Intervention de Catherine Coutelle

Réunion du 17 juillet 2012 à 17h00
Délégation de l'assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCatherine Coutelle, présidente :

Je pense que nous touchons là au coeur même des missions de la Délégation. Il appartient en effet à la Délégation d'être attentive à l'application d'un certain nombre de textes très importants, tels que les textes sur les retraites, sur l'égalité salariale femmeshommes, par exemple. Je suis donc tout à fait d'accord pour la procédure d'une évaluation par le biais des questions d'actualité ; nous pouvons convenir aussi de nous réunir passé un certain délai, par exemple deux ans, pour voir comment ce texte aura été appliqué.

La Délégation adopte le rapport à l'unanimité et les recommandations suivantes :

1) La Délégation demande la mise en place d'un programme national de formation destiné :

– aux acteurs de la procédure judiciaire – policiers, gendarmes, magistrats ;

– aux délégués du personnel dans les entreprises ainsi qu'aux médecins du travail.

Une campagne de sensibilisation aux violences au travail, parmi lesquelles le harcèlement sexuel, devra être organisée lors de l'entrée en vigueur de la présente loi, afin de toucher le public le plus large.

2) La Délégation demande qu'une enquête statistique complète sur les violences faites aux femmes soit conduite au plan national pour mieux cerner cette réalité tant dans le monde du travail que de manière plus générale. Un volet consacré spécifiquement au harcèlement sexuel devra être prévu. Cette enquête devra permettre de guider l'action des pouvoirs publics, en termes de prévention comme d'évaluation des politiques publiques.

L'enquête devra comporter un volet particulier sur la réalité des atteintes sexuelles et du harcèlement sexuel dans l'enseignement supérieur.

3) La Délégation propose de compléter la définition du harcèlement sexuel figurant dans le paragraphe I la rédaction de l'article 222-33 du code pénal introduite par l'article 1 du projet de loi en incluant un élément objectif permettant de faciliter la recherche des preuves.

Cette définition modifiée serait la suivante : « Le harcèlement sexuel est le fait d'imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou agissements qui, soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son égard une situation intimidante, hostile ou offensante, soit entraînent une altération de sa santé physique ou mentale ».

4) La Délégation propose de définir le délit consistant en un acte unique assimilé au harcèlement de la manière suivante : « Est assimilé au harcèlement sexuel le fait, même non répété, d'user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers. »

5) La Délégation considère que les cas d'aggravation de la sanction prévue par le III de l'article 222-33 du code pénal par l'article1er du projet de loi, devraient être complétés par un 6ème cas prenant en considération l'orientation sexuelle ou l'identité sexuelle de la victime des actes de harcèlement décrits par le I comme par le II de l'article 222-33.

6) La Délégation propose de conduire une réflexion législative pour introduire la notion de genre dans la terminologie juridique française.

7) La Délégation approuve la coordination réalisée entre les nouvelles dispositions du code pénal introduites par le présent projet de loi et la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Elle formule les mêmes propositions de modification de la définition des deux types de comportements sanctionnés que pour les dispositions du code pénal.

8) La Délégation approuve la proposition de Mme la Ministre des Droits des femmes de créer un Observatoire national des violences envers les femmes, chargé de recueillir les informations et de réaliser des études régulièrement, afin d'aider les pouvoirs publics à faire évoluer les politiques de lutte contre ces violences.

Plutôt que de créer ex nihilo une nouvelle structure, il serait souhaitable de réunir en réseau les observatoires existants ou à créer au plan local, comme l'Observatoire des violences envers les femmes de Seine-Saint-Denis. Il conviendrait de disposer au niveau de chaque département d'un lieu d'analyse et d'action spécifiquement chargé des violences envers les femmes.

9) La Délégation demande que soit établi un bilan de la rédaction des protocoles départementaux de lutte contre les violences faites aux femmes.

10) La Délégation demande à Mme la Garde des Sceaux d'étudier la manière dont les pratiques innovantes, mises au point par certaines juridictions pour l'instruction des faits de harcèlement sexuel, pourraient être mises à la disposition des autres juridictions afin d'améliorer le traitement des enquêtes.

11) Lutter avec volontarisme contre le harcèlement sexuel suppose d'ouvrir la voie à la mise en cause d'une personne morale pour harcèlement sexuel : une telle extension de responsabilité pénale de l'employeur constituerait un signal fort pour un réel changement des mentalités et des pratiques. Le lieu de travail, plus que tout autre, ne doit plus admettre le harcèlement sexuel comme une pratique tolérée ou faisant l'objet d'un déni général.

12) La Délégation considère que la définition du harcèlement moral dans la sphère familiale ou entre ex-époux, figurant à l'article 222-33-2-1 du code pénal doit être améliorée afin de faciliter le dépôt de plainte et le traitement des procédures relatives à cette infraction.

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