Intervention de Hervé Mariton

Séance en hémicycle du 20 novembre 2012 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2013 — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHervé Mariton :

Madame la présidente, monsieur le ministre délégué chargé du budget, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, ce premier budget signe la stratégie de la nouvelle majorité au début du mandat. Cette stratégie, comment l'apprécier ? Comme cet hebdomadaire international reconnu qui qualifie la France de « bombe à retardement » ?

Votre programme, c'est le déni de l'austérité, et nos concitoyens subissent un matraquage fiscal ; c'est le déni de l'Europe, et vous vous êtes soumis au traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance tel qu'il était initialement rédigé ; c'est le déni des problèmes de compétitivité, et vous êtes aujourd'hui en session de rattrapage.

Comment apprécier encore votre stratégie ? Comme ce que suggèrent la dégradation de la note de la France par l'agence Moody's et, ce qui est plus grave encore, les perspectives négatives qu'elle trace. Car autant, s'agissant de la note, vous pouvez essayer d'argumenter sur le passé, autant, s'agissant des perspectives, vous êtes confrontés à la critique même du programme dit de compétitivité.

Dans ce travail budgétaire, il y a quelques analyses justes mais aussi – vous le savez vous-même – des réponses souvent inopérantes.

On pourrait sourire.

Sourire, lorsque vous établissez le prélèvement à 75 % et que vous rétablissez dans le même temps un bouclier fiscal fort coûteux : au total, les finances publiques y perdront.

Sourire encore, lorsque le plafonnement des niches fiscales que vous proposez crée tant de trous nouveaux qu'en réalité, comme le rapporteur général le précise très bien dans son rapport, l'article en question aura – aimable terme, s'agissant d'un impôt – un « rapport négatif ». Dans le contexte lourd de matraquage fiscal de ce budget, le rendement de l'impôt va baisser, au bénéfice des plus favorisés et au détriment des classes moyennes et des classes moyennes supérieurs.

Mais, en réalité, sourire, on ne le peut pas, car votre projet est dangereux.

Dangereux pour les contribuables. Dans le texte que vous aviez adopté en Conseil des ministres, monsieur le ministre, il était prévu plus de 23 % d'augmentation pour l'impôt sur le revenu.

Dangereux pour les entreprises : plus de 30 % d'augmentation pour l'impôt sur les sociétés. Tout cela a conduit à une révolte fiscale alors même que l'une des réalités solides de notre pays était le consentement à l'impôt. Vous avez réussi à l'abîmer.

Dangereux pour l'État, puisque les perspectives budgétaires sont incertaines, comme l'agence Moody's l'a souligné, et qu'il n'y a guère d'efforts en matière de réforme de l'État : d'un projet de loi de finances à l'autre, de 2012 à 2013, il y aura 5 491 emplois de plus. L'effort d'économies est insuffisant et les dépenses appellent tout de même quelques commentaires. Nous avons voulu lancer quelques pistes, que vous n'avez pas retenues, en particulier s'agissant des économies à faire sur les opérateurs, notamment les agences. De surcroît, vous avez eu une approche très clientéliste. Il suffit de regarder la manière dont vous avez construit le budget de la culture, qui massacre les initiatives en faveur du patrimoine au seul bénéfice de ceux que vous pensez faire davantage partie de votre clientèle électorale.

Au-delà du présent projet de loi de finances, il y aurait, à ce qu'on entend, de nouvelles dépenses à venir. L'aide sociale au carburant que vous envisagez est-elle vraiment nécessaire ? Faut-il vraiment créer des aides supplémentaires dans notre pays ? Ne pensez-vous pas, monsieur le ministre, qu'en termes de transferts sociaux, il y a toujours à améliorer, évaluer, perfectionner ?

Cette stratégie est incohérente : des augmentations d'impôt dans le projet de loi de finances, puis un petit effort de réalisme après le rapport Gallois. Le bilan, hélas, restera lourd pour les contribuables. Ajoutons à cela la suppression de la TVA sociale dans le collectif budgétaire de juillet et la réapparition de celle-ci à la suite du rapport Gallois. En vérité, entre les décisions de l'été et les pistes qui s'annoncent pour l'hiver et le printemps, on a bien du mal à comprendre où se situe le projet de finances.

Votre politique fait courir des risques à la France.

Un risque budgétaire, puisqu'il n'y a pas suffisamment d'économies.

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