultés et concurrentiels – notamment, au premier chef, le tourisme. Vous avez indiqué y être favorable : qu’en est-il concrètement ? Seriez-vous disposée à accepter des amendements portant ce taux, pour le tourisme, à 12 % en 2015 et à 18 % en 2016, étant entendu que ce secteur particulier voit les crédits à la rénovation hôtelière supprimés et que nous enregistrons encore ce mois-ci en Martinique deux nouvelles mises en redressement de structures hôtelières ? C’est donc un secteur en ruines, qui a besoin d’un électrochoc et, à défaut d’un « CICE méga renforcé », de vraies mesures de relance.
Le dispositif sur lequel porte votre préoccupation, monsieur Marie-Jeanne, n’était pas très utilisé, puisqu’au total ce sont moins de 2 % des commerçants et des artisans qui en bénéficiaient au moment de leur départ à la retraite, et ils étaient encore moins nombreux dans les outre-mer. Cela signifie que le dispositif n’était plus adapté, probablement parce qu’aujourd’hui les commerçants et les artisans bénéficient de pensions de retraite d’un montant équivalent à celles des salariés.
En outre, ce dispositif avait des effets indésirables : il incitait ses bénéficiaires à limiter leurs revenus, puisque c’était quelque chose de défavorable à la transmission de leur entreprise.
C’est pourquoi nous avons estimé qu’il n’était pas utile de maintenir le dispositif tel quel. Mme Carole Delga a engagé une réflexion visant à rechercher de nouvelles modalités d’accompagnement de la cessation d’activité des artisans et elle a invité le président du régime social des indépendants à lui faire des propositions en la matière. Si vous considérez que certains éléments spécifiques doivent être pris en compte s’agissant de la Martinique, vous pourrez faire valoir votre point de vue auprès de Mme Delga.
S’agissant de votre souhait d’un CICE renforcé au bénéfice du secteur du tourisme, monsieur Azerot, je vous rappelle que le Gouvernement compte déjà mettre en place un CICE majoré d’un taux de 9 % au bénéfice de toutes les entreprises d’outre-mer, ce qui représente déjà un effort considérable. Je ne dirais pas que cet arbitrage a arraché le coeur de notre ami Christian Eckert, mais le moins qu’on puisse dire est qu’il n’a pas suscité l’enthousiasme du secrétariat d’État chargé du budget.
Sourires.
Quand un arbitrage est favorable, il faut le reconnaître, et c’est le cas en l’occurrence, l’outre-mer ayant obtenu des crédits conséquents.
Nous avons par ailleurs obtenu que les exonérations de charges au bénéfice des entreprises des outre-mer soient intégralement préservées. Là encore, cela constitue un bol d’air considérable pour les entreprises. Il en résulte un effort global au bénéfice des entreprises des outre-mer équivalent à ce qu’aurait représenté la fixation à 12 % du taux de CICE demandée par la délégation aux outre-mer, présidée par Jean-Claude Fruteau. Là encore, c’est un effort tout à fait considérable qui a été consenti par le Président de la République et le Premier ministre dans l’intérêt des outre-mer, et qui me semble répondre aux difficultés spécifiques aux entreprises de ces territoires, que vous avez à juste titre soulignées.
Nous poursuivons avec deux autres questions du groupe GDR.
La parole est à M. Gabriel Serville.
Permettez que je salue d’abord votre présence parmi nous, monsieur le président, à l’occasion de l’examen de la mission « Outre-mer ». Sachez qu’elle nous fait vraiment plaisir.
Madame la ministre, je tiens à vous féliciter d’avoir réussi, pour votre premier budget au ministère de la rue Oudinot, à obtenir des arbitrages favorables à nos territoires.
Toutefois, malgré mon soutien au Gouvernement, je ne puis me réjouir d’un budget dont de nombreux indicateurs ont viré au rouge, parce que je ne peux pas accepter que mes compatriotes vivent dans des conditions indignes de la République : 40 000 foyers guyanais ne sont toujours pas raccordés au réseau d’électricité ; 25 % des habitants de ma commune de Matoury vivent dans un logement insalubre faute de logements décents disponibles, au point que certains en arrivent à s’entre-tuer pour un lopin de terre.
Le renouvellement de mon soutien au Gouvernement est conditionné à la sauvegarde des intérêts des citoyens des outre-mer.
Vous comprendrez donc ma déception à la lecture des crédits alloués à la Guyane au titre du programme 123 « Conditions de vie outre-mer », ceux-là même qui financent le logement social. Ces crédits affichent une baisse de 23 % sur le budget triennal, alors que dans le même temps la population guyanaise aura augmenté de près de 10 %.
Madame la ministre, je connais votre engagement en faveur du logement outre-mer et je remets d’autant moins en cause vos arbitrages que je peux témoigner du soutien que vous avez apporté aux amendements des parlementaires des outre-mer. Mais à la lecture du document de politique transversale, je me demande si vos collègues de Bercy prennent la pleine mesure de l’ampleur de nos besoins en matière de lutte contre l’habitat indigne.
Malgré les points d’inquiétude relevés, madame la ministre, je veux encore espérer que le projet d’opération d’intérêt national prévu sur trois secteurs du territoire guyanais verra enfin le jour, avec votre soutien, et qu’il sera assorti des crédits nécessaires, dont le montant a été estimé par un rapport récent du Conseil national du développement durable. Je vous remercie des précisions que vous nous communiquerez sur ce sujet.
Je salue à mon tour votre présence à nos débats, monsieur le président, et je vous demande d’ores et déjà, en tant que dernier orateur, d’avoir l’indulgence de m’autoriser de dépasser mon temps de parole de deux minutes. Cela me dispensera de devoir faire un rappel au règlement, comme mon collègue Letchimy, pour terminer mon exposé.
Sourires.
Bien que le budget de la mission « Outre-mer » soit en augmentation de 0,3 %, les crédits alloués à la Martinique sont en diminution pour la troisième année consécutive. Il m’incombe, en ma qualité de député martiniquais, de vous faire part de nos interrogations quant à cette tendance lourde et désormais durable.
Tant les particuliers que les entreprises s’interrogent sur la capacité réelle du Gouvernement à élaborer des politiques de développement à la hauteur des enjeux, d’autant que le niveau des crédits destinés à nos territoires au titre d’autres missions est indécent – je pense notamment à la mission « Sport ».
La Martinique doit faire face à un marché restreint, à un coût du travail qui asphyxie les acteurs, dans un environnement fortement exposé à la concurrence régionale, à des banques qui ne jouent pas leur rôle de soutien aux entreprises, notamment aux très petites entreprises. À l’heure où nous fantasmons allègrement sur la croissance, le chômage, notamment des jeunes – il atteint un taux de 68 % dans notre département –, la vie chère, les mises en liquidation judiciaires et les fermetures d’entreprise, la désertion de notre destination, le découragement se banalisent.
D’où le départ massif de nos jeunes, notamment les plus diplômés. La délinquance et la violence gagnent inexorablement du terrain. Il y a donc un véritable malaise, dont il convient de prendre toute la mesure au moment de décider des arbitrages budgétaires.
Madame la ministre, vous proposez un CICE majoré de 50 %, dont le taux est porté à 9 % pour les secteurs exposés à la concurrence. À notre avis, il faudrait le porter à 12 % en faveur des secteurs qui jouent un rôle moteur dans le développement économique et social, mais nous avons entendu vos assurances qu’une mesure d’un effet équivalent serait décidée et nous veillerons à vos côtés au respect de cet engagement.
Vous avez sanctuarisé le crédit d’impôt investissement à travers un fonds de garantie de la BPI, maintenu la défiscalisation et la TVA non perçue récupérable et vous comptez développer un plan tourisme et un plan logement. Nous adhérons à ces avancées réelles et qui relèvent du bon sens. Nous n’avons cependant pas la naïveté de croire que ces mesures suffiront à nous nous positionner à armes égales vis-à-vis de nos voisins caribéens.
Il faut donc aller plus loin dans la recherche de mesures pertinentes et cohérentes, qui profitent aux secteurs d’activité et aux entreprises qui en ont le plus besoin, et non toujours aux mêmes.
Tel est le défi majeur que nous avons à relever ensemble pour les années à venir, si nous voulons sortir progressivement de la logique de comptoir et de l’hyper-dépendance.
Madame la ministre, êtes-vous prête à vous engager, aux côtés des acteurs locaux, dans cette voie ambitieuse ?
Le rapprochement de ces deux dernières questions montre la difficulté de l’exercice : chaque territoire invoque légitimement des besoins plus importants que les autres, pour revendiquer une part plus grande des crédits que nous avons à répartir. Notre rôle est de prendre en compte les spécificités de chaque territoire sans opposer les outre-mer les uns aux autres.
S’agissant de la Guyane, nous avons significativement augmenté les crédits destinés à ce territoire. Ainsi, la dotation allouée au préfet au titre de la LBU a progressé de 60 % entre 2013 et 2014. L’effort sera maintenu d’ici à 2015, avec un objectif de 7 950 nouveaux logements sociaux et des crédits de paiement qui passent de 123 millions à 126 millions d’euros. Les crédits sont donc en progression.
Le problème est effectivement que la population de la Guyane croît beaucoup plus vite que l’effort consenti. C’est un peu le même problème à Mayotte. Par conséquent, même si l’on fait de gros efforts, il est clair qu’on a du mal à suivre.
Nous devons aussi prendre en compte les difficultés spécifiques aux autres territoires, même si leur population ne croît pas à la même vitesse – je pense par exemple à l’exposition aux risques sismique et cyclonique. Nous essayons de répartir ces crédits de la façon la plus équilibrée, mais nous sommes prêts à revoir les éléments qui vous sembleraient totalement déséquilibrés.
Monsieur Nilor, vous avez également déploré la diminution des crédits destinés à la Martinique au titre de la mission « Sport ». Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, le CREPS Antilles-Guyane a une vocation régionale, ce qui explique en grande partie l’apparente concentration des crédits au bénéfice de la Guadeloupe. Je sais que vous devez rencontrer prochainement Thierry Braillard : il pourra répondre aux observations que vous avez à faire sur ce point.
S’agissant du secteur touristique, je veux répéter, car apparemment je n’ai pas été assez claire, que ce secteur bénéficie du taux renforcé de CICE de 9 %, ce qui sera un bol d’air supplémentaire pour les entreprises.
S’y ajoutera un allégement supplémentaire de charges au bénéfice de ce secteur exposé. L’effet pour les entreprises sera le même que celui d’un CICE à 12 %. Vous avez donc été entendu sur ce point.
Nous avons par ailleurs à travailler à une stratégie en faveur du secteur touristique. Nous avons obtenu que le Conseil de promotion du tourisme, organisme mis en place par Laurent Fabius, consacre une de ses sessions aux outre-mer. Au-delà de l’aide fiscale, nous comptons développer le tourisme dans les outre-mer, notamment en renforçant la notoriété de ces destinations. La Martinique a les mêmes atouts en termes de paysage que sa voisine Saint-Domingue, destination très courue où je me suis rendue il y a quelques semaines.
Il faut assouplir les conditions de délivrance des visas, faciliter l’accès aux destinations ultramarines, développer la desserte aérienne régionale, encourager la relance des infrastructures hôtelières et améliorer la formation des personnels. Nous devons y travailler ensemble ; ce faisant, nous parviendrons à améliorer significativement le tourisme en Martinique et en outre-mer en général.
J’appelle les crédits de la mission « Outre-mer », inscrits à l’état B.
Sur ces crédits, je suis saisi d’un amendement no 394 .
La parole est à Mme Maina Sage, pour soutenir cet amendement.
L’amendement vise à augmenter la dotation générale d’autonomie de 3,2 millions d’euros, afin de la maintenir au niveau de 2014.
La parole est à M. Patrick Ollier, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l’avis de la commission.
Tout en comprenant l’intérêt de cet amendement, la commission ne peut pas y être favorable, pour deux raisons.
Il est compréhensible que vous jugiez inacceptable qu’en raison de son indexation à la DGF, la DGA passe de 87 millions à 79 millions d’euros, et que vous vouliez qu’elle repasse à 86,7 millions d’euros. Mais – et je parle sous le contrôle de M. le secrétaire d’État chargé du budget – le Gouvernement proposera tout à l’heure de la porter à 84,5 millions d’euros.
Un tiens valant mieux que deux tu l’auras, je préfère la proposition du Gouvernement à la vôtre, qui est excessive, et surtout qui est gagée sur des crédits destinés à financer notamment l’exonération des cotisations sociales patronales. Si votre amendement était voté avec ce gage, cela compromettrait le développement des entreprises, ce que je peux accepter.
La parole est à Mme la ministre des outre-mer, pour donner l’avis du Gouvernement.
Effectivement, madame Sage, la DGA connaît une légère diminution, mais celle-ci est beaucoup moins sévère que ce qu’elle aurait dû être si elle avait été entièrement indexée sur l’évolution de la DGF. Je vous demande de considérer que cette diminution est plutôt un bon résultat pour la Polynésie.
Par ailleurs nous avons maintenu notre niveau de soutien au développement de la Polynésie en sanctuarisant les autorisations d’engagement du troisième instrument financier. À cela s’ajoute la contribution de l’État au nouveau contrat de projet qui va démarrer en 2015 pour un montant équivalent au contrat couvrant la période 2008-2015.
D’une manière générale, les subventions de l’État à la Polynésie connaissent une hausse constante et significative.
Je vous demande par conséquent de retirer cet amendement, auquel il me semble impossible de donner satisfaction, faute de quoi j’en demanderai le rejet.
Je voudrais intervenir en soutien à nos amis de la Polynésie française.
La Polynésie vient de traverser dix années d’une grave crise politique, économique et sociale. Une crise politique liée à une instabilité chronique qui a conduit les gouvernements à se succéder sans pouvoir véritablement mettre en oeuvre les réformes structurelles dont le pays a besoin.
Une crise économique causée par un tourisme en chute libre : même si les choses se sont un petit peu améliorées ces dernières années, des établissements importants ont dû fermer leurs portes, avec les conséquences sociales qui en découlent.
Ces élément n’ont pas encouragé les entreprises à investir, ni les acteurs économiques à aller de l’avant.
Aujourd’hui, une nouvelle ère s’ouvre, pour une série de raisons : une équipe renforcée a pris la direction du gouvernement, sous la présidence d’Édouard Fritch, une majorité élargie s’est installée à l’Assemblée territoriale. Cette équipe essaie d’assainir les comptes du pays et je crois qu’il est dommage, sur le plan symbolique, qu’un signe négatif soit donné par l’État, même s’il est minime. Vous savez, le minime en Polynésie pèse lourd dans la balance.
Madame la ministre, je tiens simplement à appeler votre attention sur la nécessité de ne pas décourager les bonnes volontés polynésiennes : il faut au contraire les accompagner du mieux possible.
Je voudrais souligner, mesdames et messieurs les députés, que les subventions du budget général de l’État à la Polynésie, comme l’a souligné votre rapporteur spécial Patrick Ollier, sont en hausse constante et significative : 1,328 milliard pour 2015, contre 1,271 milliard en 2014 et 1,202 milliard en 2013.
Si la DGA subit une très légère baisse, l’ensemble des subventions connaît une hausse importante, d’autant que – madame Sage, vous l’avez d’ailleurs dit tout à l’heure –, si nous avions indexé la DGA sur l’évolution de la DGF, son montant serait descendu à 80 millions d’euros, alors que nous avons fixé cette dotation à 84,5 millions d’euros.
Comme l’a fait Mme la ministre, je vous invite donc à retirer cet amendement ; à défaut, je demanderai qu’il soit repoussé.
Il s’agissait, dans notre esprit, d’un amendement d’appel, car nous devions parler de la DGA.
Certes, pour vous, sa baisse est purement symbolique – et il est vrai que, dans notre budget, elle ne représente que 0,43 % des frais de fonctionnement.
Sans m’étendre sur le sujet, je tiens à rappeler que la DGA n’est pas une DGF comme les autres : elle est issue de l’engagement de plusieurs chefs de l’État, au titre de la compensation des essais nucléaires. La Polynésie ne souhaite pas, à chaque fois, remettre ce sujet sur le tapis, mais je voulais vous rappeler cet élément. Il faut aussi que vous sachiez que ce rognage, fût-il symbolique, est tout aussi symboliquement perçu en Polynésie française. Je me devais, par solidarité avec tous ceux qui ont oeuvré à la reconversion économique de la Polynésie, de présenter cet amendement.
Bien sûr, j’entends aussi vos arguments. Je souhaite réellement que nous n’ayons pas à revenir sur ce sujet. Nous sommes prêts à discuter sur d’autres enveloppes, mais il faut que vous compreniez qu’il s’agit d’un engagement symbolique qui est entré dans notre histoire commune, dans le passif commun entre l’État et la Polynésie. Je retire mon amendement.
L’amendement no 394 est retiré.
Les crédits de la mission « Outre-mer » sont adoptés.
J’appelle maintenant l’article 57 du projet de loi de finances, rattaché à la mission « Outre-mer ».
L’article 57 est adopté.
Je suis saisi d’un amendement, no 371 , portant article additionnel après l’article 57.
La parole est à Mme la ministre, pour le soutenir.
Nous avons proposé qu’au second alinéa de l’article L. 6500 du code général des collectivités territoriales, le montant de 90 552 000 euros soit remplacé par le montant de 84 547 668 euros. Autrement dit, plutôt que d’indexer la DGA sur la DGF, nous avons proposé un montant ferme – c’est une manière de répondre aux préoccupations exposées par Mme Sage.
Nous avions indexé sur la DGF le montant de la DGA, ce qui s’est révélé négatif, puisque cette dotation diminuait. En fixant ce montant, nous permettons à la Polynésie d’avoir une évolution autonome, ce qui est préférable.
La commission a donné un avis favorable, comme je l’ai annoncé tout à l’heure.
Madame Sage, je comprends bien votre souci et le côté psychologique de cette diminution qui vous gêne beaucoup. Je prendrai cela en compte dans mon rapport de l’année prochaine.
Mais nous avons obtenu du Gouvernement qu’au lieu de maintenir l’indexation qui faisait descendre la DGA de 87,7 millions à 79,7 millions, il la désindexe et la remonte à 84,5 millions, ce qui est quand même un résultat positif.
Je tiendrai le plus grand compte de vos observations pour l’année prochaine, mais je dois dire que, sur ce point, je suis plutôt satisfait de ce que le Gouvernement vient de nous proposer.
Nous sommes partiellement satisfaits. Nous aurions pu déposer un sous-amendement afin que ces 84 millions soient un plancher, mais que la dotation puisse être révisée à la hausse en cas de hausse du taux d’inflation.
Quoi qu’il en soit, les Polynésiens sont à votre disposition pour travailler avec vous sur ce sujet et faire comprendre à l’ensemble de la représentation nationale l’importance de cette dotation.
Sur la partie chiffrée de cette dotation, je vous rappelle qu’à l’origine, elle devait être indexée sur la DGF. Or, sachez-le, cela ne s’est jamais fait quand celle-ci a évolué à la hausse : la dotation a été gelée pendant plusieurs années. Malgré cela, nous avons été solidaires de la nation à ce moment-là.
Nous sommes donc partiellement satisfaits et j’espère que nous pourrons continuer à travailler sur les pistes qui permettent de rehausser cette dotation.
L’amendement no 371 est adopté.
Nous en avons terminé avec l’examen de la mission « Outre-mer ».
La parole est à Mme la ministre.
Un mot pour saluer tous les participants à ce débat et les remercier de leur vote positif sur ce budget des outre-mer. Je crois pouvoir vous dire que le Sénat vient lui aussi d’approuver ce budget. Il me semble donc que les efforts que nous avons faits ensemble pour défendre les intérêts des populations des outre-mer, dans le cadre d’un budget d’effort pour la nation, doivent être salués.
C’est la raison pour laquelle je tiens à remercier M. le secrétaire d’État chargé du budget. Je sais qu’il a été confronté à des choix difficiles. Il est clair que ce que nous obtenons pour les populations des outre-mer, en raison de leurs difficultés tout à fait exceptionnelles, est pris ailleurs. Cet effort de solidarité de la nation avec les outre-mer mérite d’être salué.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2015 : mission « Recherche et enseignement supérieur ».
La séance est levée.
La séance est levée à dix-huit heures dix.
La Directrice du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale
Catherine Joly