Monsieur le Premier ministre, le 2 octobre, je vous disais, ici, que la criminalité en Corse est, par habitant, quatre fois plus importante que dans les Bouches-du-Rhône. En six semaines, il s'est commis, dans notre île, quatre nouveaux crimes – et même cinq, depuis ce midi –, dont deux ont frappé l'opinion publique nationale parce que les victimes étaient respectivement un avocat de renom et le président de la chambre de commerce de Corse-du-Sud.
La venue des ministres de l'intérieur et de la justice, quelques heures après l'assassinat du président Jacques Nacer, a été bien reçue parce que, pour une fois, on a reconnu d'abord le devoir de la République de protéger les citoyens avant d'en appeler à leur responsabilité et que l'on s'est abstenu de demander au peuple corse de régler lui-même cette question par je ne sais quelle rébellion, parfaitement contraire à la République et à ses lois.
Mes chers collègues, le brouhaha dans lequel je m'exprime, alors qu'est évoquée une question aussi grave, me paraît malvenu.
Les Corses manifestent publiquement leur attachement à la justice et leurs représentants s'attachent à traiter les questions avec méthode et détermination. Ainsi, l'Assemblée de Corse a mis fin aux désordres des transports maritimes et conduit une politique exemplaire pour régler la question foncière et les excès de la spéculation.
Votre gouvernement a annoncé de bonnes mesures pour lutter contre la criminalité économique. Toutefois, j'ai trop l'expérience de réactions justes mais aussitôt oubliées, d'annonces sans autre effet que médiatique, pour ne pas vous interroger à nouveau.
Monsieur le Premier ministre, combien de fois, depuis dix ans, ai-je eu, hélas, à intervenir à l'Assemblée à propos de la criminalité en Corse ? Je mesure le risque qui est le mien à nouveau. J'ai déjà reçu, il y a deux ans, le plus tragique des avertissements, sans changer pour autant les habitudes d'une vie réglée et limpide, ni renoncer à mon devoir de liberté.
C'est au nom de ces valeurs…